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17/01/2017 | FRANCE | N°14BX01795

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 17 janvier 2017, 14BX01795


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Thierry, a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2010 par lequel le préfet du département des Deux-Sèvres a déclaré cessibles les immeubles nécessaires à la réalisation de la ZAC " Pôle Sports " de Niort, ensemble la décision en date du 31 mars 2011 rejetant son recours gracieux en date du 31 janvier 2011.

Par un jugement n° 1101139 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Poitiers a fait droit à cette demand

e.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Thierry, a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2010 par lequel le préfet du département des Deux-Sèvres a déclaré cessibles les immeubles nécessaires à la réalisation de la ZAC " Pôle Sports " de Niort, ensemble la décision en date du 31 mars 2011 rejetant son recours gracieux en date du 31 janvier 2011.

Par un jugement n° 1101139 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Poitiers a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 juin 2014 et 22 juin 2015, sous le n° 14BX01795, la SAEML Deux Sèvres Aménagement, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 avril 2014 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de condamner la société civile immobilière (SCI) Thierry à lui verser une somme de 4 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

II°) Par un recours enregistré le 19 juin 2014, sous le n°14BX01805, le ministre de l'intérieur, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 avril 2014 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de rejeter les demandes de première instance de la société civile immobilière (SCI) Thierry ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 modifié ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Didier Péano,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant SAEML Deux Sèvres Aménagement.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Niort a décidé de réaliser une zone d'aménagement concertée (ZAC) destinée à permettre la réalisation et le développement du " Pôle Sports " comprenant notamment un stade de 12 000 places, une halle des sports et des pratiques acrobatiques ainsi qu'un centre de développement du sport, et des activités économiques connexes représentant environ 130 000 mètres carrés de surface hors d'oeuvre nette. A cette fin, elle a conclu le 26 juillet 2005 une convention d'aménagement avec la société anonyme d'économie mixte locale (SAEML) Deux-Sèvres Aménagement. Par arrêté du 13 février 2007, le préfet des Deux-Sèvres a déclaré d'utilité publique l'opération d'aménagement du " Pôle Sports ", engagé la procédure de mise en compatibilité du plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Niort et l'a autorisée ou son concessionnaire, la SAEML Deux-Sèvres Aménagement, à acquérir à l'amiable ou par voie d'expropriation, les immeubles nécessaires à cette opération. Par arrêté du 8 janvier 2010, le préfet a prescrit 1'ouverture d'une nouvelle enquête parcellaire, qui s'est déroulée du 27 janvier 2010 au 12 février 2010. Par arrêté du 4 novembre 2010, il a déclaré cessibles à la SAEML Deux-Sèvres Aménagement les immeubles correspondant à l'emprise de la ZAC du " Pôle Sports ".

2. A la demande de la SCI Thierry, le tribunal administratif de Poitiers a, par jugement n° 1101139 du 11 avril 2014, annulé l'arrêté du 4 novembre 2010, ainsi que la décision du 31 mars 2011 rejetant le recours gracieux formé à son encontre. La SAEML Deux-Sèvres Aménagement et le ministre de l'intérieur relèvent appel de ce jugement. Le recours du ministre et la requête étant dirigés contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

