La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2017 | FRANCE | N°17BX01200

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2017, 17BX01200


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...F...B...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2016 par lequel le préfet de la Charente a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°1602685 en date du 14 mars 2017, le tribunal administratif

de Poitiers a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 avr

il 2017, et un mémoire complémentaire enregistré le 21 juin 2017, Mme E...F...B..., représentée par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...F...B...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2016 par lequel le préfet de la Charente a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°1602685 en date du 14 mars 2017, le tribunal administratif

de Poitiers a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 avril 2017, et un mémoire complémentaire enregistré le 21 juin 2017, Mme E...F...B..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n°1602685 du 14 mars 2017 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2016 du préfet de la Charente ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Charente de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à défaut, de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, en attendant, de lui délivrer, dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur l'arrêté dans son ensemble :

- il est entaché d'un défaut de motivation ;

- il est entaché d'un vice de procédure en ce que le préfet n'a pas procédé à la consultation de la commission du titre de séjour ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation en ce que le préfet n'a pas retenu qu'elle contribue à l'entretien et à l'éducation de son enfant depuis sa naissance ;

- elle porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision susvisée affecte l'intérêt supérieur de son fils mineur tel que protégé par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles ont été édictées en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2017, le préfet de la Charente conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91 647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Philippe Delvolvé a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...est une ressortissante ivoirienne née le 20 août 1980, qui déclare être entrée sur le territoire français le 22 novembre 2015 sous couvert d'un visa de type C attribué par les autorités espagnoles, valable du 14 février 2016 au 12 août 2016. Le 23 juin 2016, elle a déposé une demande de titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. Elle relève appel du jugement rendu le 14 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Charente du 9 novembre 2016 portant à son encontre refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixation du pays de renvoi.

Sur la légalité de l'arrêté du 1er septembre 2016 :

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

2. La requérante reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué. Toutefois, la décision mentionne, avec une précision suffisante pour permettre à la requérante d'en comprendre les motifs et, dépourvue de caractère stéréotypé, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté.

3. Aux termes des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à

l'article L. 431-3. (...) ". Il résulte des dispositions de l'article R. 312-2 dudit code que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à ces articles auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.

L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit

que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à

l'article L. 313-2 soit exigée ; 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que la requérante est mère d'un enfant

français, Tarek A...né le 3 novembre 1999 à Kagbe (Côte d'ivoire). Si elle soutient qu'elle a la charge de son fils depuis sa naissance, qu'elle a communiqué très régulièrement avec lui par téléphone lorsqu'il est parti vivre en France chez son père, M. D...A..., à compter du 2 août 2015, afin d'y poursuivre ses études, et qu'au regard de la relation conflictuelle qu'entretenait son fils avec son père, elle est entrée sur le territoire français pour apaiser cette situation, elle n'apporte aucune pièce à l'appui de telles allégations. Elle se borne à produire, pour établir qu'elle contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils, des quittances de frais de scolarité établies au nom de son fils, une facture du 24 décembre 2010 sur laquelle son nom n'apparait pas, un mandat cash de 35 euros du 8 décembre 2015, un virement de 15 euros du 25 octobre 2016 et un autre de 100 euros du 8 novembre 2016, quatre tickets de caisse du 9 mars 2016 qui ne permettent pas d'identifier l'acheteur et le destinataire de ces achats, une lettre de la CAF portant demande d'informations complémentaires sur laquelle elle indique qu'elle a la charge de son fils depuis le 16 avril 2016, et des attestations qui ne sont pas suffisamment circonstanciées pour justifier qu'elle contribue à l'entretien et à l'éducation de son fils depuis au moins deux ans avant la décision contestée.

5. La requérante n'établit pas non plus avoir tissé sur le territoire français des liens personnels, intenses, anciens et stables et ne justifie d'aucune attache familiale sur le territoire français hormis son fils. Mme B... n'établit ni même n'allègue être dépourvue de famille ou de liens personnels en Côte d'ivoire, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans.

6. Dès lors que la requérante ne satisfait ni aux conditions posées par les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni à celles du 7° dudit article du même code, le préfet de la Charente n'a pas entaché son arrêté d'un vice de procédure par défaut de consultation de la commission du titre de séjour.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

7. La requérante soutient que le préfet a entaché la décision susvisée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle en ce qu'il n'a pas retenu qu'elle contribue à l'entretien de son fils ainsi qu'à son éducation depuis sa naissance. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle. Par suite, ce moyen doit être écarté.

8. Pour l'application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que la décision portant refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Si les attestations fournies en appel indiquent que la requérante a eu la charge de son enfant et qu'elle a contribué à son entretien et à son éducation du moins jusqu'au départ de celui-ci pour la France, la seule production de messages échangés entre elle et son fils ne démontrent pas que les liens entre elle et son fils, âgé de 17 ans et qui avait décidé de s'éloigner de la Côte d'Ivoire pour rejoindre son père en France, seraient tels qu'en refusant à Mme B...la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de la Charente aurait méconnu les stipulations précitées.

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

10. Compte tenu des circonstances exposées ci-dessus, notamment au point 5, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les décisions susvisées méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Dans les circonstances exposées au point 9, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet a, en édictant les décisions susmentionnées, méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi

du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Charente.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Gil Cornevaux, président-assesseur,

M. Philippe Delvolvé, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2017.

Le rapporteur,

Philippe Delvolvé

Le président,

Elisabeth Jayat Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme,

Le greffier

Vanessa Beuzelin

2

N°17BX01200


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01200
Date de la décision : 11/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Philippe DELVOLVÉ
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : BONNEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-07-11;17bx01200 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award