Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...D...a demandé au tribunal administratif de Poitiers, l'annulation de la décision du 2 avril 2013 par laquelle l'inspectrice du travail de la Charente a autorisé son licenciement pour inaptitude physique, d'enjoindre à l'inspectrice du travail de statuer à nouveau sur la demande de licenciement, de condamner la fédération ADMR (aide à domicile en milieu rural ) Charente à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1301124 du 21 mai 2015, le tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 2 avril 2013, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de MmeD....
Procédures devant la cour :
I) Par une requête enregistrée le 23 juin 2015 sous le n° 15BX02154, la Fédération l'ADMR Charente, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 21 mai 2015 par lequel le tribunal a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 2 avril 2013 ;
2°) de rejeter la demande de MmeD... présentée devant le tribunal administratif de Poitiers ;
3°) de mettre à la charge de Mme D...la somme de 5000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- elle constitue une association appartenant à un réseau d'associations formé de personnes morales de droit privé autonomes et comportant une fédération nationale ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, l'ADMR a satisfait à son obligation de reclassement tant sur le plan quantitatif que qualitatif ;
- en effet, sur le plan quantitatif, l'ADMR a satisfait à son obligation de reclassement en ne se bornant pas, contrairement à ce qu'a considéré le tribunal, à l'envoi d'un seul courrier du 16 janvier 2013 aux quarante associations du département de la Charente, mais en transmettant le même jour des courriers de recherche de reclassement auprès des fédérations des Deux-Sèvres et de la Charente-Maritime ;
- sur le plan qualitatif, le courrier de recherche de reclassement qui a été adressé le 16 janvier 2013 comportait toutes les informations requises ;
- les réponses ont été négatives tant en ce qui concerne la recherche d'un reclassement en qualité de coordonnatrice du territoire, que sur un poste équivalent ;
- le tribunal s'est substitué à l'administration quant à l'appréciation de l'existence d'une recherche de reclassement par l'ADMR qui n'était tenue qu'à une obligation de moyens et non de résultats ;
- un courrier a été également adressé à la fédération nationale de l'ADMR ;
- en ce qui concerne notamment l'emploi de coordonnatrice du territoire, l'avis du médecin du travail est contradictoire dès lors qu'il conclut à l'inaptitude à tous les postes de Mme D...tout en indiquant qu'elle serait apte à un emploi sans pression et sans stress, ce qui parait difficilement compatible avec le reclassement sur l'emploi de coordonnatrice du territoire, qui est générateur d'une certaine pression.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2016, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 21 mai 2015 et au rejet de la demande de MmeD...
Il soutient que :
- l'ADMR a satisfait à son obligation de reclassement tant sur le plan quantitatif que qualitatif dès lors qu'elle a transmis un courrier du 16 janvier 2013 non seulement aux quarante associations du département de la Charente, mais aussi auprès des fédérations de Deux-Sèvres et de la Charente-Maritime et ces courriers répondaient aux exigences en la matière dès lors qu'ils mentionnaient la description du poste de la salariée, sa qualification, ses diplômes ainsi que l'avis du médecin du travail ;
- dans l'hypothèse où l'employeur appartient à un groupe, la Cour de Cassation juge que doit être appréciée la permutabilité parmi les structures qui oeuvrent dans le même secteur d'activité et permet d'assurer la permutabilité du salarié ;
- le tribunal ne s'est pas attaché à vérifier la permutabilité entre les différentes entités, mais a considéré que l'ADMR Charente n'avait pas recherché le reclassement auprès d'autres fédérations que celle de la Charente et auprès de l'union nationale des ADMR ;
- ni le tribunal ni MmeD..., n'ont démontré la possibilité d'une permutation ;
- le tribunal, en considérant que l'ADMR Charente n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement, a commis une erreur de droit et d'appréciation.
Par une ordonnance du 6 octobre 2016 la clôture de l'instruction a été fixée au 30 novembre 2016.
Un mémoire en défense a été enregistré le 10 janvier 2017 pour MmeD..., représentée par MeB....
II) Par une requête enregistrée le 23 juin 2015, sous le n° 15BX02155, la Fédération ADMR Charente, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du 21 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 2 avril 2013, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de MmeD... ;
2°) de mettre à la charge de Mme D...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- l'exécution du jugement du 11 mai 2015 du tribunal administratif de Poitiers annulant la décision de l'inspectrice du travail du 2 avril 2013 autorisant le licenciement de Mme D...aurait des conséquences difficilement réparables au sens de l'article R. 811-15 du code de justice administrative. En effet, le conseil des prud'hommes d'Angoulême saisi par Mme D...a prononcé un sursis à statuer sur sa demande dans l'attente de l'examen par le juge administratif de la légalité de l'autorisation administrative de licenciement, et Mme D...a demandé devant le conseil des prud'hommes, la condamnation de l'ADMR à lui verser la somme de 13 8291, 99 euros ;
- en ce qui concerne la question des moyens sérieux, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, l'ADMR a satisfait à son obligation de reclassement tant sur le plan quantitatif que qualitatif ;
- en effet, sur le plan quantitatif, ADMR a satisfait à son obligation de reclassement en ne se bornant pas, contrairement à ce qu'a considéré le tribunal, à l'envoi d'un seul courrier du 16 janvier 2013 aux quarante associations du département de la Charente, mais en transmettant le même jour des courriers de recherche de reclassement auprès des fédérations de Deux-Sèvres et de la Charente-Maritime ;
- sur le plan qualitatif, le courrier de recherche de reclassement qui a été adressé le 16 janvier 2013 comportait toutes les informations requises ;
- les réponses ont été négatives tant en ce qui concerne la recherche d'un reclassement en qualité de coordonnatrice du territoire, que sur un poste équivalent ;
- le tribunal s'est substitué à l'administration quant à l'appréciation de l'existence d'une recherche de reclassement par l'ADMR qui n'était tenue qu'à une obligation de moyens et non de résultats ;
- un courrier a été également adressé à la fédération nationale de l'ADMR ;
- en ce qui concerne notamment l'emploi de coordonnatrice du territoire, l'avis du médecin du travail est contradictoire dès lors qu'il conclut à l'inaptitude à tous les postes de Mme D...tout en indiquant qu'elle serait apte à un emploi sans pression et sans stress, ce qui parait difficilement compatible avec le reclassement sur l'emploi de coordonnatrice du territoire, qui est générateur d'une certaine pression.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2016, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut à l'annulation du jugement du 21 mai 2015.