3. Pour prononcer l'annulation de l'arrêté du 4 novembre 2010, le tribunal administratif de Poitiers s'est fondé sur le motif que l'arrêté du 13 février 2007 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a déclaré d'utilité publique l'opération d'aménagement, qui entraînait une réduction des espaces agricoles, n'avait pas été précédé de la consultation de la chambre d'agriculture prévue par l'article L. 112-3 du code rural et de la pêche maritime aux termes duquel : " Les plans d'occupation des sols...prévoyant une réduction des espaces agricoles ou forestiers ne peuvent être rendus publics ou approuvés qu'après avis de la chambre d'agriculture... et, le cas échéant, du centre régional de la propriété forestière. Il en va de même en cas de révision ou de modification de ces documents. Ces avis sont rendus dans un délai de deux mois à compter de la saisine. En l'absence de réponse à l'issue de ce délai, l'avis est réputé favorable... ". Toutefois, ainsi que l'a admis le tribunal administratif, la chambre d'agriculture des Deux-Sèvres a été associée à la procédure de déclaration d'utilité publique, notamment sous la forme d'une invitation de son président à assister à une réunion du 4 octobre 2005 à la préfecture des Deux-Sèvres en vue de l'examen conjoint préalable à la mise en compatibilité du plan d'occupation des sols de cette commune, conformément aux articles L. 123-16 et R. 123-23 du code de l'urbanisme. Une telle procédure d'examen conjoint préalable à l'enquête publique prévue par l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme poursuit des objectifs analogues et offre les mêmes garanties à la personne publique associée que la saisine pour avis de l'article L. 112-3 du code rural, lequel d'ailleurs n'est requis que dans le cadre de la mise en compatibilité du plan d'occupation des sols. De plus, en application des dispositions précitées du code rural, compte-tenu de la participation d'un représentant de la chambre d'agriculture à la réunion relative à l'examen du dossier d'enquête, celle-ci est réputée avoir émis un avis favorable au projet du fait de l'absence d'autre réponse dans le délai de deux mois à compter de l'invitation du 6 septembre 2005. Par suite, c'est à tort que pour annuler l'arrêté du 4 novembre 2010, le tribunal administratif de Poitiers s'est fondé sur le motif que l'arrêté du 13 février 2007 n'avait pas été précédé de la consultation prévue par l'article L. 112-3 du code rural et de la pêche maritime et que la chambre d'agriculture des Deux-Sèvres n'a pas été " véritablement amenée à émettre un avis sur le projet de modification " du POS de la commune de Niort en vue de déclarer d'utilité publique l'opération d'aménagement du " Pôle Sports ".

4. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SCI Thierry.

Sur l'arrêté du 13 février 2007 déclarant l'utilité publique du projet et portant mise en compatibilité du POS de la commune de Niort :

5. Au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 4 novembre 2010, la société civile immobilière (SCI) Thierry excipe de l'illégalité de l'arrêté du 13 février 2007 déclarant l'utilité publique de l'opération d'aménagement de la ZAC " Pôle Sports " et autorisant la commune ou son concessionnaire, la SAEML Deux-Sèvres Aménagement à acquérir à l'amiable ou par voie d'expropriation, les immeubles nécessaires à cette opération.

En ce qui concerne la compétence du signataire de l'acte :

6. La SCI Thierry soutient que le secrétaire général de la préfecture ne disposait pas de la compétence nécessaire pour signer l'arrêté du 13 février 2007 déclarant l'utilité publique du projet, faute de délégation en ce sens, au regard des dispositions de l'article R. 11-20 du code de l'expropriation. Toutefois, M. Jean-Yves Chiaro, secrétaire général de la préfecture des Deux-Sèvres, bénéficiait d'une délégation de signature accordée par arrêté préfectoral n° 2006-1306-0038 du 12 juin 2006, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture le 12 juin 2006, à l'effet de : " signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de 1'Etat dans le département des Deux-Sèvres à 1'exception des actes pour lesquels une délégation a été conféré à un chef de Service de 1'Etat dans le département et des mesures générales concernant la défense nationale et la défense opérationnelle du territoire ". Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 13 février 2007 sera écarté.

En ce qui concerne la concertation avec la région Poitou-Charentes :

7. La SCI Thierry soutient que la concertation avec la région Poitou-Charentes ne peut être tenue pour établie, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme. Toutefois il ressort des pièces du dossier que par une lettre en date du 6 septembre 2005, le préfet des Deux-Sèvres a informé le président du conseil régional de Poitou-Charentes du projet ainsi que de ses implications sur le plan d'occupation des sols de la commune de Niort et l'a invité à la réunion des personnes publiques associées qui s'est tenue le 4 octobre 2005 et la seule circonstance que ce dernier n'a pas participé à cette consultation n'est pas de nature à vicier la procédure.

En ce qui concerne l'avis du service des Domaines :

