La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/11/2018 | FRANCE | N°16BX00776

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 16 novembre 2018, 16BX00776


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, le syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente (CALITOM) a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2013 par lequel le préfet de la Charente a fixé les conditions financières du retrait de la commune de Mornac et d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 28 513 euros, correspondant à la somme mise à sa charge par l'arrêté du 15 juillet 2013, émis par la commune le 8 novembre 2013.

Par un jugement n°13020

17-1302795 du 30 décembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, le syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente (CALITOM) a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2013 par lequel le préfet de la Charente a fixé les conditions financières du retrait de la commune de Mornac et d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 28 513 euros, correspondant à la somme mise à sa charge par l'arrêté du 15 juillet 2013, émis par la commune le 8 novembre 2013.

Par un jugement n°1302017-1302795 du 30 décembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 février 2016 et un mémoire en réplique enregistré le 19 septembre 2016, le syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente, représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 30 décembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Charente du 15 juillet 2013 et le titre exécutoire en litige ;

3°) de condamner solidairement l'Etat et la commune de Mornac à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le syndicat requérant soutient que :

En ce qui concerne l'arrêté préfectoral :

- le jugement attaqué est entaché de défaut de motivation dès lors qu'il n'explicite pas les motifs pour lesquels il estime que la valeur comptable nette retenue par le préfet n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet ne pouvait, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales, retenir la valeur nette comptable des centres d'enfouissement ;

- il n'est pas établi que la valeur nette comptable correspondrait au coût d'investissement des centres qui supposent également des coûts à venir dans le cadre du suivi trentenaire dont ils doivent faire l'objet ; à l'issue de cette période, les terrains d'implantation des centres ne pourront pas être valorisés ; ils constituent ainsi une charge et non une immobilisation ayant une valeur réelle alors même qu'ils ont été inscrits au compte 2135 relatif aux immobilisations corporelles ; le préfet, en prenant en compte la durée des amortissements qui est plus longue que celle des emprunts, s'est mépris sur la prétendue valeur nette comptable des centres ; les CET, arrivés à saturation, continuent de constituer une charge pour CALITOM qui n'en retire plus de recette d'exploitation même si les emprunts ont été entièrement remboursés ;

- l'arrêté se fonde à tort sur l'utilité sociale des CET pour en déterminer la valeur et justifier que soit retenue la valeur nette comptable ;

- le préfet aurait dû tenir compte de la valeur réelle et effective des installations à la date de retrait de la commune ;

- en vertu du principe d'équité qui doit commander la méthode de répartition, la commune doit participer au coût des charges et travaux à venir quelque soit son niveau d'endettement ; la commune de Mornac est redevable d'une reprise de dette de l'ordre de 127 000 euros.

En ce qui concerne le titre exécutoire :

- il ne mentionne le débiteur que sous l'enseigne " CALITOM " ; à défaut de désigner son destinataire sous son véritable nom, il est entaché d'illégalité ;

- il est privé de base légale du fait de l'illégalité de l'arrêté du préfet ;

- il ne comporte pas l'indication des nom et prénom du comptable public chargé du recouvrement en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2016, la commune de Mornac, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation du syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 mars 2018 la clôture d'instruction a été fixée au 9 avril 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

-la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marianne Pouget,

- les conclusions de Mme. Sabrina Ladoire, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant le syndicat mixte de valorisation des déchets ménagers de la Charente, et de MeA..., représentant la commune de Mornac.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat de valorisation des déchets de la Charente " CALITOM " relève appel du jugement du 30 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Charente du 15 juillet 2013 fixant les conditions financières et patrimoniales du retrait de la commune de Mornac du syndicat d'une part et du titre exécutoire émis à son encontre par la commune de Mornac le 8 novembre 2013 d'un montant de 28 513 euros, correspondant à la somme mise à sa charge par l'arrêté du 15 juillet 2013, d'autre part.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges ont, aux points 6 et 7 du jugement attaqué, suffisamment explicité les motifs de droit et de fait qui les amenaient à considérer, d'une part, que le préfet avait pu, pour procéder à la répartition des biens du syndicat requérant à la suite du retrait de la commune de Mornac, retenir la valeur nette comptable des centres d'enfouissement technique, d'autre part, que ce dernier n'avait pas commis d'erreur manifeste d'appréciation. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué du fait de l'insuffisance de sa motivation doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'arrêté préfectoral du 15 juillet 2013 :

