Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 50 000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral résultant de la perte de la valeur de son bien et de la destruction de sa maison à la suite de la tempête Xynthia.
Par un jugement n° 1202665 du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 mai 2015, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 mars 2015 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 50 000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en appel et la même somme au titre des frais exposés en première instance sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal commet une erreur de fait en ne reconnaissant pas la présence d'une habitation bâtie sur son terrain ;
- il a subi un préjudice lié à la privation de son droit de propriété du fait de la démolition par l'Etat du bâtiment se trouvant sur la parcelle ;
- l'Etat a manqué à l'obligation qui lui incombait aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement et a de ce fait engagé sa responsabilité pour carence fautive dans la gestion des risques naturels auxquels était exposé son bien ; à la date de la tempête Xynthia, soit quinze années après l'inscription dans la loi de l'obligation d'élaborer des plans de prévention des risques naturels prévisibles, et en dépit de la parfaite connaissance de ces risques dans la zone concernée, aucun PPRN n'avait été élaboré pour le territoire et le littoral de la commune d'Aytré ; à défaut de faire adopter un PPRN, l'Etat avait, en outre, la possibilité d'agir rapidement en adoptant d'autres mesures telles que le zonage établi le 8 avril 2010 ;
- le préfet a commis une erreur de droit en lui refusant l'indemnisation qu'il réclame ; la parcelle cadastrée section AY n°0043 qu'il possède à Aytré étant bâtie, elle doit être rachetée par l'Etat ; aucune disposition légale, ni réglementaire ne prévoit de distinction entre les terrains bâtis et les terrains nus dans le cadre du rachat de biens immobiliers par l'Etat au moyen du fonds prévu par l'article L. 561-3 du code de l'environnement ;
- la différence de traitement opérée par l'Etat entre les propriétaires de terrain sur lesquels se trouvent selon lui une habitation et ceux où l'immeuble n'est pas considéré comme tel constitue une rupture d'égalité devant les charges publiques qui a causé un préjudice anormal et spécial ; l'instauration d'une telle différence non justifiée, porte atteinte au principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques ; il n'existe aucun motif d'intérêt général à une telle différence de traitement ;
- cette rupture d'égalité devant les charges publiques lui cause un préjudice anormal puisqu'il a perdu du jour au lendemain la valeur du terrain litigieux soit 1 371,90 euros (prix du terrain en 1971) ainsi que les frais de notaire et le montant des travaux de construction de la maison d'habitation ; ce préjudice est spécial puisqu'il est le seul propriétaire de biens situés en zone noire n'ayant pas reçu d'offre de rachat ; certains propriétaires de terrains bâtis ont reçu des offres de rachat alors que les constructions concernées n'étaient pas forcément des habitations ; certains autres propriétaires de biens qui ne sont situés ni en zone jaune, ni en zone noire ont vu leur maison rachetée par l'Etat ;
- son préjudice matériel doit être évalué à la somme de 30 000 euros pour la parcelle bâtie au prix du marché avant la tempête suivant les évaluations réalisées par une agence immobilière au mois d'avril 2010 quelques jours seulement avant la tempête ; il sera fait une juste appréciation de son préjudice moral par l'allocation d'une somme de 20 000 euros ;
- il existe un lien de causalité entre la faute de l'Etat et les préjudices qu'il a subis.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2015, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que le moyen tiré de la privation de son droit de propriété du fait de la démolition du bâtiment se trouvant sur la parcelle est irrecevable et en tout état de cause manque en fait et que les autres moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 14 décembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 24 janvier 2017 à 12 heures.
Un courriel présenté par M. C...a été enregistré le 24 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue ;
- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...a fait l'acquisition le 3 mars 1971 d'un terrain situé route de la plage à Aytré, classé en zone de solidarité à la suite de la tempête Xynthia survenue en février 2010 au cours de laquelle il a été submergé. Le 10 juillet 2012, M. C... a saisi le préfet de la Charente-Maritime d'une demande de rachat, à hauteur de 30 000 euros, du bien immobilier édifié sur ce terrain et d'une demande d'indemnité de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de la survenance de la tempête. Par lettre du 2 août 2012, le préfet de la Charente-Maritime a rejeté ces demandes. M. C...relève appel du jugement du 19 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.
