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28/11/2017 | FRANCE | N°15BX00491

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 28 novembre 2017, 15BX00491


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Aquitaine santé a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 11 juillet 2012 par laquelle la directrice générale de l'agence régionale de santé (ARS) d'Aquitaine a prononcé à son encontre une sanction financière de 24 062 euros.

Par un jugement n° 1203279 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2015, la SAS Aquitaine santé, représe

ntée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeau...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Aquitaine santé a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 11 juillet 2012 par laquelle la directrice générale de l'agence régionale de santé (ARS) d'Aquitaine a prononcé à son encontre une sanction financière de 24 062 euros.

Par un jugement n° 1203279 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2015, la SAS Aquitaine santé, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 décembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 11 juillet 2012 par laquelle la directrice générale de l'agence régionale de santé (ARS) d'Aquitaine a prononcé à son encontre une sanction financière de 24 062 euros, subsidiairement, de réformer la décision et de fixer la sanction à zéro euro ;

3°) d'ordonner le remboursement de la somme en cause par la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde à laquelle elle a été versée ;

4°) mettre à la charge de l'ARS la somme de 2 500 euros en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision litigieuse du 11 juillet 2012 est insuffisamment motivée, notamment en fait ;

- elle est également entachée d'une erreur de droit ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'établissement n'a commis aucun manquement aux règles de facturation ;

- le montant de la sanction financière est disproportionné au regard de la réalité de la prise en charge des patients et de la divergence d'analyse entre les médecins de l'établissement et les médecins contrôleurs.

Par ordonnance du 29 juin 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 8 septembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 19 février 2009 relatif à la classification et à la prise en charge des prestations d'hospitalisation pour les activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie et pris en application de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Salvi,

- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La polyclinique Jean Vilar à Bruges (Gironde), gérée par la SAS Aquitaine santé, a fait l'objet, du 13 au 24 décembre 2010, d'un contrôle externe de la tarification à l'activité portant notamment sur le champ d'activité correspondant au groupe homogène de malade " GHM 08 M 341 " pour la période allant du 1er avril au 31 décembre 2009. À la suite de ce contrôle et après avoir informé l'établissement de santé, par lettre du 6 mars 2012, qu'elle envisageait de prendre à son encontre une sanction financière, la directrice générale de l'agence régionale de santé (ARS) d'Aquitaine a, sur avis de la commission de contrôle rendu le

5 juin 2012, prononcé une sanction d'un montant de 24 062 euros à l'encontre de l'établissement, par une décision du 11 juillet 2012. La SAS Aquitaine santé relève appel du jugement du 16 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ainsi qu'à la restitution de la somme en cause.

2. Aux termes de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les établissements de santé sont passibles, après qu'ils ont été mis en demeure de présenter leurs observations, d'une sanction financière en cas de manquement aux règles de facturation fixées en application des dispositions de l'article L. 162-22-6, d'erreur de codage ou d'absence de réalisation d'une prestation facturée. / Cette sanction est prise par le directeur général de l'agence régionale de santé, à la suite d'un contrôle réalisé sur pièces et sur place par les médecins inspecteurs de santé publique, les inspecteurs de l'agence régionale de santé ayant la qualité de médecin ou les praticiens-conseils des organismes d'assurance maladie en application du programme de contrôle régional établi par l'agence. Le directeur général de l'agence prononce la sanction après avis d'une commission de contrôle composée à parité de représentants de l'agence et de représentants des organismes d'assurance maladie et du contrôle médical. La motivation de la sanction indique, si tel est le cas, les raisons pour lesquelles le directeur général n'a pas suivi l'avis de la commission de contrôle. La sanction est notifiée à l'établissement. / (...) ".

3. Un recours devant le juge administratif tendant à l'annulation d'une sanction prononcée à l'encontre d'un établissement de santé sur le fondement de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale, qui a le caractère d'une sanction visant à réprimer la méconnaissance des règles particulières auxquelles est soumis l'exercice d'une activité professionnelle déterminée, relève du contentieux de l'excès de pouvoir.

Sur la légalité de la décision du 11 juillet 2012 :

En ce qui concerne la motivation :

4. Il résulte des dispositions précitées qu'une sanction financière prononcée sur le fondement de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale doit être motivée. Pour satisfaire à cette exigence, le directeur général de l'agence régionale de santé doit indiquer, soit dans sa décision elle-même, soit par référence à un document joint ou précédemment adressé à l'établissement de santé, outre les dispositions en application desquelles la sanction est prise, les considérations de fait et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour décider de son principe et en fixer le montant.

