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29/11/2018 | FRANCE | N°16BX03085,16BX03086

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 29 novembre 2018, 16BX03085,16BX03086


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme F...E...ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 3 mars 2014 par lequel le maire de la commune de Roumazières-Loubert a délivré à la société à responsabilité limitée (SARL) Technique Solaire Invest 12 un permis de construire un bâtiment agricole bi-pan photovoltaïque à usage de stabulation et stockage de matériel sur un terrain situé au lieu-dit " Le Communal " sur les parcelles cadastrées section K n°452, 453, 455 et 456, ainsi que, par requête distincte

, l'annulation du permis modificatif délivré le 6 mars 2015.

Par deux jugements ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme F...E...ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 3 mars 2014 par lequel le maire de la commune de Roumazières-Loubert a délivré à la société à responsabilité limitée (SARL) Technique Solaire Invest 12 un permis de construire un bâtiment agricole bi-pan photovoltaïque à usage de stabulation et stockage de matériel sur un terrain situé au lieu-dit " Le Communal " sur les parcelles cadastrées section K n°452, 453, 455 et 456, ainsi que, par requête distincte, l'annulation du permis modificatif délivré le 6 mars 2015.

Par deux jugements n° 1401396 et n° 1501156 du 7 juillet 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté les demandes de M. et Mme E...et a mis à leur charge le versement à la commune de Roumazières-Loubert de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête n° 16BX03085, enregistrée le 6 septembre 2016 et des mémoires enregistrés les 27 mars 2017, 8 mars, 17 avril et 14 juin 2018, M. et Mme E...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401396 du tribunal administratif de Poitiers du 7 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 mars 2014 par lequel le maire de la commune de Roumazières-Loubert a délivré à la société Technique Solaire Invest 12 un permis de construire un bâtiment agricole bi-pan photovoltaïque à usage de stabulation et stockage de matériel sur un terrain situé au lieu-dit " Le Communal " sur les parcelles cadastrées section K n° 452, 453, 455 et 456 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roumazières-Loubert et de la société technique Solaire Invest 12 le versement d'une somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils démontrent justifier d'un intérêt à agir en produisant un constat d'huissier établi devant leur maison d'habitation, mettant en exergue des nuisances olfactives, ainsi que des photographies démontrant l'existence de nuisances visuelles résultant de la construction autorisée ; ils soulignent également un risque de pollution de l'étang leur appartenant, du fait de l'écoulement de l'eau présente sur le terrain sur lequel a été épandu du lisier, ainsi que le risque dû au manque de mesures pour assurer la sécurité incendie ;

- le permis de construire est entaché d'un vice de procédure au regard de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme dès lors que la demande de permis de construire et celle au titre de la législation sur les installations classées ne correspondent pas, ni dans le lieu, ni dans la superficie, ni dans la personne, et le service instructeur ne disposait pas des éléments lui permettant de vérifier si l'exploitation projetée sur le lieu-dit Le Communal avait bien fait l'objet d'une déclaration ICPE ;

- les juges de première instance ont commis une erreur de droit en ne censurant pas l'arrêté attaqué alors que les dispositions de l'article NC1 du plan d'occupation des sols imposent qu'une construction agricole constitutive d'une installation classée ou un bâtiment d'élevage ne puisse être implantée en zone NC qu'à condition d'une part de s'intégrer à un ensemble existant et d'autre part d'être située au-delà d'une bande de 150 mètres de profondeur longeant les limites extérieures des zones urbaines (U)n ou à urbaniser (NA, NB) de la commune. Par ailleurs, la nécessité d'une telle stabulation n'est pas démontrée dès lors que des bâtiments agricoles existent déjà sur cette petite commune de moins de 2 500 habitants. La taille du projet est totalement disproportionnée par rapport à l'exploitation déjà existante et ne paraît pas répondre aux besoins de l'activité agricole. Enfin, l'ouvrage dont le permis de construire est sollicité par une personne dont l'activité est la production d'électricité doit être qualifié d'ouvrage de production d'énergie, et le projet n'est pas destiné à l'activité d'élevage, située sur un autre lieu au lieu-dit " La Faye ".

- en application de l'article R. 422-2 du code de l'urbanisme, seul le préfet était compétent pour délivrer le permis de construire et pour se prononcer sur un ouvrage de production d'énergie ;

- le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité publique au sens des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en ce que le bâtiment, objet du permis de construire, constitue une installation photovoltaïque située à proximité d'une fosse à lisier d'un volume de 2 700 m² qui représente un danger important à proximité d'habitations éparses et de la route départementale D346, alors que la défense incendie n'est pas satisfaisante en raison d'une absence de point d'eau à moins de 200 mètres ; les prescriptions du SDIS n'ont pas été reprises dans l'arrêté, contrairement à celles de l'ARS ; aucun aménagement de défense contre l'incendie n'a été réalisé alors que le bâtiment est en exploitation depuis novembre 2014 ;

- le projet ne prévoit aucun moyen pour assurer l'écoulement des eaux pluviales en méconnaissance de l'article NC4 du plan d'occupation des sols ;

