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09/05/2018 | FRANCE | N°16BX00812

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 09 mai 2018, 16BX00812


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2014 par lequel le maire de la commune de Rémire-Montjoly a fait opposition à sa déclaration préalable tendant à la division de la parcelle cadastrée AL 332 en trois lots.

Par un jugement n° 1401290 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er mars 2016, M.D..., représenté par Me C..., d

emande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 10 décemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2014 par lequel le maire de la commune de Rémire-Montjoly a fait opposition à sa déclaration préalable tendant à la division de la parcelle cadastrée AL 332 en trois lots.

Par un jugement n° 1401290 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er mars 2016, M.D..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 10 décembre 2015 ;

2°) d'annuler " la procédure d'instruction supplémentaire, la lettre du 18 juin 2014, la notification au tiers géomètre " et l'arrêté du maire de la commune de Rémire-Montjoly du 25 septembre 2014 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Rémire-Montjoly la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la majoration du délai d'instruction de deux mois prévue par l'article R. 423-25 du code de l'urbanisme n'est pas applicable aux déclarations préalables ;

- la commune de Rémire-Montjoly ne rapporte pas la preuve de la réception avant l'expiration du délai de droit commun du courrier du 18 juin 2014 l'informant d'un nouveau délai de deux mois pour l'instruction de sa déclaration ; de plus, les motifs de cette notification ne concernaient que la consultation de la direction régionale des affaires culturelles et non pas la demande d'avis aux services du conseil général de la Guyane ;

- la consultation de la direction régionale des affaires culturelles était inutile alors qu'il résulte de l'avis de l'architecte des bâtiments de France du 2 juillet 2014 que le projet n'est pas situé dans le champ de visibilité d'un monument historique ;

- la notification d'un délai supplémentaire d'instruction ne lui a pas été adressée mais a été communiquée à la société GTU Géomètre Agréé alors que les articles L. 423-1 et R. 423-42 du code de l'urbanisme imposent qu'une telle notification soit faite à l'auteur de la déclaration ; la décision modifiant les délais d'instruction, en raison de sa qualité de décision administrative faisant grief, ne peut être notifiée à un tiers ; la commune a reconnu dans son mémoire en défense du 26 octobre 2015 que la lettre modifiant les délais d'instruction avait été adressée au géomètre, procédant ainsi à un aveu judiciaire au sens de l'article 1356 du code civil ;

- à défaut de notification expresse du nouveau délai d'instruction directement à l'auteur de la déclaration, le silence gardé par l'autorité compétente dans le délai d'un mois vaut décision de non-opposition à la déclaration préalable du 6 juin 2014 ; en procédant au retrait de la décision de non opposition alors qu'elle n'était pas illégale et après le délai de 3 mois, l'arrêté a méconnu les dispositions de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2017, la commune de Rémire-Montjoly, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. D...la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la notification de la modification du délai d'instruction a été adressée à la société GTU le 18 juin 2014 en raison de la demande du requérant précisant dans l'imprimé CERFA que les courriers, autres que les décisions, devaient être transmis à cette société ; elle a rapporté la preuve de la réception par le géomètre du courrier recommandé lui notifiant la modification des délais d'instruction ;

- la parcelle en litige se trouvant dans un secteur sauvegardé, en application de l'article R. 423-24 du code de l'urbanisme, le délai d'instruction devait être majoré ; si dans son avis, l'architecte des Bâtiments de France a estimé que " l'ABF n'a pas à donner son accord ", cette annotation relève uniquement de son appréciation par rapport à la visibilité du projet avec le bâtiment projeté ;

- le requérant ne peut se prévaloir de la naissance d'une décision tacite alors qu'en l'espèce, un permis tacite ne peut être acquis qu'en l'absence d'opposition ou de prescription de l'architecte des Bâtiments de France ;

- les demandes d'avis à la DRAC et au conseil général de la Guyane sont intervenues dans le délai de majoration de deux mois, en application de l'article R. 423-25 du code de l'urbanisme ; en l'absence de contestation des conditions de prorogation des délais d'instruction dans un délai de trois mois, le requérant n'est plus recevable à les contester dans le présent recours ;

