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27/06/2017 | FRANCE | N°17BX00900

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 27 juin 2017, 17BX00900


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1605474 du 8 mars 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 mars 2017, MmeA..., r

eprésentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 mars 2017 du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1605474 du 8 mars 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 mars 2017, MmeA..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 mars 2017 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 22 novembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour en qualité de salarié au titre du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En effet, elle est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel et d'une promesse d'embauche pour un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein. Son salaire répond aux exigences des dispositions de l'article R. 5221-21 du code du travail. Le préfet n'a pas pris en compte la spécificité et le niveau de qualification de son emploi, le fait qu'elle possède les compétences requises et qu'elle donne entièrement satisfaction à ce dernier dans l'exercice de ses fonctions, et la circonstance que son employeur ait rencontré des difficultés à pourvoir ce poste. Il n'a pas davantage tenu compte de l'avis favorable émis par l'unité territoriale de la Haute-Garonne de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi le 13 juillet 2016. Enfin le préfet s'est mépris sur ses fonctions d'aide cuisinière en spécialité vietnamienne en les amalgamant à celles d'employé polyvalent de restauration collective et lui a, à tort, opposé la situation de l'emploi dans un secteur qui n'est pas le sien ;

- il ressort des termes mêmes de la lettre que le préfet a adressée à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi le 8 août 2016, que ce dernier a commis un détournement de pouvoir, dès lors que par cette lettre, il demandait aux services du ministre du travail de lui apporter les arguments nécessaires à la motivation du refus de séjour qu'il envisageait de prendre à son encontre. En se fondant sur la seule durée de son séjour en France et en invoquant la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, alors qu'elle se trouvait en situation régulière en France, le préfet a entaché sa décision d'illégalité ;

- la décision de refus de titre de séjour est également entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle remplit les conditions pour bénéficier d'une admission au séjour au titre du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En effet, elle est mère d'un enfant français mineur résidant en France né de son concubinage avec un ressortissant français ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi sont dépourvues de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2017, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête de Mme A...en soutenant que les moyens qu'elle a invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 9 mai 2017, la clôture de l'instruction a été reportée au 16 mai 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,

- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...a épousé, le 26 novembre 2012 à Dong Thap (Vietnam), M. E... C..., de nationalité française, né le 19 septembre 1986 à Ho Chi Minh (Vietnam). Elle est entrée régulièrement en France, le 31 janvier 2013, sous le couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour valant premier titre de séjour pour une durée d'un an à compter du 30 janvier 2013. L'intéressée s'est vue octroyer, le 31 janvier 2014, une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " régulièrement renouvelée jusqu'au 30 janvier 2016. Le 21 janvier 2016, à la suite de sa séparation avec son conjoint français, Mme A...a sollicité le changement de son statut et son admission au séjour en France en qualité de salariée sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA). Elle relève appel du jugement n° 1605474 du 8 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

2. Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention "salarié". / (...). ". En vertu de l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : " 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule (...) 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, dans la même branche professionnelle (...) 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L.3232-1 (...) " ;

