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27/04/2018 | FRANCE | N°16BX01274

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 27 avril 2018, 16BX01274


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision, en date du 20 juillet 2010, par laquelle le maire du Taillan-Médoc a mis fin à ses fonctions de chef de cabinet à compter du 1er septembre 2010 et l'a mutée à la bibliothèque municipale, ensemble la décision du 3 avril 2013 rejetant son recours gracieux ainsi que d'enjoindre au maire du Taillan-Médoc de la réintégrer sur le poste de chef de cabinet ou, à défaut, sur un poste administratif de chef de service à responsab

ilités équivalentes et de condamner la commune du Taillan-Médoc à lui verser ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision, en date du 20 juillet 2010, par laquelle le maire du Taillan-Médoc a mis fin à ses fonctions de chef de cabinet à compter du 1er septembre 2010 et l'a mutée à la bibliothèque municipale, ensemble la décision du 3 avril 2013 rejetant son recours gracieux ainsi que d'enjoindre au maire du Taillan-Médoc de la réintégrer sur le poste de chef de cabinet ou, à défaut, sur un poste administratif de chef de service à responsabilités équivalentes et de condamner la commune du Taillan-Médoc à lui verser la somme de 18 100 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité fautive commise.

Par un jugement n° 1301944 du 16 février 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du maire du Taillan-Médoc en date 20 juillet 2010, ensemble la décision du 3 avril 2013 rejetant le recours gracieux de MmeD..., et a enjoint au maire du Taillan-Médoc de soumettre la décision de mutation de Mme D...à la commission administrative paritaire compétente.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 avril 2016, MmeD..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de bordeaux du 16 février 2016 ;

2°) d'annuler la décision, en date du 20 juillet 2010, par laquelle le maire du Taillan-Médoc a mis fin à ses fonctions de chef de cabinet à compter du 1er septembre 2010 et l'a mutée à la bibliothèque municipale, ensemble la décision du 3 avril 2013 rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au maire du Taillan-Médoc de la réintégrer sur le poste de chef de cabinet ou, à défaut, sur un poste administratif de chef de service à responsabilités équivalentes ;

4°) de condamner la commune du Taillan-Médoc à lui verser la somme de 18 100 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité fautive commise ;

5°) de mettre à la charge de la commune du Taillan-Médoc la somme 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier du fait d'une omission à statuer sur le réexamen de sa situation par la commune au vu des postes de rédacteurs éventuellement vacants ;

- sa requête est recevable car le dispositif lui fait partiellement grief ;

- la décision du 20 juillet 2010 qui n'a pas fait l'objet d'une motivation alors qu'elle doit être analysée comme une décision de retrait d'une décision créatrice de droit ;

- elle n'a pas été précédée de la consultation de la commission administrative paritaire, en méconnaissance de l'article 52 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la décision attaquée, qui n'a pas été prise dans l'intérêt du service, est en fait une sanction disciplinaire déguisée ;

- la décision attaquée a été prise en considération de la personne en méconnaissance des dispositions de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 ;

- la décision du 20 juillet 2010 ayant disparue de l'ordonnancement juridique, les premiers juges ne pouvaient faire injonction de soumettre une décision de mutation inexistante à la commission administrative paritaire ;

- la décision attaquée est entachée d'une incompétence de son auteur ;

- la mutation de la requérante sur un poste d'agent de gestion administrative à la bibliothèque municipale est illégale en ce que le poste n'a jamais été créé ou vacant ;

- la décision ne saurait être regardée comme une simple mutation interne mais doit s'interpréter comme une sanction déguisée, qui a été prise en méconnaissance de la procédure disciplinaire, compte tenu du déclassement que cette décision implique ;

- elle doit être réintégrer dans son ancien poste ou sur un poste équivalent en matière de responsabilité ;

- la faute de la commune engage sa responsabilité qui conduit à une indemnisation de son préjudice subi, directement imputable à cette décision illégale, à savoir un préjudice financier à hauteur de 8 100 euros, un préjudice de carrière à hauteur de 5 000 euros, ainsi que des troubles dans ses conditions d'existence et un préjudice moral à hauteur de 5 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2017, la commune du Taillan-Médoc, représentée par la SCP Noyer etB..., avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3000 euros soit mise à la charge de Mme D...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 22 avril 1905, notamment son article 65 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 94-1134 du 27 décembre 1994 ;

- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 ;

- le décret n° 90-128 du 9 février 1990 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gil Cornevaux ;

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

- et les observations de MeA..., représentant de Mme D...et de MeB..., représentant la commune du Taillan-Médoc.

