Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...C...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative en date du 4 mai 2012 prononçant sa réintégration, à compter du 1er septembre 2010, dans le corps des attachés d'administration de l'éducation nationale et de 1'enseignement supérieur, d'enjoindre au ministre, sous astreinte, de prononcer son intégration dans le corps des personnels de direction ou, à défaut, de réexaminer sa situation et notamment ses chances sérieuses d'intégration dans ce corps ainsi que de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1200701 du 5 mars 2015, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative du 4 mai 2012, a enjoint au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de réexaminer la situation de M.C..., a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M.C....
Procédure devant la cour :
Par un recours et un mémoire enregistrés respectivement les 13 mai 2015 et le 14 avril 2016, le ministre de 1'éducation nationale, de 1'enseignement supérieur et de la recherche demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1200701 du 5 mars 2015 du tribunal administratif de La Réunion ;
2°) de rejeter la requête de M.C....
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi du 22 avril 1905 ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 ;
- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
- le décret n° 2001-1174 du 11 décembre 2001 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gil Cornevaux ;
- et les conclusions de M. David Katz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., attaché d'administration de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, a été détaché dans le corps des personnels de direction par un arrêté ministériel du 6 novembre 2007, pour une période allant du 1er septembre 2007 au 31 août 2010. L'administration a engagé à l'encontre de l'intéressé des poursuites pénales au titre d'un incident qui s'est déroulé le 10 novembre 2007, dans l'enceinte de l'établissement où M. C...occupait l'emploi de principal adjoint. M. C... a été relaxé des faits de dénonciation mensongère aux termes d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 11 octobre 2012. Cependant, l'intéressé a fait l'objet de deux décisions ministérielles, en date des 25 septembre 2008 et 13 mai 2009, mettant fin à son détachement et prononçant sa réintégration dans son corps d'origine, avec affectation à la Réunion, la date d'effet de ces mesures étant fixée en dernier lieu au 3 octobre 2008. Le tribunal administratif de La Réunion par un jugement du 30 décembre 2011 a prononcé l'annulation de ces deux décisions au motif d'une motivation insuffisante et de la méconnaissance de la règle de communication du dossier. Par un arrêté du 4 mai 2012, le ministre de l'éducation nationale a confirmé la réintégration de M.C..., à compter du 1er septembre 2010, dans le corps des attachés d'administration de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur. Le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche fait appel du jugement du tribunal administratif de La Réunion du 5 mars 2015, qui a annulé l'arrêté ministériel du 4 mai 2012 et l'a enjoint au réexamen de la situation de M. C...dans un délai de deux mois suivant la notification dudit jugement.
2. Si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, des militaires ou des magistrats, l'administration peut, en dérogation à cette règle, leur conférer une portée rétroactive dans la stricte mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation.
3. Aux termes de l'article 45 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son corps d'origine mais continuant à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / (...) A l'expiration de son détachement, le fonctionnaire est, sauf intégration dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, réintégré dans son corps d'origine ".
4. En l'espèce, par l'effet de l'annulation contentieuse prononcée par le tribunal de la Réunion par jugement du 30 décembre 2011, M. C...se trouvait en position de détachement dans le corps des personnels de direction mais seulement jusqu'au 31 août 2010, date à laquelle son détachement prenait normalement fin. A cette date, il n'avait aucun droit au renouvellement de son détachement et les dispositions de l'article 22 du décret n° 85-986, si elles ouvrent une possibilité d'intégration dans le cadre d'emploi des personnels de direction, ne créaient en faveur de M. C...aucun droit à cette intégration. Dès lors, l'arrêté attaqué du 4 mai 2012, bien qu'ayant une portée rétroactive, a permis d'assurer la continuité de la carrière du requérant à compter du 1er septembre 2010, date à laquelle il se trouvait en dehors de toute position régulière. Le ministre, en prenant la décision contestée, doit, par suite, être regardé comme ayant procédé à la régularisation de la position statutaire de l'intéressé et n'a, ainsi, pas entaché sa décision d'une rétroactivité illégale.
