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13/07/2017 | FRANCE | N°16BX01364,16BX01365

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 13 juillet 2017, 16BX01364,16BX01365


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association présence les terrasses de la Garonne, l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées et l'association Nature Midi-Pyrénées ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 août 2013 du préfet de la Haute-Garonne portant autorisation de destruction, déplacement d'individus ainsi que de destruction, altération, dégradation d'aires de repos et/ou de reproduction d'espèces protégées dans le cadre de la réalisation du centre commercial Val Tolosa à Plais

ance-du-Touch .

Par un jugement n° 1304811 du 8 avril 2016, le tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association présence les terrasses de la Garonne, l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées et l'association Nature Midi-Pyrénées ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 août 2013 du préfet de la Haute-Garonne portant autorisation de destruction, déplacement d'individus ainsi que de destruction, altération, dégradation d'aires de repos et/ou de reproduction d'espèces protégées dans le cadre de la réalisation du centre commercial Val Tolosa à Plaisance-du-Touch .

Par un jugement n° 1304811 du 8 avril 2016, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête enregistrée sous le n° 16BX01364 le 22 avril 2016 et un mémoire présenté le 6 octobre 2016, la SAS PCE et la SNC Foncières Toulouse Ouest, représentées par Me A...et MeB..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 8 avril 2016 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association présence les terrasses de la Garonne et l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées et l'association Nature Midi-Pyrénées devant le tribunal administratif de Toulouse.

3°) de mettre solidairement à la charge de ces associations la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

* Sur la régularité du jugement :

- Le jugement est insuffisamment motivé dès lors que le tribunal s'est borné à indiquer, pour nier le caractère d'intérêt public majeur du projet, que celui-ci ne présentait pas un caractère exceptionnel et indispensable.

* Sur la légalité de l'arrêté :

* Le tribunal administratif a commis une erreur de droit en procédant à une interprétation restrictive de la notion d'intérêt public majeur, laquelle est contraire aux textes nationaux et communautaires :

- en exigeant que le projet constitue un " cas exceptionnel dont la réalisation se révélerait indispensable ", le tribunal a méconnu la loi et la directive habitats dans la mesure où cette définition de l'intérêt public majeur s'oppose à la réalisation de projet porteurs d'un intérêt économique et social ;

- la directive ne fait pas primer l'intérêt environnemental sur tout autre intérêt public dès lors que son article 2 impose de tenir compte des exigences économiques, sociales et culturelles ;

- le Conseil d'Etat opère désormais une balance entre l'importance des impacts sur l'environnement et l'intérêt public du projet. Il a d'ailleurs reconnu que le caractère privé et lucratif d'un projet ne faisait pas obstacle à ce qu'il poursuivre un intérêt public majeur ;

- le jugement a commis une autre erreur de droit en ne recherchant pas, pour censurer la légalité de l'arrêté attaqué, " si la dérogation à l'interdiction de destruction et de déplacement des espèces concernées pouvait être justifiée " par un intérêt public majeur, apprécié au regard de l'impact environnemental du projet. Il a porté une atteinte disproportionnée aux intérêts économiques et sociaux qui, aux termes de la Directive et de la Loi, doivent compter parmi les intérêts à mettre en balance avec l'objectif de préservation de conservation de l'état favorable des espèces protégées dans leur aire de répartition naturelle ;

- l'octroi de la dérogation n'est pas un mécanisme exceptionnel mais un outil de préservation de l'objectif de la directive ;

- la réalisation d'un projet privé n'exclut pas la reconnaissance d'un intérêt publique majeur ;

- il convient de mettre en balance l'utilité du projet pour lequel une dérogation est sollicitée et les autres intérêts susceptibles d'être en partie atteints par la réalisation du projet.

* Ce projet présente un intérêt public majeur de nature à justifier la dérogation préfectorale délivrée en vue de sa réalisation :

- il existe selon le Serdeaut qui a publié une étude en ce sens en novembre 2014, une présomption d'intérêt public lorsque le projet s'inscrit ans le cadre d'un plan public d'aménagement ;

- ce projet s'inscrit dans une politique locale d'aménagement et répond à un besoin collectif.

- En effet, le projet de centre Val Tolosa participe à l'amélioration du cadre de vie des habitants. Compte tenu de l'augmentation démographique, il est nécessaire, dans le cadre d'un aménagement raisonné du territoire, de créer des équipements structurants en matière de commerce afin de répondre aux attentes des nouveaux habitants, en réduisant les distances habitat/commerce et habitat/travail et ainsi, les émissions de gaz à effet de serre afin de réduire la pollution atmosphérique :

- il s'intègre dans l'aménagement d'une partie de la commune de Plaisance-du-Touch, le plateau de la Ménude, destinée à être urbanisée notamment dans la ZAC dite " Portes de Gascogne ".

- eu égard à sa qualité architecturale et environnementale, il présente un intérêt au titre de l'animation urbaine de la zone qui est appelée à accueillir des équipements commerciaux ;

- il permettra de garantir une concurrence et de satisfaire les besoins des consommateurs locaux, notamment ceux situés à la périphérie ouest de l'agglomération toulousaine et de limiter ainsi les déplacements de la clientèle vers les grands pôles commerciaux de l'agglomération.

