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15/02/2018 | FRANCE | N°17BX03470

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 15 février 2018, 17BX03470


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté

du 28 décembre 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1701789 du 7 juillet 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un

e requête, enregistrée le 6 novembre 2017, M.B..., représenté par

MeA..., demande à la cour :

1°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté

du 28 décembre 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1701789 du 7 juillet 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 novembre 2017, M.B..., représenté par

MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juillet 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde du 28 décembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour temporaire, l'autorisant à travailler, dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, l'autorisation à travailler.

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi

du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- le préfet a commis une erreur de droit dans l'application de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur de fait en considérant qu'il ne disposait pas de promesse d'embauche ;

- la décision susvisée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la mesure d'éloignement :

- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. D...B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 octobre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la circulation et le séjour des personnes ;

- l'accord du 23 septembre 2006 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, modifié ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant sénégalais né le 24 février 1990, est entré en France

le 4 septembre 2009 et a obtenu la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, successivement renouvelé jusqu'au 14 septembre 2015. Le 28 septembre 2015, il a demandé son changement de statut d'étudiant à salarié sur le fondement des dispositions du 1° de

l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'intéressé n'étant pas titulaire d'un contrat de travail en cours de validité, le préfet a pris à son encontre, le 17 mai 2016, une décision de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français. Le tribunal administratif de Bordeaux a, par jugement du 16 novembre 2016, annulé cet arrêté et enjoint au préfet de réexaminer la demande d'admission au séjour de M.B.... Par un nouvel arrêté du 28 décembre 2016, le préfet de la Gironde a refusé de délivrer à M. B...un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai. M. B...relève appel du jugement du 7 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 29 juillet 2016 pris dans son ensemble :

2. En premier lieu, l'appelant reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance tiré du défaut de motivation de l'arrêté litigieux. Toutefois, ce dernier mentionne, avec une précision suffisante pour permettre à M. B...d'en comprendre les motifs et dépourvue de caractère stéréotypé, les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des différentes décisions qu'il comprend. Par suite, ce moyen doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni des autres pièces du dossier que le préfet aurait omis de procéder à un examen sérieux et particulier de la situation personnelle de M. B...avant d'édicter les décisions litigieuses.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants sénégalais, s'appliquent les stipulations de la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relative à la circulation et au séjour des personnes ainsi que celles de l'accord du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires, telles que modifiées par un avenant signé le 25 février 2008. Aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord

du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ".

5. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2.(...) ". Les stipulations du paragraphe 42 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code.

6. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant dans la liste annexée à l'arrêté interministériel du 18 janvier 2008, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels dans l'arrêté du 18 janvier 2008, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

7. D'une part, M. B...est célibataire et sans charge de famille. La durée de sa présence en France est consécutive au renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant qui ne lui donne pas vocation à rester durablement en France à l'issue de ses études. Si l'appelant fait valoir qu'il a une soeur et un frère résidant régulièrement en France, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Sénégal où résident ses parents et d'autres membres de sa fratrie. Dans ces conditions, M. B...n'établit pas que sa situation relèverait de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels justifiant qu'il soit admis au séjour à titre exceptionnel au titre de sa vie privée et familiale. D'autre part, si M. B...se prévaut d'une promesse d'embauche à durée indéterminée à temps complet en qualité de préparateur par la SARL MOMH en date

du 15 décembre 2016, antérieure à la décision litigieuse bien que produite à l'appui de son recours gracieux ultérieur, cette seule circonstance ne saurait, par elle-même, attester de l'existence de " motifs exceptionnels " au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La circonstance que l'intéressé a exercé des métiers, notamment dans l'hôtellerie-restauration, en parallèle de ses études en langues étrangères appliquées option tourisme, ne peut pas davantage suffire à constituer un motif exceptionnel justifiant son admission au séjour au titre d'une activité salariée. Par suite, le préfet a pu, sans commettre d'erreur de fait, d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation, refuser de délivrer à M. B...un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En second et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Ainsi qu'il a été dit, M. B... est célibataire et sans charge de famille. La durée de sa présence en France est consécutive au renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant qui ne lui donne pas vocation à rester durablement en France à l'issue de ses études. Si une soeur et un frère de l'appelant résident en France, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales au Sénégal où résident ses parents et d'autres membres de sa fratrie. Les seules circonstances qu'il est diplômé et détiendrait une promesse d'embauche ne peuvent suffire à établir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et ainsi méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'appelant n'est pas plus fondé à soutenir que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

10. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

11. Il résulte de ce qui a été dit au point 9 ci-dessus que le moyen tiré de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée et familiale de M.B..., garanti par

l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté. Pour les mêmes motifs, la mesure d'éloignement n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de M.B....

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

12. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'éloignement à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 7 juillet 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter, d'une part les conclusions présentées par l'appelant aux fins d'injonction et d'astreinte, d'autre part, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., au ministre de l'intérieur et à MeA....

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2018 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 février 2018.

Le rapporteur,

Didier C...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX03470


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX03470
Date de la décision : 15/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : REIX

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-02-15;17bx03470 ?
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