- le projet ne respecte pas les dispositions de l'article NC13.3 du plan d'occupation des sols dès lorsqu'il ne prévoit aucun traitement paysager afin de masquer les denrées entreposées sur le terrain.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 janvier 2017 et 9 février et 20 avril 2018, la commune de Roumazières-Loubert conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme E...d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. et Mme E...ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité à agir à l'encontre de l'arrêté attaqué dans les conditions prévues par l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dès lors qu'ils ne démontrent pas en quoi le projet porte atteinte directe aux conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leur bien, situé à 300 mètres au-delà d'une route départementale et d'un espace boisé ;

- l'autorité communale est seule compétente pour examiner une demande d'autorisation de construire un bâtiment agricole supportant des panneaux photovoltaïques sur la couverture. L'article R. 422-2-1 du code de l'urbanisme résultant du décret du 28 février 2012 dispose que : "Les installations de production d'électricité à partir d'énergie renouvelable accessoires à une construction ne sont pas des ouvrages de production d'électricité au sens du b de l'article L. 422-2." La toiture recouverte de panneaux photovoltaïques, par elle-même, n'est pas de nature à modifier la destination agricole du bâtiment dont elle est l'accessoire, et ne saurait donc caractériser un ouvrage de production d'énergie au sens du b) de l'article R. 422-2 du code de l'urbanisme et ce, quand bien même l'énergie ainsi produite serait destinée à la revente.

- le pétitionnaire, bénéficiant d'un mandat de l'exploitant, avait qualité pour déposer le permis de construire litigieux ;

- le permis de construire ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme en ce que d'une part, M. A...G...représentant de la SARL G...a bien déposé et en a justifié, sa déclaration d'une activité d'élevage soumise aux dispositions de l'article R. 512-47 du code de l'environnement et d'autre part, les pièces du dossier permettaient d'écarter tout doute quant à l'emplacement de la construction ainsi qu'à la destination agricole de la construction projetée ;

- l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en ce que l'avis du service départemental d'incendie et de secours a bien été sollicité et les prescriptions du service ont été expressément prévues dans l'arrêté de permis de construire, la place desdites prescriptions étant sans incidence ;

- l'article NC1 du plan d'occupation des sols est respecté dès lors qu'il est expressément fait état de l'utilité, pour la pérennisation et le développement de l'exploitation agricole de M. G..., de la construction du projet ;

- le moyen tiré de la violation de l'article NC 4 du plan d'occupation des sols n'est pas fondé en ce que la zone dans laquelle se trouve la flaque d'eau relevée par l'huissier de justice ne fait pas partie de l'assiette foncière soumise à permis de construire ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article NC 13.3 doit être écarté dès lors que la présence d'éventuels dépôts relevés par l'huissier de justice est sans lien avec le permis de construire ;

- le cas échéant, elle demande l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 14 mars 2018, le GAECG..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- son intervention est recevable au regard des dispositions de l'article R. 632-1 du code de justice administrative dès lors que, bien que non titulaire du permis, il est directement bénéficiaire des travaux autorisés en vertu du contrat conclu avec la société Technique Solaire Invest 12 et que l'exécution de ce contrat est conditionnée par le rejet des recours formés contre les arrêtés de permis de construire ;

- les appelants ne justifient d'aucun intérêt à agir au sens de l'article R. 600-1-2 du code de l'urbanisme dès lors que la covisibilité de la maison d'habitation de M. et Mme E...et de la construction objet du permis de construire est presque inexistante, que les nuisances olfactives ne sont que passagères et que la stabulation ne génère pas de risque incendie pour une maison située à 300 mètres ;

- le maire était compétent pour édicter l'arrêté querellé, les panneaux photovoltaïques apposés en toiture du bâtiment étant accessoires à la construction agricole, et ne constituant pas des installations de production d'énergie au sens du b) de l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 512-15 du code de l'environnement est inopérant et en tout état de cause mal fondé dès lors que le dossier de demande de permis contient bien un récépissé de la préfecture de la Charente attestant du dépôt d'une déclaration pour la mise en service d'une ICPE conformément à l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme ; par ailleurs l'erreur matérielle entre l'adresse du siège de l'exploitation, au lieu-dit " La Faye ", et celle de l'implantation de la construction, au lieudit " Le Communal " n'a pas été de nature à entacher d'illégalité la décision dès lors que le dossier de demande de permis de construire comprenait un plan de situation assorti des références cadastrales du terrain d'assiette, ainsi qu'un plan de masse mentionnant l'implantation du bâtiment le long du chemin rural n° 19 au lieudit " Le Communal " ;

- l'avis du service d'incendie et de secours n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et le permis de construire litigieux ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 111-2 du code de l'urbanisme ; la fosse à lisier n'est pas inflammable et les premières habitations sont éloignées ;