- Il a été pris en compte par plusieurs documents de planification :

- le plateau de la Ménude est, selon le SMEAT, un pôle de développement économique majeur de l'ouest toulousain au sein duquel se sont associées plusieurs communes à travers le SIDEXE (syndicat intercommunal de développement et d'expansion économique) ;

- la révision du PLU en 2005 a permis la création d'une zone 1AU secteur 1AUf correspondant à cette future ZAC ;

- le SCOT de la grande agglomération toulousaine qui s'est substitué au SDAT prévoit d'assurer un aménagement commercial équilibré dans ce secteur ;

- le projet Val Tolosa est considéré comme un pôle majeur existant. Le document d'aménagement commercial de la grande agglomération toulousaine prévoit le développement des pôles majeurs existants selon les prescriptions du SCOT.

- Ce projet est porteur d'intérêts économiques et sociaux qui, compte tenu des caractéristiques du projet, sont des intérêts à long terme qui renforce le caractère majeur de son intérêt public :

- il présente un intérêt socio-économique à long terme et engendrera la création d'emplois de manière pérenne compte tenu des activités liées à la maintenance et à l'entretien du centre ;

- il permettra la création de 1 785 emplois dont 1 467 ETP et 85 ETP dédiés à la gestion directe ou indirecte du centre commercial, comme en témoigne la convention signée avec Pôle Emploi en février 2013. La détermination du nombre d'emplois repose sur des moyennes calculées sur les retours d'expérience concernant l'ouverture des structures qui leur appartiennent ou non ;

- il favorisera le commerce local et indépendant dès lors que la société PCE s'est engagée auprès la CCI de la Haute-Garonne à louer à des commerçants indépendants 35 % des unités commerciales d'une surface inférieure à 300 m² situées dans la galerie commerciale ;

- il répond à des besoins pérennes dès lors que la croissance démographique continuera à augmenter.

- Il s'agit d'un projet écologiquement propre, fondé sur une démarche de haute qualité environnementale guidée par l'écoconstruction, l'écogestion, la santé et le confort.

* Sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté, le fait, au demeurant inexact, que les autorités publiques ne soutiendraient plus le projet et l'incident de chantier ayant impacté certaines espèces protégées.

* L'arrêté en litige n'avait pas à être conforme au SCOT en vertu du principe d'indépendance des législations :

- Les articles L. 122-1 et R. 142-1 du code de l'urbanisme énumèrent de manière exhaustive les documents et opérations qui doivent être compatibles avec le DOO du SCOT.

- Le SCOT est en tout état de cause inopposable au projet d'aménagement de la ZAC des Portes de Gascogne dans la mesure où il ne s'applique pas aux opérations d'aménagement ayant fait l'objet d'un acte de création antérieur à son approbation du SCOT. Or, la ZAC des Portes de Gascogne a été créée le 7 mars 2005 alors que le SCOT a été approuvé le 15 juin 2012.

* En tout état de cause, ce projet est compatible avec le SCOT :

- en vertu de la prescription P 71, les sites d'agglomération en zone classée Ville intense peuvent porter sur 100 ha alors que ceux classés en-dehors de ces villes intenses ne doivent pas dépasser 50 ha. La carte page 56 du DOG révèle que la commune de Plaisance-du-Touch est située en zone Ville intense ;

- le site d'implantation du projet de Val Tolosa se situe en catégorie 3. Le SCOT en page 56 comporte une erreur matérielle dès lors qu'il classe le projet en pôle majeur potentiel alors que selon la définition donnée par ce document, il devrait être classé en pôle majeur existant dès lors qu'il a fait l'objet d'une autorisation commerciale le 21 octobre 2008 et donc avant le 1er janvier 2009. Ainsi s'applique la prescription P95 et non la P96 relative au développement des nouveaux pôles majeurs d'agglomération. Or, la P95 prévoit un seuil de 90 000 m² ou de 75 000 m² suivant l'existence ou non d'une desserte en transport en commun en site propre ;

- si les terrains d'emprise de Val Tolosa sont effectivement répertoriés en espace agricole préservé, la prescription P5 autorise l'urbanisation dans les territoires d'extension clairement identifiés ce qui, selon la carte du DOG page 65, est le cas des terrains d'emprise du projet ;

- de même, la prescription P9 permet une urbanisation dans les territoires d'extension urbaine clairement identifiés, ce qui est le cas, selon la carte reproduite page 65, de la zone considérée ;

- s'agissant enfin de la continuité écologique à restaurer, les prescriptions P11 et P12 du DOG prévoient que les PLU veillent à la préservation des fonctions naturelles et écologiques des continuités écologiques identifiées et en précise le tracé, ce qu'a fait le PLU de Plaisance-du-Touch en matérialisant le tracé d'une coulée verte au nord du projet, le long de la zone UBC ;

- le projet n'est pas répertorié en pôle secondaire par la carte p. 56 mais en pôle majeur de développement qui doit être regardé comme existant et permet ainsi un développement commercial compris entre 75 000 et 90 000 m².

