Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A...G..., agissant en leur qualité de représentants légaux de leur fille mineureB..., ont demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner l'Etat et la commune de Saint-Pierre à leur verser la somme de 96 000 euros en réparation des préjudices subis par leur fille à l'occasion de l'accident dont elle a été victime le 18 septembre 2009 à l'école Jacques Prévert lors de la pause méridienne, et de mettre à la charge de l'Etat et de la commune de Saint-Pierre la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1300726 du 5 mars 2015, le tribunal administratif de La Réunion a condamné la commune de Saint-Pierre à verser à M. et Mme A...G...la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral subi par leur fille mineureB....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 mai 2015, M. et Mme A...G..., représentés par MeD..., demandent à la cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 5 mars 2015 en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de leur demande ;
2°) de porter l'indemnisation sollicitée à la somme de 96 000 euros en la mettant à la charge solidaire de l'Etat, de la commune de Saint-Pierre, M. C...et de la SMACL assurances, assureur de la commune ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, de la commune de Saint-Pierre et de la SMACL assurances, la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la responsabilité de l'Etat et de la commune de Saint-Pierre est engagée car leur fille a été victime d'un accident en raison d'un défaut de surveillance ainsi que de la faute commise en s'abstenant de prévenir les secours ;
- la présence d'un enseignant au moment de l'accident est de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; aucun dispositif de surveillance constante des élèves n'a été mis en place en méconnaissance de l'article D. 321-12 du code de l'éducation ;
- les fautes commises justifient l'allocation d'une indemnité d'un montant de 96 000 euros, dès lors que, selon l'expert, leur fille B...a subi une incapacité permanente partielle de 30 %, qu'elle a subi un préjudice esthétique, évalué à 4 sur une échelle de 1 à 7, compte tenu d'une cicatrice abdominale disgracieuse, un préjudice lié aux souffrances physiques endurées évaluées par l'expert à 4/7, un préjudice physique de 4/7, et des troubles dans ses conditions d'existence évalués à 4/7.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2015, la commune de Saint-Pierre, représentée par MeE..., conclut, à titre principal et par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement en tant qu'il a retenu sa responsabilité, à ce qu'il soit mis à la charge des requérants la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à la confirmation du jugement, ainsi qu'à l'annulation des opérations d'expertise.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme A...G...ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2016, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête de M. et Mme A...G....
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme A...G...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 26 septembre 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 octobre 2016 à 12 heures.
Par un courrier du 2 mai 2017, les parties ont été averties, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires présentées par M. et Mme A...G...en tant qu'elles sont dirigées contre l'assureur de la commune.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Larroumec,
- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 18 septembre 2009, la jeune B...A...G..., alors âgée de huit ans et scolarisée à l'école Jacques Prévert située sur la commune de Saint-Pierre de La Réunion, s'est blessée en faisant une chute dans un escalier alors qu'elle faisait " la course " avec une camarade durant la pause méridienne. M. et Mme A...G..., parents de la jeuneB..., ont saisi, le 18 octobre 2010, le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion qui, par une ordonnance du 14 novembre 2011, a prescrit une expertise médicale. Imputant l'accident dont leur fille a été victime à un défaut de surveillance engageant la responsabilité de l'Etat et de la commune de Saint-Pierre, M. et Mme A...G..., agissant en qualité de représentants légaux de leur fille mineure, ont saisi ce même tribunal qui, par un jugement du 5 mars 2015, a condamné la commune de Saint-Pierre à leur verser une indemnité de 3 000 euros en réparation du préjudice moral subi par Mlle B...A...G.... M. et Mme A...G...demandent la réformation de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit intégralement à leurs conclusions indemnitaires, de porter l'indemnisation à la somme de 96 000 euros, en mettant cette somme à la charge solidaire de l'Etat, de la commune de Saint-Pierre, de M.C... et de la SMACL Assurances, assureur de la commune. Par la voie de l'appel incident, la commune de Saint-Pierre conclut, à titre principal, à la réformation du jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité et, à titre subsidiaire, à l'annulation pour irrégularités des opérations d'expertise, et au rejet de la requête de M. et Mme A...G.... Le ministre de l'éducation nationale demande, pour sa part, le rejet de la requête et la confirmation du jugement qui a mis l'Etat hors de cause.
Sur les conclusions indemnitaires dirigées contre la société SMACL Assurances :
2. M. et Mme A...G...demandent la condamnation de la société SMACL Assurances, assureur responsabilité civile de la commune de Saint-Pierre. Ces conclusions, sont, en tout état de cause, irrecevables dès lors qu'elles sont présentées devant un juge incompétent pour en connaître et ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
Sur la responsabilité de M.C... :
3. Pour demander réparation à M. C...des conséquences dommageables de son défaut de surveillance et de son manque de diligence à avertir les services de secours, les requérants se fondent sur les fautes commises par M. C... en sa qualité de responsable de cantine employé par la commune de Saint-Pierre. Les manquements reprochés à M. C...ne pouvant être regardés comme des fautes personnelles détachables du service, ne sauraient en conséquence engager que la seule responsabilité de la commune
Sur la responsabilité de la commune de Saint-Pierre :
4. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise diligentée en référé que le 18 septembre 2009, vers 12 h 30, pendant la récréation suivant le repas pris à la cantine avant la reprise des classes, et alors que les élèves étaient sous la seule surveillance de dix employés de la commune, la jeune B...A...G...a été blessée en chutant dans un escalier après une course poursuite avec une camarade. Cet accident a généré, outre un traumatisme à la bouche avec enfoncement des incisives supérieures, un traumatisme abdominal avec perforation du duodénum qui a nécessité, le lendemain, une intervention chirurgicale. Il n'est pas contesté que le nombre d'adultes affectés à la surveillance des élèves durant la pause méridienne était suffisant, eu égard au nombre d'enfants à encadrer. Il n'est pas établi qu'une surveillance accrue des élèves aurait permis d'éviter l'accident dont a été victime la jeuneB..., sans que le jeu auquel elle se livrait puisse être regardé comme étant particulièrement dangereux.
