Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...B...fonctionnaire du ministère de la défense a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du ministre de la défense du 23 juin 2010, lui refusant le bénéfice des dispositions du plan d'accompagnement des restructurations (P.A.R.), ensemble la décision de rejet de son recours gracieux en date du 5 août 2010 et la décision de rejet de son recours hiérarchique en date du 30 novembre 2010, d'enjoindre au ministre de la défense de prendre une décision l'autorisant à bénéficier du P.A.R., de condamner l'Etat à lui verser les sommes dues en application des dispositions relatives au P.A.R. et, en outre, 32 836 euros au titre de l'indemnisation de la mobilité géographique des personnels civils du ministère de la défense, 15 000 euros au titre de la prime de restructuration de service, 7 708,84 euros au titre du remboursement de son déménagement et, enfin, la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle estime avoir subi ;
Par un jugement n° 1100587 du 20 novembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté la demande de MmeB....
Procédure devant la cour :
Par une requête du 21 février 2015 et par un mémoire complémentaire du 16 avril 2017 MmeB..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe ;
2°) d'annuler la décision du ministre de la défense du 23 juin 2010, lui refusant le bénéfice du plan d'accompagnement des restructurations (P.A.R.), ensemble les décisions du ministre de la défense, des 5 août 2010 et 30 novembre 2010, portant rejet de son recours gracieux et de son recours hiérarchique ;
3°) d'enjoindre au ministre de la défense de prendre une décision d'attribution du P.A.R ;
4° ) de condamner l'Etat à lui verser les sommes dues au titre du P.A.R. et, en outre, 32 836 euros au titre de l'indemnisation de la mobilité géographique des personnels civils du ministère de la défense, 15 000 euros au titre de la prime de restructuration de service, 7 708,84 euros au titre du remboursement de son déménagement et, enfin, la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors qu'elle n'a pas fait l'objet d'une convocation à l'audience devant le tribunal administratif de la Guadeloupe compte tenu de ce que l'avis d'audience a été adressé au cabinet d'avocats qui la représentait, mais qui était placé en liquidation judiciaire ; qu'elle n'a découvert la tenue de l'audience devant le tribunal, que lorsque le jugement lui a été notifié et dans ces conditions, elle n'a pu défendre ses droits devant la juridiction administrative ;
- le jugement du 20 novembre 2014 est également entaché d'irrégularité dès lors qu'il lui a été notifié de façon incomplète le 21 novembre 2014 ne lui ayant été notifié de façon complète que le 21 janvier 2015 ;
- sur le fond, contrairement à ce que soutient l'administration, elle n'a jamais présenté de demande de mutation pour la Guadeloupe, l'arrêté du 4 novembre 2008 qui prononce son affectation à la gendarmerie de Pointe à Pitre ne lui ayant jamais été notifié, cet acte ayant été élaboré à postériori pour justifier le comportement de l'administration ;
- sa mutation aux Antilles répondait à l'intérêt du service, compte tenu de la situation de harcèlement moral qui était la sienne ;
- par un courrier du 6 août 2008, le directeur des ressources humaines du ministère de la défense l'a mise en demeure de choisir un poste parmi 25 affectations en France métropolitaine ;
- dans ces conditions contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, et à ce que soutient le ministre, son affectation en Guadeloupe ne doit pas être regardée comme prise à sa demande, mais comme constituant une mutation d'office lui ouvrant droit au bénéfice de la prime de restructuration ;
- qu'elle a été soumise à une pression en témoignant en sa qualité d'assistante sociale, des faits qu'elle avait observés dans l'exercice de ses fonctions ;
- le bénéfice de l'indemnité prévue par le plan d'accompagnement des restructurations doit donc lui être accordé ;
- le ministre de la défense n'a pas tenu compte du harcèlement moral qu'elle a subi ;
- qu'elle a ainsi été victime le 31 mars 2010 d'une agression verbale ayant entrainé un malaise et son hospitalisation ;
- l'affectation en Guadeloupe n'est en fait jamais intervenue, si bien que du fait de la suppression de 1er régiment du Génie d'Illkirch, elle a du demander une affectation ;
- la mutation dont elle a fait l'objet étant le résultat de la décision de restructuration du site d'Illkirch, le bénéfice de la prime de restructuration, devait lui être accordé en vertu de l'article 5 du décret du 17 avril 2008 ;
- elle a droit à la prime de restructuration, qui s'élève à la somme de 15 000 euros, ainsi qu'en application des dispositifs du plan d'accompagnement des restructurations à ce que l'Etat soit condamné à lui verser les sommes de 32 836 euros au titre de l'indemnisation de la mobilité géographique des personnels civils du ministère de la défense et 7 708,84 euros au titre du remboursement de son déménagement ;
- compte tenu des pressions et des menaces dont elle a été victime, elle a droit au titre du préjudice moral à la somme de 15 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2015, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête de MmeB....