3. Aux termes de l'article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales : " En cas de retrait de la compétence transférée à un établissement public de coopération intercommunale : / 1° Les biens meubles et immeubles mis à la disposition de l'établissement bénéficiaire du transfert de compétences sont restitués aux communes antérieurement compétentes et réintégrés dans leur patrimoine pour leur valeur nette comptable, avec les adjonctions effectuées sur ces biens liquidées sur les mêmes bases. Le solde de l'encours de la dette transférée afférente à ces biens est également restituée à la commune propriétaire ; / 2° Les biens meubles et immeubles acquis ou réalisés postérieurement au transfert de compétences sont répartis (...) entre la commune qui se retire de l'établissement public de coopération intercommunale et l'établissement (...) ou, dans le cas particulier d'un syndicat dont les statuts le permettent, entre la commune qui reprend la compétence et le syndicat de communes. (...). Le solde de l'encours de la dette contractée postérieurement au transfert de compétences est réparti dans les mêmes conditions (...) entre la commune qui se retire et l'établissement public de coopération intercommunale ou, le cas échéant, entre la commune et le syndicat de communes. A défaut d'accord entre l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale et les conseils municipaux des communes concernés, cette répartition est fixée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés. ". Il résulte de ces dispositions, combinées avec celles précitées de l'article L. 5211-19 du même code, qui y renvoient, qu'en cas de retrait d'une commune d'un établissement public de coopération intercommunale en raison de son adhésion à un autre établissement , il appartient à la commune et à l'établissement public de coopération intercommunale ou, à défaut d'accord, au représentant de l'Etat dans le département, de procéder à la répartition, d'une part, de l'ensemble des actifs dont l'établissement est devenu propriétaire postérieurement au transfert de compétences, à l'exception des disponibilités nécessaires pour faire face aux besoins de financements relatifs à des opérations décidées avant la date de la répartition et non encore retracées au bilan de l'établissement public, d'autre part, de l'encours de la dette contractée postérieurement au transfert de compétences. Cette répartition doit être fixée dans le but, d'une part, d'éviter toute solution de continuité dans l'exercice, par les personnes publiques, de leur compétence, d'autre part, de garantir un partage équilibré compte tenu de l'importance de la participation de la commune dans la communauté dont elle se retire.

4. L'adhésion de la commune de Mornac à la communauté d'agglomération du Grand Angoulême a emporté automatiquement son retrait du syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente. Le syndicat et la commune n'ayant pas réussi à arrêter à l'amiable les conditions financières du retrait de cette dernière, le préfet de la Charente, saisi en application du I de l'article L. 5216-7 du code général des collectivités territoriales, a fixé les conditions financières et patrimoniales du retrait de la commune de Mornac du syndicat de valorisation des déchets de la Charente. Eu égard à l'impossibilité de répartir les biens entre la commune et le syndicat compte tenu de la poursuite par ce dernier de son activité, il a prévu le maintien à l'actif du syndicat de l'ensemble des centres d'enfouissement technique (CET) pour leur valeur nette comptable évaluée à 17 774 852 euros au 31 décembre 2011. En fonction d'une clé de répartition basée sur la population municipale, arrêté à 0,8787% de la population totale des collectivités adhérentes au syndicat, le préfet a estimé que la part de valorisation comptable des CET pouvant être affectée à la commune de Mornac était de 156 188 euros. Il a limité la participation de la commune à l'encours de la dette contractée par le syndicat pour la réalisation des centres au solde du capital restant dû de l'emprunt y afférent, à hauteur de 127 675 euros en fonction de la même clé de répartition. La compensation entre ces deux valeurs a fait apparaitre un solde de 28 513 euros, au profit de la commune et à la charge du syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente.