5. La décision litigieuse du 11 juillet 2012 comporte l'énoncé des considérations de droit qui en constituent le fondement, rappelle les différentes étapes de la procédure engagée à l'encontre de l'établissement de santé, mentionne l'étendue et la nature des prestations contrôlées, ainsi que le taux de surfacturation retenu et fait état des considérations ayant justifié la fixation du montant de la sanction effectivement prononcée pour le champ litigieux en vertu du barème défini à l'article R. 162-42-12 du code de la sécurité sociale. L'avis de la commission de contrôle, joint à la décision, énonçait les motifs l'ayant conduit à écarter les observations précises formulées au préalable par l'établissement de santé. La décision était en outre accompagnée d'un détail des séjours concernés, repérés par leur numéro de contrôle dit " OGC " attribué lors du contrôle, comportant le détail des faits reprochés, ainsi que d'une fiche comportant les données ayant permis le calcul du montant de la sanction. Dans ces conditions et contrairement à ce que soutient la SAS Aquitaine santé, la décision du 11 juillet 2012 est suffisamment motivée.

En ce qui concerne le vice de procédure :

6. Il ressort des pièces du dossier que l'avis de la commission de contrôle rendu

le 5 juin 2012 a été notifié à l'établissement de santé le 28 juin 2012. Ainsi, le vice de procédure allégué doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne la légalité interne :

7. D'une part, l'article R. 162-32 du code de la sécurité sociale dispose que : " Les catégories de prestations d'hospitalisation donnant lieu à une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale mentionnées au 1° de l'article L. 162-22-6 sont les suivantes : / 1° Le séjour et les soins avec ou sans hébergement, représentatifs de la mise à disposition de l'ensemble des moyens nécessaires à l'hospitalisation du patient, à l'exception de ceux faisant l'objet d'une prise en charge distincte en application des dispositions de l'article R. 162-32-1. / La prise en charge des frais occasionnés par ces prestations est assurée par des forfaits. / Ces forfaits sont facturés par séance, journée ou séjour. Ils peuvent être minorés ou majorés notamment en fonction de la durée de séjour. (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 19 février 2009 : " La catégorie de prestations mentionnée au 1° de l'article R. 162-32 du code de la sécurité sociale donnant lieu à une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale est couverte par les forfaits suivants : / 1° Des forfaits de séjour et de soins dénommés " groupes homogènes de séjours " (GHS), dont la liste est fixée en annexe 1. Ils sont établis selon la classification des groupes homogènes de malades (GHM) fixée par l'arrêté du 20 janvier 2009 susvisé. Le cas échéant, des suppléments journaliers peuvent être facturés en sus de ces forfaits ". Et aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Les modalités de facturation des forfaits et suppléments mentionnés à l'article 1er sont définies aux I à III ci-dessous. / I. - Les forfaits " groupes homogènes de séjours " sont facturés dans les conditions suivantes : / (...) 9° Lorsque le patient est pris en charge moins d'une journée, à l'exception des cas où il est pris en charge dans un service d'urgence, un GHS ne peut être facturé que dans les cas où sont réalisés des actes qui nécessitent : / - une admission dans une structure d'hospitalisation individualisée mentionnée à l'article D. 6124-301 du code de la santé publique disposant de moyens en locaux, en matériel et en personnel, et notamment des équipements adaptés pour répondre aux risques potentiels des actes réalisés ; - un environnement respectant les conditions de fonctionnement relatives à la pratique de l'anesthésie ou la prise en charge par une équipe paramédicale et médicale dont la coordination est assurée par un médecin ; - l'utilisation d'un lit ou d'une place pour une durée nécessaire à la réalisation de l'acte ou justifiée par l'état de santé du patient. / Lorsque l'une de ces conditions n'est pas remplie, la prise en charge du patient donne lieu à facturation de consultations ou actes mentionnés à l'article L. 162-26 du code de la sécurité sociale ou réalisés en médecine de ville. (...) ".

8. Pour prononcer la sanction litigieuse, la directrice générale de l'ARS d'Aquitaine a retenu que 136 des 140 séjours contrôlés au titre du groupe homogène de séjour GHS 3148 ne répondaient pas aux conditions cumulatives énoncées au 9° du I de l'article 6 de l'arrêté du 19 février 2009 précité permettant la facturation d'un forfait de séjour et de soins.

