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06/12/2016 | FRANCE | N°15BX00972

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2016, 15BX00972


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Pau de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 2000 à 2004, ainsi que des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1301467 du 22 janvier 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2015 et un mémoire présenté le 31 décembre 2015, Mme D

...B..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Pau de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 2000 à 2004, ainsi que des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1301467 du 22 janvier 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2015 et un mémoire présenté le 31 décembre 2015, Mme D...B..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 22 janvier 2015 ;

2°) de la décharger du montant de 135 142 euros qui se décompose ainsi :

- 114 334 euros au titre de l'impôt sur le revenu ;

- 4 812 euros au titre de la contribution sociale ;

- 11 914 euros après application d'une majoration de 10% ;

- 4 082 euros au titre des frais.

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention conclue entre la France et l'Espagne le 10 octobre 1995 ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C...a créé, en 1999, à Irun (Espagne), la société Patrick C...Design SL, une société de droit espagnol dont il était le gérant et l'unique associé et qui disposait d'un établissement stable à Anglet (Pyrénées-Atlantiques). A la suite d'une vérification de comptabilité concernant les années 2000 à 2004, l'administration fiscale a estimé que la société Patrick C...Design SL exerçait en réalité la totalité de son activité en France à partir d'un établissement stable qui y est situé et que les bénéfices réalisés devaient en conséquence être imposés en France, à l'impôt sur le revenu entre les mains de son unique associé. Une proposition de rectification du 15 mai 2006 contenant notamment une évaluation d'office, sur le fondement des articles L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales, des bénéfices réalisés au cours des années 2000 à 2004, a été adressée à M. C...en sa qualité de représentant légal de cette société. Des rehaussements en matière de revenus fonciers pour les années 2000 et 2004 et un rehaussement au titre de l'année 2002, consécutifs à un contrôle sur pièces, ont par ailleurs fait l'objet d'une proposition de rectification du 23 décembre 2005. Les suppléments d'impôt sur le revenu résultant de tous ces rehaussements et les pénalités y afférentes ont été mis en recouvrement au nom des épouxC.... MmeB..., qui était mariée à M. C...au cours des années 2000 à 2004 concernées, a été recherchée en paiement de ces impositions au titre de la solidarité résultant de l'article 1685 du code général des impôts alors en vigueur. Elle relève appel du jugement n° 1301467 du 22 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à être déchargée de ces impositions et pénalités.

Sur le principe de l'imposition des bénéfices de la société Patrick C...Design à l'impôt sur le revenu entre les mains de M.C... :

2. Mme B...fait valoir que la société de son époux disposant d'un siège social à Irun, d'un établissement stable en France, et s'acquittant de l'impôt sur les sociétés en Espagne, ses résultats devaient être soumis à l'impôt sur les sociétés au nom de cet établissement et non pas à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

3. Aux termes de l'article 206 du code général des impôts : " (...) 3. Sont soumis à l'impôt sur les sociétés s'ils optent pour leur assujettissement à cet impôt (...) e. Les sociétés à responsabilité limitée dont l'associé unique est une personne physique (...) ". En vertu de l'article 8 du même code : " (...) les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société (...) Il en est de même, sous les mêmes conditions : (...) 4° De l'associé unique d'une société à responsabilité limitée lorsque cet associé est une personne physique. ; ". En vertu de ces dispositions, l'associé unique personne physique d'une société à responsabilité limitée, est imposé à l'impôt sur le revenu dans la catégorie de revenus correspondant à l'activité de la société, sauf à ce que la société ait opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés.

4. Il résulte de l'instruction que la société Patrick C...Design SL est une " sociedad de responsabilidad limitada " (SRL) dont M. C...est l'unique associé. En vertu du droit des sociétés espagnol, le capital des SRL est divisé en parts égales, non librement cessibles, entre des associés qui ne répondent des dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et peut, sous certaines conditions, être réuni entre les mains d'un associé unique. Ainsi, la société Patrick C...Design SL est assimilable à une société à responsabilité limitée, dont M. C...est l'unique associé. Par suite, et en l'absence de stipulations conventionnelles contraire, les résultats réalisés par la société Patrik C...Design en France sont, de plein droit, en vertu des dispositions rappelées au point 3, imposables à l'impôt sur le revenu entre les mains de son unique associé, quand bien même cette société serait, en droit espagnol, une société de capitaux.

Sur le principe de l'imposition en France des bénéfices réalisés par la société Patrick C...Design :

5. Les sociétés régies par l'article 8 du code général des impôts ont une personnalité distincte de celle de leurs membres et exercent une activité qui leur est propre. Dès lors que cette activité est exercée en France, les bénéfices réalisés par ces sociétés sont en principe imposables en France entre les mains de leurs associés, à proportion des droits qu'ils détiennent dans la société. Il n'en va autrement que si une convention internationale relative aux doubles impositions fait obstacle à l'imposition en France de revenus qui y sont imposables en application du droit interne.

