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17/10/2017 | FRANCE | N°16BX03949

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 17 octobre 2017, 16BX03949


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...G...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'ordonner, après avoir retenu le caractère nosocomial de l'infection dont il a été atteint à la suite de l'aponévrotomie pratiquée le 3 juin 2008 au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, une expertise médicale aux fins d'évaluation de ses préjudices.

Par un jugement n° 1500991 du 8 novembre 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregist

rés les 12 décembre 2016 et 4 mai 2017,

M.G..., représenté par MeH..., demande à la cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...G...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'ordonner, après avoir retenu le caractère nosocomial de l'infection dont il a été atteint à la suite de l'aponévrotomie pratiquée le 3 juin 2008 au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, une expertise médicale aux fins d'évaluation de ses préjudices.

Par un jugement n° 1500991 du 8 novembre 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 décembre 2016 et 4 mai 2017,

M.G..., représenté par MeH..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 8 novembre 2016 ;

2°) de retenir le caractère nosocomial de l'infection dont il a été atteint à la suite de l'aponévrotomie pratiquée le 3 juin 2008 au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres ;

3°) d'ordonner une expertise au contradictoire du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et de la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres.

Il soutient que :

- l'expertise médicale ordonnée par le tribunal est irrégulière ;

- l'infection dont il a été atteint à la suite de l'aponévrotomie qui a été réalisée en conséquence du syndrome des loges présente un caractère nosocomial.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 janvier et 2 juin 2017, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. G...ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 février et 17 mai 2017, le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelant une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. G...ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 18 mai 2017, la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres, représentée par MeB..., demande à la cour d'annuler le jugement du 8 novembre 2016.

Elle soutient que :

- le rapport d'expertise définitif qui fait mention de la réponse du Dr I...n'a pas été soumis au contradictoire ;

- l'infection dont a été victime M. G...présente un caractère nosocomial.

Par ordonnance du 24 mai 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 juillet 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.C...,

- les conclusions de M. Katz, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, de MeF..., représentant l'ONIAM, et de Me D... substituant MeB..., représentant la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres.

Considérant ce qui suit :

1. Victime d'une double fracture tibia-péroné de la jambe droite au cours d'une activité sportive, M. G...a subi une intervention chirurgicale, le 31 mai 2008, au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres. Un syndrome des loges affectant cette jambe ayant été diagnostiqué

le 3 juin suivant, une aponévrotomie a été pratiquée. M. G...est ensuite sorti du centre hospitalier le 24 juin 2008 et l'évolution de son état de santé a été initialement favorable, de sorte qu'il a marché sans canne à compter du 16 septembre 2008 et repris la conduite automobile au cours du mois de novembre 2008. Cependant, M. G...a présenté, le 2 janvier 2009, une ulcération de la face externe de sa jambe droite qui a nécessité une hospitalisation, du 13 au 29 janvier 2009, au cours de laquelle a été réalisé un parage chirurgical de cet ulcère. L'évolution de son état de santé a, par la suite, été marquée par des complications, notamment un choc septique qui a motivé son transfert au centre hospitalier universitaire de Poitiers. M.G..., s'estimant victime d'une infection nosocomiale, a présenté une demande d'indemnisation au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres qui l'a rejetée le 18 mars 2014. Il a alors saisi, le 7 mai 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers qui a ordonné une expertise. Après la remise du rapport d'expertise, le 18 décembre 2014, le juge des référés du tribunal, de nouveau saisi le 18 février 2015 par M.G..., a rejeté, par ordonnance

du 9 avril 2015, la demande d'une seconde expertise. Ce dernier a ensuite présenté une requête, enregistrée le 16 avril 2015 au greffe du tribunal, qui a été regardée comme tendant à la condamnation du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres ou de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à réparer les préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'infection. M. G...doit être regardé comme demandant à la cour d'annuler le jugement du 8 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête. Par la voie de l'appel incident, la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres demande également l'annulation du jugement.

Sur la régularité des opérations d'expertise :

2. L'article R. 621-2 du code de justice administrative dispose que : " (...) Lorsqu'il apparaît à un expert qu'il est nécessaire de faire appel au concours d'un ou plusieurs sapiteurs pour l'éclairer sur un point particulier, il doit préalablement solliciter l'autorisation du président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel ou, au Conseil d'État, du président de la section du contentieux. La décision est insusceptible de recours. ".

3. Il ressort du rapport d'expertise que, pour répondre au dire de l'avocat du requérant, l'expert a pris l'attache, par courriel, d'une consoeur exerçant à l'hôpital européen Georges Pompidou et cité sa réponse du 4 décembre 2014 pour conforter ses conclusions, au demeurant déjà exprimées, sur l'absence d'infection nosocomiale. Dans ces conditions, compte tenu notamment de la teneur de l'avis rendu et du stade de l'expertise au cours duquel cet avis a été requis, l'expert ne peut être regardé comme s'étant adjoint le concours d'un sapiteur au sens et pour l'application des dispositions susmentionnées. En interrogeant une consoeur pour asseoir sa position, l'expert n'a pas plus méconnu le principe du contradictoire. M. G...n'est donc pas fondé, en tout état de cause, à soutenir que les opérations d'expertise auraient présenté un caractère irrégulier.

Sur le principe de responsabilité :

4. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ". Si ces dispositions font peser sur l'établissement de santé la responsabilité des infections nosocomiales, qu'elles soient exogènes ou endogènes, à moins que la preuve d'une cause étrangère soit rapportée, seule une infection survenant au cours ou au décours d'une prise en charge et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de la prise en charge peut être qualifiée de nosocomiale.

5. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, qu'à la suite de l'intervention initiale et de l'aponévrotomie, les prélèvements bactériologiques réalisés

les 8 et 10 juin 2008 étaient stériles. Après la sortie de l'établissement public, un prélèvement bactériologique pratiqué en juillet 2008 s'est également révélé négatif. Ce n'est que

le 2 janvier 2009 que le patient présente une récidive de l'ulcération de sa jambe et, devant l'échec du parage chirurgical réalisé le 13 janvier 2009, avec notamment une ablation du fond de l'ulcère conduisant à une ablation des tendons péroniers qui sont d'aspect nécrotique, est évoquée, le 6 mars 2009, une infection torpide au niveau du foyer de fracture tibiale. L'évolution de l'état de santé de M. G...est ainsi la conséquence de la fracture initiale du tibia-péroné compliquée d'un syndrome des loges, secondairement compliqué d'un processus infectieux inhérent à l'évolution de ce syndrome et non au décours d'un acte de soin pratiqué au cours de sa prise en charge au centre hospitalier. Par conséquent, l'appelant n'est pas fondé à soutenir qu'il a contracté une infection nosocomiale susceptible d'engager la responsabilité du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres ou de faire l'objet d'une indemnisation par l'ONIAM sur le fondement de l'article L.1142-1-1 du code de la santé publique.

6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de procéder à une expertise, que la requête de M. G...doit être rejetée. Il en est de même des conclusions d'appel incident présentées par la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. L'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge

de M. G...la somme demandée par le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. G...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...G..., à la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres, au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 17 octobre 2017,

Le rapporteur,

Didier C...

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 16BX03949


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03949
Date de la décision : 17/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

60-02-01-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SCP DENIZEAU GABORIT TAKHEDMIT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-10-17;16bx03949 ?
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