9. Il ressort des pièces du dossier que les différents dossiers médicaux contrôlés ne comportaient d'élément susceptible d'établir l'existence d'une prise en charge ni dans une structure d'hospitalisation individualisée, ni dans un environnement respectant les conditions de fonctionnement relatives à la pratique de l'anesthésie ni incluant la mise en oeuvre d'une surveillance médicale ou paramédicale. Si l'appelante se prévaut de la nomenclature de la classification commune des actes médicaux dont il résulte que la réalisation des actes en cause nécessite le respect de certaines conditions de bonne pratique, notamment des conditions de sécurité anesthésique et la mobilisation de personnel spécifiquement formé, sans que soit toutefois exigé un environnement hospitalier, elle n'établit, par les pièces qu'elle produit à l'instance, ni que ces actes ont été réalisés sous le contrôle d'un médecin anesthésique, ni qu'une surveillance post-interventionnelle par des infirmières a été mise en oeuvre. Si les organismes d'assurance maladie n'ont pas contesté le codage de ces actes médicaux et ont remboursé les praticiens les ayant réalisés, cette circonstance n'est pas susceptible d'établir que les conditions de facturation d'un GHS étaient effectivement remplies. L'appelante ne peut pas plus utilement se prévaloir de ce que les praticiens interviennent à titre libéral en dehors de tout lien de subordination avec elle. Ainsi, c'est sans commettre d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation que la directrice générale de l'ARS a pu estimer que la facturation de 136 séjours au titre du GHS 3148 ne répondait pas aux conditions cumulatives prévues au 9° du I de l'article 6 de l'arrêté du 19 février 2009.

10. D'autre part, aux termes de l'article R. 162-42-12 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Le montant de la sanction est déterminé par le directeur général de l'agence régionale de santé sur avis de la commission de contrôle en fonction de la gravité des manquements constatés et dans la limite de 5 % des recettes annuelles d'assurance maladie de l'établissement./ (...) Lorsque le contrôle porte sur certaines activités ou prestations en particulier ou sur des séjours présentant des caractéristiques communes, le montant de la sanction est fixé dans la limite de : (...) f) 50 % des recettes annuelles d'assurance maladie afférentes à ces activités, ces prestations ou ces séjours, lorsque le pourcentage des sommes indûment perçues par rapport aux sommes dues est supérieur à 30 %. (...) ".

11. Il ressort des pièces du dossier que le montant des sommes indument perçues par la SAS Aquitaine santé au titre des séjours contrôlés correspondant au GHS 3148 est de 40 056 euros tandis que le montant des sommes dues par les caisses était de 97 euros. Le pourcentage de surfacturation est ainsi très largement supérieur à 30 %. Le montant non contesté des recettes d'assurance maladie de l'établissement de santé afférentes aux séjours relevant du champ contrôlé s'élevant à la somme de 64 164 euros au titre de l'année 2009, le montant de la sanction susceptible d'être retenu par l'ARS ne pouvait dès lors être supérieur à 50 % de cette dernière somme, soit à 32 082 euros, tandis que les recettes totales d'assurance maladie de l'établissement au titre de la même année s'établissaient à 13 226 782 euros. Eu égard, notamment, au pourcentage élevé de séjours relevant du GHS 3148 ayant donné lieu à une facturation indue, la SAS Aquitaine santé n'est pas fondée à soutenir que la directrice aurait, en retenant un montant de 24 062 euros correspondant à 75 % du plafond ainsi fixé, prononcé une sanction disproportionnée au regard de la gravité des manquements constatés.

12. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la SAS Aquitaine santé dirigées contre la décision du 11 juillet 2012 doivent être rejetées, de même que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la restitution de la somme en cause. Par suite, l'appelante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'agence régionale de santé d'Aquitaine, qui en tout état de cause n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande la SAS Aquitaine santé au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Aquitaine santé est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Aquitaine santé et au ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Salvi, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 novembre 2017

Le rapporteur,

Didier Salvi

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 15BX00491


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00491
Date de la décision : 28/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Santé publique - Administration de la santé - Agences régionales d'hospitalisation.

Sécurité sociale - Relations avec les professions et les établissements sanitaires - Relations avec les établissements de santé.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : MOULIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-11-28;15bx00491 ?
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