Sur la responsabilité pour faute de l'Etat :
2. En premier lieu, la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur et que ses prétentions demeurent.dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle
3. Le préjudice qui résulterait selon M. C...de la privation de son droit de propriété du fait de la démolition par l'Etat des bâtiments présents sur le terrain litigieux se rattache à un fait générateur différent de ceux invoqués en première instance tirés de la méconnaissance des dispositions du code de l'environnement et de la rupture d'égalité devant les charges publiques. Les conclusions tendant à la réparation de ce préjudice sont dès lors irrecevables.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction en vigueur à la date à laquelle le requérant a fait l'acquisition de son terrain : " I-L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, dites " zones de danger ", en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones, dites " zones de précaution ", qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° (dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle )". Aux termes du 1er alinéa de l'article L. 562-4 du même code : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme.".
5. Il résulte de l'instruction que le préfet de la Charente-Maritime avait par lettre du 23 octobre 2001, diffusé aux maires du département l'atlas départemental des risques littoraux, élaboré avant que ne survienne l'ouragan du 27 décembre 1999. A cet atlas était annexé un dossier intitulé " Eléments de mémoire sur la tempête du 27 décembre 1999 " comportant notamment une cartographie sur laquelle figure les hauteurs d'eau relevées dans le secteur de la route de la plage. Ladite lettre du 23 octobre 2001 mentionnait notamment " (...) les connaissances actuelles de ces risques (érosion et submersion marines) doivent être pris en compte dans vos politiques d'aménagement et l'ensemble des autorisations d'occupation des sols (...) et des différentes autorisations (...) ". Les documents annexés à cette lettre étaient mis à la disposition du public sur le site internet de la direction départementale de l'équipement. En outre le préfet a, par arrêté 05-3162 du 29 septembre 2005 relatif à l'information du public sur les risques majeurs, notamment le risque " tempête " auxquels il est susceptible d'être exposé, puis par un arrêté du 7 janvier 2008, publié un dossier départemental sur les risques majeurs (DDRM). Dans ces conditions le préfet doit être regardé comme ayant, avant la survenue de la tempête Xynthia, pris les mesures nécessaires à l'information des élus locaux et du public quant au risque " tempête " auquel la commune d'Aytré était susceptible d'être exposée. Par suite, en n'ayant pas prescrit l'élaboration d'un plan de prévention des risques littoraux sur le territoire de cette commune avant la survenue de la tempête Xynthia, le préfet n'a pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Au demeurant, M. C...propriétaire de la parcelle de terrain concernée depuis 1971 n'indique pas la date d'édification des bâtiments qui y sont implantés et ne saurait se prévaloir d'aucun lien entre la carence alléguée de l'Etat dans la réalisation d'un plan de prévention des risques naturels (PPRN) sur le territoire de la commune d'Aytré et les différents chefs de préjudice allégués.
6. Aux termes de l'article L. 561-1 du code de l'environnement, dans sa version applicable le 2 août 2012 date de la décision par laquelle le préfet de la Charente-Maritime a fait part au requérant du refus de l'Etat de procéder à l'acquisition de son terrain classé en zone de solidarité à la suite de la tempête Xynthia : " Sans préjudice des dispositions prévues au 5° de l'article L. 2212-2 et à l'article L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, lorsqu'un risque prévisible (...) de submersion marine menace gravement des vies humaines, l'Etat peut déclarer d'utilité publique l'expropriation par lui-même, les communes ou leurs groupements, des biens exposés à ce risque, dans les conditions prévues par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et sous réserve que les moyens de sauvegarde et de protection des populations s'avèrent plus coûteux que les indemnités d'expropriation.(dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle) ". L'article L. 561-3 du même code, dans sa version alors en vigueur, dispose : " I. Le fonds de prévention des risques naturels majeurs est chargé de financer, dans la limite de ses ressources, les indemnités allouées en vertu des dispositions de l'article L. 561-1 ainsi que les dépenses liées à la limitation de l'accès et à la démolition éventuelle des biens exposés afin d'en empêcher toute occupation future. En outre, il finance, dans les mêmes limites, les dépenses de prévention liées aux évacuations temporaires et au relogement des personnes exposées. / Il peut également, sur décision préalable de l'Etat et selon des modalités et conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, contribuer au financement des mesures de prévention intéressant des biens couverts par un contrat d'assurance mentionné au premier alinéa de l'article L. 125-1 du code des assurances. Les mesures de prévention susceptibles de faire l'objet de ce financement sont : / 1° L'acquisition amiable par une commune, un groupement de communes ou l'Etat d'un bien exposé à un risque prévisible de mouvements de terrain ou d'affaissements de terrain dus à une cavité souterraine ou à une marnière, d'avalanches, de crues torrentielles ou à montée rapide, de submersion marine menaçant gravement des vies humaines ainsi que les mesures nécessaires pour en limiter l'accès et en empêcher toute occupation, sous réserve que le prix de l'acquisition amiable s'avère moins coûteux que les moyens de sauvegarde et de protection des populations ; / 2° L'acquisition amiable, par une commune, un groupement de communes ou l'Etat, de biens à usage d'habitation ou de biens utilisés dans le cadre d'activités professionnelles relevant de personnes physiques ou morales employant moins de vingt salariés et notamment d'entreprises industrielles, commerciales, agricoles ou artisanales et de leurs terrains d'assiette ainsi que les mesures nécessaires pour en limiter l'accès et en empêcher toute occupation, sous réserve que les terrains acquis soient rendus inconstructibles dans un délai de trois ans, lorsque ces biens ont été sinistrés à plus de la moitié de leur valeur et indemnisés en application de l'article L. 125-2 du code des assurances.(dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle) ". Ces dispositions permettent l'expropriation de biens exposés à un risque de submersion marine dont résulte une menace grave pour les vies humaines, et sur le fondement desquelles les personnes qui s'estiment exposées à un tel risque peuvent demander à l'Etat d'acquérir leurs biens.
7. Si M. C...soutient qu'il a construit une " petite maison " sur la parcelle en litige pour " séjourner ponctuellement " et que le préfet a commis une faute en refusant le rachat de son bien immobilier au moyen du fonds prévu par l'article L. 561-3 du code de l'environnement, il résulte toutefois de l'instruction que la construction édifiée sur le terrain en litige est constituée de deux hangars légers et non d'une maison d'habitation. Ni la facture EDF ou l'acquittement d'une taxe sur les propriétés bâties, ni les attestations de voisins qui au demeurant indiquent que M. C...: " venait dans son abri Martin passer quelques jours pour réparer ou entretenir son véhicule ", ne contredisent les affirmations du préfet qui a produit en première instance une photo de la construction montrant deux bâtiments en tôle ondulée sans fenêtre, qui ne peuvent être regardés comme une maison à usage d'habitation, M. C...ayant lui-même évoqué l'existence d'un garage sur sa parcelle. Il n'est d'ailleurs pas établi que ces constructions auraient fait l'objet d'une quelconque autorisation d'urbanisme. Le préfet a donc pu légalement refuser de procéder à l'acquisition amiable de son bien aux motifs que compte tenu de ses caractéristiques, il n'était pas exposé à une menace grave pour les vies humaines et que l'élaboration d'un plan de prévention des risques littoraux et le classement du terrain dans une zone de danger ou de prescription étaient de nature à assurer suffisamment la sauvegarde et la protection des populations pour un coût moindre que l'acquisition de la propriété par l'Etat. En outre, il n'est nullement établi que le bien litigieux aurait fait l'objet d'un contrat d'assurances " multirisques habitation " prévu à l'article L. 561-3 du code de l'environnement permettant une acquisition amiable financée par le fonds de prévention des risques naturels majeurs. Dans ces conditions, M. C...n'est pas fondé à demander une indemnisation à l'Etat au motif qu'il aurait commis une faute dans l'application des dispositions précitées des articles L. 561-1 et L. 561-3 du code de l'environnement en refusant de lui proposer une acquisition amiable financée par le fonds de prévention des risques naturels majeurs.
8. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que des situations différentes soient réglées de façon différente ni à ce qu'il soit dérogé à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un et l'autre cas, en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier.