* Il n'existe pas de solutions alternatives au projet qui soient satisfaisantes :

- le projet a été implanté en respectant le principe général de l'évitement / suppression des impacts sur les espèces protégés et leurs habitats, conformément à la séquence " éviter-réduire-compenser " ;

- si trois zones d'implantation avaient été envisagées dans le cadre de la création de la ZAC et du permis de construire, aucune autre solution alternative n'était satisfaisante ;

- cette ZAC devait être située dans l'ouest toulousain afin de répondre à l'augmentation démographique et au rééquilibrage de l'offre commerciale ;

- il répond à l'objectif formulé par les documents de planification urbaine qui soulignent la nécessité du développement d'un pôle majeur commercial localisé sur le plateau de la Ménude au droit de la commune de Plaisance ;

- au moment de la création de la ZAC, n'ont pas été intégrés les sites présentant une sensibilité écologique ;

- l'hypothèse retenue est celle offrant le plus d'espaces verts et de possibilité de mise en place de mesures d'accompagnement ou compensatoires écologiques dans le périmètre du projet de centre commercial. Conformément à la doctrine éviter/réduire/compenser, la solution retenue était donc celle présentant le moindre impact environnemental ;

- les sociétés PCE et FTO ont en cours d'instruction modifié les caractéristiques de la conception du centre afin de réduire au maximum l'impact du projet sur les espèces protégées, et notamment pour le Rosa Gallica comme cela ressort du dossier complémentaire du Rosa Gallica ;

- comme le rappelle la circulaire du 21 janvier 2008, il n'appartient pas à l'autorité administrative, en charge de la délivrance de la dérogation, de rechercher elle-même d'autres solutions au projet envisagé par le pétitionnaire. L'autorité administrative doit uniquement contrôler que la recherche de solutions alternatives a bien été effectuée et apprécié le choix effectué, à savoir la solution présentant le moindre impact environnemental mais permettant néanmoins d'atteindre les mêmes objectifs que la solution nécessitant une dérogation.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 septembre et 9 décembre 2016, l'association " présence les terrasses de la Garonne ", l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées et l'association Nature Midi-Pyrénées, représentées par Me C..., concluent :

- au rejet de la requête des sociétés PCE et Foncières Toulouse ouest ;

- à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le préfet n'a pas justifié de l'existence de raisons impératives d'intérêt public majeur permettant la délivrance d'une dérogation sur le fondement de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ;

- les décisions de la commission européenne montrent que seuls les grands projets d'infrastructures ont été reconnus comme satisfaisant une raison impérative d'intérêt public majeur. Dans son guide d'interprétation portant sur l'évaluation des plans et projets ayant des incidences significatives sur des sites Natura 2000, la commission européenne précise qu'il doit s'agir d'un intérêt public à long terme ;

- le juge administratif exige également qu'il s'agisse d'un cas exceptionnel dont la réalisation se révèlerait indispensable ;

- un projet privé ne bénéficie pas d'une présomption d'intérêt public majeur ;

- elles n'ont pas invoqué le moyen tiré de la méconnaissance du SCOT mais souhaitent uniquement démontrer que ce projet n'est pas intégré dans la politique d'aménagement du SCOT et qu'il ne saurait dès lors répondre à une raison impérative d'intérêt public ;

- elles n'entendent pas non plus soulever l'incompatibilité de la ZAC avec le SCOT ;

- les pétitionnaires ne peuvent se prévaloir utilement du SDAT qui n'était plus applicable.

- l'invocation du PLU est sans incidence dès lors qu'en vertu des articles L. 122-1-5 et R. 122-5 du code de l'urbanisme, le PLU doit être compatible avec le document d'orientation et d'objectifs du SCOT.

- Le projet VAL TOLOSA ne saurait présenter un intérêt public majeur dès lors qu'il est contraire à la politique publique d'aménagement de l'agglomération toulousaine tant au niveau de l'activité commerciale qu'au regard de l'objectif de protection des espaces naturels et agricoles :

- le SCOT définit le plateau de la Ménude comme un " site d'intérêt d'agglomération existant " c'est-à-dire comme un second niveau de polarisation des activités économiques qui n'est pas prioritaire. Il précise que sa taille ne peut excéder 50 ha dès lors que la zone n'est pas desservie en transports en commun. Or, la zone d'activité de la Ménude a déjà atteint la limite de 50 ha ;

- le DOG classe les zones commerciales en quatre catégories en fonction de leur surface. Compte tenu de sa surface supérieure à 25 000 m², il serait intégré aux pôles d'agglomération et métropolitain, ce qui correspond à un niveau de raisonnement 3 (pôle majeur ou centralités sectorielles) ou 4 (portes métropolitaines) ;

- or, la Ménude n'est pas intégrée à l'une des portes métropolitaines ;

- il ne peut davantage être défini comme un pôle majeur d'agglomération. En effet, Plaisance du Touch et le plateau de la Ménude ne font pas partie des territoires sur lesquels les ZACom sont définies. Or la prescription P 86 dispose que dans les territoires ou ils sont autorisés, aucun nouveau pôle majeur ne pourra être créé en l'absence de délimitation de ZACom. En vertu de la prescription P 96, ne disposant pas d'offre en transport en commun en site propre, le projet Val Tolosa est limité règlementairement à 50 000 m² de surfaces commerciales. Enfin, et à supposer qu'il puisse être regardé comme un pôle majeur métropolitain, il méconnaîtrait la prescription P 99 du SCOT ;