Il fait valoir que :
- contrairement à ce que la requérante soutient, elle a bien demandé sa mutation en Guadeloupe, par différents courriers notamment des 18 juin et 26 juillet 2008, dernier courrier dans lequel Mme B...demandait une affectation à la gendarmerie de Pointe à Pitre ; elle a rappelé son souhait d'être mutée aux Antilles, par un courrier du 8 septembre 2008
- la décision de mutation en Guadeloupe du 4 novembre 2008 lui a bien été notifiée, par lettre recommandée dont elle a accusé réception le 17 novembre 2008 en apposant sa signature ;
- elle a reconnu par des courriers postérieurs des 24 novembre et 23 décembre 2008, et du 10 janvier 2009, avoir reçu notification de la décision de mutation ;
- si Mme B...soutient qu'elle se trouvait sur le site d'Illkirch jusqu'au 14 septembre 2010, son arrêté de mutation prévoyait qu'elle devait rejoindre son affectation le 16 août 2010 et débuter son activité le 6 septembre 2010 ;
- l'article 5 du décret du 17 avril 2008 exclut le bénéfice du plan d'accompagnement des restructurations, pour un agent qui a sollicité sa mutation ;
- en ce qui concerne le harcèlement moral, si Mme B...fait référence au malaise qu'elle a subi le 31 mars 2010 et qu'elle impute à sa hiérarchie, les faits invoqués par Mme B... ne sont pas en relation avec les décisions attaquées ;
- faute d'illégalité des décisions attaquées, les conclusions en injonction présentées par MmeB..., ne peuvent être que rejetées ;
- les préjudices allégués en relation avec le défaut de versement de l'indemnité prévue par le plan d'accompagnement des restructurations ne peuvent être que rejetés, faute d'illégalité du refus d'attribution de cette indemnité ;
- en ce qui concerne les autres préjudices, et notamment le préjudice moral invoqué, aucune faute ne peut être attribuée à l'Etat, qui a sur la base des préconisations du médecin du travail, répondu aux attentes de Mme B...en l'affectant en Guadeloupe, lui a versé la somme de 5822, 68 euros au titre des frais de changements de résidence et l'a fait bénéficier d' une aide sociale versée à son déménageur ;
- contrairement à ce que soutient MmeB..., elle a une fille de vingt huit ans et non des " enfants à charge ".
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- le décret n° 2008-366 du 17 avril 2008 ;
- l'arrêté du ministre de la défense du 9 avril 2010 fixant la liste des opérations de restructuration ou de rationalisation des fonctions d'administration générale et de soutien commun des services et établissements du ministère de la défense ouvrant droit à certaines indemnités de restructuration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant MmeB....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B...fonctionnaire du ministère de la défense, a demandé au tribunal administratif de Strasbourg par une requête réattribuée au tribunal administratif de la Guadeloupe, par une ordonnance de renvoi en date du 1er juillet 2011 du président du Tribunal administratif de Strasbourg, l'annulation de la décision du ministre de la défense du 23 juin 2010, lui refusant le bénéfice des dispositions du plan d'accompagnement des restructurations (P.A.R.) et des décisions du ministre de la défense, des 5 août 2010 et 30 novembre 2010, portant rejet de son recours gracieux et de son recours hiérarchique, d'enjoindre au ministre de la défense de lui attribuer le P.A.R, et de condamner l'Etat à lui verser les sommes dues en application des dispositions relatives au P.A.R. et, en outre, 32 836 euros au titre de l'indemnisation de la mobilité géographique des personnels civils du ministère de la défense, 15 000 euros au titre de la prime de restructuration de service, 7 708,84 euros au titre du remboursement de son déménagement et, enfin, la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral selon elle subi. Par un jugement n° 1100587 du 20 novembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté la demande de MmeB....