8. La SCI Thierry soutient que la procédure a été irrégulière du fait de l'absence de consultation préalable du service des Domaines et fait valoir que " l'article 23 de la loi MURCEF n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 " impose de solliciter " l'avis du service des domaines - devenu France Domaine - en vue de produire au dossier d'enquête publique l'estimation sommaire et globale des biens dont l'acquisition est nécessaire à la réalisation du projet d'expropriation ". Toutefois, s'il est vrai que l'administration est, en vertu des dispositions de l'article 6 du décret du 14 mars 1986, tenue de fournir, dans l'enquête publique, une appréciation sommaire des dépenses, aucune disposition de l'article susmentionné qui dispose : " I.-Les projets d'opérations immobilières mentionnés au II doivent être précédés, avant toute entente amiable, d'une demande d'avis du directeur des services fiscaux (1) lorsqu'ils sont poursuivis par : (...) II.- Ces projets d'opérations immobilières comprennent : (...) 3° Les acquisitions poursuivies par voie d'expropriation pour cause d'utilité publique. " ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne lui impose d'annexer au dossier d'enquête préalable à l'utilité publique l'avis du service des Domaines. Au demeurant, la SAEML Deux-Sèvres Aménagement a versé devant la juridiction l'avis rendu par le service des Domaines le 23 mars 2005 qui lui a permis de produire une estimation des dépenses précisant leur montant dans le dossier soumis à l'enquête, ainsi d'ailleurs que l'avis du directeur des services fiscaux préalable à chaque acquisition poursuivie par voie d'expropriation conformément aux dispositions précitées, notamment l'avis rendu le 13 mai 2011 s'agissant de la parcelle HK 39 appartenant anciennement à la SCI Thierry elle-même. De ce fait, le moyen sera écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne les enquêtes conjointes de 2006 :

S'agissant de l'affichage en mairie de l'arrêté prescrivant l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique :

9. La SCI Thierry soutient tout d'abord que les dispositions de l'article R. 11-4 du code de l'expropriation ont été méconnues en ce qu'il ne serait pas justifié de l'affichage en mairie de Niort de l'arrêté prescrivant l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et notamment de la page 4 du rapport du commissaire-enquêteur du 11 novembre 2006 et de l'attestation émanant de l'adjoint délégué au maire de la commune de Niort du 16 octobre 2006, que cet arrêté a été publié par voie d'affichage interne et externe à la mairie de Niort du 23 août au 13 octobre 2006 inclus, conformément aux dispositions de l'article R. 11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

S'agissant de la composition du dossier soumis à l'enquête publique :

10. La SCI Thierry soutient que " les caractéristiques générales des bâtiments destinés au " pôle de compétence économique " ne seraient pas présentées dans le dossier soumis à enquête ublique, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 11-3 I du code de l'expropriation. Toutefois, les documents soumis à l'enquête ont pour objet, non de décrire en détail les ouvrages envisagés, mais seulement de permettre au public de connaître la nature et la localisation des travaux prévus, ainsi que les caractéristiques générales des ouvrages les plus importants. En l'espèce, il résulte des pièces du dossier et notamment de la notice jointe au dossier soumis à l'enquête publique que le plan de situation, extraits de deux cartes IGN de situation générale au 1/100.000 ème et de situation du projet au 1/ 25.000 ème, situe clairement le lieu de l'opération d'aménagement projetée, et que le plan général des travaux mentionne, précisément, la localisation de chacune des opérations de constructions ou d'équipement envisagées, dont les caractéristiques de surface figuraient dans la notice explicative. En particulier s'agissant des bâtiments destinés au " pôle de compétence économique ", qui ne constituent pas les ouvrages les plus importants dans une opération dédiée à la réalisation d'équipements sportifs, la notice explicative mentionne que les ouvrages dans lesquels seraient implantés des activités économiques connexes représenteront environ 130 000 mètres carrés de surface hors d'oeuvre nette. Ainsi, compte-tenu de ce que les opérateurs économiques intéressés par une implantation dans la ZAC ne pouvaient pas être connus à ce stade de l'enquête publique, le moyen précité doit être écarté.

S'agissant de l'insuffisance du dossier soumis à l'enquête publique :

11. La SCI Thierry avance que l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique n'était pas complète et que l'étude hydrogéologique n'était pas jointe au dossier. Toutefois, le commissaire-enquêteur la vise directement dans son rapport, précise que : " Le dossier de DUP est complété par un avis hydrogéologique portant sur la compatibilité du projet avec la protection de la ressource en eau potable ", et évoque plus loin dans son rapport, les incidences du projet sur le cadre hydrogéologique. Le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact n'est donc pas établi.

12. La SCI Thierry soutient également qu'une étude des incidences environnementales Natura 2000 s'imposait et devait figurer au dossier soumis à l'enquête publique. Toutefois l'étude d'impact figurant au dossier rappelle en son point 3.2.2.1 " Milieux naturels inventoriés et/ou protégés " que le projet de Pôle Sports n'interfère directement ou indirectement avec aucun milieu naturel inventorié et/ou protégé mais qu'une étude spécifique, dont la synthèse figure au dossier, valant document d'incidence au titre des articles L. 414-1 et suivants et R. 214-34 du code de l'environnement a néanmoins été réalisée en vue d'évaluer les incidences prévisibles sur l'avifaune notamment présente dans le site de haute valeur écologique que jouxte le projet, côté aérodrome.