- en tout état de cause, et d'une part, à supposer même que la zone en cause se situe dans une ville intense, il conviendrait alors de considérer le plateau de la Ménude dans son ensemble et pas uniquement le centre commercial Val Tolosa (carte du DOG). Or, cette zone comprenant déjà un pôle d'activité économique qui s'étale sur 65 ha, la réalisation du projet en litige aboutirait à une surface globale de 120 ha en violation de la prescription P 71 qui fixe un seuil de 70 ha. D'autre part, à supposer que la surface de la zone d'activité existante ne soit pas prise en compte, le seuil de 100 ha ne saurait s'appliquer dès lors que le centre commercial de Val Tolosa ne dispose pas de desserte pour les modes doux de transport ;

- les pétitionnaires confondent la surface de vente et la surface commerciale. Or, en vertu du SCOT, une surface de vente de 63 251 m² implique une surface commerciale de 79 063 m² ;

- le SCOT qui identifie Val Tolosa comme un pôle majeur potentiel et non existant n'est pas entaché d'une erreur matérielle ;

- le PADD définit d'ailleurs la commune de Plaisance-du-Touch comme une zone où il convient précisément de limiter le développement des pôles commerciaux majeurs existants et futurs. Le plateau de la Menude n'est pas considéré comme une zone d'activité majeure et le projet Val Tolosa ne saurait être regardé comme un axe prioritaire de développement ;

- le DOG intègre le périmètre d'emprise du centre commercial dans une zone agricole préservée (cf. carte des espaces agricoles préservés) au sein de laquelle, en vertu des prescriptions P4 et P5, aucune urbanisation nouvelle n'est autorisée en-dehors des territoires d'extension clairement identifiés. Le DOG identifie également cette zone comme un " espace naturel préservé " où, selon la prescription P9, aucune nouvelle urbanisation n'est autorisée en-dehors des territoires d'extension urbaine sauf exceptions, à la condition qu'elles ne portent pas atteinte à la préservation des sols agricoles et des espèces. La zone en cause est située en-dehors de la zone pixélisée définissant les territoires d'intensification et d'extension urbaine ;

- les terrains d'emprise sont intégrés dans une zone de contrainte écologique (trame verte et bleue) que les prescriptions P11 et P12 préconisent de préserver.

- L'intérêt économique et social du projet n'est pas sérieusement démontré :

- il n'est pas établi par des études que ce projet créerait effectivement 1785 emplois et que ceux-ci seraient stables et durables ;

- le dossier de demande prévoit d'ailleurs la création de 1 620 emplois. La gestion du parc ne créerait seulement que 4 emplois ;

- le maillage commercial de l'agglomération toulousaine (carte p. 56 du DOG) révèle que l'Ouest toulousain est déjà largement desservi en grandes surfaces, avec un pôle majeur existant un peu plus au nord de Plaisance-du-Touch sur la commune de Blagnac (Leclerc Blagnac), ainsi que des pôles secondaires répartis de manière équilibrée dans le secteur concerné ;

- l'intérêt de la construction du centre commercial Val Tolosa, en dépit même des quelques emplois directs qu'il pourra générer, ne saurait justifier la destruction définitive de nombreuses espèces dont la protection est regardée comme d'intérêt européen.

- Le projet n'est plus soutenu depuis longtemps par les acteurs publics concernés.

- Le président du conseil général et du conseil départemental ont manifesté leur opposition à ce projet au motif qu'il serait obsolète et ne répondrait pas aux besoins des consommateurs.

- Ce dernier a souligné le caractère obsolète de ce projet, l'avis défavorable émis par le comité syndical du SMEAT compte tenu du risque concurrentiel direct pour le commerce de proximité et le risque de dévitalisation des centres urbains qu'il pourrait induire. Il a enfin souligné le risque d'asphyxie du réseau routier résultant de la circulation automobile que pourrait générer ce projet.

- Les sociétés n'ont pas recherché de solutions plus satisfaisantes de nature à éviter la destruction massive des espèces et habitats protégés :

- la dérogation litigieuse a porté sur 3 espèces végétales, 11 mammifères et 45 oiseaux, 2 insectes, 4 amphibiens et 3 reptiles ;

- les sociétés n'ont pas appliqué la méthode consistant à " éviter, réduire, compenser les impacts sur les milieux naturels " ;

- elles n'établissent pas avoir recherché des solutions alternatives, plus respectueuses de l'environnement. Le bureau d'études n'a fait que rappeler la définition du périmètre de la ZAC des Portes de Gascogne qui, selon lui, concernait un terrain sans intérêt écologique particulier au jour de la création de la ZAC et a souligné l'absence d'intérêt faunistique et floristique de la zone au moment de la délivrance du PC en 2009. Or, des espèces remarquables ont été identifiées sur ce site en 2011, à la suite d'une nouvelle étude ;

- le permis de construire du 10 septembre 2009 a d'ailleurs été annulé par la Cour le 14 juin 2016 au motif que les sociétés n'avaient pas procédé à une nouvelle enquête publique en 2009 et s'étaient bornées à s'appuyer sur une ancienne étude de 2005 ;

- les sociétés admettent d'ailleurs n'avoir pas envisagé d'autres alternatives au choix d'implantation géographique du projet en raison de son état d'avancement ;

- le fait que les pétitionnaires aient obtenu une autorisation de construire en 2009 et la circonstance que le périmètre de la ZAC ait été défini antérieurement ne les dispensaient pas de rechercher d'autres solutions au titre de la législation sur les espèces protégées.