Sur la régularité du jugement :
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen invoqué à l'appui de ces conclusions :
2. Aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience (...) ". Si l'avis d'audience est adressé à l'avocat mais que la convocation à l'audience de l'avocat n'est pas fructueuse, il appartient à la juridiction de convoquer la partie elle-même. En l'espèce, le tribunal administratif de la Guadeloupe a convoqué pour l'audience du 6 novembre 2014, l'avocat de Mme B...par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 octobre 2014 réceptionnée le 13 octobre 2014 par l'avocat de MmeB.... Toutefois, le bâtonnier de l'ordre des avocats à la cour d'appel de Nancy a indiqué au tribunal administratif de la Guadeloupe par courrier du 20 octobre 2014, que la société d'avocats qui défendait Mme B... avait été placée en liquidation judiciaire. Dans ces conditions, faute pour Mme B... d'avoir été convoquée à l'audience du 6 novembre 2014 devant le tribunal administratif de la Guadeloupe, elle est fondée à demander l'annulation du jugement pour irrégularité.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de MmeB....
Sur les conclusions en annulation des décisions de refus d'attribution de la prime de restructuration de service :
Sur la légalité externe :
4. Par une décision du 28 novembre 2008, publiée au Journal officiel de la République française du 4 décembre 2008, le ministre de la défense a donné une délégation de signature, à MmeD..., administratrice civile, à l'effet de signer tous actes, arrêtés et décisions à l'exclusion des décrets au nom du ministre de la défense dans la limite des attributions de la direction. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, invoqué par MmeB..., tant à l'encontre de décision initiale du 23 juin 2010 que de la décision du 30 novembre 2010 prise sur recours hiérarchique ne peut qu'être écarté, la circonstance par ailleurs invoquée selon laquelle ces deux décisions ont été toutes deux signées par MmeD..., se trouvant sans incidence, dès lors que comme il est indiqué, Mme D...bénéficiait d'une délégation de signature pour signer ces deux décisions.
Sur la légalité interne :
5. En premier lieu, si Mme B...se prévaut de l'instruction n°383555/DEF/SGA/DRH-MD du 7 juillet 2010 du ministre de la défense, relative au plan d'accompagnement des restructurations, cette instruction n'a pas de caractère réglementaire, alors qu'en tout état de cause, la requérante n'invoque aucune disposition de cette instruction qui serait de nature à entacher d'illégalité les décisions de refus d'attribution du plan d'accompagnement des restructurations
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er du décret n° 2008-366 du 17 avril 2008 instituant une prime de restructuration de service et une allocation d'aide à la mobilité du conjoint : " En cas de restructuration d'une administration de l'Etat, de l'un de ses établissements publics ou d'un établissement public local d'enseignement, une prime de restructuration de service peut être versée aux magistrats, aux fonctionnaires et agents non titulaires de l'Etat de droit public recrutés pour une durée indéterminée. Les opérations de restructuration de service ouvrant droit à la prime sont fixées par arrêté ministériel, pris après avis des comités techniques compétents. Cette prime peut, le cas échéant, être complétée par une allocation d'aide à la mobilité du conjoint. ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " La prime de restructuration de service et l'allocation d'aide à la mobilité du conjoint sont accordées sans préjudice de l'application des dispositions du décret du 28 mai 1990 susvisé. Elles sont exclusives de toute autre indemnité de même nature. / Les déplacements d'office prévus par l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ainsi que les mutations prononcées par l'administration sur demande des fonctionnaires n'ouvrent pas droit à la prime de restructuration de service. ".