- le tribunal administratif de Poitiers n'a commis aucune erreur de droit en jugeant que le permis de construire respectait l'article NC1 du plan local d'urbanisme ; d'une part, l'interprétation de cet article par les appelants selon laquelle toutes les constructions devraient respecter la condition d'intégration à proximité des bâtiments d'exploitation agricole existants n'est pas fondée, ces dispositions ne s'appliquent pas pour les bâtiments d'exploitation ; d'autre part, la couverture de la toiture par des panneaux photovoltaïques n'est pas de nature à modifier la destination (en l'occurrence, agricole) du bâtiment ; enfin, le bâtiment litigieux est non seulement lié à l'activité agricole, mais également nécessaire à l'exploitation ;

- les dispositions de l'article NC 4 sont respectées, la notice du projet précisant que " Les eaux pluviales seront évacuées dans une réserve d'eau enterrée de 200 m3 située à l'Est du bâtiment " ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article NC 13.3 du plan d'occupation des sols doit être écarté, le projet ne prévoyant aucun dépôt susceptible de donner lieu à l'application de cette disposition.

II. Par une requête n° 16BX03086, enregistrée le 6 septembre 2016 et des mémoires enregistrés les 27 mars 2017, 8 mars, 17 avril et 14 juin 2018, M. et Mme E...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1501156 du tribunal administratif de Poitiers du 7 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 mars 2015 par lequel le maire de la commune de Roumazières-Loubert a délivré à la société Technique Solaire Invest 12 un permis de construire modificatif concernant un bâtiment agricole bi-pan photovoltaïque à usage de stabulation et stockage de matériel ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roumazières-Loubert et de la société Technique Solaire Invest 12 le versement d'une somme de 3 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme E...soutiennent que :

- ils démontrent justifier d'un intérêt à agir en produisant un constat d'huissier établi devant leur maison d'habitation mettant en exergue des nuisances olfactives ainsi que des photographies démontrant l'existence de nuisances visuelles résultant de la construction autorisée ; ils soulignent également un risque de pollution de l'étang leur appartenant, du fait de l'écoulement de l'eau présente sur le terrain sur lequel a été épandu du lisier, ainsi que le risque dû au manque de mesures pour assurer la sécurité incendie ;

- l'annulation du permis de construire initial, délivré le 3 mars 2014, entraînera par voie de conséquence l'annulation du permis modificatif litigieux ;

- l'auteur de l'acte est incompétent, seul le préfet pouvant délivrer le permis de construire pour un ouvrage de production d'énergie en application de l'article R. 422-2 du code de l'urbanisme ;

- le pétitionnaire ne disposait pas d'un mandat pour les travaux objet de la demande, le mandat accordé à la société Technique Solaire Invest 12 mentionnait les parcelles K n° 452, 453, 455, 456, la demande de permis de construire modificatif indiquait les parcelles K n° 451, 452, 453, 454, 455, 456, alors que le terrain d'assiette du projet se situe sur les parcelles K n° 456, 458, 460, 462, 464 et 466 ;

- le permis de construire est entaché d'un vice de procédure au regard de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme dès lors que la demande de permis de construire et celle au titre de la législation sur les installations classées ne correspondent pas, ni dans le lieu, ni dans la superficie, et le service instructeur ne disposait pas des éléments lui permettant de vérifier si l'exploitation projetée sur le lieu-dit Le Communal avait bien fait l'objet d'une déclaration ICPE ;

- le projet implique une modification de l'aspect extérieur, une modification de l'implantation, la création d'une extension de 9 m2, la mise en place d'une fosse à lisier à la place de deux poches et l'augmentation de l'emprise au sol de 80 m2, l'ensemble de ces modifications imposant qu'un nouveau permis soit délivré ;

- le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité publique au sens des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en ce que le bâtiment constitue une installation photovoltaïque située à proximité d'une fosse à lisier d'un volume de 2 700 m² qui représente un danger important à proximité d'habitations éparses et de la route départementale D346, alors que la défense incendie n'est pas satisfaisante en raison d'une absence de point d'eau à moins de 200 mètres ;

- compte tenu de l'importance de la construction, du volume de la fosse à lisier, beaucoup plus importante que ce qui était initialement prévu, et donc du risque pour la salubrité que cela entraîne en l'absence de couverture, le permis aurait dû être accordé sous réserve du respect de prescriptions spéciales. En l'absence de ces prescriptions, le permis est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article NC1 du plan d'occupation des sols qui impose qu'une construction agricole constitutive d'une installation classée ou un bâtiment d'élevage ne puisse être implantée en zone NC qu'à condition d'une part de s'intégrer à un ensemble existant et d'autre part d'être située au-delà d'une bande de 150 mètres de profondeur longeant les limites extérieures des zones urbaines (U)n ou à urbaniser (NA, NB) de la commune. Par ailleurs, la nécessité d'une telle stabulation n'est pas démontrée dès lors que des bâtiments agricoles existent déjà sur cette petite commune de moins de 2.500 habitants. La taille du projet est totalement disproportionnée par rapport à l'exploitation déjà existante et ne paraît pas répondre aux besoins de l'activité agricole. Enfin, l'ouvrage dont le permis de construire est sollicité par une personne dont l'activité est la production d'électricité doit être qualifié d'ouvrage de production d'énergie, le projet n'est pas destiné à l'activité d'élevage située sur un autre lieu au lieu-dit " La Faye " ;

