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18/06/2018 | FRANCE | N°18BX00658

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 18 juin 2018, 18BX00658


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, d'annuler la décision du 26 novembre 2015 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un document de circulation pour étranger mineur au profit de son fils mineur C...B..., et d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 000 euros en réparation du préjudice subi avec intérêts.

Par un jugement n° 1600451 du 27 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.<

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Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 février 2018, Mme ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, d'annuler la décision du 26 novembre 2015 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un document de circulation pour étranger mineur au profit de son fils mineur C...B..., et d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 000 euros en réparation du préjudice subi avec intérêts.

Par un jugement n° 1600451 du 27 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 février 2018, Mme A...B..., représentée par Me Hirtzlin-Pinçon, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 27 décembre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 26 novembre 2015 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un document de circulation pour étranger mineur au profit de son fils mineur C...B...;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice subi par elle et son fils ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de délivrer au profit de son fils mineur C...B...un document de circulation dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir, et à défaut après ce délai sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, la somme de 2 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de délivrance d'un document de circulation pour étranger mineur est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet s'est fondé à tort sur les stipulations de l'article 10b de l'accord franco-algérien ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 6 l'accord franco-algérien, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1dans la mesure où son fils, qui réside en France pour être soigné, ne peut pas retourner rencontrer sa famille en Algérie sans document de circulation ; la procédure tendant à la délivrance d'un visa est aléatoire et longue, peut entraîner un risque pour sa santé en cas de nécessité de soins médicaux urgent ;

- l'administration lui a causé, ainsi qu'à son fils, un préjudice réel, certain et direct dès lors que leur famille est coupée en deux pour des raisons administratives, augmenté par le blocage de la situation par l'administration, et qu'elle estime dans son ensemble à hauteur de 15 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2018, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il réitère ses observations présentées en première instance et fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 15 mars 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 20 avril 2018.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 avril2018

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 11 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Gil Cornevaux a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., ressortissante algérienne, est entrée en France le 6 octobre 2013 avec son fils mineur, C..., né le 19 janvier 2008, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour, où elle s'est vue délivrer un titre de séjour en qualité d'accompagnant de son fils malade. Elle a présenté le 21 octobre 2013 une demande en vue d'obtenir un document de circulation pour étrangers mineurs au profit de son fils. Par une décision du 26 novembre 2016, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté cette demande. Mme B... relève appel du jugement du 27 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande à fin d'annulation de ce refus et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 7 000 euros en réparation du préjudice subi.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 10 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les mineurs algériens de dix-huit ans résidant en France, qui ne sont pas titulaires d'un certificat de résidence reçoivent sur leur demande un document de circulation pour étrangers mineurs qui tient lieu de visa lorsqu'ils relèvent de l'une des catégories mentionnées ci-après : (...) b) Le mineur algérien qui justifie par tous moyens avoir sa résidence en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans et pendant une durée d'au moins six ans ; (...) ". Il est constant que l'enfant de MmeB..., le jeune C...n'entre pas dans le cas prévus par les stipulations précitées. Par suite, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas commis d'erreur de droit en refusant de délivrer le document en cause au motif le jeune C...ne rentrait pas dans le champ d'application des stipulations précitées.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de 1 'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de délivrance d'un document de circulation au bénéfice d'un étranger mineur qui n'appartient à aucune des catégories prévues par les textes, de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que le refus de délivrer ce document ne méconnaît pas lesdites stipulations.

4. La décision de refus de délivrance du document de circulation sollicité pour l'enfant C...B..., compte tenu de la possibilité de solliciter pour lui un visa, n'implique, par elle-même, aucune séparation avec sa famille demeurant à.l'étranger Il ne ressort pas des pièces du dossier que le père de cet enfant, ainsi que les autres membres de sa famille résidant à l'étranger, se trouveraient dans l'impossibilité d'entreprendre eux-mêmes un déplacement en France pour le rencontrer. Par ailleurs, si l'enfant C...B..., qui souffre d'un lymphangiome kystique de la cavité buccale de la langue, fait l'objet d'un suivi médical en France, Mme B...n'apporte cependant aucun élément à l'appui de ses allégations relatives aux difficultés qui existeraient quant à la délivrance de visas permettant à son fils de circuler entre la France et l'Algérie, et ainsi de pouvoir revenir en France pour poursuivre ses soins médicaux. Ainsi en prenant la décision contestée, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas porté une atteinte disproportionnée au respect de la vie privée et familiale de l'enfant C...B...ni méconnu son intérêt supérieur. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, et en tout état de cause du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien doivent être écartés.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

5. Il résulte de ce qui précède qu'en l'absence d'illégalité fautive la décision du 26 novembre 2015 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un document de circulation pour étranger mineur au profit de l'enfant C...B..., les conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice que Mme B...et son fils auraient subi du fait de cette décision ne peuvent qu'être rejetées.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation la décision du 26 novembre 2015 refusant la délivrance d'un document de circulation pour étranger mineur à son filsC.l'étranger Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fins d'injonction, ainsi que celles tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi qu'aux entiers dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 14 mai 2018, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Gil Cornevaux, président-assesseur,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 juin 2018.

Le rapporteur,

Signé

Gil CornevauxLe président,

Signé

Pierre LarroumecLe greffier,

Signé

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX00658


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18BX00658
Date de la décision : 18/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005 Étrangers. Entrée en France.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Gil CORNEVAUX
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : HIRTZLIN-PINÇON

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-06-18;18bx00658 ?
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