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29/05/2018 | FRANCE | N°17BX03934

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 29 mai 2018, 17BX03934


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2017 de la préfète de la Vienne portant refus de délivrance d'un titre de séjour avec obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et désignation du pays de destination.

Par un jugement n° 1701949 du 14 novembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 décembre 2017 e

t le 26 février 2018, Mme A..., représentée par la SCP D...Dieumegard Masson, demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2017 de la préfète de la Vienne portant refus de délivrance d'un titre de séjour avec obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et désignation du pays de destination.

Par un jugement n° 1701949 du 14 novembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 décembre 2017 et le 26 février 2018, Mme A..., représentée par la SCP D...Dieumegard Masson, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 novembre 2017 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté du 21 juillet 2017 par lequel la préfète de la Vienne a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour " étudiant ", l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Vienne de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la

loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient :

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble, qu'il est entaché d'incompétence dès lors que la délégation de signature produite est trop large et ne permet pas de considérer que le secrétaire général disposait d'une habilitation pour signer l'arrêté en question ;

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour, que :

- la décision portant refus de séjour est entachée d'insuffisance de motivation en droit dès lors qu'elle ne fait pas état du décret n° 2002-337 du 5 mars 2002 portant publication de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Dakar le 1er août 1995, ni de l'article 9 de la convention franco-sénégalaise ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- c'est à tort que le préfet et le tribunal ont estimé que sa présence en France constituait une menace à l'ordre public au jour de l'édiction de l'arrêté en litige alors qu'elle a fait l'objet d'une condamnation isolée, d'ailleurs effacée de son casier judiciaire, intervenue dans un contexte de violences conjugales, plus d'un an avant l'édition de la décision litigieuse et a poursuivi avec réussite son cursus universitaire ;

- la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour étudiant est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle eu égard à la réalité et au sérieux de ses études, à son comportement exemplaire dans le suivi de ses études et à la possession de ressources suffisantes ;

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination, que :

- elles sont entachées d'illégalité en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elles sont entachées d'insuffisance de motivation ;

- elles méconnaissent les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 22 février et 5 mars 2018, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 28 février 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 15 mars 2018.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision

du 8 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la circulation et le séjour des personnes ;

- l'accord du 23 septembre 2006 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C...A..., ressortissante sénégalaise née le 27 avril 1992, entrée régulièrement en France le 17 septembre 2014 munie d'un visa long séjour, a bénéficié d'une carte de séjour en qualité d'étudiante valable du 11 septembre 2015 au 10 septembre 2016 dont elle a sollicité le renouvellement le 7 décembre 2016 auprès de la préfecture de la Vienne. Par arrêté du 21 juillet 2017, la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligée à quitter le territoire dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination.

Mme A...relève appel du jugement n° 1701949 du 14 novembre 2017, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes des stipulations de l'article 9 de la convention franco-sénégalaise du 1er août 1995 modifiée qui peuvent être substituées aux dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mentionnées par l'arrêté contesté : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation qui ne peut être assuré dans le pays d'origine, sur le territoire de l'autre État, doivent, pour obtenir le visa de long séjour prévu à l'article 4, présenter une attestation d'inscription ou de pré inscription dans l'établissement d'enseignement choisi (...). Ils doivent en outre justifier de moyens d'existence suffisants, tels qu'ils figurent en annexe. Les intéressés reçoivent le cas échéant, un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite des études ou du stage, ainsi que de la possession de moyens d'existence suffisants".

3. S'il ressort des pièces du dossier que l'appelante a été condamnée par un jugement du tribunal correctionnel de Poitiers du 26 avril 2016, à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis, pour des faits de violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité n'excédant pas 8 jours commis le 17 mars 2016 à Poitiers, cette condamnation isolée, relative à des faits survenus plus d'un an avant l'arrêté contesté du 21 juillet 2017, dans un contexte de disputes conjugales, ne suffit pas en l'espèce à regarder la présence de l'intéressée comme constituant, à la date de la décision litigieuse, une menace pour l'ordre public. Ce motif ne saurait dès lors justifier la décision de refus de renouvellement du titre de séjour mention " étudiant " opposé par la préfète de la Vienne à la demande présentée par MmeA....

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 juillet 2017 par laquelle la préfète de la Vienne a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour " étudiant ", et par voie de conséquence, des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

6. Eu égard au motif d'annulation retenu, et dès lors qu'il est constant que MmeA..., inscrite en licence sciences pour l'ingénieur, justifie de la poursuite d'études sérieuses et dispose de moyens d'existence suffisants en application des stipulations précitées de l'article 9 de la convention franco-sénégalaise, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Vienne délivre à Mme A...un titre de séjour portant la mention " étudiant ". Sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait ou de droit, il y a lieu d'enjoindre au préfet d'y procéder dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1990 :

7. Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1701949 du tribunal administratif de Poitiers est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 21 juillet 2017 par lequel la préfète de la Vienne a rejeté la demande de renouvellement du titre de séjour " étudiant " de MmeA..., l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Vienne de délivrer à Mme A...un titre de séjour mention " étudiant " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'État versera à Me D...la somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'État allouée au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., au préfet de la Vienne et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2018, à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 29 mai 2018

Le rapporteur,

Aurélie B...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX03934


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 17BX03934
Date de la décision : 29/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Aurélie CHAUVIN
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SCP BREILLAT DIEUMEGARD MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-05-29;17bx03934 ?
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