Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCI French Cricket a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la délibération du conseil exécutif de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy n° 2011-1028 CE du 8 décembre 2011 ainsi que l'arrêté du président du conseil exécutif de la collectivité, n°9711231100225 du 8 décembre 2011, refusant de lui délivrer un permis de construire portant sur des travaux de modification de l'emplacement de piscines, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé le 25 janvier 2012.
Par un jugement n° 1200027 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 16 février 2016, le 27 juin 2017 et le 24 août 2017, la SCI French Cricket, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint-Barthélemy du 17 décembre 2015 ;
2°) d'annuler la délibération du conseil exécutif de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy n° 2011-1028 CE du 8 décembre 2011 ainsi que l'arrêté du président du conseil exécutif de la collectivité, n°9711231100225 du 8 décembre 2011, refusant de lui délivrer un permis de construire portant sur des travaux de modification de l'emplacement des piscines, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé le 25 janvier 2012 ;
3°) d'enjoindre à la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy de statuer sur sa demande de permis de construire dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy une somme de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'article 7 du règlement du lotissement Domaine de Cricket sur lequel se sont fondés les premiers juges pour confirmer la légalité des décisions attaquées n'était pas applicable à la demande de permis de construire dès lors que cette demande ne portait pas sur l'implantation d'une construction ; cet article ne concerne que l'implantation et le volume des constructions, or le projet n'a aucune influence sur l'implantation et le volume de la construction ; l'article 7 ne concerne pas un éventuel risque pour la sécurité publique ;
- compte tenu de la compétence de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy en matière d'urbanisme en application de la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007, le conseil exécutif de Saint-Barthélemy était compétent pour donner l'accord favorable prévu par l'article 7 du règlement du lotissement en lieu et place de la direction départementale de l'équipement ; la délibération et l'arrêté du 8 décembre 2011 doivent être regardés comme valant refus de l'accord préalable visé à l'article 7 alinéa 2 du règlement du lotissement ;
- la zone d'implantation du projet n'est pas une zone à risque et il n'existe aucun document opposable aux tiers relatif à la définition de zones à risque ; l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ne trouve pas à s'appliquer ;
- la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy ne précise pas en quoi le projet serait susceptible de porter atteinte à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques et de son importance ;
- le projet n'aura aucun impact sur les paysages environnants ;
- quand bien même le projet serait pour partie hors des limites du lotissement, il est implanté dans les parties actuellement urbanisées.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 avril 2016 et le 23 août 2017, la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de la SCI French Cricket une somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en l'absence de carte d'urbanisme et en application de l'article 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme étaient applicables à la date du refus de permis de construire ; la parcelle AP 269 constitue le lot 14 du lotissement et le règlement de ce lotissement lui est donc applicable ;
- même si la direction départementale de l'équipement de Saint-Barthélemy n'existait plus à la date de la décision attaquée, le pétitionnaire était tenu d'obtenir l'accord favorable du service qui lui a succédé ;
- l'accord préalable était requis non seulement pour des motifs liés à la préservation du paysage, mais aussi pour des raisons de sécurité publique en application de l'article 7 du règlement du lotissement ;
- le projet méconnaît l'alinéa 1er de l'article 7 du règlement du lotissement qui prévoit que les constructions seront implantées dans le gabarit figurant en pointillé au plan de masse de lotissement dès lors que la modification des piscines se situe au-delà des limites du lotissement ; l'implantation des piscines au-delà de la limite du lotissement suffisait à justifier un refus de permis de construire ;
- à supposer même que l'alinéa 2 de l'article 7 du règlement du lotissement ne concerne que l'implantation de la construction, le projet de la requérante aura un impact sur les paysages environnants ;
- le projet est situé dans une zone à risque de chutes de blocs, sur la crête d'une falaise, et au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme qui était applicable en dépit de l'absence de plan de prévention des risques, le permis devait être refusé ; ce motif tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme justifie à lui seul le refus de permis attaqué.
Par ordonnance du 29 juin 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 5 septembre 2017 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI French Cricket est propriétaire de deux parcelles cadastrées AP 269 et 273 situées sur le territoire de la collectivité de Saint-Barthélemy. La parcelle AP 269 est située dans le périmètre du lotissement du domaine de Cricket autorisé par un arrêté préfectoral n° 77-30 du 24 novembre 1977, modifié par arrêté préfectoral n° 79-61 du 12 juin 1979. Le 18 octobre 2011, la SCI French Cricket a déposé une demande de permis de construire ayant pour objet des travaux de modification de l'emplacement de deux piscines. Par une délibération du conseil exécutif de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy n°2011-1028 CE du 8 décembre 2011, ainsi qu'un arrêté du même jour pris par le président du conseil exécutif, le permis sollicité a été refusé. Par un courrier du 20 janvier 2012 réceptionné par l'autorité administrative le 25 janvier 2012, la SCI French Cricket a formé un recours gracieux dirigé contre ces décisions, auquel la collectivité d'outre-mer n'a pas donné suite. La SCI French Cricket a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler ces décisions et relève appel du jugement n° 1200027 du 17 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Le refus de permis de construire litigieux est fondé sur trois motifs, tirés de ce que le projet se situe en dehors du lotissement, hors des espaces urbanisés de la commune et dans une zone à risque. Les décisions attaquées relèvent que le projet ne respecte pas l'article 7 du règlement du lotissement et méconnaît, compte tenu de sa situation dans une zone à risque, les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Pour confirmer la légalité du refus de permis de construire, les premiers juges ont estimé qu'en méconnaissance de l'alinéa 2 de l'article 7 du règlement du lotissement, l'accord préalable de la direction départementale de l'équipement ou du service qui lui a succédé n'avait pas été recueilli.