9. Le dispositif institué par l'article L. 561-1 précité du code de l'environnement, qui n'ouvre qu'une faculté à l'Etat, est subordonné à la condition que les moyens de sauvegarde et de protection des populations, comprenant les travaux, équipements et aménagements susceptibles de supprimer ou de réduire le risque ou de permettre l'alerte et l'évacuation ou à la mise à l'abri de la population menacée ainsi que les mesures de police de nature à sauvegarder ou à protéger la population ou à éviter son exposition au risque, s'avèrent plus coûteux que les indemnités à verser pour sa mise en oeuvre. L'appréciation des mesures de sauvegarde ou de protection de nature à faire obstacle à l'acquisition par l'Etat peut ainsi différer notamment selon qu'il s'agit de terrains bâtis, dont la vocation est de permettre une occupation humaine permanente, ou de terrains dont l'occupation ou la fréquentation peut faire l'objet de restrictions en rapport avec leur usage et avec le risque auquel ils sont exposés.
10. La différence de traitement entre la situation du terrain de M.C..., sur lequel sont implantés deux hangars à vocation de garage, qui n'a pas vocation à permettre une occupation humaine permanente et d'autres terrains, est en rapport direct avec l'appréciation des mesures de sauvegarde ou de protection des populations et des biens exposés au risque de submersion marine. Il ne résulte pas de l'instruction une différence de traitement manifestement disproportionnée eu égard à l'absence d'exposition permanente de personnes au risque de submersion. Par suite, l'absence d'acquisition de la propriété de M. C...n'est pas de nature à engager la responsabilité de l'Etat à raison d'une violation fautive du principe d'égalité.
Sur la responsabilité sans faute de l'Etat :
11. La détermination des " zones noires " devenues " zones de solidarité ", qui avait pour objet de délimiter les secteurs de dangers extrêmes où les risques pouvaient être mortels eu égard à l'impossibilité d'en assurer la protection par l'aménagement des bâtiments exposés ou l'établissement d'espaces de repli accessibles par des chemins hors d'eau, a eu pour seul effet de désigner les biens que l'Etat acceptait d'acquérir à l'amiable, selon une évaluation du service des domaines, dans le cadre du dispositif exceptionnel de solidarité nationale décidé par le Gouvernement et rappelé par le préfet de la Charente-Maritime dans son communiqué du 15 avril 2010. Toutefois, l'établissement de ces cartographies, qui est dépourvu de tout effet juridique, n'affecte en aucune manière le droit de propriété, en particulier n'entraîne aucune dépossession, et n'emporte par lui-même ni interdiction d'habiter, ni obligation de démolir les habitations. M. C...qui peut user et disposer de son bien ne peut dès lors être regardé comme supportant un préjudice grave résultant de ces actes.
12. M. C...n'établit pas l'existence d'un préjudice anormal conduisant à une rupture de l'égalité devant les charges publiques, et ouvrant droit à réparation sur ce fondement dès lors que le terrain en cause est situé à proximité immédiate de l'océan, et était par conséquent soumis à un risque d'inondation. Ainsi qu'il vient d'être dit en outre, M. C...n'a pas perdu l'usage de son terrain. La spécialité du préjudice allégué n'est pas plus établie, dès lors que la tempête Xynthia a frappé les propriétaires de nombreuses communes du littoral de la Charente-Maritime et de la Vendée, menacés de la même manière par le risque de submersion marine, en tant qu'habitants de ces zones. Par suite, le moyen tiré de ce que le refus de rachat du terrain par l'État conduit à une rupture de l'égalité devant les charges publiques doit être écarté.
13. Les préjudices propres allégués par M. C...ne présentent aucun lien direct avec l'offre d'acquisition des biens immobiliers formulée par l'État, mais résultent des conséquences de la tempête Xynthia. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, l'ensemble des nombreuses victimes de cette tempête a subi, à des degrés divers, des préjudices de sorte que le requérant ne peut se prévaloir d'un préjudice spécial, justifiant l'engagement de la responsabilité sans faute de l'État.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. C...demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
Mme Christine Mège, président-assesseur,
Mme Florence Madelaigue, rapporteur,
Lu en audience publique, le 19 décembre 2017.
Le rapporteur,
Florence Madelaigue
Le président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire. en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX01661