Une note en délibéré pour Mme D...a été enregistrée le 30 mars 2018.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C...D..., qui a été recrutée le 1er juin 2005 en qualité d'agent contractuel par la commune du Taillan-Médoc, a été intégrée, à compter du 1er septembre 2006, dans le cadre d'emplois de rédacteur territorial. L'intéressée après avoir occupé les emplois de responsable du service de l'administration générale puis de responsable du service solidarité, jeunesse et développement local, a été nommée chef de cabinet du maire à compter du 1er décembre 2008. Le maire du Taillan-Médoc, par un courrier du 20 juillet 2010, a informé Mme D...qu'elle quitterait ce poste de chef de cabinet, pour être mutée, à compter du 1er septembre 2010, à la bibliothèque municipale, sous la direction de la responsable de service et de la directrice du pôle culture, vie associative et sport. Mme D...a demandé au tribunal administratif, de Bordeaux, d'une part, d'annuler la décision, en date du 20 juillet 2010, par laquelle le maire du Taillan-Médoc a mis fin à ses fonctions de chef de cabinet à compter du 1er septembre 2010 et l'a mutée à la bibliothèque municipale, ensemble la décision du 3 avril 2013 rejetant son recours gracieux, et d'autre part, d'enjoindre au maire de ladite commune de la réintégrer sur le poste de chef de cabinet ou, à défaut, sur un poste administratif de chef de service à responsabilités équivalentes, et enfin, de condamner la commune du Taillan-Médoc à lui verser la somme de 18 100 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité fautive commise. Mme D...relève appel du jugement du 16 février 2016 par lequel tribunal administratif a annulé la décision du maire du Taillan-Médoc en date 20 juillet 2010, ensemble la décision du 3 avril 2013 rejetant le recours gracieux de Mme D..., et a enjoint au maire du Taillan-Médoc de soumettre la décision de mutation de Mme D...à la commission administrative paritaire compétente.

Sur la fin de non-recevoir opposée en défense :

2. Les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs ne peuvent tendre qu'à l'annulation ou à la réformation du dispositif du jugement attaqué. Par suite, n'est pas recevable, quels que soient les motifs retenus par les premiers juges, l'appel dirigé contre un jugement qui, par son dispositif, fait intégralement droit aux conclusions de la demande qu'avait présentée l'appelant en première instance. L'intérêt à faire appel d'un jugement s'apprécie par rapport à son dispositif et non à ses motifs.

3. En l'espèce, par l'article 1er de son jugement du 16 février 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du 20 juillet 2010 par laquelle le maire du Taillan-Médoc a mis fin aux fonctions de Mme D...en tant que chef de cabinet à compter du 1er septembre 2010 et l'a mutée à la bibliothèque municipale, ainsi que sa décision du 3 avril 2013 rejetant le recours gracieux de l'intéressée. Les premiers juges ont ainsi fait droit aux conclusions principales de la requérante tendant à l'annulation de ces deux décisions. Il s'ensuit que le dispositif de l'article 1er du jugement ayant ainsi donné entièrement satisfaction à MmeD..., les conclusions de la requête d'appel de cette dernière à l'encontre de l'article 1er du jugement, qui sont en réalité dirigées non contre le dispositif d'un tel article mais contre son motif, ne sont pas recevables.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme D...est seulement recevable à contester le jugement du 16 février 2016 en tant que le tribunal administratif de Bordeaux n'a fait droit partiellement à ses conclusions à fin d'injonction et a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions en injonction :