3. Aux termes de l'article 7 du règlement du lotissement du domaine de Cricket relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives des parcelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe n° 77-30 du 24 novembre 1977, modifié par arrêté préfectoral n° 79-61 du 12 juin 1979 : " Les constructions seront implantées dans le gabarit figurant, en pointillé, au plan de masse du lotissement. / Toutefois, les constructions implantées sur les lots numéros 12 et 14 devront faire l'objet, en raison de leur situation en crête de falaise, d'un accord préalable de la direction départementale de l'équipement en ce qui concerne l'implantation et le volume. "
4. La SCI French Cricket, propriétaire de la parcelle AP 269 qui constitue le lot 14 du lotissement domaine de Cricket, soutient en premier lieu que le projet ne concerne pas l'implantation d'une construction. Il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment de la demande de permis de construire que le projet a pour objet de modifier l'emplacement de deux piscines pour les éloigner d'environ 1,20 m des maisons afin de dissimuler la vue sur un projet d'usine de concassage en contrebas. Par suite, les dispositions de l'article 7 du règlement du lotissement étaient bien applicables au projet de permis de construire déposé par la SCI French Cricket.
5. Aux termes de l'article L.O. 6214-3 du code général des collectivités territoriales : " La collectivité fixe les règles applicables dans les matières suivantes : (...) / 2° Urbanisme ; construction ; habitation ; logement ; " La SCI French Cricket soutient également que compte tenu de la compétence en matière d'urbanisme de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy, seule cette collectivité pouvait donner l'accord préalable prévu par les dispositions du règlement susvisé, et que le refus de permis de construire opposé à son projet exprime implicitement mais nécessairement le désaccord de l'autorité visée par l'alinéa 2 de l'article 7 du règlement du lotissement.
6. En application de l'article susvisé du code général des collectivités territoriales, la collectivité de Saint-Barthélemy est compétente pour fixer les règles en matière d'urbanisme. Par suite, et depuis ce transfert de compétences, ce sont les services de cette collectivité chargés de l'urbanisme qui devaient être saisis pour l'application de l'alinéa 2 de l'article 7 du règlement de lotissement. Toutefois dès lors que l'autorité compétente pour statuer est la même que celle qui doit être consultée, c'est à tort que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de ce que le projet ne respecte pas les dispositions de l'alinéa 2 de l'article 7 du règlement de lotissement, à défaut de consultation de la direction départementale de l'équipement ou du service qui lui a succédé, pour confirmer le refus de permis de construire.
7. Il ressort des pièces du dossier et notamment des plans produits que si les piscines appartenant à la SCI French Cricket resteraient édifiées sur la parcelle AP 269, dépendant du lotissement, la jardinière et le muret de cette jardinière seront implantées sur la parcelle AP 713, qui est située en dehors du lotissement, et serait destinée à accueillir, en contrebas, les eaux de vidange de la piscine. Ainsi, ces constructions excèdent les limites du lotissement et c'est à bon droit que la collectivité de Saint-Barthélemy a considéré que le projet ne respectait pas les dispositions de l'alinéa 1er de l'article 7 du règlement du lotissement relatives à l'implantation des constructions.
8. Aux termes de l'article 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy : " En l'absence de carte d'urbanisme opposable aux tiers, les règles de constructibilité sont les suivantes : (...) 2° Sur l'ensemble du territoire de la collectivité, les règles nationales d'urbanisme prévues aux articles R. 111-2 à R. 111-24 du code national de l'urbanisme sont applicables. " Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. "
9. Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent. Le risque de mouvement des sols et d'éboulement auquel est exposé un terrain est au nombre de ceux qui peuvent fonder un refus de permis de construire.
10. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'Atlas communal des risques naturels établi en 1997, que la parcelle AP 713 est exposée à un aléa fort de mouvements de terrains en raison de chutes de blocs. La société requérante soutient que cette étude est ancienne, toutefois, aucune pièce du dossier ne permet de remettre en cause les informations qu'elle contient. Par ailleurs, si la société requérante indique que les travaux à réaliser n'entraîneront pas, eu égard à leur faible ampleur, de risques pour la sécurité publique, le projet nécessite toutefois la réalisation sur la parcelle concernée de constructions qui se rapprochent du bord de la falaise. Par suite, en raison de la nature des risques pesant sur la parcelle AP 713, et qui sont accrus par son profil particulièrement pentu, le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant le permis de construire sollicité par la SCI French Cricket.
11. Il ressort des pièces du dossier que le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy aurait pris la même décision de refus de permis de construire en se fondant sur les deux motifs tirés d'une part de la méconnaissance des règles d'implantation des constructions prévues par le règlement du lotissement et d'autre part, de ce que le projet de la SCI méconnaît les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
12. Il résulte de ce qui précède que la SCI French Cricket n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par la SCI French Cricket, n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions de la société requérante tendant à ce qu'il soit enjoint à la collectivité de Saint-Barthélemy de statuer sur sa demande de permis de construire dans un délai de deux mois ne peuvent donc qu'être rejetées.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SCI French Cricket est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI French Cricket et à la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy. Copie en sera adressée au préfet délégué de Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
M. David Terme, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 octobre 2018.
Le rapporteur,
Jean-Claude PAUZIÈSLe président,
Catherine GIRAULTLe greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au préfet, représentant de 1'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 16BX00673