- Les pétitionnaires ont présenté une nouvelle demande de dérogation en septembre 2016 laquelle se fonde sur un nouvel inventaire des espèces présentes.

La requête a été communiquée à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer qui n'a pas produit de mémoire.

Par ordonnance du 12 décembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 13 janvier 2017 à 12h00.

II) Par une requête enregistrée sous le n° 16BX01365, le 22 avril 2016, et un mémoire présenté le 6 octobre 2016, la SAS PCE et la SNC Foncières Toulouse Ouest, représentées par Me A...et MeB..., demandent à la cour de surseoir à l'exécution du jugement n° 1304811 du tribunal administratif de Toulouse du 8 avril 2016.

Elles reprennent les mêmes moyens que ceux invoqués dans le requête enregistrée sous le n° 16BX01364 et soutiennent en outre qu'il existe, au sens de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, une réelle urgence et un intérêt général à suspendre le jugement dès lors qu'il rend impossible la continuité des mesures de suivi écologique pourtant favorables à l'environnement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 septembre et 9 décembre 2016, l'association présence les terrasses de la Garonne, l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées et l'association Nature Midi-Pyrénées, représentées par MeC..., concluent :

- au rejet de la demande de sursis à exécution présentées par les sociétés PCE et Foncières Toulouse ouest ;

- et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat et des sociétés PCE et Foncières Toulouse Ouest au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles reprennent les mêmes moyens que ceux exposés précédemment, dans l'instance enregistrée sous le n° 16BX01364.

La requête a été communiquée à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer qui n'a pas produit de mémoire.

Par une ordonnance du 12 décembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 13 janvier 2017 à 12h00.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la directive du Conseil 92/43/CE du 21 mai 1992 ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant les sociétés PCE et Foncières Toulouse Ouest, et de MeC..., représentant l'association présence les terrasses de la Garonne, l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées et l'association Nature Midi-Pyrénées.

Les sociétés PCE et Foncières Toulouse Ouest, d'une part, et l'association présence les terrasses de la Garonne, l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées et l'association Nature Midi-Pyrénées, d'autre part, ont présenté une note en délibéré le 28 juin 2017.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 29 août 2013, le préfet de la Haute-Garonne a autorisé la SAS PCE et la SNC Foncières Toulouse Ouest, en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, à déroger à l'interdiction de détruire, déplacer les individus et de détruire, altérer, dégrader les habitats de reproduction ou/et de repos, des espèces protégées à l'occasion des travaux de réalisation d'un centre commercial " Val Tolosa " sur la commune de Plaisance-du-Touch. A la demande des associations Présence les terrasses de la Garonne, France Nature Environnement (FNE) Midi-Pyrénées et Nature Midi-Pyrénées, le tribunal administratif de Toulouse, par un jugement n° 1304811 du 8 avril 2016, a annulé cet arrêté. Par une première requête enregistrée sous le n° 16BX01364, la SAS PCE et la SNC Foncières Toulouse Ouest relèvent appel de ce jugement. Par une seconde requête enregistrée sous le n° 16BX01365, ces sociétés demandent à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement.

2. Les requêtes n° 16BX01364 et 16BX01365 présentées par la SAS PCE et la SNC Foncières Toulouse Ouest présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement :

3. En soutenant que le jugement serait insuffisamment motivé au motif que le tribunal s'est borné à indiquer que le projet ne présentait pas un caractère exceptionnel et indispensable pour estimer qu'il ne présentait pas un intérêt public majeur, les requérantes contestent le bien-fondé du jugement et non sa régularité. Le moyen ainsi évoqué n'est donc pas de nature à entacher le jugement d'irrégularité.

Sur la légalité de l'arrêté :

4. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier ou que les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : 1° La destruction ou l'enlèvement des oeufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; 2° La destruction, la coupe, la mutilation, l'arrachage, la cueillette ou l'enlèvement de végétaux de ces espèces, de leurs fructifications ou de toute autre forme prise par ces espèces au cours de leur cycle biologique, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat, la détention de spécimens prélevés dans le milieu naturel ; 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces ; 4° La destruction, l'altération ou la dégradation des sites d'intérêt géologique, notamment les cavités souterraines naturelles ou artificielles, ainsi que le prélèvement, la destruction ou la dégradation de fossiles, minéraux et concrétions présents sur ces sites. II. - Les interdictions de détention édictées en application du 1°, du 2° ou du 4° du I ne portent pas sur les spécimens détenus régulièrement lors de l'entrée en vigueur de l'interdiction relative à l'espèce à laquelle ils appartiennent. ". En vertu de l'article L. 411-2 qui transpose l'article 6 de la directive du Conseil 92/43/CE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages : " Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : 1° La liste limitative des habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées ainsi que des sites d'intérêt géologique, y compris des types de cavités souterraines, ainsi protégés ; (...) 4° La délivrance de dérogation aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; (...) ".

5. Le 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement permet de déroger aux interdictions prévues aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1 dès lors que sont remplies les trois conditions distinctes et cumulatives tenant, d'une part, à l'absence de solution alternative satisfaisante, d'autre part, à la condition de ne pas nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle et, enfin, à la justification de la dérogation par l'un des motifs qu'il fixe.