5. Toutefois, il résulte de l'instruction que si l'accident a eu lieu vers 12h30, ce n'est qu'à 14h que la jeune B...a été prise en charge par les services de secours et qu'elle a pu être hospitalisée. Immédiatement après l'accident, l'enfant, qui avait été placée dans un bureau, n'a reçu aucun soin si ce n'est une toilette par un agent de service. La commune de Saint-Pierre ne conteste pas que l'agent communal chargé du service de restauration scolaire, présent sur les lieux au moment de l'accident, n'a pas jugé nécessaire de faire appel aux services de secours, se bornant à contacter les parents, lesquels sont arrivés sur place vers 13 heures 30. Si la commune entend s'exonérer de sa responsabilité en soutenant que son agent n'a commis aucune négligence en refusant d'appeler les services de secours au seul motif qu'il ne pouvait soupçonner l'existence de lésions internes liées au traumatisme abdominal révélé le lendemain, le saignement abondant provoqué par le traumatisme à la bouche justifiait que les services scolaires préviennent sans attendre les services de secours. Ainsi, en se bornant à contacter les parents de la jeuneB..., le personnel communal n'a pas réagi de manière appropriée à la situation, dès lors que ce comportement a retardé la prise en charge médicale de la victime. Ce retard de prise en charge, qui révèle une faute dans l'organisation du service, est de nature à engager la responsabilité de la commune de Saint-Pierre.
Sur la responsabilité de l'Etat :
6. Contrairement à ce qu'allèguent les requérants, la seule présence d'un enseignant au moment de l'accident, à la supposée établie, n'est pas, à elle seule, de nature à établir que la direction de l'école a commis une faute dans la surveillance des élèves susceptible d'entraîner la responsabilité de l'Etat.
7. Aux termes des dispositions de l'article D. 321-12 du code de l'éducation : " La surveillance des élèves durant les heures d'activité scolaire doit être continue et leur sécurité doit être constamment assurée en tenant compte de l'état de la distribution des locaux et du matériel scolaires et de la nature des activités proposées. L'accueil des élèves est assuré dix minutes avant l'entrée en classe. (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'à partir de la prise en charge des élèves par les enseignants, qui a lieu dans l'établissement à 13h20 soit dix minutes avant l'entrée en classe, la surveillance des enfants est assurée sous la responsabilité du chef d'établissement, soit par les personnels communaux, soit par les enseignants, que les enfants se trouvent dans les locaux où a lieu la sieste ou dans les classes qu'ils regagnent au fur et à mesure de leur réveil. En revanche, avant 13h20, pendant les activités périscolaires, les enfants sont placés sous la seule responsabilité de la commune.
8. Ainsi qu'il a été dit précédemment, l'accident dont a été victime la jeune B...s'étant produit vers 12h30 après le déjeuner à la cantine et avant la rentrée en classe. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté la responsabilité de l'Etat, et ont retenu la responsabilité de la commune de Saint-Pierre à l'égard de M. et Mme A...G....
Sur les préjudices :
9. Pour demander une majoration du montant de l'indemnité mise à la charge de la commune de Saint-Pierre par le tribunal administratif de La Réunion, M. et Mme A...G...se prévalent des seules conclusions du rapport d'expertise selon lesquelles B...a subi une incapacité permanente partielle de 30 %, un préjudice esthétique évalué à 4 sur une échelle de 1 à 7, des souffrances physiques évaluées à 4, un préjudice physique ainsi que des troubles dans ses conditions d'existence évalués également à 4. Toutefois, le lien entre le retard dans la prise en charge médicale de l'enfant et les préjudices invoqués n'est pas établi.
10. En revanche, le tribunal administratif a fait une juste évaluation de son préjudice moral en condamnant la commune de Saint-Pierre à verser à M. et Mme A...G...la somme de 3 000 euros. Il n'y a pas lieu, dès lors, de faire droit aux conclusions des requérants tendant à ce que leur soient alloués une indemnité d'un montant supérieur.
11. Il résulte de ce qui précède que l'appel principal et les conclusions principales de l'appel incident présentées par la commune de Saint-Pierre tendant à la réformation du jugement attaqué doivent, par suite, être rejetés.
Sur les conclusions incidentes présentées à titre subsidiaire tendant à l'annulation des opérations d'expertise :
12. La commune de Saint-Pierre demande l'annulation des opérations de l'expertise, qui auraient été conduites en violation du contradictoire et en méconnaissance des articles R. 621-7 et R. 621-8-1 du code de justice administrative. Toutefois, ces conclusions, nouvelles en appel, sont irrecevables et ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
13. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...G...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a limité leur indemnisation à la somme de 3 000 euros.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties tendant au remboursement des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. et Mme A...G...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident de la commune de Saint-Pierre de la Réunion et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...A...G...et Mme H...A...G..., à la commune de Saint-Pierre de La Réunion, au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, à M.C... et à la société SMACL Assurances.
Délibéré après l'audience du 9 mai 2017 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,
M. Axel Basset, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 6 juin 2017.
Le rapporteur
Florence Rey-Gabriac
Le président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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No 15BX01624