Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. H...B...a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler la décision du 8 octobre 2013 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à sa charge les sommes de 17 200 euros au titre de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et de 580 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement d'un étranger prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un jugement n° 1400246 du 15 mai 2015, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 juillet 2015, M.B..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 15 mai 2015 ;
2°) d'annuler la décision du 8 octobre 2013 susmentionnée ;
3°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le signataire de la décision contestée ne rapporte pas la preuve qu'il avait délégation de signature pour signer " pour le directeur général et par délégation " ;
- cette même décision est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que contrairement à ce qui est indiqué dans les procès-verbaux d'infraction établis le 1er mars 2012, il n'a jamais embauché illégalement M.A..., de nationalité sainte-lucienne, qui était venu pour la première fois ce jour-là sur son exploitation agricole afin de lui demander du travail et à qui il a donné une somme de 50 euros pour qu'il s'achète de la nourriture après qu'il ait pris l'initiative de couper quelques branches sur la route bordant son exploitation ;
- responsable d'une petite exploitation agricole, il ne dégage que de maigres revenus tirés de son activité et se fait aider de temps à autres par un neveu qu'il rémunère par des chèques emploi-service.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2016, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par MeF..., conclut à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête de M. B...et, à titre subsidiaire, à son rejet au fond, à la confirmation du jugement du 15 mai 2015 du tribunal administratif de la Martinique et à ce que soit mise à la charge de M. B...la somme de 2 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- à titre principal, l'intéressé n'a pas contesté la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 14 novembre 2013, reçu par l'OFII le 20 novembre 2013, née le 20 janvier 2014, avant l'expiration du délai de deux mois requis, le 20 mars 2014, de sorte que sa demande était tardive lorsqu'il a saisi le tribunal administratif de la Martinique le 31 mars 2014 ;
- à titre subsidiaire, la décision contestée a été signée par une autorité compétente pour ce faire en vertu d'une délégation de signature régulièrement publiée ;
- sur le fond, si M. B...avait - ainsi qu'il lui incombe - effectué les démarches préalables imposées lors de l'embauche de M.E..., il se serait rendu compte que l'intéressé était déjà connu des services de la préfecture pour des faits de séjour irrégulier et qu'il ne disposait pas d'une autorisation de travail sur le sol français, ce qu'il a sciemment refusé de faire en parfaite connaissance de cause ;
- à cet égard, l'article L. 8251-1 du code du travail précise que l'infraction est constituée quelle que soit la durée du recrutement irrégulier ;
- M. B...a reconnu l'ensemble des faits qui lui sont reprochés lors de son audition.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2013-467 du 4 juin 2013 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Axel Basset,
- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'un contrôle effectué dans le cadre de la lutte contre le travail illégal et l'emploi d'étrangers en situation irrégulière, les services de police ont procédé, le 1er mars 2012, à l'interpellation d'un individu dénommé M. A...E..., né le 9 septembre 1966, de nationalité Saint-Lucienne. L'intéressé ayant déclaré, lors de son audition, d'une part, être entré et avoir séjourné irrégulièrement sur le territoire national depuis un mois, en provenance de Sainte-Lucie et, d'autre part, avoir travaillé pour le compte de M.B..., responsable d'une exploitation agricole située quartier Manzo, sur le territoire de la commune de le François, en Martinique (97), alors qu'il se trouvait démuni tant d'une autorisation d'exercer une activité salariée en France, que d'un contrat de travail et d'une déclaration d'embauche, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a, par une décision du 8 octobre 2013 implicitement confirmée sur recours gracieux formé par l'intéressé le 14 novembre suivant, appliqué à M.B..., d'une part, la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-l du code du travail, d'un montant de 17 200 euros et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement d'un étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-l du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour un montant de 580 euros. M.B..., qui doit être regardé comme demandant la décharge des contributions litigieuses, relève appel du jugement du 15 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 octobre 2013 susmentionnée.
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 8 octobre 2013 et de décharge des contributions litigieuses :
2. En premier lieu, M. B...reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance et tiré de l'incompétence de M. D...G..., directeur de l'immigration, pour signer la décision du 8 octobre 2013, " pour le directeur général et par délégation ". Il ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif pertinent retenu par les premiers juges.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) ". L'article L. 8253-1 du même code, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, dispose : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger sans titre de travail, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. (...) / L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et de liquider cette contribution. (...) ". Aux termes de l'article L. 8271-17 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Outre les inspecteurs et contrôleurs du travail, les agents et officiers de police judiciaire, les agents de la direction générale des douanes sont compétents pour rechercher et constater, au moyen de procès-verbaux transmis directement au procureur de la République, les infractions aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger sans titre de travail et de l'article L. 8251-2 interdisant le recours aux services d'un employeur d'un étranger sans titre. / Afin de permettre la liquidation de la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du présent code et de la contribution forfaitaire mentionnée à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration reçoit des agents mentionnés au premier alinéa du présent article une copie des procès-verbaux relatifs à ces infractions ". En vertu de l'article L. 8113-7 de ce même code : " Les inspecteurs du travail, les contrôleurs du travail et les fonctionnaires de contrôle assimilés constatent les infractions par des procès-verbaux qui font foi jusqu'à preuve du contraire. / Ces procès-verbaux sont transmis au procureur de la République. Un exemplaire est également adressé au représentant de l'Etat dans le département (...). ".
4. En l'espèce, et ainsi que l'a relevé le tribunal, il résulte de l'instruction, et notamment des procès-verbaux établis par les officiers de police judiciaire les 1er, 2 et 9 mars 2012, que M. A... E..., de nationalité Saint-Lucienne, était entré et avait séjourné irrégulièrement sur le territoire national lorsque, à trois reprises, il a été amené à travailler pour le compte de M. B..., sur son exploitation agricole, dépourvu de toute autorisation d'exercer une activité salariée en France, d'un contrat de travail et d'une déclaration d'embauche. En se bornant à soutenir, comme il l'avait déjà fait devant les premiers juges, d'une part, que M. A...E...se trouvait, le jour de son interpellation, pour la première fois sur son exploitation agricole afin de lui demander du travail et qu'il lui avait donné une somme de 50 euros pour qu'il s'achète de la nourriture après qu'il ait pris l'initiative de couper quelques branches sur la route bordant son exploitation, et que, d'autre part, responsable d'une petite exploitation agricole, il ne dégage que de maigres revenus tirés de son activité et se fait aider de temps à autres par un neveu qu'il rémunère par des chèques emploi-service, M. B...n'apporte pas d'éléments pertinents de nature à remettre en cause les constatations faites par les officiers de police judiciaire, lesquels, ainsi qu'il a été dit au point 3, font foi jusqu'à preuve contraire. Dès lors, la matérialité et la réalité des infractions constatées par les services de police, que M. B...a d'ailleurs admises lui-même lors de son audition, doivent être regardées comme établies. Il s'ensuit que c'est à bon droit que, par la décision contestée, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à la charge de l'appelant les pénalités litigieuses.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'office intimé, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'appelant la somme de 1 200 euros à verser à l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : M. B...versera la somme de 1 200 euros à l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office français de l'immigration et de l'intégration et à M. H...B.... Copie en sera transmise au ministre des outre-mer et à la direction des entreprise, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Martinique.
Délibéré après l'audience du 10 avril 2017, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,
M. Axel Basset, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 mai 2017.
Le rapporteur,
Axel BassetLe président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 15BX02424