Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association départementale des accueillants familiaux de la Vienne (" ADAF "), a demandé au tribunal administratif de Poitiers l'annulation des décisions des 21 décembre 2011 et 24 avril 2012 du président du conseil général de la Vienne refusant de faire droit à ses demandes d'abrogation de la délibération du 27 mai 2011, modifiant, en la portant à deux fois et demi le SMIC de l'accueillant familial, le montant de l'aide sociale accordée aux familles, en tant que cette délibération ne comporte pas d'application rétroactive au 5 mai 2010.
Par un jugement n°1201533 du 10 décembre 2014, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête du 10 février 2015, l'association départementale des accueillants familiaux de la Vienne, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 10 décembre 2014 du tribunal administratif de Poitiers ;
2°) de modifier la prise en charge des dépenses des familles au titre de l'emploi des accueillants familiaux soit effective à compter du 8 août 2010 et non du 27 mai 2011, comme le prévoit la délibération du 27 mai 2011 ;
3°) d'enjoindre au président du conseil général de la Vienne, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de décider que la prise en charge de la rémunération de l'accueillant à hauteur de 2,5 fois le montant du SMIC sera effective à compter du 8 août 2010 ;
4°) de mettre à la charge du département de la Vienne à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- il est de la compétence du conseil général de fixer le montant de la prise en charge des frais d'accueil pour l'aide sociale à l'enfance, au titre du paiement des accueillants familiaux ;
- il n'y a pas d'indépendance juridique entre la prise en charge de l'aide sociale et la rémunération des accueillants familiaux ;
- la rémunération versée à l'accueillant familial ne doit pas être inférieure au montant minimum de la rémunération fixée par décret ;
- en vertu de l'article R. 231-4 du code de l'action sociale et des familles, le placement à titre onéreux chez un particulier donne lieu à une prise en charge compte tenu d'un plafond constitué par les rémunérations et indemnités mentionnées aux 1 et 2 de l'article L. 422-1, qui prévoit un salaire minimum.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2016, le département de la Vienne, représenté par Me C...B..., conclut au rejet de la requête de l'association départementale des accueillants familiaux de la Vienne et à ce qu'il mis à la charge de cette dernière la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la demande de première instance de l'association départementale des accueillants familiaux devant le tribunal administratif était irrecevable dès lors que l'intérêt pour agir et la qualité pour agir de l'association, n'étaient pas justifiés au dossier ;
- la requête d'appel est également irrecevable dès lors que la qualité pour agir de la présidente de l'association départementale des accueillants familiaux de la Vienne n'est pas justifiée au dossier et que les conclusions en annulation de la décision du 24 avril 2012 sont irrecevables faute pour l'association de justifier de disposer d'un intérêt pour agir contre cette décision qui ne lèse pas de manière directe et certaine les intérêts des accueillants familiaux ;
- à titre subsidiaire, sur le fond, si l'association en appel soutient que le département était tenu d'appliquer dès le 3 août 2010, le décret modifiant l'article D. 442-2 du code de l'action sociale et des familles, relatif à la rémunération des accueillants, cette demande ne peut être que rejetée ;
- en effet, d'une part, donner un effet rétroactif à une décision administrative entache d'illégalité cette décision, comme le juge le Conseil d'Etat notamment dans la décision du 25 juin 1948, Société du Journal l'Aurore ;
- d'autre part, la rémunération des accueillants et le montant de l'aide accordée aux familles au titre de la prise en charge des personnes accueillies, obéissent à deux régimes juridiques distincts ;
- si l'article R. 231-4 du code de l'action sociale et des familles, qui fixe le montant de la participation du département aux dépenses des familles, comporte un plafond de prise en charge qui se rapporte à la rémunération des accueillants familiaux, le montant de la prise en charge des dépenses par le département, sous réserve du respect de ce plafond, est libre, comme le relèvent différentes décisions rendues par la commission centrale d'aide sociale ;
- cette prise en charge des dépenses s'établit notamment au vu des différentes ressources et charges des familles ;
- les éléments de la rémunération des accueillants ne constituent donc pas des critères réglementaires de détermination du montant de la prise en charge des dépenses des familles ;
- la délibération du 27 mai 2011 modifie l'article 103 bis du règlement départemental d'aide sociale aux personnes âgées et aux personnes handicapées, qui ne se rapporte qu'à la prise en charge des dépenses des familles et non à la rémunération des accueillants.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le décret n° 2010-928 du 3 août 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. L'association départementale des accueillants familiaux de la Vienne (" ADAF "), a demandé devant le tribunal administratif de Poitiers, l'annulation des décisions des 21 décembre 2011 et 24 avril 2012 du président du conseil général de la Vienne refusant de faire droit à ses demandes d'abrogation de la délibération du 27 mai 2011, modifiant en le portant à deux fois et demi le SMIC de l'accueillant familial le montant de l'aide sociale accordée aux familles, en tant que cette délibération ne comporte pas d'application rétroactive au 5 mai 2010. Par un jugement n°1201533 du 10 décembre 2014, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles : " Pour accueillir habituellement à son domicile, à titre onéreux, des personnes âgées ou handicapées adultes (....), une personne ou un couple doit, au préalable, faire l'objet d'un agrément (...). L'agrément ne peut être accordé que si les conditions d'accueil garantissent la continuité de celui (...). ". Aux termes de l'article L. 442-1 du même code : " Toute personne accueillie au domicile d'un accueillant familial ou, s'il y a lieu, son représentant légal passe avec ledit accueillant un contrat écrit (...). Ce