5. Le juge, saisi de conclusions tendant à ce que soient prescrites les mesures d'exécution qu'implique nécessairement l'annulation d'une décision, est tenu d'assurer l'exécution de la chose jugée s'attachant tant au dispositif qu'aux motifs qui en sont le support nécessaire, sans pouvoir retenir un autre motif que celui retenu comme fondement de cette annulation. Eu égard au moyen d'annulation retenu par les premiers juges et tiré d'un vice de procédure, l'exécution du jugement impliquait seulement que la commune du Taillan-Médoc réexamine la situation de l'intéressée suivant une procédure régulière. Il revenait donc au maire de la commune de soumettre la décision de mutation de Mme D...à la commission administrative paritaire compétente, sans qu'il puisse être sérieusement opposé, contrairement à ce que soutient l'intéressée, que l'annulation de la décision de mutation avait, par l'effet de l'annulation contentieuse disparue de l'ordonnancement juridique. Le maire pouvait, sa décision soumise préalablement à la commission administrative paritaire, se prononcer à nouveau sur la situation de Mme D...après une nouvelle instruction. Par suite, le tribunal, en rejetant les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme D...aux fins de réintégration dans ses fonctions antérieures de chef de cabinet, n'a ni entaché son jugement d'irrégularité en ne se prononçant pas, pour définir les mesures d'exécution de son jugement, sur les autres moyens invoqués par l'intéressé au soutien de ses conclusions à fin d'annulation des décisions contestées ni estimé à tort que le motif d'annulation qu'il avait retenu n'impliquait pas nécessairement la réintégration sur ses fonctions précédentes. Ainsi, les conclusions en injonction présentées par Mme D...doivent être rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

6. Mme D...soutient que les décisions du maire de la commune de Taillan-Médoc des 20 juillet 2010 et 1er septembre 2013 lui auraient causés des préjudices à raison de leurs illégalités fautives. Mme D...estime que les décisions ne sont pas motivées par l'intérêt su service mais révèlent en fait une sanction disciplinaire déguisée.

7. Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise. Il résulte de l'instruction que la décision de mutation contestée à conduit à une modification des responsabilités confiées à l'intéressée ainsi qu'à bénéficier d'un régime indemnitaire moindre que dans ses fonctions précédentes. Toutefois, d'une part, MmeD..., qui au demeurant n'avait aucun droit acquis à l'emploi de chef de cabinet, a été reclassé sur un emploi correspondant à son grade et d'autre part, la décision de mutation interne a été motivée par la rupture de confiance du maire à son égard. En effet, les emplois de cabinet, outre qu'ils n'ont pas vocation à être permanents, requièrent un engagement personnel déclaré au service des principes et objectifs guidant l'action de l'autorité politique ainsi qu'une relation de confiance personnelle d'une nature différente de celle résultant de la subordination hiérarchique du fonctionnaire à l'égard de son supérieur. Au regard du caractère intrinsèquement précaire des emplois fonctionnels, le vice de procédure entachant la mutation de Mme D...n'est pas la cause directe et certaine des préjudices que l'intéressée estime avoir subis. Ceux-ci résultent uniquement de la fin anticipée de ses fonctions, auxquelles le maire de la commune était libre de mettre un terme en cas de rupture de confiance. Dès lors les conclusions indemnitaires présentées par Mme D...doivent être rejetées.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondé à soutenir que, par le jugement du 16 février 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions à fin d'injonction et d'indemnisation.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Taillan-Médoc au titre des frais exposés par MmeD..., et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de Mme D...au titre des frais exposés par la commune de Taillan-Médoc et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Mme D...versera à la commune de Taillan-Médoc une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié Mme C...D...et au maire de la commune de Taillan-Médoc.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Gil Cornevaux, président-assesseur,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 avril 2018.

Le rapporteur,

Gil CornevauxLe président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

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No16BX01274


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01274
Date de la décision : 27/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Détachement et mise hors cadre. Mise hors cadre.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Gil CORNEVAUX
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SELARL CAROLINE LAVEISSIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-04-27;16bx01274 ?
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