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10/07/2018 | FRANCE | N°16BX00800

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 10 juillet 2018, 16BX00800


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Gout-Rossignol a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté en date du 17 avril 2015 par lequel l'inspectrice d'académie, directrice académique des services de l'éducation nationale de la Dordogne, a décidé de retirer un emploi d'enseignant dans l'école primaire de la commune et d'enjoindre à l'inspectrice d'académie de procéder à l'établissement d'une nouvelle carte scolaire pour la rentrée 2015.

Par un jugement n° 1502774 du 24 décembre 2015, le tribuna

l administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Gout-Rossignol a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté en date du 17 avril 2015 par lequel l'inspectrice d'académie, directrice académique des services de l'éducation nationale de la Dordogne, a décidé de retirer un emploi d'enseignant dans l'école primaire de la commune et d'enjoindre à l'inspectrice d'académie de procéder à l'établissement d'une nouvelle carte scolaire pour la rentrée 2015.

Par un jugement n° 1502774 du 24 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 29 février et 6 avril 2016 et

le 11 juillet 2017, la commune de Gout-Rossignol, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 décembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 avril 2015 ;

3°) d'enjoindre à l'État de procéder à l'établissement d'une nouvelle carte scolaire pour la rentrée 2016 ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté le moyen tiré de l'absence de concertation et d'information des maires dans le processus de fermeture de l'école

de Gout-Rossignol alors que le code de l'éducation et le code général des collectivités territoriales prévoient expressément que les communes doivent être associées au développement du service public de l'éducation et que le ministre a signalé la nécessité d'un dialogue entre l'académie et les pouvoirs publics en amont de tout projet de retirer des emplois d'enseignant ; que l'inspectrice n'a pas pris en considération l'ensemble des avis et observations formulées par les autorités publiques, les maires des communes concernées n'ayant pu formuler leurs avis et propositions ni entrer en contact avec l'inspecteur chargé de leur circonscription ; l'arrêté a été pris avant les courriers des maires adressés à l'inspectrice et avant le rapport de visite de la commission des affaires scolaires et de la commission des bâtiments du 27 mai 2015 ; les obligations de consultation et de dialogue qui sont renforcées en cas de suppression d'une école n'ont pas été respectées ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a estimé que la baisse des effectifs dans le RPI était incontestable alors que cette baisse limitée à une diminution de trois élèves est relative et que l'inspectrice n'apporte aucun élément de nature à démontrer son caractère durable et définitif ; en outre, compte tenu de l'installation de nombreux couples dans la commune ces dernières années, le nombre d'écoliers a nécessairement vocation à augmenter ; au regard de la population actuelle de la commune, du nombre d'élèves dans le regroupement pédagogique, elle est fondée à demander le maintien du poste d'enseignant de son école;

- contrairement à la motivation du jugement attaqué relative au refus de prendre en considération la qualité de l'infrastructure de l'école et les modalités pratiques d'accueil des élèves, elle est fondée à invoquer la capacité d'accueil de son école qui est dans un très bon état d'équipements selon le rapport de visite de la commission des affaires scolaires alors que l'école de Champagne-et-Fontaine qui dispose de deux poste d'enseignants est dans un état de vétusté avancé nécessitant des travaux et est en situation excentrée ; la suppression contestée a entraîné un surcoût de 25 000 euros pour l'ensemble des communes concernés ;

- la décision de suppression d'un poste d'enseignant qui est contestée par la majorité des acteurs concernés, entraîne la fermeture totale de l'école et aurait pu être évitée s'il avait été procédé à la suppression d'un des deux postes de l'école de Champagne-et-Fontaine.

Par un mémoire, enregistré le 11 mars 2016, le recteur de l'académie de Bordeaux s'en remet aux observations du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche seul compétent pour présenter des observations en défense.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2017, le ministre de l'éducation nationale conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Gout-Rossignol ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 22 juin 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu

au 1er août 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Gout-Rossignol relève appel du jugement du 24 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 17 avril 2015 par lequel l'inspectrice d'académie, directrice académique des services de l'éducation nationale de la Dordogne, a décidé de retirer un emploi d'enseignant dans l'école primaire de la commune.

2. Aux termes de l'article L. 2121-30 du code général des collectivités territoriales, auquel renvoie l'article L. 212-1 du code de l'éducation: " Le conseil municipal décide de la création et de l'implantation des écoles et classes élémentaires et maternelles d'enseignement public après avis du représentant de l'État dans le département ". Aux termes de l'article L. 212-2 du code de l'éducation : " Toute commune doit être pourvue au moins d'une école élémentaire publique. Il en est de même de tout hameau séparé du chef-lieu ou de toute autre agglomération par une distance de trois kilomètres et réunissant au moins quinze enfants d'âge scolaire. / Toutefois deux ou plusieurs communes peuvent se réunir pour l'établissement et l'entretien d'une école. Cette réunion est obligatoire lorsque, deux ou plusieurs localités étant distantes de moins de trois kilomètres, la population scolaire de l'une d'elles est inférieure régulièrement à quinze unités. / Un ou plusieurs hameaux dépendant d'une commune peuvent être rattachés à l'école d'une commune voisine. Cette mesure est prise par délibération des conseils municipaux des communes intéressées. ".

