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06/02/2018 | FRANCE | N°17BX03349

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 06 février 2018, 17BX03349


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 2 mai 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour un délai d'un an.

Par un jugement n° 1700738 du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté, a enjoin

t au préfet de la Haute-Vienne de délivrer à Mme B...un titre de séjour portant la m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 2 mai 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour un délai d'un an.

Par un jugement n° 1700738 du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de la Haute-Vienne de délivrer à Mme B...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 octobre 2017, le préfet de la Haute-Vienne demande à la cour d'annuler ce jugement du 12 octobre 2017 du tribunal administratif de Limoges.

Il soutient que contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, son refus de titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'au vu des éléments connus par l'administration sur la situation générale du système de soins en République démocratique du Congo, il apparaît qu'il existe une offre de soins pour les pathologies psychiatriques, adaptée à l'état de santé de MmeB....

Par mémoire enregistré le 18 décembre 2017, MmeB..., représentée par Me Duponteil, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée - vie familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 75 euros par jour de retard et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivé ;

- cette décision de refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle reprend à l'encontre de la mesure portant obligation de quitter le territoire français les moyens invoqués à l'encontre du refus de titre de séjour ; cette mesure est également entachée de méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi n'est pas suffisamment motivée ;

- cette mesure est également entachée de méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'interdiction de retour n'est pas motivée ;

- cette décision d'interdiction de retour est disproportionnée.

Par ordonnance du 18 décembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 2 janvier 2018 à 12h00.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 janvier 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Elisabeth Jayat a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., ressortissante de la République démocratique du Congo, née le 26 novembre 1989 à Kinshasa (République Démocratique du Congo), est entrée irrégulièrement en France le 29 décembre 2011. Sa demande d'admission au bénéfice de l'asile a été rejetée par décision du 20 juillet 2012 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 19 septembre 2013. Entre le 11 juillet 2013 et le 6 juin 2016, elle a été bénéficiaire de titres de séjour à raison de son état de santé. Par arrêté du 2 mai 2017, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi. Le préfet de la Haute-Vienne relève appel du jugement du 12 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer à Mme B... un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat ".

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle.

4. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. Par un avis rendu le 21 juillet 2016, le médecin de l'agence régionale de santé d'Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes a estimé, d'une part, que l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et, d'autre part, qu'il n'existe pas dans son pays d'origine un traitement approprié pour cette prise en charge. Toutefois, le préfet de la Haute-Vienne se prévaut d'un courriel détaillé du docteur Baume, médecin à la polyclinique de Kinshasa, qui indique que tous les médicaments usuels sont disponibles sur place ou au moins sur commande ainsi que d'un courriel émanant du médecin référent de l'ambassade de France en République Démocratique du Congo qui fait état de ce que la pathologie psychiatrique est correctement prise en charge et que les médicaments inscrits à la pharmacopée belge et française ou leurs équivalents sont disponibles dans ce pays. Il verse également au dossier une liste nationale des médicaments essentiels, dans sa version révisée en mars 2010, disponibles dans le pays d'origine de la requérante qui confirme la disponibilité dans ce pays de médicaments de types anxiolytique, antidépresseur et sédatif, de la même classe thérapeutique que ceux prescrits à MmeB.... Aucune pièce du dossier ne permet de considérer que cette liste aurait été modifiée, notamment en ce qui concerne ces trois types de médicaments, entre mars 2010 et le 2 mai 2017, date de la décision contestée. MmeB..., qui ne fait état d'aucun élément permettant d'estimer que les médicaments disponibles ne seraient pas adaptés au traitement de sa pathologie ou que des contrindications feraient obstacle à ce qu'ils lui soient prescrits, ne remet pas en cause les éléments ainsi apportés par l'administration. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Vienne doit être regardé comme apportant des éléments suffisants pour considérer que le traitement nécessaire à l'état de santé de Mme B...est disponible en République Démocratique du Congo. Par ailleurs, au regard des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction applicable en l'espèce dès lors que la demande de titre de séjour de Mme B...est antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016, la requérante ne peut utilement soutenir qu'elle ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Le préfet de la Haute-Vienne est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Limoges s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler son arrêté du 2 mai 2017.