S'agissant de la motivation des conclusions du commissaire-enquêteur :

13. La SCI Thierry soutient que le commissaire-enquêteur n'aurait pas suffisamment motivé ses conclusions au regard de l'ampleur du projet et ce en contradiction avec les dispositions de l'article R. 11-10 du code de l'expropriation. Toutefois il ressort des pièces du dossier que le commissaire-enquêteur qui a rendu un avis favorable sans réseve sur le projet, a valablement motivé ses conclusions en indiquant les raisons justifiant sa position notamment sur l'intérêt du projet, le choix du site, son accessibilité, sa desserte ainsi que sur son impact sur l'environnement tout en exprimant son sentiment quant à l'attitude de certains propriétaires compris dans le périmètre de la ZAC, ce qui au demeurant ne saurait lui être reproché.

En ce qui concerne l'utilité publique du projet :

14. La SCI Thierry soutient que le projet du Pôle Sports ne présente pas d'utilité publique au regard notamment du besoin d'intérêt général et que les inconvénients de l'opération sont supérieurs à ses avantages.

15. Il appartient au juge, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente.

16. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'un pôle de développement sports / loisirs d'envergure régionale qui a été acté dans le cadre du 12ème contrat de plan signé le 13 janvier 2000 permet de pallier le déficit de la région Poitou-Charentes et du département des Deux-Sèvres en matière d'équipements sportifs susceptibles d'accueillir de grandes manifestations et répond ainsi à un objectif d'intérêt général alors même qu'il y existe de nombreux lieux permettant au public de pratiquer une activité de détente et de loisirs. Le projet est de nature à susciter le développement d'activités économiques et à créer des emplois dans la zone en drainant des activités économiques connexes et il est constant qu'il a également pour but de dynamiser et de valoriser 1'entrée Est de la commune de Niort, où sont déjà situés un centre équestre et un aérodrome.

17. Il n'est ni démontré ni allégué que le projet aurait pu être réalisé dans des conditions équivalentes sans qu'il soit recouru à l'expropriation. Il ne ressort pas en particulier des pièces du dossier et notamment de l'étude d'impact qui a envisagé l'implantation du projet sur quatre sites, que la commune de Niort aurait possédait des terrains dans d'autres secteurs permettant la réalisation de cette opération qui porte sur une emprise de 122 hectares. La SCI Thierry soutient également que le coût de l'opération serait excessif et disproportionné au regard des objectifs globalement recherché. Toutefois ce moyen est dépourvu des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé et en conséquence, le moyen tiré du défaut d'utilité publique du projet doit être écarté.

En ce qui concerne l'impact du projet sur l'environnement :

18. La SCI Thierry soutient que le projet impacte l'environnement puisque le terrain d'assiette du projet jouxte une zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique (ZNIEFF) et qu'il aura comme conséquence la destruction et la dégradation d'un habitat ornithologique remarquable et des effets notables sur les nappes phréatiques et les périmètres de protection. Il ressort toutefois de l'étude d'impact réalisée sur site que le secteur d'implantation du Pôle Sports est situé hors du périmètre d'une ZNIEFF, d'une zone importante pour la conservation des oiseaux, ou d'une zone de protection spéciale et hors Natura 2000. S'agissant de l'atteinte aux captages, il est constant que le terrain d'assiette du projet est situé en partie au sein des périmètres de protection éloignée du captage de Saint-Lambin à Aiffres et du périmètre de protection rapprochée des captages du Vivier et Gachet 1 et 3 à Niort. Pour autant, l'hydrogéologue agréé sollicité sur la compatibilité du projet avec la protection de la ressource en eau potable a émis dans son rapport de mai 2006 un avis favorable au projet sous réserve de l'application des prescriptions établies dans le cadre de la mise en place des périmètres de protection et des mesures préventives annoncées dans le dossier de déclaration d'utilité publique ainsi que des prescriptions particulières notamment lors des travaux d'aménagement. Cet avis énonce également les dispositions à prendre et les contrôles à effectuer dans le cadre de la procédure de demande d'autorisation au titre des articles L. 214-1 et suivants du code de l'environnement pour réduire les risques de pollution liés à l'aménagement de la ZAC du Pôle Sports et il ressort des termes mêmes de l'arrêté du 10 août 2007 que le préfet a prise en compte cet avis et a imposé aux opérateurs le respect de prescriptions particulières au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement.