3. MmeA..., qui ne conteste pas qu'elle ne remplit plus les conditions prévues par le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) en l'absence de vie commune avec son époux, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée pendant la validité de sa carte de séjour obtenue au titre de la vie privée et familiale. A l'appui de cette demande de changement de statut, elle s'est prévalue d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel, signé le 14 novembre 2014 avec M. F...B..., propriétaire exploitant d'un restaurant pour un emploi d'aide cuisinière, niveau 1, échelon 1. Si le responsable de l'unité territoriale de la Haute-Garonne de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE ) a émis, le 13 juillet 2016, un avis favorable à la demande de MmeA..., le préfet qui n'était pas lié par cet avis, a examiné la demande de l'intéressée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et a relevé d'une part, que la rémunération proposée était insuffisante au regard de l'article R. 5221-20 alinéa 6 du code du travail, et, d'autre part, que son employeur n'avait pas déposé d'offre d'emploi auprès des services de pôle emploi, alors qu'il existait 1 392 demandeurs d'emploi en recherche dans le secteur " d'employé polyvalent de restauration " pour seulement 202 offres. Il ressort des pièces du dossier, que le contrat de travail susmentionné portait sur une quotité mensuelle de travail de 104 heures et une rémunération brute de 1 005,68 euros, et qu'ainsi, l'emploi de la requérante, à durée indéterminée et à temps partiel, ne lui garantissait pas le salaire minimum interprofessionnel de croissance mensuel, lequel s'établissait, en 2016, au montant brut de 1 466,67 euros. La circonstance que la rémunération prévue par ce contrat soit inférieure au montant minimum exigé par les dispositions du 6° de l'article R. 5221-20 du code du travail au motif qu'elle exerçait une activité à temps partiel et non à temps plein, est, à cet égard, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, dès lors que ce critère ne figure pas parmi ceux énoncés par ces dispositions. Si elle soutient en outre que le préfet ne saurait lui opposer la situation des employés polyvalents de restauration dès lors qu'elle exercerait les fonctions d'aide-cuisinière en spécialité vietnamienne, il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier de l'article 6 du contrat de travail susévoqué, que son emploi est soumis aux dispositions de la convention collective " Restauration rapide " dont les emplois de niveau 1, échelon 1 correspondent à l'exécution de tâches simples, répétitives et variées et que son employeur n'a ni renseigné le code Rome de l'imprimé Cerfa d'autorisation de travail, ni accompli de recherche auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail. Par suite, la requérante qui n'établit pas, au demeurant, la spécificité des fonctions qu'elle occupe comme " aide cuisinière ", ne saurait utilement contester que cet emploi n'équivaudrait pas à l'emploi tel que précisé par la DIRECCTE sous le Code Rome G 1603 " employé polyvalent de restauration ". Enfin, si Mme A...se prévaut de son diplôme d'ingénieur en technologie de production alimentaire, qui lui a été délivré par l'université de technologie de Saïgon le 10 novembre 2011, elle ne justifie pas de l'adéquation entre ce diplôme et les caractéristiques de l'emploi pour lequel elle bénéficie d'un contrat de travail. Par suite, c'est sans méconnaître les dispositions précitées du CESEDA que le préfet a rejeté la demande de Mme A...tendant à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ".

4. Par courriel du 8 août 2016, les services de la préfecture en charge de l'instruction de la demande de Mme A...se sont rapprochés de ceux de la DIRECCTE. Avant d'indiquer qu'un refus de titre de séjour est envisagé à l'encontre de MmeA..., ce courriel mentionne que "la règle de l'opposabilité de l'emploi de même que le seuil réglementaire de salaire n'est pas respecté". Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce courriel aurait été émis dans un autre but que celui de connaître la situation de l'emploi dans la profession considérée et la zone géographique concernée. Par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

5. Contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des termes de l'arrêté que le préfet lui ait refusé le séjour en se fondant sur la seule durée de son séjour en France ni en lui opposant les conditions de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur.

6. Si la requérante soutient qu'elle est mère d'un enfant français et peut dès lors se prévaloir d'un titre de séjour vie privée et familiale sur le fondement de l'article L. 313-11, 6° du CESEDA, il ressort toutefois du formulaire de demande de titre de séjour, renseigné par ses soins, qu'elle n'a pas sollicité de titre de séjour en qualité de mère d'enfant français. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité d'un refus de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11, 6° du CESEDA est inopérant.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement et de la décision fixant le pays de renvoi.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 8 mars 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2016 du préfet de la Haute-Garonne. Par voie de conséquence, les conclusions de l'intéressée tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Christine Mège, président,

M. Fréderic Faïck, premier conseiller

Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 27 juin 2017.

Le rapporteur,

Sabrina Ladoire Le président,

Christine MègeLe greffier,

Evelyne Gay-Boissières

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Evelyne Gay-Boissières

N° 17BX009002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX00900
Date de la décision : 27/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEGE
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : ESCUDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-06-27;17bx00900 ?
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