3. Il ne résulte pas des dispositions du code de l'éducation dont se prévaut la commune de Gout-Rossignol, ni d'aucune autre disposition législative ou réglementaire que l'État, qui demeure seul compétent pour décider de l'affectation des emplois d'instituteurs dans le département, doive recueillir l'avis des communes avant de supprimer un poste d'enseignant au sein des écoles élémentaires et maternelles dont elles sont propriétaires, alors même que cette suppression serait de nature à entrainer la fermeture de la classe ou de l'école correspondante. Aucune disposition n'impose davantage qu'une concertation locale soit organisée dans cette situation, entre les représentants des municipalités, responsables des locaux et du fonctionnement de l'école, et les directeurs académiques des services de l'éducation nationale chargés d'implanter et de retirer les emplois d'enseignant. En tout état de cause et contrairement à ce que soutient la commune de Gout-Rossignol, le maire de cette dernière ainsi que les maires des communes du regroupement pédagogique intercommunal (RPI) concerné ont été consultés dans le cadre du processus de préparation de la carte scolaire pour la rentrée 2015 et ont pu formuler leurs observations. Ainsi, il ressort des pièces du dossier que les communes ont été informées dès le 4 novembre 2014 par la directrice académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Dordogne de ce que l'évolution à la baisse des effectifs pourrait entraîner, si elle devait perdurer, un ajustement du nombre d'emplois d'enseignants du premier degré dans le RPI pour la rentrée 2015 et invitées à se rapprocher de l'inspecteur de l'éducation nationale de la circonscription Dordogne de Nontron-Nord afin de lui apporter des éléments relatifs à la démographie scolaire. Le maire de Gout-Rossignol a été, en outre, avisé, le 31 mars 2015, de ce qu'une mesure de retrait de poste d'enseignant était envisagée au sein du RPI, dans l'école de sa commune, compte tenu de l'effectif prévisionnel attendu. Les maires ont, de plus, pu présenter des observations et ont été reçus par l'inspectrice académique à deux reprises. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'absence de concertation et dialogue avec les maires dans le processus de suppression d'un emploi d'enseignant sur la commune de Gout-Rossignol ne pouvait qu'être écarté.

4. Aux termes de l'article D. 211-9 du code de l'éducation : " Le nombre moyen d'élèves accueillis par classe et le nombre des emplois par école sont définis annuellement par l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale, compte tenu des orientations générales fixées par le ministre chargé de l'éducation, en fonction des caractéristiques des classes, des effectifs et des postes budgétaires qui lui sont délégués, et après avis du comité technique paritaire départemental. ".

5. Il ressort des pièces du dossier que les effectifs scolaires du RPI auquel appartient la commune de Gout-Rossignol ont diminué de manière continue depuis plusieurs années. Ainsi le nombre d'élèves inscrits dans les écoles du RPI était de 94 en 2012, puis 82 en 2013 et

de 76 élèves en 2014 correspondant alors à un taux d'encadrement de 19 élèves par classe pour quatre classes. Il n'est, par ailleurs, pas sérieusement contesté que l'effectif prévisionnel attendu à la rentrée 2015 était de 73 élèves, soit une baisse de 21 élèves en quatre années. Si la commune de Gout-Rossignol conteste l'ampleur de cette baisse, qu'elle estime relative et limitée à trois élèves, elle n'apporte aucun élément de nature à justifier d'une hausse attendue des effectifs scolaires dans les prochaines années alors qu'elle reconnaît que seulement 62 élèves étaient effectivement présents à la rentrée 2015, soit une moyenne de 21 élèves par classe et qu'il ressort au contraire des pièces du dossier que cet effectif a encore diminué pour la rentrée de 2016.

En se prévalant de l'installation d'une dizaine de nouveaux couples dans la commune

de Gout-Rossignol durant les cinq dernières années, l'appelante n'établit pas que l'administration aurait, en décidant le retrait d'un poste d'enseignant à l'école de la commune commis une erreur de fait, ni une erreur manifeste dans l'appréciation des effectifs scolaires à la date à laquelle la décision en litige a été prise.

6. La décision de supprimer un poste d'enseignant dans une école est prise au regard de l'évolution des effectifs des classes concernées, et non en considération de la qualité des infrastructures de l'école, des modalités pratiques d'accueil des élèves, des conditions de transport scolaire et de restauration des enfants. Ainsi nonobstant la qualité des équipements de l'école de Gout-Rossignol, reconnus comme étant en très bon état selon le rapport de visite de la commission des affaires scolaires, comparativement aux locaux moins adaptés à l'accueil d'effectifs supplémentaires de l'école de Champagne-et-Fontaine, dans laquelle deux emplois d'enseignant ont été conservés, la décision de l'inspecteur d'académie de supprimer un poste d'enseignant dans la commune appelante pour l'année scolaire 2015-2016 n'est pas entachée, compte tenu des effectifs en diminution dans le RPI, d'erreur manifeste d'appréciation. La circonstance que cette décision, qui a pour effet de fermer à compter de la rentrée 2015 l'école de Gout-Rossignol, entraînerait des conséquences financières pour l'ensemble des communes concernées et qu'elle soit contestée par la majorité des acteurs est, ainsi que l'ont jugé les premiers juges, sans incidence sur sa légalité.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Gout-Rossignol n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 17 avril 2015 par lequel l'inspectrice d'académie, directrice académique des services de l'éducation nationale de la Dordogne, a décidé de retirer un emploi d'enseignant dans l'école primaire de la commune. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Gout-Rossignol est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au maire de Gout-Rossignol, au ministre de l'éducation nationale et au recteur de l'académie de Bordeaux.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2018, à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 10 juillet 2018.

Le rapporteur,

Aurélie A...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX00800


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00800
Date de la décision : 10/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-02-01 Enseignement et recherche. Questions propres aux différentes catégories d'enseignement. Enseignement du premier degré.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Aurélie CHAUVIN
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : ALJOUBAHI

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-07-10;16bx00800 ?
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