5. Ainsi qu'il a été dit au point 2, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales qu'il appartenait au préfet de la Charente, à défaut d'accord entre le syndicat et la commune de Mornac, de procéder à la répartition de l'ensemble des actifs dont le syndicat est devenue propriétaire postérieurement au transfert de compétences, d'autre part, de l'encours de la dette contractée postérieurement à ce transfert.

6. Le syndicat soutient que ces CET n'ont plus de valeur économique et constituent une charge dès lors qu'ils sont grevés de frais de fonctionnement résultant d'une obligation de suivi trentenaire à l'issue de la période d'exploitation commerciale de sorte que le préfet ne pouvait sans erreur de droit retenir les centres pour leur valeur nette comptable.

7. Toutefois, ces centres sont ou ont été exploités par le syndicat qui en retire ou en a retiré des recettes et ont une valeur susceptible d'évaluation comptable, déterminée en fonction du coût de l'investissement et des amortissements dont la durée a d'ailleurs été calculée sur toute la période d'exploitation qui correspond non seulement à la période de chargement des lieux de stockage mais également à celle de contrôle des centres.

8. Le syndicat requérant ne précise pas la nature exacte des coûts que, selon lui, la commune de Mornac devrait prendre en charge alors au surplus, qu'en application de l'arrêté du 11 janvier 2013 du préfet de la Charente modifiant la décision instituant le syndicat, les contributions dues par les nouvelles communes membres du syndicat comprennent, outre le coût à la tonne des déchets ménagers pour les charges liées au traitement actuel, le coût à l'habitant pour les charges liées aux anciens équipements de traitement.

9. Par suite, le préfet, pouvait, sans commettre d'erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales prendre en compte la valeur nette comptable des CET.

10. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que le préfet a retenu les CET pour leur valeur nette comptable telle qu'elle figurait au bilan de l'établissement public au 31 décembre 2011. Le syndicat ne peut utilement soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste au seul motif que la durée d'amortissement de ces équipements est différente de celle des emprunts contractés pour financer leur réalisation.

11. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Charente, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait tenu compte du niveau d'endettement respectif de la commune de Mornac et du syndicat, a pu décider, sans erreur manifeste d'appréciation, que le syndicat conserve les charges de fonctionnement de ces centres qui demeurent.dans son actif et que la commune se retirant ne participe, au prorata de sa population, qu'à la compensation du capital restant dû sur l'emprunt contracté, correspondant à sa part de la dépense d'investissement consentie durant sa présence dans le syndicat

En ce qui concerne le titre exécutoire :

12. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le syndicat n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'arrêté préfectoral à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du titre exécutoire.

13. Le titre exécutoire désigne comme débiteur le syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente sous sa seule enseigne " CALITOM " sans mentionner son véritable nom. Toutefois, compte tenu de l'usage répandu de cette enseigne et de la mention de l'adresse du syndicat, le titre exécutoire n'était entaché d'aucune ambiguïté sur l'identité de son destinataire.

14. Les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 n'étant pas applicables aux relations entre personnes morales de droit public, le moyen tiré de leur méconnaissance ne peut dès lors qu'être écarté.

15. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Mornac qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par le syndicat de valorisation des déchets de la Charente au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat de valorisation des déchets de la Charente la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Mornac sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête du syndicat de valorisation des déchets de la Charente est rejetée.

Article 2 : Le syndicat de valorisation des déchets de la Charente versera à la commune de Mornac la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat de valorisation des déchets de la Charente et à la commune de Mornac.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme. Marianne Pouget, président-assesseur,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 16 novembre 2018.

Le rapporteur,

Marianne Pouget

Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au préfet de la Charente en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°16BX00776


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00776
Date de la décision : 16/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-05-01-03-06 Collectivités territoriales. Coopération. Établissements publics de coopération intercommunale - Questions générales. Syndicats de communes. Dissolution.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Marianne POUGET M.
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : CABINET PIERREPINTAT AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-11-16;16bx00776 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award