Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Crus et châteaux du Sud-ouest a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 4 juillet 2007 par laquelle le directeur de l'Institut national de l'origine et de la qualité a reconnu le syndicat de défense des vins à appellation d'origine contrôlée " Gaillac " en tant qu'organisme de défense et de gestion pour les appellations d'origine contrôlées " Gaillac " et " Gaillac premières côtes ".
Par un jugement n° 1002179 du 2 juillet 2013, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par un arrêt n° 13BX02490 du 31 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par la société Crus et châteaux du Sud-ouest contre ce jugement.
Par une décision n° 388181 du 5 octobre 2016 enregistrée au greffe de la cour le 6 octobre 2016 sous le n° 16BX03311, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt n° 13BX02490 du 31 décembre 2014 et renvoyé l'affaire devant la cour.
Par un arrêt n° 16BX03311 du 18 mai 2017, la cour a annulé le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 2 juillet 2013 ainsi que la décision du directeur de l'Institut national de l'origine et de la qualité du 4 juillet 2017, a mis à la charge de l'Institut national de l'origine et de la qualité le versement à la société Les vignobles Gayrel, anciennement dénommée société Crus et châteaux du Sud-ouest, de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions de l'Institut national de l'origine et de la qualité tendant à l'application de ces dispositions.
Par une requête enregistrée au greffe de la cour sous le n° 17BX01721 le 1er juin 2017, l'Institut national de l'origine et de la qualité, représenté par la SCP Hélène Didier et François Pinet, demande à la cour de rectifier l'erreur matérielle entachant son arrêt du 18 mai 2017 en ce qu'il a omis de statuer sur ses conclusions tendant à ce que l'annulation de sa décision ne prenne effet qu'à compter du 30 avril 2017 et que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de l'arrêt contre des actes pris sur le fondement des dispositions annulées, les effets produits par la décision de reconnaissance antérieurement à son annulation soient réputés définitifs.
Il soutient que dans son mémoire enregistré le 12 janvier 2017, il a conclu au rejet de la requête et a demandé subsidiairement à la cour de ne prononcer l'annulation de la décision contestée qu'à compter du 30 avril 2017, date à laquelle sera entrée en vigueur une nouvelle décision de reconnaissance et que la cour a omis de se prononcer sur ces conclusions sur lesquelles il lui appartenait de statuer et n'en a d'ailleurs pas fait état.
Par un mémoire enregistré le 24 juillet 2017, la société Les vignobles Gayrel, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Institut national de l'origine et de la qualité le versement d'une somme de 1 500 euros.
Elle soutient que :
- l'Institut national de l'origine et de la qualité a fait état devant la cour de difficultés qui résulteraient, selon lui, de l'effet rétroactif d'une annulation, mais n'a pas formellement conclu à l'aménagement des effets d'une éventuelle annulation ; il ne peut donc être reproché à la cour d'avoir omis de statuer sur une partie des conclusions de l'Institut ;
- en tout état de cause, le délibéré ayant été rendu le 18 mai 2017 et l'Institut ayant pu de ce fait prendre les mesures conservatoires nécessaires, il a été, de fait, satisfait à la demande de l'Institut en ce qui concerne une annulation à compter du 30 avril 2017 ;
- si l'Institut est en désaccord avec l'annulation prononcée, il lui appartient de saisir le Conseil d'Etat d'un pourvoi en cassation ;
- l'application de la jurisprudence permettant de remettre en cause l'effet rétroactif des annulations doit revêtir un caractère exceptionnel et être réservée aux cas dans lesquels la rétroactivité aurait des conséquences manifestement excessives sur les situations qui ont pu se constituer lorsque l'acte était en vigueur ; tel n'est pas le cas en l'espèce dès lors que, selon la jurisprudence, l'éventuelle illégalité de la décision de reconnaissance d'un organisme de défense et de gestion ne peut pas être invoquée par la voie de l'exception à l'appui d'un recours dirigé contre l'arrêté ministériel portant homologation du cahier des charges du signe de qualité dont cet organisme a la charge ; faute de justifier de conséquences manifestement excessives pouvant découler de l'application de l'arrêt d'annulation, la demande de l'Institut ne peut être satisfaite.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (CE) n° 1493/1999 du Conseil du 17 mai 1999 portant organisation commune du marché vitivinicole ;
- le règlement (CE) n° 884/2001 de la Commission du 24 avril 2001 fixant les modalités d'application relatives aux documents accompagnant les transports des produits vitivinicole ;
- le règlement (CE) n° 1282/2001 de la Commission du 28 juin 2001 portant modalités d'application en ce qui concerne l'établissement des informations pour la connaissance des produits et le suivi du marché dans le secteur vitivinicole ;
- le règlement (CE) n° 509/2006 du Conseil du 20 mars 2006, relatif aux spécialités traditionnelles garanties des produits agricoles et des denrées alimentaires ;
- le règlement (CE) n° 510/2006 du Conseil du 20 mars 2006 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d'origine des produits agricoles et des denrées alimentaires ;
- le règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole ;
- le règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil du 29 avril 2008 portant organisation commune du marché vitivinicole ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- l'ordonnance n° 2006-1547 du 7 décembre 2006 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2006 relatif à la reconnaissance des organismes de défense et de gestion par l'Institut national de l'origine et de la qualité en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2006-1547 du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,
- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 833-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel ou du Conseil d'Etat est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification (...) ".