- le projet ne prévoit aucun moyen pour assurer l'écoulement des eaux pluviales en méconnaissance de l'article NC4 du plan d'occupation des sols ;

- le projet ne respecte pas les dispositions de l'article NC13.3 du plan d'occupation des sols dès lorsqu'il ne prévoit aucun traitement paysager afin de masquer les denrées entreposées sur le terrain.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 janvier 2017, 9 février et 20 avril 2018, la commune de Roumazières-Loubert conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme E...d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. et Mme E...ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité à agir à l'encontre de l'arrêté attaqué dans les conditions prévues par l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- les modifications autorisées au titre du permis modificatif justifiaient un permis de construire modificatif et n'exigeaient pas le dépôt d'une nouvelle demande de permis de construire ;

- s'agissant de la qualité du pétitionnaire pour déposer le permis de construire litigieux, depuis la réforme de 2007, l'administration n'a pas à contrôler le titre habilitant à construire sauf en cas de fraude. Or ici, aucune fraude n'est soutenue notamment par M.G..., la société Technique Solaire Invest 12 disposant d'un mandat non remis en cause par son auteur ;

- le permis de construire ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme en ce que d'une part, M. G...représentant du GAEC G...a bien déposé et en a justifié, sa déclaration d'une activité d'élevage soumise aux dispositions de l'article R. 512-47 du code de l'environnement et d'autre part, les pièces du dossier permettaient d'écarter tout doute quant à l'emplacement de la construction ou la destination agricole de la construction projetée ;

- l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, l'avis du service départemental d'incendie et de secours a bien été sollicité et les prescriptions du service ont été expressément prévues dans l'arrêté de permis de construire ;

- sur la réalisation d'une fosse à lisier, l'article 2 de l'arrêté de permis de construire modificatif rappelle que les prescriptions initiales doivent s'imposer au pétitionnaire. Cette prescription particulière de l'ARS ayant été émise initialement et de manière identique, elle doit être considérée comme intégrée au permis de construire initial, l'absence de reprise dans l'arrêté de permis de construire modificatif est sans incidence sur son opposabilité au pétitionnaire ;

- l'article NC1 du plan d'occupation des sols est respecté dès lors qu'il est expressément fait état de l'utilité, pour la pérennisation et le développement de l'exploitation agricole de M. G..., de la construction du projet querellé ;

- le moyen tiré de la violation de l'article NC 4 du plan d'occupation des sols n'est pas fondé en ce que la zone dans laquelle se trouve la flaque d'eau relevée par l'huissier de justice ne fait pas partie de l'assiette foncière soumise à permis de construire ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article NC 13.3 doit être écarté dès lors que les dépôts relevés par l'huissier de justice ne font pas partie du permis de construire querellé ;

- si la cour relevait un moyen de nature à entacher d'irrégularité l'arrêté de permis de construire querellé, il est demandé l'application de l'article L. 600-1-5 du code de l'urbanisme pour sursoir à statuer et inviter le pétitionnaire à régulariser sa demande.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 14 mars 2018, le GAECG..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- son intervention est recevable au regard des dispositions de l'article R. 632-1 du code de justice administrative dès lors que, bien que non titulaire du permis, il est directement bénéficiaire des travaux autorisés en vertu du contrat conclu avec la société Technique Solaire Invest 12 et que l'exécution de ce contrat est conditionnée par le rejet des recours formés contre les arrêtés de permis de construire ;

- les appelants ne justifient d'aucun intérêt à agir au sens de l'article R. 600-1-2 du code de l'urbanisme dès lors que la covisibilité entre la maison d'habitation de M. et Mme E...et la construction objet du permis de construire est presque inexistante, que les nuisances olfactives ne sont que passagères et que la stabulation ne génère pas de risque d'incendie pour une maison située à 300 mètres ;

- les modifications autorisées par l'arrêté sont tout à fait limitées, de sorte qu'elles pouvaient régulièrement être autorisées par un permis de construire modificatif ;

- le maire était compétent pour édicter l'arrêté querellé, les panneaux photovoltaïques apposés en toiture du bâtiment étant accessoires à la construction agricole, et ne constituant pas des installations de production d'énergie au sens du b de l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 512-15 du code de l'environnement est inopérant et en tout état de cause mal fondé dès lors que le dossier de demande de permis contient bien un récépissé de la préfecture de la Charente attestant du dépôt d'une déclaration pour la mise en service d'une ICPE conformément à l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme ; par ailleurs l'erreur matérielle entre l'adresse du siège de l'exploitation, au lieu-dit " La Faye ", et celle de l'implantation de la construction, au lieudit " Le Communal " n'a pas été de nature à entacher d'illégalité la décision dès lors que le dossier de demande de permis de construire comprenait un plan de situation assorti des références cadastrales du terrain d'assiette, ainsi qu'un plan de masse mentionnant l'implantation du bâtiment le long du chemin rural n° 19 au lieudit " Le Communal " ;

