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17/07/2018 | FRANCE | N°18BX00147

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 17 juillet 2018, 18BX00147


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2017 par lequel le préfet de la Martinique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700585 du 12 décembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, des mémoires et des mémoires e

n production de pièces, enregistrés les 12 janvier, 29 janvier, 22 mai et 24 mai 2018, M. A...C.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2017 par lequel le préfet de la Martinique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700585 du 12 décembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, des mémoires et des mémoires en production de pièces, enregistrés les 12 janvier, 29 janvier, 22 mai et 24 mai 2018, M. A...C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 12 décembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Martinique en date du 27 septembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Martinique de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jours de retard passé un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jours de retard, et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors qu'il justifie être entré sur le territoire national en possession d'une vignette " urgence maria " apposée dans son passeport qui s'apparente à un visa d'entrée ou à un sauf conduit ;

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il existe une procédure spécifique à l'examen des personnes ayant dû quitter leur pays d'origine du fait des cyclones ;

- le préfet de la Martinique en s'estimant en situation de compétence liée au regard des articles L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a méconnu l'étendue de sa compétence en s'abstenant de lui délivrer un titre de séjour alors même qu'il ne remplissait pas toutes les conditions requises ; il a méconnu l'étendu de sa compétence en s'estimant tenu de prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il fait l'objet d'un suivi médical en France ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dès lors qu'il est arrivé sur l'île de la Martinique pour fuir un cyclone et qu'il ne dispose plus d'attaches dans son pays d'origine ;

- cette décision est entachée d'un détournement de procédure dans la mesure où il aurait dû être maintenu en zone d'attente et non pas retenu pour vérification du droit au séjour ;

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen personnel de sa situation ;

- cette décision est entachée d'un défaut de base légale dès lors que l'administration aurait pu faire le choix de le placer en zone d'attente où il n'aurait pu faire l'objet de la mesure d'éloignement contestée ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'un défaut d'examen particulier dès lors qu'il disposait d'un titre de séjour délivré par la République dominicaine jusqu'au 14 octobre 2017 contrairement à ce qu'indique la décision contestée ;

- cette décision méconnait les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison du passage d'ouragans en République dominicaine et en Haïti respectivement à l'automne 2017 et le 30 juin 2017.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2018, le préfet de la Martinique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête de M. C...n'est fondé.

Par ordonnance du 22 mai 2018, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 5 juin 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gil Cornevaux,

- et les observations de Me B...D...représentant M.C....

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant haïtien, a fait l'objet d'un contrôle tendant à la vérification de son droit au séjour et de circulation lors de son entrée sur le territoire français le 26 septembre 2017, aux termes duquel il n'a pas été en mesure de justifier de la régularité de son séjour sur le territoire national. Il relève appel du jugement du 12 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 septembre 2017 par lequel le préfet de la Martinique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ". M. C...soutient que son entrée sur le territoire français serait régulière dès lors qu'il a dû quitter la République dominicaine dans l'urgence suite aux dégâts occasionnés par le cyclone Maria, ainsi qu'en atteste la vignette de la société de transport maritime " l'express des îles " figurant sur son passeport. Toutefois, de tels circonstances ne sont pas de nature à faire regarder M. C...comme étant entré de manière régulière sur le territoire français alors qu'il n'est, par ailleurs, titulaire d'aucun titre de séjour en cours de validité lui permettant de séjourner en France.

3. En deuxième lieu, M. C...ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu l'étendue de sa compétence en s'abstenant d'examiner son droit au séjour sur le fondement de ces dispositions.

4. En troisième lieu, il ne ressort ni de la lecture de la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français, ni des autres pièces du dossier que le préfet se serait estimé tenu d'obliger M. C...à quitter le territoire français ou de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à examen particulier de la situation de M.C....

5. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C...est entré récemment en France le 26 septembre 2017, à l'âge de quarante-trois ans, où il ne justifie pas détenir des attaches personnelles fortes. En outre, s'il affirme avoir dû quitter la République dominicaine pour fuir un cyclone, il est constant qu'il est de nationalité haïtienne. Enfin, si M. C... fait valoir qu'il a été suivi pour des raisons médicales en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé nécessiterait le maintien d'une prise en charge sur le territoire français. Par suite, la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et ni en tout état de cause de l'article 3 de cette convention. Pour les mêmes motifs cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

6. En cinquième lieu, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait dépourvue de base légale dès lors qu'il existerait une procédure spécifique d'examen des situations des personnes ayant dû quitter leur pays d'origine du fait des cyclones n'est pas assorti des précisions ni des justifications suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. Au surplus, il est constant que M. C..., qui dit avoir quitté la République dominicaine pour fuir un cyclone, est de nationalité haïtienne et qu'il entrait dans le champ d'application du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.

7. En sixième, contrairement à ce que soutient M.C..., le préfet de la Martinique n'a pas entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier en fixant comme pays de destination son pays d'origine ou tout autre pays non membre de l'Union européenne dans lequel il serait légalement admissible, et notamment la République dominicaine pays pour lequel l'intéressé soutient qu'il était en possession d'un titre de séjour valide à la date de la décision contestée.

8. En septième lieu, la circonstance tenant à ce que la République dominicaine et Haïti ont connu le passage de deux ouragans au cours de l'année 2017, n'est pas de nature, en soi, à faire regarder la décision contestée fixant le pays de destination comme ayant été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En dernier lieu, le détournement de procédure invoqué par M. C...n'est pas établi. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier, qu'il entrait dans la catégorie d'étranger pouvant faire l'objet d'une retenue pour vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande tendant à l'annulation l'arrêté du 27 septembre 2017 par lequel le préfet de la Martinique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fins d'injonction, ainsi que celles tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à A...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Martinique.

Délibéré après l'audience du 25 juin, 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Gil Cornevaux, président-assesseur,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2018.

Le rapporteur,

Gil CornevauxLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 18BX00147


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18BX00147
Date de la décision : 17/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Gil CORNEVAUX
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : BOAMAH BARBARA

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-07-17;18bx00147 ?
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