2. La société Crus et châteaux du Sud-ouest, qui exerce une activité de négoce en vins de Gaillac et de vinificateur, a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 4 juillet 2007 par laquelle le directeur de l'Institut national de l'origine et de la qualité a reconnu le syndicat de défense des vins à appellation d'origine contrôlée " Gaillac " en tant qu'organisme de défense et de gestion pour les appellations d'origine contrôlées " Gaillac " et " Gaillac premières côtes ". Par un jugement du 2 juillet 2013, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande. Par un arrêt n° 13BX02490 du 31 décembre 2014, la cour a rejeté l'appel formé par la société Crus et châteaux du Sud-ouest contre ce jugement. Par une décision n° 388181 du 5 octobre 2016, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt n° 13BX02490 du 31 décembre 2014 et renvoyé l'affaire devant la cour. Par un arrêt n° 16BX03311 du 18 mai 2017, la cour a annulé le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 2 juillet 2013 ainsi que la décision du directeur de l'Institut national de l'origine et de la qualité du 4 juillet 2007 et a mis à la charge de l'Institut national de l'origine et de la qualité le versement à la société Les vignobles Gayrel, anciennement dénommée société Crus et châteaux du Sud-ouest, de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. L'Institut national de l'origine et de la qualité saisit la cour, sur le fondement de l'article R. 833-1 précité du code de justice administrative, d'un recours tendant à la rectification de l'erreur entachant son arrêt du 18 mai 2017, en ce qu'il a omis de statuer sur ses conclusions tendant à ce que l'annulation de sa décision ne prenne effet qu'à compter du 30 avril 2017 et que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de l'arrêt contre des actes pris sur le fondement des dispositions annulées, les effets produits par la décision de reconnaissance antérieurement à son annulation soient réputés définitifs.
3. Il ressort des pièces du dossier que, comme le soutient l'Institut national de l'origine et de la qualité, la cour, dans son arrêt du 18 mai 2017, a omis de se prononcer sur ses conclusions mentionnées ci-dessus. Ces conclusions subsidiaires sont expressément formulées dans un mémoire enregistré le 12 janvier 2017, alors même qu'elles ne sont pas reprises dans le paragraphe final du mémoire dans lequel l'Institut résume ses conclusions principales. Ce mémoire a été enregistré antérieurement à la clôture de l'instruction de l'affaire, fixée au 13 février 2017. L'omission invoquée par l'Institut national de l'origine et de la qualité constitue une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire au sens de l'article R. 833-1 précité du code de justice administrative. Dès lors le recours de l'Institut national de l'origine et de la qualité est recevable.
4. Contrairement à ce que soutient la société Les vignobles Gayrel, l'intervention de la lecture de l'arrêt de la cour le 18 mai 2017, postérieurement au 30 avril 2017, date d'entrée en vigueur de la nouvelle décision de reconnaissance prise par l'Institut national de l'origine et de la qualité, ne peut valoir réponse favorable implicite de la cour aux conclusions de l'Institut, dès lors que cette date de lecture ne remet nullement en cause l'effet rétroactif de l'annulation prononcée par l'arrêt.
5. L'annulation d'un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n'être jamais intervenu. Toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur, que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif - après avoir recueilli sur ce point les observations des parties et examiné l'ensemble des moyens, d'ordre public ou invoqués devant lui, pouvant affecter la légalité de l'acte en cause - de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation. Il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation, ou, lorsqu'il a décidé de surseoir à statuer sur cette question, dans sa décision relative aux effets de cette annulation, que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de sa décision prononçant l'annulation contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il détermine.
6. En application de l'article L. 642-18 du code rural et de la pêche maritime, la reconnaissance de la qualité d'organisme de défense et de gestion est subordonnée notamment à la condition que les règles de composition et de fonctionnement de cet organisme assurent, pour chacun des produits pour lesquels un signe est revendiqué, la représentativité des opérateurs et une représentation équilibrée des différentes catégories d'opérateurs. Pour annuler la décision contestée du 4 juillet 2007, la cour a retenu un moyen tiré de ce qu'à l'appui de sa demande de reconnaissance en qualité d'organisme de défense et de gestion, le syndicat de défense des vins à appellation d'origine contrôlée Gaillac n'avait pas fourni, en méconnaissance de l'article 1er de l'arrêté du 27 décembre 2006 du ministre chargé de l'agriculture, des éléments chiffrés suffisamment clairs et complets concernant ses adhérents par famille d'opérateurs, ne mettant ainsi pas l'Institut national de l'origine et de la qualité à même de se prononcer en connaissance de cause sur sa représentativité. Aucun autre moyen d'ordre public ou invoqué devant la cour n'est de nature à justifier l'annulation prononcée par l'arrêt du 18 mai 2017.