6. Il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par MmeB....

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

7. En premier lieu, la décision contestée vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment ses articles 3 et 8 ainsi que les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle mentionne également les principaux éléments caractérisant la situation de Mme B...et notamment l'avis favorable du médecin de l'agence régionale de santé du 21 juillet 2016 ainsi les éléments sur lesquels le préfet de la Haute-Vienne s'est appuyé pour apporter la preuve contraire. Dans ces conditions, la décision contestée est suffisamment motivée en droit et en fait. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". En application de ces stipulations, il appartient à l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France d'apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

9. Pour soutenir que la décision contestée a été prise en méconnaissance des stipulations précitées, Mme B...se prévaut de sa présence en France depuis 2011, de ce que sa vie privée se trouve sur le territoire français et de ce qu'elle justifie avoir travaillé régulièrement en dépit de ses difficultés de santé. S'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a fait des efforts d'intégration professionnelle en travaillant notamment en qualité d'ouvrier agricole saisonnier du 24 août 2015 au 18 septembre 2015, d'employée de vestiaire au sein de l'association " Secours populaire français " du 28 octobre 2015 au 13 mars 2016 et en ayant effectué un stage de formation en hôtellerie restauration financé par la région Limousin du 24 mars 2014 au 30 juin 2014, elle n'établit pas avoir noué des liens d'une particulière intensité et stabilité sur le territoire français. Si elle établit que sa fille est décédée en novembre 2016, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dépourvue d'attaches privées ou familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-deux ans. Si elle se prévaut, pour la première fois en appel, de sa relation avec un concubin bénéficiant d'un titre de séjour, le seul document qu'elle produit à l'appui de ses affirmations ne corrobore l'existence d'une vie commune avec cette personne qu'à compter de la fin du mois de février 2016, soit un peu plus de deux mois avant la décision contestée. Elle ne peut donc être regardée comme justifiant, à la date de cette décision, d'une vie commune suffisamment ancienne et stable. Dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'elle poursuit. Dès lors, elle n'a pas été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, la décision vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment ses articles 3 et 8 ainsi que les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, la décision contestée est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

11. En second lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 5 du présent arrêt, la décision contestée n'a pas été prise, en tout état de cause, en violation des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. En troisième lieu, il ressort de ce qui a été dit au point 9 du présent arrêt que la décision contestée n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

13. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Si Mme B...soutient qu'en cas de retour dans son pays d'origine, sa vie serait manifestement en danger, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. En tout état de cause, la décision d'éloignement n'implique pas, par elle-même, un retour dans le pays d'origine de l'intéressée.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

14. En premier lieu, la décision vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne que Mme B...ne démontre pas être exposée à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, la décision contestée qui n'avait pas à mentionner l'ensemble des éléments relatifs à la situation de MmeB..., est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

15. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Si Mme B...soutient qu'en cas de retour, sa vie serait manifestement en danger, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

Sur la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :

16. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. [...] La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. "

17. Il ressort des pièces du dossier que Mme B...est entrée en France en 2011, qu'elle ne présente pas une menace pour l'ordre public et qu'elle n'a fait l'objet d'aucune précédente mesure d'éloignement. Dans ces conditions, en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, le préfet de la Haute-Vienne a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

18. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Vienne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Limoges a annulé ses décisions du 2 mai 2017 refusant le renouvellement du titre de séjour de Mme B..., l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. Il n'est, en revanche, pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal, par ce même jugement, a annulé sa décision du 2 mai 2017 portant interdiction de retour d'une durée d'un an.

Sur l'injonction :

19. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".

20. La seule annulation de la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, n'implique pas qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Vienne de délivrer un titre de séjour à MmeB.... Par suite, le préfet est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il prononce une injonction en ce sens et les conclusions d'appel de Mme B...en ce sens doivent être rejetées.

Sur l'application des dispositions combinées de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à Me Duponteil, avocat de Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°1700738 du 12 octobre 2017 du tribunal administratif de Limoges est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de Mme B...à fin d'annulation des décisions du préfet de la Haute-Vienne du 2 mai 2017 portant refus de renouvellement de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi, ainsi que sur ses conclusions à fin d'injonction.

Article 2 : L'Etat versera à Me Duponteil, avocat de MmeB..., la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., à Me Duponteil et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Pierre Bentolila, président-assesseur,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 février 2018.

Le président-assesseur,

Pierre BentolilaLe président-rapporteur,

Elisabeth Jayat

Le greffier,

Evelyne Gay-Boissières

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

8

N° 17BX03349


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX03349
Date de la décision : 06/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : DUPONTEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-02-06;17bx03349 ?
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