La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/06/2017 | FRANCE | N°16BX04190

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 20 juin 2017, 16BX04190


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1605429 du 7 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 décembre 2016 et un mémoire enregist

ré le 18 mars 2017, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1605429 du 7 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 décembre 2016 et un mémoire enregistré le 18 mars 2017, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 décembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit de la somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle n'est pas suffisamment motivée ; elle ne vise pas, en particulier, le refus de séjour édicté à son encontre le 22 septembre 2016 ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine du médecin de l'agence régionale de santé ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car son état de santé le protégeait contre une mesure d'éloignement ; il souffre d'un syndrome post-traumatique résultant des événements vécus en Algérie, pays dans lequel il ne pourrait être soigné en raison de l'origine de sa pathologie ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; en effet, il a de fortes attaches sur le territoire national, notamment sa compagne, de nationalité française, avec laquelle il devait se marier au mois de décembre 2016 ;

S'agissant de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en édictant cette décision qui ne prend pas en considération son état de santé ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est également insuffisamment motivée ;

- elle est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en raison du risque de réactivation du syndrome post traumatique auquel il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine.

Par le mémoire en défense, enregistré le 20 février 2017, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête de M. A...et s'en remet aux documents qu'il a produits en première instance.

Par une décision du 9 mars 2017, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée le 3 janvier 2017 par M.A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sylvie Cherrier,

- et les conclusions de M. D...de la Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., de nationalité algérienne, né le 25 septembre 1992, est entré régulièrement en France le 17 août 2010 sous le couvert d'un visa de court séjour délivré par le consulat général de France à Oran. Le 27 février 2013, il a fait l'objet d'un refus de séjour assorti d'une mesure d'éloignement à la suite du rejet définitif par la cour nationale du droit d'asile, le 7 décembre 2012, de sa demande d'admission au titre de l'asile, décision confirmée le 10 octobre 2013 par le tribunal administratif de Toulouse et par la cour le 7 mai 2014. Après avoir recueilli l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, le préfet de la Haute-Garonne a, par un arrêté du 27 février 2015, rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour présentée sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et lui a fait obligation de quitter le territoire français, décision confirmée par le tribunal administratif de Toulouse le 10 juin 2015 et par la cour le 4 février 2016. A la suite de son interpellation par les services de police, le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre, le 2 décembre 2016, un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de renvoi. M. A...relève appel du jugement du 7 décembre 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) ".

3. Il est constant que, conformément à ce qu'a estimé le médecin de l'agence régionale de santé dans son avis émis le 30 juillet 2014, les graves troubles psychiatriques dont souffre M. A..., qui ont déjà nécessité à trois reprises son hospitalisation, nécessitent une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans son avis émis deux ans et demi avant l'édiction de l'arrêté contesté, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé qu'un traitement approprié existait en Algérie. Le requérant produit toutefois des certificats émanant de trois médecins différents, notamment un certificat établi le 17 mai 2016 par un expert près la cour d'appel, médecin agréé pour les étrangers malades, selon lesquels les troubles dont il souffre sont en lien avec des évènements traumatiques vécus en Algérie, de sorte que son retour dans ce pays entraînerait une aggravation de son état de santé faisant obstacle à ce qu'il puisse y recevoir effectivement des soins appropriés. Ni en première instance, ni en appel, le préfet n'a apporté de contestation sur la teneur de ces certificats et notamment de celui du 17 mai 2016 précité. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que, en prenant la mesure d'éloignement contestée, le préfet a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être accueilli. L'illégalité de cette décision entraîne, par voie de conséquence, l'annulation du refus de départ volontaire et de la décision fixant le pays de renvoi.

4. Il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté contesté du 2 décembre 2016.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A...de la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 7 décembre 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse et l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 2 décembre 2016 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 300 euros à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...E...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2017 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 20 juin 2017.

Le rapporteur,

Sylvie CHERRIER

Le président,

Aymard de MALAFOSSELe greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition certifiée conforme.

4

N° 16BX04190


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX04190
Date de la décision : 20/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CHAMBARET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-06-20;16bx04190 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award