- le fait que soit mentionnée la qualité de propriétaire des seules parcelles K n° 452, 453, 455 et 456 est sans incidence sur la régularité du mandat donné par M. G..., dès lors que celui-ci est bien propriétaire des parcelles d'implantation du bâtiment autorisé par le permis modificatif, situées sur la même unité foncière, et que les termes utilisés ne laissent pas de doute quant à l'autorisation donnée au pétitionnaire pour " exécuter les travaux d'édification d'une stabulation pour vaches laitières et (...) déposer toute demande de permis de construire " ;

- l'avis du service d'incendie et de secours n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et le permis de construire litigieux ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 111-2 du code de l'urbanisme. Les requérants ne démontrent pas en quoi ces mesures seraient insuffisantes pour garantir la sécurité des lieux au regard du risque incendie ;

- le tribunal administratif de Poitiers n'a commis aucune erreur de droit en jugeant que le permis de construire respectait l'article NC1 du plan local d'urbanisme ; d'une part, l'interprétation de cet article par les appelants selon laquelle toutes les constructions devraient respecter la condition d'intégration à proximité des bâtiments d'exploitation agricole existants n'est pas fondée, ces dispositions ne s'appliquent pas pour les bâtiments d'exploitation ; d'autre part, la couverture de la toiture par des panneaux photovoltaïques n'est pas de nature à modifier la destination (en l'occurrence, agricole) du bâtiment,dont elle constitue un accessoire ; enfin, le bâtiment litigieux est non seulement lié à l'activité agricole, mais également nécessaire à l'exploitation ;

- les dispositions de l'article NC 4 sont respectées, la notice du projet modificatif précisant que " Les eaux pluviales seront évacuées dans la parcelle par épandage " et la surface de près de trois hectares permettant cette disposition ; la stagnation constatée par huissier est due à l'obstruction d'une buse ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article NC 13.3 du plan d'occupation des sols ne peut qu'être écarté, le projet ne prévoyant aucun dépôt susceptible de donner lieu à l'application de cette disposition ;

- l'arrêté de permis modificatif n'avait pas à statuer sur la mise en place de la fosse à lisier, qui n'est pas une construction. La circonstance que l'arrêté ne rappelle pas l'obligation de respecter les prescriptions du titre VIII du règlement sanitaire départemental est sans incidence sur la légalité du permis modificatif, dès lors que les dispositions dudit règlement s'imposent au GAECG..., quel qu'eût été l'avis rendu par l'Agence Régionale de Santé. Il ne s'agit pas de prescriptions particulières au projet mais du respect de règles générales applicables à tous.

Par ordonnance du 23 avril 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 20 juin 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeH...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant M. et Mme E...et les observations de Me D...représentant la commune de Roumazières-Loubert.

Considérant ce qui suit :

1. Le 10 janvier 2014, la société à responsabilité limitée (SARL) Technique Solaire Invest 12 a sollicité un permis de construire un bâtiment agricole bi-pan photovoltaïque à usage de stabulation et stockage de matériel sur un terrain situé lieu-dit " Le Communal " sur les parcelles cadastrées section K n° 452, 453, 455 sur le territoire de la commune de Roumazières-Loubert, qui est dotée d'un plan d'occupation des sols. Par un arrêté du 3 mars 2014, le maire de la commune de Roumazières-Loubert a délivré le permis de construire sollicité. A la suite d'une demande de la société Technique Solaire Invest 12 du 12 janvier 2015, le maire de Roumazières-Loubert a accordé, le 6 mars 2015, un permis de construire modificatif en vue de déplacer le bâtiment, remplacer les poches à lisier par une fosse et créer un local technique pour la laiterie. Par des requêtes distinctes, M. et MmeE..., voisins du terrain d'assiette du projet, ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler le permis de construire initial et le permis de construire modificatif. Par deux jugements du 7 juillet 2016, n° 1401396 et n° 1501156, leurs demandes ont été rejetées. Par les requêtes n° 16BX03085 et n° 16BX03086, M. et Mme E...demandent l'annulation respectivement du jugement n° 1401396 rejetant leur demande tendant à l'annulation du permis de construire initial et du jugement n° 1501156 rejetant leur demande tendant à l'annulation du permis de construire modificatif.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées n° 16BX3085 et n° 16BX3086, présentées pour M. et Mme E..., concernent le même projet et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur l'intervention du GAECG... :

3. Le GAECG..., qui exploite un élevage de près de 150 vaches laitières destinées à être abritées dans la construction en litige, a intérêt au maintien des jugements attaqués. Ainsi son intervention est recevable.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 3 mars 2014 délivrant le permis de construire initial :

Quant à la légalité externe :