En ce qui concerne la condition tenant au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle :

6. Selon l'arrêté en litige, le projet de réalisation du centre commercial Val Tolosa impliquera, d'une part, la destruction d'espèces protégées que sont la rose de France, le crapaud calamite, le crapaud commun, la grenouille agile, la rainette méridionale, la couleuvre verte et jaune, le lézard des murailles, le lézard vert, le hérisson d'Europe, l'écureuil roux, le sphinx d'épilobe, le grand capricorne, et conduira, d'autre part, à la destruction, à l'altération, et à la dégradation d'aire de repos et/ou de site de reproduction de soixante-quatre espèces protégées parmi lesquelles quatre espèces d'amphibiens, trois de reptiles, onze de mammifères, deux d'insectes et quarante-cinq oiseaux.

7. Le dossier de demande de dérogation comporte une analyse des espèces présentes dans le secteur et de l'impact du projet sur celles-ci, en précisant si ce projet induira la destruction d'individus des espèces concernées ou s'il induira uniquement la destruction ou la dégradation de leur aire de repos ou de leur site de reproduction. Au titre des espèces dont l'arrêté préfectoral a prévu la destruction, il ressort de l'étude jointe au dossier de demande que si le crapaud calamite sera fortement impacté par le projet, cette espèce est assez commune dans la région. Si la grenouille agile est une espèce rare, voire absente, dans l'Aveyron et le Tarn, l'étude reconnaît que l'impact de ce projet sur cette espèce sera faible. Le projet prévoit également la destruction de rainettes méridionales, de couleuvres vertes et jaunes, de lézards des murailles, de lézards verts et d'écureuils roux, mais il ressort de cette même étude que ces espèces sont communes dans le secteur et l'impact du projet sur celles-ci a donc été qualifié de faible. S'agissant du hérisson d'Europe, si l'impact du projet est qualifié de moyen, cette espèce est également courante dans le secteur considéré. Bien que le projet ait des impacts forts sur le sphinx d'épilobe et le grand capricorne du chêne, il résulte de cette même étude que ces espèces sont assez communes dans la région.

8. Cependant, et contrairement aux indications mentionnées à l'annexe I de l'arrêté attaqué qui se borne à indiquer que le projet entraînera la destruction, l'altération, la dégradation de l'aire de repos ou du site de reproduction d'espèces de chiroptères telles que le petit rhinolophe qui est inscrit comme prioritaire au plan d'action national, le grand rhinolophe, le noctule de Leisler, la pipistrelle de Nathuslus, la vespère de Savi, ou d'oiseaux tels que le hibou moyen duc, le milan noir, le moineau friquet, l'oedicnème criard et le bruant jaune, il ressort de l'étude jointe au dossier de demande de dérogation que ce projet impliquera la destruction d'individus de ces différentes espèces. Or, si l'étude qualifie l'impact du projet sur ces différentes espèces protégées de faible voire très faible, elle relève, s'agissant de l'oedicnème criard, qui bénéficie d'un statut de protection européen, national et régional, qu'il se verra fortement impacté par le projet et mentionne un impact moyen sur le bruant jaune, une espèce qui a également tendance à se raréfier. Enfin, il résulte de l'instruction, et en particulier de l'avis du conservatoire botanique national émis le 1er juillet 2013, que deux autres espèces protégées ont été observées avant l'édiction de l'arrêté attaqué dans l'emprise du projet, la Renoncule à feuilles d'Ophioglosse et le Trèfle écailleux, qui n'ont pas été pris en considération par les pétitionnaires dans le dossier présenté à l'appui de leur demande de dérogation. Or, l'arrêté attaqué ne fait pas état de ces espèces végétales menacées et ne prévoit aucune mesure de nature à les préserver de la destruction. En outre, si l'arrêté reconnaît que le projet induira également une destruction du rosier de France, il ne prévoit, au titre des mesures d'évitement, de réduction, d'accompagnement et de suivi de cette espèce protégée, que le confinement de la station résiduelle de rose de France.

9. Dans ces conditions, et compte tenu de la destruction d'espèces végétales et faunistiques rares et protégées, et en particulier de l'oedicnème criard, du rosier de France, du bruant jaune, de la renoncule à feuilles d'ophioglosse et du trèfle écailleux, présentes sur ce site, l'arrêté attaqué, qui n'a d'ailleurs pas fait une exacte appréciation de l'impact de ce projet sur ces différentes espèces, ne permet pas le maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.

En ce qui concerne l'existence d'un intérêt public majeur :

10. L'arrêté contesté est fondé sur le motif tiré de ce que la création du centre commercial dans la zone d'aménagement concerté (ZAC) " Portes de Gascogne " correspond à des raisons impératives d'intérêt public majeur dès lors qu'il s'intègre dans un secteur de la commune de Plaisance-du-Touch destiné à être urbanisé, qu'eu égard à sa qualité architecturale et environnementale, il présente un intérêt au titre de l'animation urbaine, qu'il répond à l'évolution démographique de l'Ouest toulousain et aux besoins de la population locale, qu'il est appelé à accueillir des équipements commerciaux et à offrir des activités de services et de loisirs, qu'il permettra d'introduire une concurrence dans la zone de chalandise et de limiter les déplacements de la clientèle vers les grands pôles commerciaux de l'agglomération toulousaine et enfin, qu'il engendrera la création de 1 785 emplois physiques.