7. En application de l'article L. 642-22 du code rural et de la pêche maritime, l'organisme de défense et de gestion reconnu a pour mission notamment d'élaborer le projet de cahier des charges concernant les produits dont il assure la défense et la gestion, de contribuer à son application par les opérateurs, de participer à la mise en oeuvre des plans de contrôle et d'inspection, notamment en réalisant des contrôles internes auprès des opérateurs, de tenir à jour la liste des opérateurs et de mettre en oeuvre les décisions du comité national qui le concernent. Comme le soutient la société Les vignobles Gayrel, l'illégalité de l'acte par lequel le directeur de l'Institut national de l'origine et de la qualité prononce la reconnaissance d'un organisme de défense et de gestion ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre un acte relatif à la reconnaissance d'une appellation d'origine contrôlée qui n'en constitue pas une mesure d'application et qui n'ont pas pour base légale cet acte de reconnaissance. En revanche, l'annulation pour excès de pouvoir de l'acte portant reconnaissance d'un organisme de défense et de gestion emportera, lorsque le juge sera saisi de conclusions recevables, soit l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé, soit le constat de leur illégalité et l'annulation des actes pris sur leur fondement. Ainsi, l'annulation de la décision du 4 juillet 2007 est susceptible d'emporter, en cas de recours, l'annulation de décisions prises sur avis, proposition ou intervention du syndicat de défense des vins à appellation d'origine contrôlée Gaillac ou prises par lui dans le cadre des missions que lui confie l'article L. 642-22 du code rural et de la pêche maritime, et d'actes pris sur le fondement de telles décisions. Ces annulations sont susceptibles de concerner, notamment, l'ensemble des décisions prises en application des cahiers des charges des appellations " Gaillac premières côtes " et " Gaillac ", homologués par décrets des 15 et 23 novembre 2011, dès lors qu'en application de l'article L. 642-22 du code rural et de la pêche maritime, l'organisme de défense et de gestion élabore le projet de cahier des charges et contribue à son application. L'Institut national de l'origine et de la qualité soutient d'ailleurs sans être sérieusement contredit que l'invalidation de la décision de reconnaissance est susceptible de remettre en cause notamment la revendication des appellations " Gaillac " et " Gaillac premières côtes " dont bénéficient de nombreux viticulteurs.
8. Eu égard à ce qui a été dit aux points 6 et 7 ci-dessus, l'effet rétroactif de l'annulation de la décision du 4 juillet 2007 porterait une atteinte manifestement excessive à la situation des opérateurs concernés par les appellations " Gaillac " et " Gaillac premières côtes ". Il y a lieu, dès lors, de prévoir que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de l'arrêt du 18 mai 2017 contre les actes qui n'auraient pas pu légalement intervenir en l'absence de la décision du 4 juillet 2007, les effets produits par cette décision antérieurement à son annulation seront regardés comme définitifs.
9. Il résulte de ce qui précède que l'Institut national de l'origine et de la qualité est fondé à demander dans cette mesure la rectification de l'arrêt de la cour n° 16BX03311 du 18 mai 2017.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Institut national de l'origine et de la qualité, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Les vignobles Gayrel au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Les motifs de l'arrêt du 18 mai 2017 n° 16BX03311 de la cour administrative d'appel sont complétés par les motifs énoncés aux points 5 à 8 du présent arrêt.
Article 2 : L'article 1er du dispositif de l'arrêt du 18 mai 2017 n° 16BX03311 de la cour administrative d'appel est complété ainsi qu'il suit :
" Sous réserve des actions contentieuses engagées à la date du 18 mai 2017 contre les actes qui n'auraient pas pu légalement intervenir en l'absence de la décision du 4 juillet 2007, les effets produits par cette décision antérieurement à son annulation sont réputés définitifs ".
Article 3 : Les conclusions de la société Les vignobles Gayrel tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Institut national de l'origine et de la qualité, à la société Les vignobles Gayrel anciennement dénommée société Crus et châteaux du Sud-ouest et au syndicat de défense des vins à appellation d'origine contrôlée Gaillac. Une copie en sera adressée au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2017, à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
Mme Christine Mège, président-assesseur,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Lu en audience publique le 14 novembre 2017.
Le président-assesseur,
Christine Mège
Le président-rapporteur,
Elisabeth Jayat
Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX01721