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10/04/2018 | FRANCE | N°16BX02321

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 10 avril 2018, 16BX02321


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 30 juillet 2013 par laquelle le directeur du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis l'a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire dans l'attente de l'avis du comité médical.

Par un jugement n° 1301722 du 18 mai 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 juillet 2016 et 21 avril 2017, Mme A..

. demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 30 juillet 2013 par laquelle le directeur du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis l'a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire dans l'attente de l'avis du comité médical.

Par un jugement n° 1301722 du 18 mai 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 juillet 2016 et 21 avril 2017, Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 18 mai 2016 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

Elle soutient que :

- la décision est entachée d'erreur de fait ; les accusations inexactes portées à son encontre ont d'ailleurs été invalidées par la décision du Conseil national de l'ordre des médecins du 22 septembre 2015 ;

- elle a seulement refusé des pratiques non thérapeutiques et maltraitantes, notamment l'abus de psychotropes et l'utilisation de pièces d'isolement ; le rapport établi à la suite de la mission d'inspection comporte de multiples erreurs et approximations ; son exercice professionnel correspond à un courant majoritaire reconnu et répond aux recommandations de la haute autorité de la santé concernant la prise en charge des enfants agités ;

- elle a en réalité été exclue en raison de ses orientations thérapeutiques, qui se rattachent à une pédopsychiatrie humaniste et sectorielle et qui divergent des méthodes du centre hospitalier.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2017, le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis, représenté par la SCP Droineau-Cosset-Bacle-Le Lain, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A...d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'avis d'audience a été adressé à l'avocat de MmeA..., de sorte que le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité ;

- les faits sur la base desquels la suspension de l'intéressée a été décidée sont établis par les pièces versées au dossier ; la décision du Conseil national de l'ordre des médecins dont la requérante se prévaut, qui est relative à la suspension liée à l'état pathologique du médecin concerné, n'est pas de nature à remettre en cause leur véracité ;

- la mesure de suspension était justifiée par des impératifs de sécurité des patients et d'intérêt du service ;

- la décision de suspension n'était nullement justifiée par les orientations thérapeutiques de MmeA....

Par ordonnance du 18 juillet 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 18 août 2017 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- les observations de MmeA...,

- et les observations de MeB..., représentant le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis.

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., médecin psychiatre, exerçait en tant que praticien hospitalier à temps partiel au sein du service de pédopsychiatrie du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis depuis le 1er septembre 2008, et était responsable de l'unité de pédopsychiatrie " Grand Bleu " dédiée au suivi d'enfants agités. Par une décision du 30 juillet 2013, le directeur du groupe hospitalier l'a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire dans l'attente de l'avis du comité médical. Mme A...relève appel du jugement du 18 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. Le directeur d'un centre hospitalier, qui exerce, aux termes de l'article L. 6143-7 du code de la santé publique, son autorité sur l'ensemble du personnel de son établissement, peut légalement, lorsque la situation exige qu'une mesure conservatoire soit prise en urgence pour assurer la sécurité des malades et la continuité du service, décider, sous le contrôle du juge, et à condition d'en référer immédiatement aux autorités compétentes pour prononcer la nomination du praticien concerné, de suspendre ses activités cliniques et thérapeutiques au sein du centre hospitalier, sans qu'y fassent obstacle les dispositions des articles R. 6152-77 et R. 6152-252 du code de la santé publique, qui ne prévoient la possibilité de suspendre les intéressés que dans le seul cas où ils font l'objet d'une procédure disciplinaire.

3. Il ressort des pièces du dossier, notamment des échanges de courriers et de courriels entre Mme A...et M.C..., chef du service de pédopsychiatrie, et des courriers établis les 21 novembre 2012, 23 novembre 2012, 14 décembre 2012 et 5 avril 2013 par trois infirmiers de l'unité " Grand Bleu " dont la requérante était responsable ainsi que par l'ensemble des autres médecins psychiatres du service de pédopsychiatrie, que la requérante refusait toute collaboration avec l'équipe soignante, refusant notamment de participer aux réunions de service et de transmettre les dossiers médicaux des patients, refusait d'exercer ses fonctions au sein d'autres unités de pédopsychiatrie, et avait une attitude agressive et dénigrante à l'égard de l'ensemble du personnel soignant. Il ressort de ces mêmes pièces ainsi que des courriers des 8 juin 2012 et 6 juillet 2012 de la directrice de l'institut thérapeutique, éducatif et pédagogique d'Aunis, que Mme A...s'opposait à tout traitement médicamenteux des enfants qu'elle suivait, le cas échéant en interrompant les prescriptions de ses confrères, et s'est abstenue, à plusieurs reprises, de réagir lors d'épisodes violents des enfants de l'unité " Grand Bleu ", mettant ainsi en péril tant la sécurité des patients que celle des intervenants. La matérialité de ces faits, qui n'est au demeurant pas sérieusement discutée par MmeA..., est corroborée par les résultats de l'enquête diligentée les 8 et 9 juillet 2013 par une mission d'inspection de l'agence régionale de santé de Poitou-Charentes, composée de deux médecins inspecteurs de santé publique, d'un psychiatre, d'un pédopsychiatre et d'un cadre de santé, qui a considéré que Mme A... avait adopté une posture professionnelle pouvant mettre en danger la sécurité des enfants et des soignants, notamment en refusant toute prescription médicamenteuse et en s'abstenant de réagir à des comportements violents de certains patients. Il ressort également des pièces que tant les médecins psychiatres du service de pédopsychiatrie du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis que la mission d'inspection de l'Agence régionale de santé de Poitou-Charentes ont imputé la posture professionnelle de Mme A...à son état de santé. Ainsi, à la date du 30 juillet 2013 d'édiction de la mesure attaquée, l'ensemble des éléments qui étaient alors signalés au directeur du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis permettaient de présumer que le comportement de Mme A...menaçait de façon grave et imminente la sécurité des malades et du personnel soignant. La circonstance invoquée par la requérante que, par décision du 22 septembre 2015, le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, a estimé qu'elle ne présentait pas un état pathologique rendant dangereux l'exercice de sa profession et a refusé en conséquence de prononcer sa suspension en application des dispositions de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique, est sans incidence sur la pertinence de l'appréciation portée par le directeur dudit groupe hospitalier à la date du 30 juillet 2013 quant à la nécessité de suspendre en urgence, à titre provisoire et conservatoire, les activités cliniques et thérapeutiques de Mme A...dans l'intérêt du service.

4. Enfin, si Mme A...fait valoir qu'elle a été suspendue en raison de ses orientations thérapeutiques, qui divergent des méthodes suivies par le service de pédopsychiatrie du groupe hospitalier, il ne ressort nullement des pièces versées au dossier que sa suspension aurait eu d'autre finalité que celle d'assurer la sécurité des malades et du personnel soignant. Le détournement de pouvoir allégué n'est ainsi pas établi.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il n' y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et au groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 avril 2018.

Le rapporteur,

Marie-Pierre BEUVE DUPUYLe président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 16BX02321


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02321
Date de la décision : 10/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Dispositions propres aux personnels hospitaliers - Personnel médical.

Santé publique - Établissements publics de santé - Organisation.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP DROUINEAU COSSET BACLE LE LAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-04-10;16bx02321 ?
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