11. En premier lieu, afin de justifier l'intérêt public majeur du projet, les sociétés requérantes soutiennent qu'il s'inscrit dans la politique locale d'aménagement pour la mise en oeuvre de laquelle a été créé le syndicat intercommunal SIDEXE, qui regroupe différentes personnes publiques telles que les communes de Plaisance-du-Touch, la Salvetat-Saint-Gilles, Fonsorbes ainsi que le Conseil départemental de la Haute-Garonne. Les pétitionnaires font ainsi valoir que ce projet, qui répond à un besoin collectif dès lors qu'il s'inscrit dans l'aménagement de la ZAC " Portes de Gascogne ", doit être présumé répondre à des raisons d'intérêt public majeur.

12. Cependant, le schéma de cohérence territoriale (SCOT) de la Grande agglomération toulousaine relève que l'offre en grands centres commerciaux apparaît suffisamment structurée pour répondre à la demande des prochaines années. Il ressort des plans annexés à ce SCOT et au document d'aménagement commercial de la grande agglomération toulousaine approuvé en juin 2009, lequel est présenté comme le volet commercial de ce document d'urbanisme, que la commune de Plaisance-du-Touch ne se situe pas au sein d'une porte métropolitaine et que si le plateau de la Ménude, a été identifié parmi les " sites d'intérêt d'agglomération ", il ne dispose pas de desserte par des voiries principales, ni par des modes de transports collectifs tels que le métro, le tramway ou le train. A ce titre, si d'un côté, le SCOT identifie le site des Portes de Gascogne parmi les pôles majeurs existants, il préconise, s'agissant de la commune de Plaisance-du-Touch sur laquelle est implanté ce site, de limiter le développement des pôles commerciaux existants ou futurs. Selon le document d'aménagement commercial précité, la commune de Plaisance-de-Touch ne constitue d'ailleurs qu'un pôle secondaire qui n'a pas été intégré aux nouveaux pôles d'agglomération majeurs. En effet, il ressort des plans joints à ces différents documents qu'au sein du secteur ouest de la grande agglomération Toulousaine, c'est la commune de Colomiers, laquelle dispose de transports en commun en site propre, qui assure la fonction de centralité urbaine de pôle majeur avec une offre de grandes surfaces de 55 528 m² de surface hors oeuvre nette. Ces contradictions dont sont entachés le SCOT et le document d'aménagement commercial ne permettent pas de caractériser l'intention de leurs auteurs de faire du plateau de la Ménude un pôle majeur métropolitain. Dans ces conditions, le projet de centre commercial à Plaisance de Touch, qui, eu égard à sa surface commerciale, correspondrait à une offre de niveau 3, ne peut être considéré comme s'inscrivant dans une politique publique de développement de pôle commercial majeur. En tout état de cause, la prescription P 95 applicable au pôle majeur existant prévoit un développement des grandes surfaces dans la limite d'une offre totale de surface commerciale de 75 000 m² maximum lorsque le secteur en cause n'est pas desservi en transport en commun en site propre. Or, le projet en litige qui a fait l'objet d'une autorisation d'exploitation commerciale le 21 octobre 2008 porte sur une surface de vente de 63 251 m², et engendrera, selon le document d'aménagement commercial, la création d'une surface commerciale de 79 063 m² en méconnaissance de cette prescription P95. Dans ces conditions, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que leur projet serait prévu par la politique locale d'aménagement et qu'il présenterait, de ce seul fait, un intérêt public majeur au sens du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

13. En second lieu, le SCOT de la Grande agglomération toulousaine, après avoir analysé l'offre commerciale dans ce secteur, a relevé que l'offre en grands centres commerciaux apparaissait suffisamment structurée pour répondre à la demande des prochaines années et a d'ailleurs préconisé de limiter, s'agissant de la commune de Plaisance-du-Touch, le développement des pôles commerciaux existants ou futurs. En outre, et contrairement à ce que soutiennent les requérantes, ce projet n'est pas soutenu par l'ensemble des acteurs institutionnels locaux. A ce titre, le conseil départemental a estimé que ce projet se fondait sur des études obsolètes remontant à 2005 et qu'il ne répondait plus désormais aux besoins des consommateurs. Le comité syndical du syndicat mixte d'études de l'agglomération toulousaine (SMEAT) a également émis un avis défavorable au projet compte tenu des risques qu'il présenterait pour le commerce de proximité, les centres urbains et la saturation du réseau routier qu'il pourrait engendrer. Il résulte enfin de l'instruction que l'ouest toulousain est desservi en grandes surfaces, avec un pôle majeur existant sur la commune de Colomiers, située au nord de la commune de Plaisance-du-Touch, ainsi que des pôles secondaires répartis de manière équilibrée dans le secteur concerné. Dans ces conditions, et en dépit de la création de plus de 1 500 emplois qu'il pourrait engendrer, ce projet ne répond pas à une raison impérative d'intérêt public majeur suffisante pour justifier, en l'espèce, l'atteinte portée par ce projet, comme indiqué au point 9, au maintien dans un état de conservation favorable des populations d'espèces protégées dans leur aire de répartition naturelle alors même que la conception architecturale du projet aurait intégré des préoccupations environnementales. Par suite, la dérogation accordée par l'arrêté du 29 août 2013 ne peut être regardée comme justifiée par l'un des motifs énoncés au c) du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

En ce qui concerne la condition tenant à l'absence de solution alternative satisfaisante :

14. L'arrêté attaqué précise qu'après avoir étudié les contraintes agricoles, forestières, environnementales et celles liées aux techniques de sécurité, aucune solution alternative concernant le lieu d'implantation du projet n'est apparue satisfaisante.