En ce qui concerne la nécessité d'une nouvelle enquête et d'une procédure de déclaration d'utilité publique :

19. La SCI Thierry soutient que l'opération ayant évolué " postérieurement à l'arrêté déclarant d'utilité publique ", au vu de la suppression du projet de stade, l'organisation d'une nouvelle enquête préalable et l'édiction d'une nouvelle déclaration d'utilité publique s'imposaient. Toutefois la décision d'abandonner le projet de stade a été prise postérieurement à l'intervention de l'arrêté portant déclaration de l'utilité publique du projet et cette circonstance est ainsi sans influence sur la légalité de l'arrêté, laquelle s'apprécie à la date de sa signature. Au demeurant il n'est pas établi que l'abandon du projet de stade qui n'est mentionné que dans le quatrième considérant et au même titre que les autres équipements et surfaces commerciales composant le Pôle Sports l'abandon remettrait en cause l'opération globale d'aménagement déclarée d'utilité publique par l'arrêté du 13 février 2007.

20. Il résulte de ce qui précède que la SCI Thierry n'est pas fondée à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de l'arrêté de l'arrêté du 13 février 2007 déclarant d'utilité publique l'opération et engageant la procédure de mise en compatibilité du plan d'occupation des sols de la commune de Niort pour demander d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2010.

Sur l'arrêté du 8 janvier 2010 prescrivant l'ouverture d'une enquête parcellaire :

21. La SCI Thierry soutient que cet arrêté serait illégal en ce que son auteur aurait été incompétent pour le signer et en ce que l'affichage effectué en mairie de Niort aurait été irrégulier.

En ce qui concerne la compétence du signataire de l'arrêté :

22. Par arrêté du 2 mars 2009, le préfet des Deux-Sèvres a donné délégation de signature à M. Jean-Jacques Boyer en sa qualité de secrétaire général de la préfecture aux fins de " signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapporte, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le Département des Deux-Sèvres ". Par suite, la SCI Thierry n'est pas fondée à soutenir que ce dernier ne disposait pas de la compétence nécessaire pour signer l'arrêté du 8 janvier 2010 prescrivant l'ouverture d'une enquête parcellaire, faute de délégation en ce sens, au regard des dispositions de l'article R. 11-20 du code de l'expropriation.

En ce qui concerne l'affichage en mairie :

23. La SCI Thierry a été avisée par voie de signification d'un huissier de justice le 26 janvier 2010 du dépôt du dossier d'enquête parcellaire en mairie. Dans ces conditions, dès lors qu'elle s'était vue notifier personnellement l'information selon laquelle le dossier était déposé en mairie, la SCI ne peut pas invoquer les éventuelles irrégularités tenant à la publicité collective de l'arrêté d'ouverture de l'enquête parcellaire. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que l'affichage a été correctement effectué en mairie à compter du 15 janvier 2010, comme en atteste le maire, soit une douzaine de jours avant la tenue de l'enquête qui a commencé le 27 janvier suivant et contrairement à ce que prétend la SCI l'article R. 11-20 du code de l'expropriation n'impose nullement que cet affichage soit antérieur au déroulé de l'enquête. De plus, s'il est vrai que l'ordonnance d'expropriation en date du 31 janvier 2011 mentionnait d'autres dates d'affichage, il est constant que ces dates erronées ont fait l'objet d'une ordonnance rectificative de la part du juge de l'expropriation le 5 avril 2011.

Sur l'arrêté du 4 novembre 2010 :

En ce qui concerne la compétence du signataire de l'arrêté :

24. Aux termes de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 susvisé : " Le préfet de département peut donner délégation de signature : 1° En toutes matières (...) au secrétaire général et aux chargés de mission (...). ". En l'espèce, ainsi qu'il a déjà été dit, M. Jean-Jacques Boyer, secrétaire général de la préfecture des Deux-Sèvres, bénéficiait d'une délégation de signature accordée par arrêté préfectoral du 2 mars 2009, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture le 3 mars 2009, à l'effet de : " signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de 1'Etat dans le département des Deux-Sèvres à 1'exception des actes pour lesquels une délégation a été conféré à un chef de Service de 1'Etat dans le département et des mesures générales concernant la défense nationale et la défense opérationnelle du territoire ". Par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté du 4 novembre 2010 n'aurait pas disposé d'une délégation de signature régulièrement publiée pour ce faire doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne la base légale de l'arrêté :

25. La SCI Thierry soutient que l'arrêté du 4 novembre 2010 doit être annulé pour défaut de base légale dès lors qu'il tend à la réalisation d'un projet différent de celui dont l'utilité publique a été reconnue par l'arrêté du 13 février 2007, l'opération ayant évolué du fait de la suppression du projet de stade. Toutefois ainsi qu'il a déjà été exposé, il n'est pas établi que l'abandon du projet de stade qui n'est mentionné que dans le quatrième considérant et au même titre que les autres équipements et surfaces commerciales composant le Pôle Sports l'abandon remettrait en cause l'opération globale d'aménagement déclarée d'utilité publique par l'arrêté du 13 février 2007.

