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15/05/2018 | FRANCE | N°17BX00062

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 15 mai 2018, 17BX00062


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D...et son épouse Mme F...D..., agissant tant en qualité de représentants légaux de leur fille mineure B...D...qu'en leur nom personnel, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à réparer les dommages qu'ils ont subis à la suite de la vaccination de B...contre la grippe A (H1N1) en leur versant les sommes de 1 041 328 euros au titre de

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D...et son épouse Mme F...D..., agissant tant en qualité de représentants légaux de leur fille mineure B...D...qu'en leur nom personnel, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à réparer les dommages qu'ils ont subis à la suite de la vaccination de B...contre la grippe A (H1N1) en leur versant les sommes de 1 041 328 euros au titre des préjudices subis par cette dernière et de 109 853,89 euros, chacun, au titre de leurs préjudices personnels. Il ont également demandé, à titre subsidiaire, que l'ONIAM soit condamné à leur verser une provision de 150 000 euros dans l'hypothèse où une expertise judiciaire serait ordonnée.

Par un jugement n° 1502300 du 8 novembre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a ordonné, avant dire droit, une expertise médicale et a réservé tous les droits et moyens des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 janvier 2017, M. E...D...et son épouse, Mme F...D..., agissant tant en qualité de représentants légaux de leur fille mineure B...D...qu'en leur nom personnel, représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 8 novembre 2016 ;

2°) de condamner l'ONIAM à leur verser une somme de 1 041 328 euros au titre des préjudices subis par leur fille B...à la suite de sa vaccination contre la grippe A (H1N1) et une somme de 109 853,89 euros, chacun, au titre de leurs préjudices personnels ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM, outre les entiers dépens dont les frais d'expertise, la somme de 5 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Ils soutiennent que

- le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation des faits qui lui étaient soumis en estimant qu'il n'était pas à même de se prononcer sur le rôle du vaccin dans la survenue de la pathologie développée par leur fille dès lors qu'il ressort de la littérature médicale ainsi que du rapport de l'expert missionné par l'ONIAM que les symptômes qu'elle a développés sont cohérents avec les observations épidémiologiques, que l'ONIAM a déjà indemnisé des personnes ayant développé la même pathologie après s'être vu administrer le vaccin Panenza et qu'aucune autre cause ne permet d'expliquer cette pathologie alors qu'il existe un lien avéré entre la narcolepsie-cataplexie et la vaccination contre le virus H1N1 ;

- ils justifient de la réalité de leurs préjudices.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2017, l'ONIAM, représenté par Me C... conclut au rejet de la requête, à l'annulation du jugement attaqué et au rejet des conclusions présentées par M. et Mme D...devant le tribunal administratif de Bordeaux.

Il soutient qu'il n'existe pas de lien établi entre l'administration du vaccin Panenza et l'apparition de la narcolepsie-cataplexie et que la pathologie développée par la fille des requérants peut avoir d'autre causes et notamment son infection par le virus de la grippe A.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.G...,

- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 24 novembre 2009, Mlle B...D..., née le 4 septembre 2002, s'est vue administrer le vaccin Panenza(r) dans le cadre d'une campagne nationale organisée contre l'épidémie de grippe A (H1N1). Ses parents, qui imputent à cette vaccination la survenance chez leur enfant d'une narcolepsie-cataplexie, ont sollicité auprès de l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) l'indemnisation de ses préjudices ainsi que de leurs propres préjudices. L'ONIAM a nommé un expert puis, par une décision du 24 mars 2015, il a rejeté cette demande. Les requérants demandent à la cour d'annuler le jugement du 8 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a ordonné, avant dire droit, une expertise médicale et de condamner l'ONIAM à leur verser une somme de 1 041 328 euros au titre des préjudices subis par leur fille B...ainsi qu'une somme de 109 853,89 euros, chacun, au titre de leurs préjudices personnels.

2. Les dispositions de l'article L. 3131-4 du code de la santé publique prévoient la réparation intégrale par l'ONIAM, en lieu et place de l'État, des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention ou de soins réalisées en application de mesures ministérielles prises conformément aux articles L. 3131-1 ou L. 3131-4, sans qu'il soit besoin d'établir l'existence d'une faute ni la gravité particulière des préjudices subis. Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la réparation incombant à l'ONIAM bénéficie à toute victime, c'est-à-dire tant à la personne qui a subi un dommage corporel du fait de l'une de ces mesures qu'à ceux de ses proches qui en subissent directement les conséquences.

3. Il résulte de l'instruction qu'au regard des données actuelles de la science, la jeune B...a présenté les premiers symptômes de la narcolepsie-cataplexie dans des délais compatibles avec l'administration du vaccin Panenza(r). Toutefois, si l'expert nommé par l'ONIAM a considéré, sans plus de précision, que l'hospitalisation de B...les 3 et 4 décembre 2009 à raison d'une forte fièvre associée à plusieurs syndromes grippaux correspondait à une réaction à sa vaccination et a établi un lien chronologique entre cette vaccination et le déclenchement de la narcolepsie, il ressort des examens de sérologie pratiqués le 3 décembre 2009 et du compte-rendu de la consultation hospitalière du 25 août 2010 que celle-ci a " présenté un épisode de grippe A confirmée " début décembre 2009. En outre, l'ONIAM, qui n'a pas été associée aux opérations d'expertise, soutient que l'administration du vaccin Panenza(r) ne peut entraîner des symptômes de la même intensité qu'une véritable infection grippale mais qu'en revanche, une étude chinoise menée en 2011 a établi l'existence d'un lien direct et certain entre les infections par le virus de la grippe A et la narcolepsie-cataplexie. Enfin, il ressort de la documentation médicale produite à l'instance que l'existence d'un lien épidémiologique entre la vaccination contre le virus H1N1 et la prévalence de la narcolepsie-cataplexie n'a pu être établie que pour le seul vaccin Pandemrix(r) et que ce lien pourrait être lié à la présence d'un adjuvant spécifique que ne contient pas le vaccin Panenza(r).

4. Dans ces conditions, eu égard au caractère non contradictoire de l'expertise ainsi qu'aux contradictions qui subsistent entre les affirmations de l'expert et les allégations étayées de l'ONIAM, les requérants et l'ONIAM ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'en l'état de l'instruction, ils n'étaient pas en mesure d'apprécier l'imputabilité du dommage subi par la jeune B...D...à la vaccination en cause et que, par suite, il était nécessaire d'ordonner une expertise médicale.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la requête et les conclusions incidentes de l'ONIAM doivent être rejetées, y compris les conclusions indemnitaires des requérants et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'ONIAM sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D...et son épouse, Mme F...D...et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2018 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mai 2018

Le rapporteur,

Manuel G...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°17BX00062


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX00062
Date de la décision : 15/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-005-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité sans faute. Actes médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : DANTE SARL

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-05-15;17bx00062 ?
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