- la réception des documents ayant justifié une prorogation du délai d'instruction étant intervenue le 26 août 2014, le délai de deux mois n'a commencé à courir qu'à cette date ; l'arrêté contesté a donc été édicté dans les délais et aucune décision implicite n'a pu naître ;

- les dispositions du plan d'occupation des sols imposent que l'emprise minimale des voies soit de 8 mètres s'il y a plus de 4 logements à desservir avec une largeur minimale de chaussée de 5 mètres ; le plan de masse fourni par le pétitionnaire faisant apparaître que la largeur de l'emprise au sol est inférieure aux exigences du plan d'occupation des sols, c'est à bon droit qu'elle s'est opposée à la déclaration préalable.

Par ordonnance du 28 novembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 29 janvier 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Cécile Cabanne,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D...a déposé à la mairie de la commune de Rémire-Montjoly le 6 juin 2014 une déclaration préalable de division pour la parcelle AL n°332, d'une superficie de 10 672 m², en trois lots situés au lieu-dit du Grand Beauregard. Par un arrêté du 25 septembre 2014, le maire de la commune de Rémire-Montjoly s'est opposé à cette déclaration préalable. M. D... relève appel du jugement du 10 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'existence d'une décision tacite de non-opposition à déclaration préalable :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / a) Un mois pour les déclarations préalables (...) ". Aux termes de l'article R. 423-24 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Le délai d'instruction de droit commun prévu par l'article R. 423-23 est majoré d'un mois lorsque le projet est soumis, dans les conditions mentionnées au chapitre V, à un régime d'autorisation ou à des prescriptions prévus par d'autres législations ou réglementations que le code de l'urbanisme (...) ". Aux termes de l'article R. 425-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable, figurant au chapitre V visé par l'article R. 423-24 précité : " Lorsque le projet est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou dans celui d'un parc ou d'un jardin classé ou inscrit ayant fait l'objet d'un périmètre de protection délimité dans les conditions fixées aux deuxième ou troisième alinéas de l'article L. 621-30-1 du code du patrimoine, le permis de construire, le permis d'aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-31 du code du patrimoine dès lors que la décision a fait l'objet de l'accord de l'architecte des Bâtiments de France (...) ". Aux termes de l'article L. 621-30 du code du patrimoine, dans sa rédaction alors applicable : " (...) Est considéré, pour l'application du présent titre, comme étant situé dans le champ de visibilité d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques tout autre immeuble, nu ou bâti, visible du premier ou visible en même temps que lui et situé dans un périmètre déterminé par une distance de 500 mètres du monument (...) ". Aux termes de l'article R. 423-42 du code de l'urbanisme : " Lorsque le délai d'instruction de droit commun est modifié en application des articles R. 423-24 à R. 423-33, l'autorité compétente indique au demandeur ou à l'auteur de la déclaration, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie : / a) Le nouveau délai et, le cas échéant, son nouveau point de départ ; / b) Les motifs de la modification de délai (...) ".

3. D'autre part, il résulte de l'article R. 423-19 du code de l'urbanisme que le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. Aux termes de l'article R. 423-38 du même code " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse (...) à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...) indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes ", les mentions obligatoires d'un tel courrier étant prévues à l'article R. 423-39 de ce code. Enfin, aux termes du a) de l'article R. 424-1 du même code, dans sa version alors applicable : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction (...) le silence gardé par l'autorité compétente vaut (...) décision de non-opposition à la déclaration préalable ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. D...a déposé en mairie sa déclaration préalable pour la division en trois lots de sa parcelle n°332 le 6 juin 2014. Un récépissé lui a alors été remis indiquant que le délai d'instruction de son dossier était d'un mois et qu'à défaut de réponse à cette échéance, il bénéficierait d'une décision tacite de non-opposition. La commune de Rémire-Montjoly fait valoir que le projet en cause étant situé dans le périmètre de protection d'un monument historique, une majoration à deux mois du délai d'instruction a été adressée à M. D...par courrier du 18 juin 2014. Elle indique lui avoir également signifié par ce même courrier que le dossier de demande était incomplet et que le délai d'instruction commencerait à courir à partir de la date de réception en mairie de la totalité des pièces manquantes.

5. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet en litige est situé à moins de 500 mètres de l'ancienne école du bourg de Rémire inscrite à l'inventaire des monuments historiques par arrêté du 21 novembre 2012 du préfet de la Guyane. Ainsi, en application de l'article R. 423-24 du code de l'urbanisme, dont ont fait application les premiers juges, le projet nécessitait l'accord de l'architecte des Bâtiments de France et le délai d'instruction du dossier devait en conséquence être porté à deux mois. La circonstance que l'architecte des bâtiments de France a estimé, dans l'avis qu'il a rendu le 2 juillet 2014, que le projet n'était pas situé dans le champ de visibilité de l'ancienne école du bourg de Rémire est sans incidence sur la légalité de la modification du délai d'instruction de la déclaration préalable litigieuse. Il est par ailleurs constant que la demande de pièces complémentaires était fondée.

6. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et la commune de Rémire-Montjoly ne le conteste pas, que le courrier du 18 juin 2014, s'il a été édicté dans le délai d'un mois, a été adressé par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 juin 2014 à la société Géomètre Topographe Urbain. S'il ressort du formulaire de demande que M. D...a indiqué qu'il souhaitait que les courriers de l'administration soient adressés à cette société, c'est sous réserve des " décisions ", qui devaient lui être communiquées. Or, la demande de pièces complémentaires et la lettre rectificative de majoration des délais sont des décisions administratives susceptibles de recours. Dans ces conditions, faute pour l'administration d'avoir régulièrement prolongé les délais d'instruction de la déclaration préalable en notifiant le courrier du 18 juin 2014 à M.D..., auteur de la déclaration préalable, une décision tacite de non opposition s'est formée dans le silence de l'administration au terme du délai d'instruction de droit commun d'un mois.

7. Si la commune de Rémire-Montjoly fait valoir qu'une décision tacite ne pouvait intervenir en l'absence d'opposition de l'architecte des bâtiments de France, l'exception prévue par l'article R. 424-3 du code de l'urbanisme prévoyant la naissance d'une décision implicite de rejet en cas d'avis défavorable de l'architecte des bâtiments de France n'est pas applicable aux déclarations préalables.

En ce qui concerne le retrait de la décision tacite de non-opposition à déclaration préalable :

8. Aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. ".

9. D'une part, le maire de la commune de Rémire-Monjoly doit être regardé comme ayant retiré la décision de non-opposition à déclaration préalable tacite du 6 juillet 2014 par l'arrêté contesté du 25 septembre 2014 en litige. Ainsi, le délai de retrait de trois mois prévu par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme a été respecté.

10. D'autre part, la décision en litige est motivée par le fait que les travaux déclarés relevaient de la procédure du permis d'aménager et non de la déclaration préalable. Il ressort des pièces du dossier, notamment du formulaire Cerfa et du plan de masse, et n'est au demeurant pas contesté en appel plus qu'en première instance, que la division de lots réalisée en vue de construire nécessitait la réalisation d'une voie d'accès commune à l'ensemble des lots, soumise à l'obligation d'obtenir un permis d'aménager en vertu des dispositions de l'article R. 421-19 du code de l'urbanisme. Par conséquent, et alors que M. D...n'établit ni même n'allègue que la servitude dont il s'est prévalu serait déjà aménagée en voie, le maire de Rémire-Montjoly était tenu de s'opposer aux travaux déclarés et d'inviter l'intéressé à présenter une demande de permis d'aménager. Ainsi, la décision tacite de non opposition à déclaration préalable était illégale. Dès lors, le maire de la commune de Rémire-Montjoly a pu légalement procéder à son retrait par l'arrêté du 25 septembre 2014.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Rémire-Montjoly, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. D...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D...la somme que demande la commune sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Rémire-Montjoly tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et à la commune de Rémire-Montjoly.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès , président-assesseur,

Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 mai 2018

Le rapporteur,

Cécile CABANNELe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

No 16BX00812


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00812
Date de la décision : 09/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Cécile CABANNE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SAINTE ROSE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-05-09;16bx00812 ?
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