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30/11/2018 | FRANCE | N°16BX04138

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 30 novembre 2018, 16BX04138


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Stade toulousain rugby a demandé le 21 octobre 2013 au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés qu'elle a acquittée au titre de l'exercice clos le 30 juin 2011 pour un montant de 38 701 euros.

Par un jugement n° 1304718 du 18 octobre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 décembre 2016 et 27 novemb

re 2017, l'association, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Stade toulousain rugby a demandé le 21 octobre 2013 au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés qu'elle a acquittée au titre de l'exercice clos le 30 juin 2011 pour un montant de 38 701 euros.

Par un jugement n° 1304718 du 18 octobre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 décembre 2016 et 27 novembre 2017, l'association, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 octobre 2016 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a respecté la réglementation en vigueur édictée notamment par les articles L.122-1, L.122-14 et R.122-8 du code du sport qui lui imposent de conclure avec la société anonyme sportive professionnelle (SASP) Stade toulousain rugby une convention stipulant les conditions et contreparties de la concession de ses signes distinctifs ;

- son caractère non lucratif est prépondérant ;

- la somme forfaitaire que lui verse annuellement la SASP est une subvention pour le développement du rugby amateur et non une redevance ; à supposer même qu'une partie seulement de la somme doive être regardée comme une redevance de concession de marque comme l'admet l'administration, celle-ci est marginale ;

- sur le fondement des articles L. 80A et L. 80B du livre des procédures fiscales, elle peut se prévaloir de la réponse de M. B...du 15 juin 2010 selon laquelle son activité n'est pas lucrative et la question de l'imposition de la redevance à l'impôt sur les sociétés n'est pas été tranchée ; si cette prise de position a été modifiée par la position de M. D...du 6 juillet 2012, cette modification ne peut valoir pour l'exercice clos en litige ;

- la SASP a déposé le 26 août 1998 le logo ST Stade Toulousain qu'elle utilise de façon systématique pour son activité de ventes de produits dérivés et qui représente l'emblème commercial de l'équipe professionnelle ; cette marque est différente de celle dont elle propriétaire, les deux logos ne pouvant être confondus ; ainsi, l'appellation " Stade Toulousain Rugby " mis à disposition de la SASP dans la convention ne fait l'objet d'aucune utilisation à des fins commerciales ; ainsi elle ne perçoit aucune redevance pour l'exploitation de sa propre marque ;

- la situation des associations mentionnées par l'administration n'est pas comparable à la sienne ;

- conformément à l'article L. 213-7 du code de justice administrative, elle sollicite une médiation.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 18 juillet 2017 et 10 avril 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 14 mars 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 13 avril 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code du sport ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 26 octobre 2018 :

- le rapport de M. Philippe Pouzoulet ;

- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public ;

- et les observations de Me C...représentant l'association STR et de M.A....

Considérant ce qui suit :

1. L'association Stade toulousain rugby (ci-après l'association STR) a pour objet le développement et la promotion de la pratique du rugby. Elle a acquitté une cotisation primitive d'impôt sur les sociétés de 38 701 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2011. Elle en a sollicité le dégrèvement et saisi le tribunal administratif du rejet de sa réclamation. L'association STR relève appel du jugement du 18 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'imposition en litige.

Sur le bien fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 206 du code général des impôts : " 1. (...) sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, (...) toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. 1 bis. Toutefois, ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés prévu au 1 les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 (...) dont la gestion est désintéressée, lorsque leurs activités non lucratives restent significativement prépondérantes et le montant de leurs recettes d'exploitation encaissées au cours de l'année civile au titre de leurs activités lucratives n'excède pas 60 000 euros (...) ".

3. L'article L. 122-1 du code du sport impose à toute association sportive affiliée à une fédération sportive participant habituellement à l'organisation de manifestations sportives payantes qui lui procurent des recettes d'un montant supérieur à un seuil fixé par décret ou qui emploie des sportifs dont le montant total des rémunérations excède un chiffre fixé par décret, de constituer pour la gestion de ces activités une société commerciale soumise au code de commerce. Pour répondre à cette obligation, l'association STR a constitué en 1998 une société anonyme à objet sportif dénommée Stade toulousain rugby, devenue en 2002 une société anonyme sportive professionnelle (SASP, ci-après la société STR) dont elle est actionnaire à hauteur de 53,47 %.

4. L'article L. 122-14 du code du sport prévoit que l'association sportive et la société qu'elle a ainsi constituée définissent leurs relations par une convention. En vertu 5° du I de l'article R. 122-8 du même code, cette convention doit notamment préciser les contreparties de la concession ou de la cession de la dénomination, de la marque ou des autres signes distinctifs de l'association.