Il soutient que :
- l'ADMR a satisfait à son obligation de reclassement tant sur le plan quantitatif que qualitatif dès lors qu'elle a transmis un courrier du 16 janvier 2013 non seulement aux quarante associations du département de la Charente, mais aussi auprès des fédérations de Deux-Sèvres et de la Charente-Maritime et que ces courriers répondaient aux exigences en la matière dès lors qu'ils mentionnaient la description du poste de la salariée, sa qualification, ses diplômes ainsi que l'avis du médecin du travail ;
- dans l'hypothèse où l'employeur appartient à un groupe, la Cour de Cassation juge que doit être appréciée la permutabilité parmi les structures qui oeuvrent dans le même secteur d'activité et permet d'assurer la permutabilité du salarié ;
- le tribunal ne s'est pas attaché à vérifier la permutabilité entre les différentes entités, mais a considéré que l'ADMR Charente n'avait pas recherché le reclassement auprès d'autres fédérations que celle de la Charente ni auprès de l'union nationale des ADMR ;
- ni le tribunal ni MmeD..., n'ont démontré la possibilité d'une permutation ;
- le tribunal, en considérant que l'ADMR Charente n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement, a commis une erreur de droit et d'appréciation ;
Par une ordonnance du 6 octobre 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 30 novembre2016.
Un mémoire en défense a été enregistré le 13 janvier 2017 pour MmeD..., représentée par MeB....
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la fédération ADMR Charente.
Une note en délibéré pour la Fédération ADMR été enregistrée le 14 février 2017.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E...D...a été recrutée le 28 mai 2004, par la fédération d'aide à domicile en milieu rural (ADMR) de la Charente en qualité d'agent administratif " itinérant ", puis à compter du 1er février 2009, en qualité de coordinatrice du territoire. Par un avis du 4 janvier 2013 le médecin du travail a déclaré Mme D..." inapte à tous les postes " et a indiqué qu'" un emploi sans pression et sans stress est seul possible ". Par décision du 2 avril 2013, l'inspectrice du travail de la Charente a autorisé le licenciement de l'intéressée. La fédération ADMR de la Charente fait appel du jugement du 21 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 2 avril 2013, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de MmeD..., et en demande le sursis à exécution.
2. Les requêtes n°s 15BX02154 et 15BX02155 sont toutes deux présentées par la fédération ADMR de la Charente, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Elles peuvent ainsi être jointes pour qu'il y soit statué par un même arrêt.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. ".
4. Pour annuler la décision du 2 avril 2013 par laquelle l'inspectrice du travail de la Charente a autorisé le licenciement de MmeD..., le tribunal s'est notamment fondé sur le fait que si l'ADMR de la Charente avait procédé à une recherche de reclassement de Mme D...au sein de la fédération ADMR de la Charente, de différentes associations ADMR du département et auprès de la fédération de la Charente-Maritime, elle s'était limitée au seul périmètre des départements de la Charente et de la Charente-Maritime, et n'avait pas informé l'union nationale ADMR des recherches de reclassement et que dans ces conditions, la fédération ADMR de la Charente avait méconnu l'étendue de son obligation de reclassement. Faute pour l'ADMR de la Charente, de justifier en appel de l'existence de recherches de reclassement auprès d'autres fédérations ADMR que celle de la Charente et de la Charente-Maritime et auprès de la fédération nationale, et de contester l'existence d'une obligation de recherche de reclassement au-delà du périmètre des fédérations ADMR de la Charente et de la Charente-Maritime, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, de rejeter la requête d'appel de l'ADMR de la Charente.
5. Il résulte de ce qui précède que l'ADMR de la Charente n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 21 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 2 avril 2013 autorisant le licenciement de MmeD....
Sur les conclusions à fin de sursis :
6. Le présent arrêt statuant sur le fond de l'affaire, il n'y a pas lieu de statuer sur la requête à fins de sursis du jugement du 21 mai 2015 présentée par l'ADMR de la Charente
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Compte tenu du rejet des conclusions en annulation présentées par l'ADMR de la Charente les conclusions présentées par l'ADMR de la Charente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 15BX02155.
Article 2 : La requête n° 15BX02154 de l'ADMR de la Charente est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la fédération ADMR de la Charente, à Mme E...F...et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Copie en sera transmise à la direction régionale des entreprise de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Charente.
Délibéré après l'audience du 13 février 2017 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, premier conseiller,
M. Axel Basset, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 mars 2017.
Le rapporteur,
Pierre Bentolila
Le président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N°s 15BX02154, 15BX02155