7. Il résulte de ces dispositions que l'attribution de la prime de restructuration de service, est exclue dans l'hypothèse où elle est sollicitée par un fonctionnaire ayant travaillé sur un site concerné par une opération de restructuration au sens des dispositions précitées, mais ayant obtenu une mutation à sa demande.
8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que MmeB..., antérieurement à la décision du ministre de la défense, du 31 juillet 2008, qui classe un certain nombre de sites, dont le site d'Illkirch, sur la liste des sites en restructuration, et qui indique que le site d' Illkirch ferait l'objet d'une restructuration en 2010, a présenté de nombreuses demandes de mutation pour la Guadeloupe, dès le 8 décembre 2006, les 8 mars, 2 avril et 17 octobre 2007, 8 avril 2008 et a confirmé sa demande de mutation le 8 septembre 2008. Contrairement à ce que la requérante soutient, l'arrêté du 4 novembre 2008 de mutation en Guadeloupe lui a été régulièrement notifié, par lettre recommandée dont Mme B...a accusé réception le 17 novembre 2008 en apposant sa signature. Dans ces conditions, Mme B...n'était pas éligible au bénéfice de la prime de restructuration de service.
9. Mme B...soutient toutefois qu'au sens de l'article 5 précité du décret du 17 avril 2008, elle ne pourrait être considérée comme ayant présenté une demande de mutation, l'excluant du bénéfice de la prime de restructuration de service, dès lors qu'elle a subi des pressions pour présenter sa demande de mutation. Si par un arrêt du 12 novembre 2009, n° 08NC01441, la cour administrative d'appel de Nancy a condamné l'Etat à verser à Mme B... la somme de 10 000 euros au titre du harcèlement moral subi pour la période antérieure au 1er décembre 2006, et si les pièces du dossier établissent que le climat de travail de MmeB..., qui a fait l'objet jusqu'à l'intervention de sa mutation de nombreux arrêts de travail pour maladie, était dégradé, il ne ressort pas des pièces du dossier, qu'au sens de l'article 5 du décret du 17 avril 2008, MmeB..., même si elle fait état dans ses demandes de mutation d'un climat de travail dégradé, ait été contrainte de présenter des demandes de mutation. Dans ces conditions, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que les décisions des 23 juin, 5 août et 30 novembre 2010, lui refusant le bénéfice des dispositifs du plan d'accompagnement des restructurations sont entachées d'illégalité. Les conclusions en annulation présentées par Mme B... doivent donc être rejetées.
Sur les conclusions indemnitaires :
10. Compte tenu du rejet des conclusions en annulation des décisions lui refusant le bénéfice des dispositifs du plan d'accompagnement des restructurations, les conclusions indemnitaires présentées par Mme B...tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes afférentes au plan d'accompagnement des restructurations ne peuvent être que rejetées.
11. Si Mme B...demande la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 15 000 euros, au titre du préjudice moral qu'elle indique avoir subi, elle n'indique pas si le préjudice invoqué se rattache aux décisions de refus de la prime de restructuration de service, lesquelles comme il a été dit, ne sont pas entachées d'illégalité ou au harcèlement moral qu'elle aurait subi, lequel a fait l'objet d'une réparation à hauteur de 10 000 euros par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 12 novembre 2009. Les conclusions présentées au titre de la réparation du préjudice moral doivent donc également être rejetées.
Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont Mme B...demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1100587 du 20 novembre 2014 du tribunal administratif de la Guadeloupe est annulé.
Article 2 : La demande de Mme B...présentée devant le tribunal administratif et le surplus de sa requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 22 mai 2017, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, premier conseiller,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 juin 2017.
Le rapporteur,
Pierre Bentolila Le président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre des armées, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 15BX00653