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19/03/2018 | FRANCE | N°17BX03894

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 19 mars 2018, 17BX03894


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2017 par lequel le préfet de la Charente lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1704493 du 18 octobre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a an

nulé les deux décisions portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et i...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2017 par lequel le préfet de la Charente lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1704493 du 18 octobre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé les deux décisions portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2017, M. D... E...C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux du 18 octobre 2017 en tant qu'il a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

2°) d'annuler la décision portant obligation de quitter le territoire français susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a indiqué le tribunal, la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée au regard de la loi du 11 juillet 1979 et de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est lacunaire et stéréotypée, ce qui démontre qu'il n'a pas été procédé à un examen particulier de sa situation ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il réside en France depuis près de quatre ans, qu'il est en couple avec une ressortissante française depuis le mois de décembre 2016 avec qui il envisage de se marier et réside, depuis mai 2017, avec sa dernière fille de cinq ans à Angoulême, où vivent par ailleurs sa soeur et ses deux neveux, qu'il côtoie quotidiennement.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 janvier 2018, le préfet de la Charente conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, reprise dans le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Axel Basset a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant guinéen né le 28 décembre 1988 à Conakry (Guinée) est entré irrégulièrement en France en mars 2014, selon ses propres dires, afin de solliciter l'asile. Ayant vu sa demande rejetée par décision de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 14 janvier 2016, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile le 2 novembre 2016, l'intéressé a sollicité, par courrier du 14 novembre 2016, la régularisation de sa situation administrative au titre de la vie privée et familiale, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par décision du 8 décembre 2016, le préfet de Seine et Marne a rejeté sa demande. A la suite de son interpellation par les services de police pour conduite en état d'ivresse, M. C...a fait l'objet d'un arrêté du préfet de la Charente en date du 15 octobre 2017 portant obligation de quitter le territoire français, refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Par un jugement du 18 octobre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé les deux décisions portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans et rejeté le surplus de sa demande. M. C...relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté du préfet de la Charente du 15 octobre 2017.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. En premier lieu, M. C...reprend en appel les moyens, déjà soulevés en première instance, et tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée au regard des dispositions des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979, désormais reprises dans le code des relations entre le public et l'administration, ce qui ne permet pas de démontrer que le préfet de la Charente a bien procédé à un examen particulier et attentif de son dossier. Il ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ces deux moyens par adoption du motif pertinent retenu par le premier juge dans le jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Pour soutenir que la mesure d'éloignement prise à son encontre a méconnu les stipulations précitées, M. C...se prévaut, comme il l'a d'ailleurs déjà fait devant le tribunal, de ce qu'il réside en France depuis près de quatre ans, qu'il entretient une relation affective avec une ressortissante française depuis le mois de décembre 2016 avec qui il envisage de se marier et avec qui il réside, depuis le mois de mai 2017, en compagnie de sa dernière fille âgée de cinq ans, à Angoulême, où vivent par ailleurs sa soeur et ses deux neveux, qu'il côtoie quotidiennement. Toutefois, et ainsi qu'il a déjà été dit au point 1, l'intéressé est entré de manière irrégulière sur le territoire français et s'y est maintenu tout aussi irrégulièrement après que le préfet de Seine et Marne ait, par décision du 8 décembre 2016, rejeté sa demande de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". En outre, M. C..., qui est célibataire et sans enfant, ne démontre pas avoir rompu tout lien avec son pays d'origine, où il a vécu pendant 26 ans, ni, davantage, l'intensité de la relation qu'il allègue entretenir avec Mme A...et sa fille, qu'il reconnaît lui-même n'avoir rencontrées qu'en décembre 2016, soit dix mois avant l'édiction de l'arrêté du préfet de la Charente en date du 15 octobre 2017. Interpellé en état d'ivresse au volant d'un véhicule par les services de police et ne justifiant d'aucun emploi sur le territoire français, M. C...ne démontre pas sa volonté d'intégration républicaine. Dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de séjour en France de M.C..., le préfet de la Charente n'a pas, en édictant à son encontre une obligation de quitter le territoire français, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur les autres conclusions :

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté le surplus de sa demande. Par suite, ses conclusions tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E...C...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Charente.

Délibéré après l'audience du 16 février 2018, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Gil Cornevaux, président assesseur,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mars 2018

Le rapporteur,

Axel BassetLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

N° 17BX03894 - 2 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX03894
Date de la décision : 19/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Axel BASSET
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP ASTIE-BARAKE-POULET-MEYNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-03-19;17bx03894 ?
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