contrat précise la nature ainsi que les conditions matérielles et financières de l'accueil. Il prévoit notamment : / 1° Une rémunération journalière des services rendus ainsi qu'une indemnité de congé calculée conformément aux dispositions de l'article L. 223-11 du code du travail ; / 2° Le cas échéant, une indemnité en cas de sujétions particulières ; / 3° Une indemnité représentative des frais d'entretien courant de la personne accueillie ; / 4° Une indemnité représentative de mise à disposition de la ou des pièces réservées à la personne accueillie (...). Cette rémunération, qui ne peut être inférieure à un minimum fixé par décret et évolue comme le salaire minimum de croissance prévu à l'article L. 141-2 du code du travail, donne lieu au versement d'un minimum de cotisations permettant la validation des périodes considérées pour la détermination du droit à pension conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 351-2 du code de la sécurité sociale. Les indemnités mentionnées respectivement aux 2° et 3° sont comprises entre un minimum et un maximum fixés par décret (...). ". L'article D. 442-2 dudit code, modifié par le décret du 3 août 2010, dispose que : " Le montant minimum de la rémunération journalière des services rendus, visée au 1º de l'article L. 442-1, est égal à 2,5 fois la valeur horaire du salaire minimum de croissance, déterminé dans les conditions prévues aux articles L. 141-2 à L. 141-7 du code du travail (...) ". L'article R. 231-4 de ce code, relatif à l'aide à domicile et au placement des personnes âgées, énonce que : " Le placement à titre onéreux chez un particulier au titre de l'aide sociale donne lieu à une prise en charge compte tenu : 1° D'un plafond constitué par la rémunération et les indemnités mentionnées aux 1° et 2° de l'article L. 442-1, le cas échéant selon la convention accompagnant l'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale ; / 2° Des ressources de la personne accueillie, y compris celles résultant de l'obligation alimentaire. / Cette prise en charge doit garantir à l'intéressé la libre disposition d'une somme au moins égale au dixième de ses ressources, ainsi qu'au centième du montant annuel des prestations minimales de vieillesse arrondi à l'euro le plus proche. " ;
3. Comme l'ont relevé les premiers juges, les dispositions législatives et réglementaires du code de l'action sociale et des familles afférentes à la rémunération des accueillants familiaux et celles relatives à la prise en charge des dépenses des familles au titre de l'accueil par des accueillants familiaux constituent deux régimes juridiques distincts. En effet, la rémunération des accueillants familiaux se trouve déterminée uniquement par l'article D. 442-2 dudit code, modifié par le décret du 3 août 2010, lequel dispose que : " Le montant minimum de la rémunération journalière des services rendus, visée au 1º de l'article L. 442-1, est égal à 2,5 fois la valeur horaire du salaire minimum de croissance, déterminé dans les conditions prévues aux articles L. 141-2 à L. 141-7 du code du travail (...) ". C'est donc par décret que doit intervenir la définition de la rémunération des accueillants familiaux. La délibération du 27 mai 2011 dont l'association requérante conteste les refus d'abrogation, qui modifie l'article 103 bis du règlement départemental d'aide sociale en disposant que " La prise en charge du département au titre de l'aide sociale se décompose de la façon suivante : " les frais d'accueil correspondant à la rémunération de l'accueillant " sont pris en charge à hauteur de 2,5 fois le SMIC. Pour un accueil sur tout le mois, la rémunération est calculée sur la base de 30,5 jours ", ne se rapporte conformément à l'article R. 231-4 du code de l'action sociale et des familles qu'à la prise en charge des dépenses des familles et non à la rémunération des accueillants familiaux. Compte tenu du principe de non-rétroactivité des actes administratifs, la délibération du 27 mai 2011 ne pouvait, sous peine d'illégalité, avoir un effet rétroactif. La circonstance que la revalorisation de la rémunération des accueillants familiaux soit intervenue par le décret n° 2010-928 du 3 août 2010, rectifié le 7 août 2010, et ait pris effet le 8 août 2010, se trouvait dès lors sans conséquence sur la date d'effet de la délibération du 27 mai 2011, laquelle ne se rapportait qu'à la prise en charge des dépenses des familles.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées à la requête d'appel et à la demande de première instance, que l'association départementale des accueillants familiaux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation des décisions des 21 décembre 2011 et 24 avril 2012 du président du conseil général de la Vienne refusant de faire droit à ses demandes d'abrogation de la délibération du 27 mai 2011.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Compte tenu du rejet des conclusions en annulation des décisions des 21 décembre 2011 et 24 avril 2012 du président du conseil général de la Vienne refusant de faire droit à ses demandes d'abrogation de la délibération du 27 mai 2011, les conclusions de l'association requérante tendant à ce qu'il soit enjoint au président du conseil général, de décider que la prise en charge au profit des familles, de la rémunération de l'accueillant à hauteur de 2,5 fois le montant du SMIC, sera effective à compter du 8 août 2010 ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Le département de la Vienne n'étant pas, dans la présente instance partie perdante les conclusions l'association départementale des accueillants familiaux tendant au bénéfice de l'article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions du département de la Vienne tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association départementale des accueillants familiaux de la Vienne est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le département de la Vienne sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association départementale des accueillants familiaux de la Vienne et au département de la Vienne.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Antoine Bec, président-assesseur,
M. Pierre Bentolila, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 janvier 2017.
Le rapporteur,
Pierre BentolilaLe président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 15BX00427