5. En l'absence de texte contraire, un agent dont le détachement arrive à échéance n'a aucun droit au renouvellement de celui-ci. Il en résulte qu'alors même que la décision de ne pas renouveler ce détachement serait fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur la manière de servir de l'agent et se trouverait prise en considération de sa personne, elle n'est - sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire - pas au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que les garanties inhérentes à la procédure disciplinaire aient été respectées. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. C...ne peut être regardé comme étant demeuré en position de détachement au 1er septembre 2010, par l'effet de l'annulation contentieuse des décisions mettant fin à son détachement au 3 octobre 2008. Ainsi, la décision de réintégrer M. C...dans le corps des attachés d'administration de l'éducation nationale au 1er septembre 2010 ne met pas fin au détachement de l'intéressé avant son échéance et a pu, par suite, légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de demander la communication de son dossier.
5. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de La Réunion, pour annuler la décision du 4 mai 2012, s'est fondé sur les motifs tirés de la rétroactivité illégale de la décision et sur la violation de la garantie prévue par l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 concernant le droit à la communication du dossier.
6. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... tant en appel que devant le tribunal administratif de La Réunion.
7. Aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 susvisé: " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / 1° Les secrétaires généraux des ministères, les directeurs d'administration centrale (...). / 2° Les chefs de service, directeurs adjoints, sous-directeurs (...) ". Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a été signé par Mme A...D..., directrice générale des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui avait été nommée à ces fonctions par décret du 1er octobre 2009 publié au journal officiel de la République française le 2 octobre 2009. Les dispositions précitées du 1° de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005, publié au journal officiel de la République française le 28 juillet 2005, habilitaient MmeD..., en sa qualité de directeur d'administration centrale, à signer l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires relevant des services placés sous son autorité, notamment la gestion déconcentrée des personnels administratifs tels que les attachés d'administration de l'éducation nationale. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué, qui manque en fait, doit être écarté.
8. Ainsi qu'il a été dit au point 4 du présent arrêt, le fonctionnaire détaché ne peut se prévaloir d'un droit au renouvellement de son détachement. La décision par laquelle le ministre de l'éducation nationale a prononcé la réintégration de M.C..., qui n'a pas le caractère d'une sanction disciplinaire, a pu légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier. M. C...n'est donc pas fondé à soutenir que l'arrêté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière.
9. Aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " (...) Doivent être motivées les décisions qui : (...) - refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". En l'absence de texte contraire, un agent dont le détachement arrive à échéance n'a droit ni au renouvellement de celui-ci, ni à intégration dans le corps d'accueil, de telle sorte que le non-renouvellement d'un détachement à son expiration ne refuse pas un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions pour l'obtenir. Dans ces conditions, la décision litigieuse prononçant la réintégration de M. C...à compter du 1er septembre 2010, à l'issue de la période de détachement n'avait pas à être motivée. Il suit de là que le moyen tiré du défaut d'une telle motivation ne peut qu'être écarté.
10. Le requérant soutient que la décision ministérielle du 4 mai 2012 méconnaît l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif de Saint Denis, qui par un jugement du 30 décembre 2010, devenu définitif, a annulé une décision du 25 septembre 2008 par laquelle le ministre de l'éducation nationale a mis fin à son détachement dans le corps des personnels de direction motif pris d'un défaut de motivation et d'un vice de procédure. Toutefois, cette annulation contentieuse d'une décision mettant fin au détachement avant son échéance, ne faisait pas obstacle à ce que le ministre mette fin au détachement de M. C...à son échéance normale, soit le 1er septembre 2010. Au surplus, le tribunal administratif de La Réunion s'est borné, par le jugement attaqué, à enjoindre à l'administration de procéder à un réexamen de la situation du requérant, l'annulation retenue n'impliquant nullement une intégration automatique de l'intéressé dans le corps des personnels de direction. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée doit être écarté.
11. M. C...ne peut utilement invoquer les dispositions de la note de service
n° 2010-003 du 15 janvier 2010, laquelle est dépourvue de caractère réglementaire, pour soutenir qu'il aurait dû avoir connaissance de l'avis du recteur sur l'opportunité du renouvellement de son détachement. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit commise sur ce point par le ministre doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa régularité, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté ministériel du 4 mai 2012 portant réintégration de M. C...dans le corps des attachés d'administration de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1200701 du 5 mars 2015 du tribunal administratif de La Réunion
est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de La Réunion est rejetée.
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No 15BX01642