4. Aux termes de l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme : " Par exception aux dispositions du a de l'article L. 422-1, l'autorité administrative de l'Etat est compétente pour se prononcer sur un projet portant sur : (...) / b) Les ouvrages de production, de transport, de distribution et de stockage d'énergie, ainsi que ceux utilisant des matières radioactives ; un décret en Conseil d'Etat détermine la nature et l'importance de ces ouvrages (...) ". L'article R. 422-2 du même code dispose : " Le préfet est compétent pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable dans les communes visées au b de l'article L. 422-1 et dans les cas prévus par l'article L. 422-2 dans les hypothèses suivantes : (...) / b) Pour les ouvrages de production, de transport, de distribution et de stockage d'énergie lorsque cette énergie n'est pas destinée, principalement, à une utilisation directe par le demandeur (...) ". L'article R. 422-2-1 dudit code précise que " Les installations de production d'électricité à partir d'énergie renouvelable accessoires à une construction ne sont pas des ouvrages de production d'électricité au sens du b de l'article L. 422-2 ".

5. Eu égard à l'objet du permis de construire, qui vise à l'édification d'un bâtiment à usage de stabulation pour des vaches laitières ainsi que de stockage de matériel surmonté de panneaux photovoltaïques, les installations de production d'électricité à partir de l'énergie solaire sont, au sens des dispositions précitées de l'article R. 422-2-1 du code de l'urbanisme, accessoires aux constructions à usage agricole. Elles ne sont donc pas des ouvrages de production d'électricité au sens du b de l'article L. 422-2 du même code. Dès lors, le maire de la commune de Roumazières Loubert était compétent pour délivrer ce permis de construire en application de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme.

6. Aux termes de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur une installation classée soumise à autorisation, enregistrement ou déclaration en application des articles L. 512-1, L. 512-7 et L. 512-8 du code de l'environnement, la demande de permis de construire doit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande d'autorisation, de la demande d'enregistrement ou de la déclaration ". L'article L. 512-15 du code de l'environnement dispose : " L'exploitant est tenu d'adresser sa demande d'autorisation ou d'enregistrement, ou sa déclaration en même temps que sa demande de permis de construire. / Il doit renouveler sa demande d'autorisation ou d'enregistrement, ou sa déclaration soit en cas de transfert, soit en cas d'extension ou de transformation de ses installations, ou de changement dans ses procédés de fabrication, entraînant des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article L. 511-1 ". L'article R. 512-47 du même code précise : " (...) II.-La déclaration mentionne : (...) / 2° L'emplacement sur lequel l'installation doit être réalisée (...) ".

7. Les appelants font à nouveau valoir devant la cour, dans les mêmes termes que devant le tribunal et sans critiquer les motifs qu'il a opposés, d'une part que la déclaration d'une activité d'élevage effectuée le 15 octobre 2012 en application des dispositions de l'article R. 512-47 du code de l'environnement, a été déposée par M. A...G..., représentant de l'EARL G...alors que le titulaire du permis de construire initial est la SARL Technique Solaire Invest 12, et d'autre part que le certificat de dépôt en date du 15 octobre 2012 d'une déclaration d'une installation classée en vertu des articles L. 512-1 et L. 512-8 du code de l'environnement ainsi que le formulaire de renseignements préalable à une construction agricole daté du 7 août 2012 mentionnent le lieu-dit " La Faye " alors que le dossier de demande de permis de construire indique le lieu-dit " le Communal " comme terrain d'assiette du projet. Toutefois, ces objections formelles doivent être rejetées par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

Quant à la légalité interne :

8. Aux termes de l'article NC1 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Roumazieres-Loubert approuvé le 19 juillet 2001 et modifié le 28 mars 2012 relatif aux occupations et utilisations du sol autorisées : " Ne sont autorisées que les occupations et utilisations du sol suivantes : / Constructions / Les constructions et bâtiments liés à l'activité agricole y compris les constructions à usage d'habitation et les gîtes ruraux à condition qu'ils s'intègrent dans l'ensemble formé par les bâtiments d'exploitation agricole existants. / NB : en cas de création d'une nouvelle exploitation agricole, la construction de l'habitation ne peut être autorisée qu'après celle des bâtiments d'exploitation (...) Les établissements agricoles nuisants soumis à déclaration ou à autorisation ainsi que tous les bâtiments d'élevage, à condition d'être situés au delà d'une bande de 150 mètres de profondeur longeant les limites extérieures des zones urbaines (U) ou à urbaniser (NA, NB) de la commune ".

9. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 5, il ressort des pièces du dossier que la demande de permis concernait la construction d'un bâtiment agricole à usage de stabulation et de stockage de matériel. La présence de panneaux photovoltaïques sur la toiture dudit hangar, compte tenu du caractère accessoire à la construction de cette installation, qui par elle-même n'est pas de nature à modifier la destination agricole de ce bâtiment, ne saurait conférer à celui-ci le caractère d'un ouvrage de production d'énergie. C'est donc à bon droit que le tribunal de Poitiers a jugé que M. et Mme E...n'étaient pas fondés à soutenir que ce bâtiment, qui n'a pas pour seul objet de permettre au pétitionnaire d'exploiter des panneaux photovoltaïques, pouvait légalement être autorisé en zone NC.

10. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que conformément à l'article NC1 du plan d'occupation des sols de la commune de Roumazières Loubert, le bâtiment d'élevage de la sociétéG..., soumis à déclaration au titre de la législation applicable aux installations classées, est situé au-delà d'une bande de 150 mètres de profondeur longeant les limites extérieures des zones urbaines ou à urbaniser de la commune. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la condition que des bâtiments s'intègrent dans un ensemble formé par des bâtiments d'exploitation agricole existants ne s'applique pas aux bâtiments liés à l'activité agricole, mais seulement aux " constructions à usage d'habitation et gîtes ruraux ", et le caractère nécessaire de la construction n'est pas exigé par le document d'urbanisme en vigueur à la date de la décision attaquée. En tout état de cause, au vu des éléments produits par la sociétéG..., le caractère proportionné du bâtiment en cause, destiné à abriter près de 150 vaches, n'apparaît pas contestable. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article NC1.

11. Selon l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

12. Il ressort des pièces du dossier que le 6 février 2014, le service départemental d'incendie et de secours de la Charente a émis un avis favorable sur le projet de construction d'un bâtiment agricole à usage de stabulation et stockage de matériel recouvert de panneaux photovoltaïques et a prescrit des mesures destinées notamment à proportionner la défense extérieure contre l'incendie à l'importance de la construction projetée, recommandant soit la pose de deux poteaux de 100 mm normalisés assurant un débit de 1 000 litres/minute chacun, soit la mise en place d'une réserve d'eau naturelle ou artificielle de 240 m3. La circonstance que la mention selon laquelle " Les prescriptions du service départemental d'incendie et de secours jointes en annexe devront être respectées par le pétitionnaire " figure après la signature de l'auteur de l'acte n'a aucune incidence sur son caractère prescriptif. Par ailleurs, la mention dans l'avis du service départemental d'incendie et de secours selon laquelle " en présence de tension électrique permanente aucune action de lutte contre le foyer principal d'incendie ne pourra être menée " ne caractérise pas un risque incendie résultant de la seule présence de panneaux photovoltaïques sur la toiture du bâtiment envisagé, mais constitue un rappel de la nécessité de dispositifs de coupure d'alimentation. Par suite, les requérants, qui ne peuvent utilement invoquer les conditions d'exécution des prescriptions du permis, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

13. Aux termes de l'article 4.6 du règlement du plan d'occupation des sols applicable à la zone NC : " Les eaux pluviales issues de toute construction ou installation nouvelle ou aménagement seront résorbées sur le terrain d'assiette du projet ; si la surface de la parcelle, la nature du sol ou la disposition des lieux ne permet pas de les résorber sur la parcelle, les eaux pluviales seront rejetées au réseau public (fossé, caniveaux ou réseau enterré) de telle sorte que l'écoulement soit assuré sans stagnation ".

14. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, le dossier de demande de permis de construire prévoyait l'évacuation des eaux pluviales, la notice mentionnant : " Les eaux pluviales seront évacuées dans une réserve d'eau enterrée de 200m3 située à l'Est du bâtiment ". L'évacuation des eaux pluviales était, en outre, matérialisée sur le plan de masse. La seule circonstance que le constat d'huissier que M et Mme E...ont fait établir le 21 novembre 2016 ait mis en exergue la présence d'une grande quantité d'eau stagnante sur une parcelle cadastrée K02 104, en dehors du terrain d'assiette de la construction projetée, ne suffit pas à établir la méconnaissance des dispositions de l'article NC4 du plan d'occupation des sols.

15. Aux termes de l'article 13.3 des dispositions du plan d'occupation des sols applicables à la zone NC : " Les dépôts éventuels doivent être masqués par un écran de végétation épaisse et non caduque ".

16. Les appelants soutiennent que l'arrêté du 3 mars 2014 ne respecte pas les dispositions de l'article NC13.3 du plan d'occupation des sols dès lorsqu'il ne prévoit aucun traitement paysager afin de masquer les dépôts sur le terrain. Toutefois, il ne ressort d'aucune pièce du dossier de demande de permis de construire que des dépôts devaient être stockés sur le terrain d'assiette de la construction envisagée. M et Mme E...ne peuvent alors utilement se prévaloir de la présence temporaire de balles de fourrage enrubannées ultérieurement constatée par l'huissier.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant à l'annulation du permis de construire initial.

En ce qui concerne les moyens propres développés à l'encontre du permis de construire modificatif :

18. Il ressort des pièces du dossier que le permis accordé le 6 mars 2015 porte sur le déplacement du bâtiment par une rotation de la parcelle d'implantation de 9 degrés sud-ouest afin d'optimiser la production photovoltaïque, la modification du bardage, le remplacement des deux poches à lisier de 1 000 m3 chacune par une fosse de 2 700 m3, le remplacement du local technique maçonné par deux armoires techniques type "totem" dont la surface est de 2 m² chacune ainsi que la création d'un local technique pour la laiterie de 9 m² et l'augmentation de la surface globale de 80 m², portant l'ensemble à 2 392 m². Rapportées à l'importance globale du projet, ces modifications ne remettent en cause ni la conception générale du projet, ni substantiellement l'implantation générale du bâtiment, ni sa hauteur. Le permis de construire accordé par le maire de Roumazières-Loubert le 6 mars 2015 pouvait ainsi être regardé comme un permis modificatif. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que la nature des modifications apportées aurait nécessité un nouveau permis.