5. Au cours de l'exercice en litige, l'association STR et la société STR ont été liées par une convention conclue le 5 juillet 2010 stipulant que l'association conservait la gestion des activités liées au rugby amateur, tandis que la société prenait en charge toutes les activités liées au rugby professionnel. L'article 4 de la convention rappelle que la marque Stade toulousain rugby, avec le logo correspondant, déposée à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), a été concédée par l'association à la société lors de la création de cette dernière et stipule que l'association met ainsi à la disposition de la société la dénomination Stade toulousain rugby ainsi que les signes, sigles, marques, dessins, modèles et couleurs du club qui sont attachées à leurs usages. L'article précise que si l'association conserve l'usage de la dénomination, la société en a toutefois l'usage et la jouissance exclusive pour les activités sportives et professionnelles et peut à son profit diffuser tous produits qui la reproduisent.

6. Il résulte de ces stipulations que l'association STR doit être regardée comme ayant concédé à la société STR l'exploitation exclusive à des fins commerciales de la marque Stade toulousain rugby. Si l'article 4 ne fixe aucune rémunération en contrepartie de l'usage lucratif de la marque ainsi consenti à la société, l'article 10 de la convention qui regroupe les clauses financières prévoit en revanche, mais seulement, que la société verse unilatéralement une " subvention " de 308 000 euros pour le développement du rugby amateur au sein de l'association, pour chaque saison sportive.

7. En l'absence de toute stipulation prévoyant une mise à disposition gratuite de la marque à la société, l'exploitation commerciale exclusive de la marque Stade toulousain doit être regardée comme ayant été concédée à la société STR par l'association STR contre rémunération. La convention ne précise pas les modalités de rémunération de cette concession ni ne donne aucune indication permettant de distinguer la part de la somme de 308 000 euros versée à titre de redevance de concession de marque du montant d'une subvention allouée par la société à l'association pour soutenir les activités de cette dernière liées au rugby amateur. L'association ne produit à l'appui de ses affirmations aucun justificatif chiffré sur la base duquel une telle ventilation pourrait être opérée. Par suite, la somme totale de 308 000 euros doit être regardée comme ayant dans son intégralité la nature d'une redevance forfaitaire payée par la société à l'association en contrepartie de l'exploitation commerciale de la marque Stade toulousain rugby.

8. De plus, l'association ne peut sérieusement soutenir que la marque exploitée par la société STR serait en réalité différente de celle dont elle lui a concédé l'exploitation, du seul fait que le logo exploité par la société, caractéristique de la marque du club aussi bien en ce qui concerne l'entrelacement des lettres S et T et leur forme que les couleurs rouge du S et noire du T, présente des nuances et peut comporter un liseré rouge ou noir entourant le logo ou les lettres formant le logo, dans un dessin également utilisé par l'association. En effet, la similitude conceptuelle et visuelle des signes exploités par la société à des fins lucratives ne laisse subsister aucun doute quant au fait que la société STR exploite commercialement la marque Stade toulousain rugby de l'association même si le dessin de la marque a été renouvelé et a pu donner lieu à une actualisation du graphisme de la marque enregistrée à l'INPI.

9. Ainsi, quand bien même l'association a affecté la recette en litige au financement de ses activités de caractère non lucratif liées au rugby amateur, elle n'a pas la nature d'une " subvention " mais d'un produit perçu en contrepartie de l'exploitation lucrative de sa marque par l'association, passible de l'impôt sur les sociétés.

10. Enfin, l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales dispose que : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / (...) ". Et aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi (...) ".

11. Si l'administration fiscale a précisé, dans sa réponse du 15 juin 2010 à la demande de rescrit de l'association STR, que compte tenu des dispositions de la convention de 2006 conclu avec la société STR, il peut être admis que les activités de l'association liées au rugby amateur n'ont pas un caractère lucratif, elle ne se prononce pas sur la nature de la " subvention " forfaitaire versée par la société en application de la convention liant l'association à la société STR. La réponse préconise d'ailleurs que l'association procède à la sectorisation comptable de ses activités relatives au sport amateur et de celles en lien avec le sport professionnel réalisées en partenariat avec la société STR puisque ces dernières, à la différence des premières, doivent intégralement être soumises aux impôts commerciaux. Dès lors, l'association ne peut utilement se prévaloir de cette réponse, sur le fondement des articles L.80A et L.80B du livre des procédures fiscales, pas plus que de la réponse faite par l'administration fiscale à l'association Castres olympique qui concerne un autre contribuable se trouvant dans une situation de fait différente.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de proposer une nouvelle médiation après celle intervenue en 2014, que l'association STR n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à l' association STR la somme de 3 000 euros qu'elle réclame sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association Stade toulousain rugby est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Stade toulousain rugby et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,

M. Romain Roussel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 novembre 2018.

Le premier conseiller,

Sylvande Perdu

Le président-rapporteur,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX04138


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX04138
Date de la décision : 30/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Personnes morales et bénéfices imposables.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Philippe POUZOULET
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : SCP BMG AVOCATS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-11-30;16bx04138 ?
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