15. Le dossier de demande de dérogation exceptionnelle de destruction d'espèces protégées précise que la détermination du périmètre du projet a pris en considération les deux sites d'intérêt écologique connus, les zones naturelles d'intérêt écologique faunistique et floristique de type I de la forêt de Beauconne et de la ramée, la vallée de l'Aussonnelle et les terrasses de Beauconne, et a envisagé deux hypothèses alternatives, l'une qui intégrait les parcelles très proches de l'Aussonnelle et qui a finalement été écartée compte tenu de leur sensibilité écologique, et l'autre qui englobait des espaces pavillonnaires à l'Est de la RD 24 et qui a également été écartée afin d'éviter de recourir à une procédure d'expropriation. Les pétitionnaires ont ainsi retenu, dans le périmètre du projet, des terrains situés à l'intérieur de la ZAC qui bénéficient d'une topographie plane, d'une bonne accessibilité, et de la proximité de la RN 124 déviée. Cependant, il ressort des pièces du dossier que ces solutions alternatives se fondaient sur une étude d'impact réalisée en 2005 qui, bien qu'elle fût partiellement actualisée en 2008, ne comportait pas un recensement exhaustif du milieu naturel, de la faune, de la flore présentes sur le site et ne reflétait dès lors pas la sensibilité écologique du secteur considéré à la date de la décision attaquée. Ainsi, et comme le reconnaissent les auteurs du dossier présenté à l'appui de la demande de dérogation, les solutions alternatives n'ont été étudiées qu'en fonction de l'état des connaissances dont ils disposaient en 2005, soit près de huit ans avant l'édiction de la dérogation en litige. Or, il est constant que la flore et la faune présentes sur le site avaient sensiblement évolué au cours de ces huit années. Il résulte ainsi de l'instruction que les pétitionnaires ont déterminé le périmètre du centre commercial projeté et excluent les hypothèses alternatives qui auraient pu être envisagées en se fondant sur une analyse erronée de la faune et la flore caractéristique du secteur considéré. En outre, les auteurs du dossier de demande de dérogation reconnaissent eux-mêmes que pour les motifs précédemment indiqués, aucune variante d'implantation du centre commercial n'avait réellement été envisagée et que les trois esquisses architecturales présentées portaient finalement sur le lieu même du site abritant les espèces protégées. Ces esquisses ne pouvaient dès lors être regardées comme des solutions alternatives au sens de l'article L. 411-2 du code de l'urbanisme. Par suite, en estimant qu'il n'existait pas de solution satisfaisante autre que celle retenue par les pétitionnaires concernant l'implantation du projet en cause sur le plateau de la Ménude, le préfet a fait une inexacte application des dispositions précitées du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

16. Il résulte de tout ce qui précède que les sociétés PCE et Foncières Toulouse Ouest ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté préfectoral du 29 août 2013.

Sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement attaqué :

17. Le présent arrêt statue au fond sur les conclusions d'appel des sociétés PCE et Foncières Toulouse Ouest. Par suite, les conclusions de ces dernières tendant au prononcé du sursis à exécution du jugement du 8 avril 2016 du tribunal administratif de Toulouse ont perdu leur objet. Il n'y a dès lors pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

18. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par les SAS PCE et la SNC Foncières Toulouse Ouest sur leur fondement.

19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge d'une part de l'Etat, et d'autre part, des sociétés SAS PCE et SNC Foncières Toulouse Ouest, une somme de 1 000 euros chacun à verser globalement aux associations Présence les terrasses de la Garonne, France nature environnement (FNE) Midi-Pyrénées et Nature Midi-Pyrénées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 16BX01365 de la SAS PCE et de la SNC Foncières Toulouse Ouest.

Article 2 : La requête de la SAS PCE et de la SNC Foncières Toulouse Ouest est rejetée.

Article 3 : La SAS PCE et la SNC Foncières Toulouse Ouest verseront une somme de 1 000 euros globalement aux associations Présence les terrasses de la Garonne, France Nature Environnement (FNE) Midi-Pyrénées et Nature Midi-Pyrénées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. L'Etat versera la même somme de 1 000 euros à ces associations en application de ces mêmes dispositions.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS PCE, à la SNC Foncières Toulouse Ouest, aux associations Présence les terrasses de la Garonne, France Nature Environnement (FNE) Midi-Pyrénées et Nature Midi-Pyrénées et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Christine Mège, président,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 13 juillet 2017

Le rapporteur,

Sabrina Ladoire Le président,

Christine MègeLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

14

N°s 16BX01364, 16BX01365


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01364,16BX01365
Date de la décision : 13/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-045 Nature et environnement.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEGE
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : CABINET BARDON ET DE FAY AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-07-13;16bx01364.16bx01365 ?
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