19. Ainsi qu'il a été indiqué au point précédant, le permis de construire modificatif porte seulement sur le déplacement et agrandissement du bâtiment, le remplacement des poches à lisier, la création de deux armoires et d'un local technique. Par suite, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir à l'encontre de ce permis modificatif des moyens développés contre le permis initial, tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, du vice de procédure au regard de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme et de la méconnaissance des dispositions des articles NC 1 et NC 13.3 du plan d'occupation des sols.

20. Aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire (...) sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ".

21. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.G..., propriétaire du terrain d'assiette de la construction projetée, a mandaté, le 2 janvier 2013, la société Technique Solaire Invest 12 pour y exécuter les travaux d'édification d'une stabulation pour vaches laitières et l'a autorisé, pour ce faire, à déposer " toute demande de permis de construire ". La circonstance que le numéro des parcelles mentionnées dans ledit mandat ait été modifié à la suite d'une division cadastrale pour opérer une légère rotation de l'implantation de la future construction n'a pas d'incidence sur la validité du mandat donné à la société pétitionnaire pour la réalisation de la construction envisagée, que le maire n'avait pas à contrôler en l'absence de toute allégation de fraude quant à l'attestation de qualité pour déposer le permis. Par ailleurs, la circonstance que la surface des parcelles nouvellement désignées soit légèrement plus importante que celle des précédentes est sans incidence sur la légalité du permis. Par suite, le maire pouvait légalement estimer que la société pétitionnaire justifiait d'un titre suffisant pour l'habiliter à construire.

22. Il ressort des pièces du dossier que le service départemental d'incendie et de secours ainsi que l'agence régionale de santé ont émis, respectivement les 17 février 2015 et 26 janvier 2015, des avis favorables sur les modifications envisagées prévoyant notamment le remplacement des deux précédentes géomembranes de 2 000 m3 par une fosse à lisier de 2 700 m3. En premier lieu, les appelants soutiennent que la réserve émise par l'agence régionale de santé dans son avis du 6 février 2015 aurait dû être mentionnée sur l'arrêté de refus de permis modificatif en tant que prescription. Toutefois, l'agence régionale de santé se borne à renvoyer au respect des prescriptions du titre VIII du règlement sanitaire départemental et le respect d'une législation ne peut être regardé comme une prescription spéciale au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme précité. En deuxième lieu, l'avis du service départemental d'incendie et de secours assorti de prescriptions était joint à l'arrêté de permis de construire modificatif qui précise que " Les prescriptions du service départemental d'incendie et de secours jointes en annexe devront être respectées par le pétitionnaire ". Ainsi qu'il a été indiqué au point 12, la circonstance que cette mention se situe après la signature de l'auteur de l'acte n'a aucune incidence sur son caractère prescriptif. En troisième lieu, les seules allégations des appelants quant au risque engendré par la présence d'une fosse à lisier destinée à récupérer la partie liquide des eaux usées, ne permettent pas d'établir l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le maire de la commune de Roumazières Loubert en délivrant le permis de construire. Par suite, les appelants n'établissent aucune méconnaissance, par le permis de construire modificatif, de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

23. Les requérants soutiennent que le projet ne prévoit aucun moyen pour assurer l'écoulement des eaux pluviales en méconnaissance des dispositions de l'article NC4 du règlement du plan d'occupation des sols. Il ressort de la notice de présentation du permis modificatif que les eaux pluviales seront évacuées par épandage et pour le trop-plein directement dans le fossé conformément aux dispositions de l'article NC4 qui autorisent la résorption des eaux pluviales sur le terrain d'assiette ou, en cas de contraintes de lieux ou de sols, directement dans le fossé. Ainsi qu'il a été précédemment dit au point 14, le constat d'huissier du 21 novembre 2016 ne suffit pas à établir la méconnaissance des dispositions de l'article NC4 du plan d'occupation des sols.

24. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant à l'annulation du permis de construire modificatif du 6 mars 2015.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Roumazières Loubert et du GAECG..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que demandent M. et Mme E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Roumazières Loubert présentées sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : L'intervention du GAEC G...est admise.

Article 2 : Les requêtes de M. et Mme E...sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme F...E..., à la commune de Roumazières-Loubert et au GAECG....

Délibéré après l'audience du 25 octobre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 29 novembre 2018.

Le rapporteur,

Nathalie GAY-SABOURDYLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au préfet de la Charente, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

10

N° 16BX03085, 16BX03086


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03085,16BX03086
Date de la décision : 29/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale. POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : ADAMAS - AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-11-29;16bx03085.16bx03086 ?
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