En ce qui concerne la liste des parcelles annexées à l'arrêté :

26. La SCI Thierry soutient que la liste des parcelles concernées par l'expropriation annexée à l'arrêté du 4 novembre 2010 est incomplète, en ce que la parcelle HK n° 81 ne serait pas mentionnée, procédant ainsi d'une méconnaissance des dispositions des articles L. 11-8 et R. 11-28 du code de l'expropriation. Toutefois ni ces dispositions ni aucune autre disposition législatives ou réglementaires ne prévoient une telle obligation, l'alinéa premier de l'article L. 11-8 prévoyant seulement que " le préfet détermine par arrêté de cessibilité la liste des parcelles ou des droits réels immobiliers à exproprier si cette liste ne résulte pas de la déclaration d'utilité publique. ". Il résulte de ces dispositions qu'après l'intervention d'une déclaration d'utilité publique, la procédure doit être poursuivie par un arrêté de cessibilité ayant pour but exclusif d'identifier précisément les parcelles dont l'acquisition est nécessaire à la réalisation du projet déclaré d'utilité publique et qui doit, aux termes dudit code, être notifié individuellement aux propriétaires concernés. L'administration, qui n'est pas tenue de déclarer cessibles tous les terrains compris dans le périmètre de l'opération déclarée d'utilité publique, dès lors que l'acquisition de certains de ces terrains peut être faite par voie amiable, doit faire figurer dans l'arrêté de cessibilité tous ceux de ces terrains dont elle entend poursuivre l'acquisition par voie d'expropriation. Dès lors la liste figurant en annexe de l'arrêté du 4 novembre 2010 qui mentionne tous les terrains à exproprier n'avait pas à mentionner également les autres parcelles situées dans le périmètre d'utilité publique dont l'acquisition a été poursuivie par voie amiable. Il n'est d'ailleurs pas contesté que les propriétés devant être rendues cessibles figurent sur la liste annexée à l'arrêté et que le plan parcellaire figurant au dossier soumis à l'enquête prévue par les dispositions précitées, délimite les parcelles à exproprier comprises dans ce périmètre. Il s'ensuit que la circonstance que le plan parcellaire annexé à l'arrêté de cessibilité ne contient pas la parcelle HK81 est sans influence sur la légalité de cet arrêté.

27. La SCI fait valoir également que la preuve de la cession amiable de la parcelle HK 81 n'est pas rapportée. Mais il ressort des pièces du dossier que la parcelle n'a pas été acquise mais qu'un bail a été conclu prévoyant une possibilité d'achat. Par suite, le moyen tiré de l'incomplétude de la liste des parcelles concernées par l'expropriation sera écarté.

28. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ni sur les autres moyens de la requête, que la SAEML Deux-Sèvres Aménagement et le ministre de l'intérieur sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1101139 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté de cessibilité du 4 novembre 2010, ensemble la décision du 31 mars 2011 rejetant le recours gracieux formé à son encontre.

29. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la SCI Thierry dirigées contre l'Etat et la SAEML Deux Sèvres Aménagement qui ne sont pas les parties perdantes à l'instance. En revanche, il y a lieu de faire application de ces dispositions en mettant à la charge de la SCI Thierry à verser à la SAEML Deux Sèvres Aménagement la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1101139 du 17 avril 2014 du tribunal administratif de Poitiers est annulé.

Article 2 : La demande de la SCI Thierry devant le tribunal administratif de Poitiers et ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : La SCI Thierry versera à la SAEML Deux Sèvres Aménagement la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

Nos 14BX01795, 14BX01805


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX01795
Date de la décision : 17/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-02-01-01-005 Expropriation pour cause d'utilité publique. Règles générales de la procédure normale. Enquêtes. Enquête préalable. Procédure d'enquête.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Didier PEANO
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : SELARL CARADEUX CONSULTANTS - INTERBARREAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 31/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-01-17;14bx01795 ?
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