6. Aux termes de l'article 7 de la convention signée le 10 octobre 1995 entre la France et l'Espagne, qui vise à prévenir la double imposition d'un contribuable dans ces deux Etats au titre de l'impôt sur les sociétés : " Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre État mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables à cet établissement stable.". Aux termes de l'article 5 de la même convention : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " établissement stable " désigne une installation fixe d'affaires par l'intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité. / 2. L'expression " établissement stable " comprend notamment : a) Un siège de direction ; / b) Une succursale ; / c) Un bureau ; (...) ; 4. Nonobstant les dispositions précédentes du présent article, on considère qu'il n'y a pas " établissement stable " si : a) Il est fait usage d'installations aux seules fins de stockage, d'exposition ou de livraison de marchandises appartenant à l'entreprise ; b) Des marchandises appartenant à l'entreprise sont entreposées aux seules fins de stockage, d'exposition ou de livraison ; c) Des marchandises appartenant à l'entreprise sont entreposées aux seules fins de transformation par une autre entreprise ; d) Une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins d'acheter des marchandises ou de réunir des informations pour l'entreprise ; e) Une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins d'exercer, pour l'entreprise, toute autre activité de caractère préparatoire ou auxiliaire ; f) Une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins de l'exercice cumulé d'activités mentionnées aux alinéas a à e, à condition que l'activité d'ensemble de l'installation fixe d'affaires résultant de ce cumul garde un caractère préparatoire ou auxiliaire. ; / 5. Nonobstant les dispositions des paragraphes l et 2, lorsqu'une personne - autre qu'un agent jouissant d'un statut indépendant auquel s'applique le paragraphe 6 - agit pour le compte d'une entreprise et dispose dans un Etat contractant de pouvoirs qu'elle y exerce habituellement lui permettant de conclure des contrats au nom de l'entreprise, cette entreprise est considérée comme ayant un établissement stable dans cet Etat pour toutes les activités que cette personne exerce pour l'entreprise, à moins que les activités de cette personne ne soient limitées à celles qui sont mentionnées au paragraphe 4 et qui, si elles étaient exercées par l'intermédiaire d'une installation fixe d'affaires, ne permettraient pas de considérer cette installation comme un établissement stable selon les dispositions de ce paragraphe. (...) ".

7. Il résulte de l'instruction qu'au cours des années litigieuses, la société Patrick C...Design SL ne disposait d'aucun local ni d'aucun matériel en Espagne et que son activité de " designer " dans le domaine industriel et commercial se déployait auprès de clients implantés en France à partir du domicile de M.C..., qui constituait ainsi un établissement stable au sens des stipulations précitées. Par suite, l'administration était fondée à imposer M. et Mme C... à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux à raison des résultats réalisés en France par l'établissement stable de la société Patrick C...Design SL.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

8. En premier lieu, Mme B...reproche à l'administration d'avoir uniquement notifié les redressements envisagés à M.C..., en tant que " représentant de la société légale étrangère Patrick C...Design SL " alors que, selon elle, une proposition de rectification au nom de " Monsieur ou MadameC... " aurait dû leur être adressée.

9. Aux termes l'article L. 53 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l'administration des impôts et la société elle-même ". En vertu de l'article L. 54 du même livre : " Les procédures de fixation des bases d'imposition ou de rectification des déclarations relatives aux revenus provenant d'une activité dont les produits relèvent de la catégorie des bénéfices agricoles, des bénéfices industriels et commerciaux et des bénéfices non commerciaux, ou des revenus visés à l'article 62 du code général des impôts, sont suivies entre l'administration des impôts et celui des époux titulaire des revenus. Ces procédures produisent directement effet pour la détermination du revenu global. ". Selon l'article L. 54 A de ce livre : " Sous réserve des dispositions des articles L. 9 et L. 54, chacun des époux a qualité pour suivre les procédures relatives à l'impôt dû à raison de l'ensemble des revenus du foyer. Les déclarations, les réponses, les actes de procédure faits par l'un des conjoints ou notifiés à l'un d'eux sont opposables de plein droit à l'autre. ". Aux termes de l'article L. 57 : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaitre son acceptation. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. ". Aux termes de l'article 8 du code général des impôts alors en vigueur : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. En cas de démembrement de la propriété de tout ou partie des parts sociales, l'usufruitier est soumis à l'impôt sur le revenu pour la quote-part correspondant aux droits dans les bénéfices que lui confère sa qualité d'usufruitier. Le nu-propriétaire n'est pas soumis à l'impôt sur le revenu à raison du résultat imposé au nom de l'usufruitier. / Il en est de même, sous les mêmes conditions : 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées à l'article 206.1 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) ".

10. En vertu de l'article 8 du code général des impôts, les associés d'une société de personnes sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. L'article 53 de ce code prévoit que la procédure de vérification des déclarations est suivie directement entre l'administration et celles de ces sociétés qui réalisent des bénéfices industriels et commerciaux. Il ressort de ces dispositions, et eu égard aux modalités selon lesquelles sont imposés les résultats des sociétés de personnes, que lorsque des redressements sont notifiés à une société de personnes, que la procédure suivie à son égard soit une procédure contradictoire ou une procédure d'imposition d'office, l'administration fiscale n'est pas tenue, pour opérer les redressements du revenu global d'un associé résultant, à concurrence de ses droits non contestés dans la société, des rehaussements de bénéfices de celle-ci, de suivre à son égard une procédure contradictoire ou une procédure d'imposition d'office.

11. Il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient MmeB..., la proposition de rectification adressée en mai 2006 à M.C..., en sa qualité de " représentant de la société Patrick C...Design ", était consécutive à la vérification de comptabilité de cette société, et n'envisageait donc des rehaussements qu'en matière de bénéfices industriels et commerciaux. Ainsi, cette proposition de rectification, qui tirait uniquement les conséquences des rehaussements des bénéfices de la société Patrick C...Design, devait uniquement être notifiée à M.C..., en sa qualité d'unique associé de la société. Cette proposition de rectification n'avait dès lors pas à faire l'objet d'une seconde notification destinée aux épouxC....

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 du code général des impôts : " 1. Sauf application des dispositions des 4 et 5, les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles... ; cette imposition est établie au nom de l'époux, précédé de la mention " Monsieur ou Madame ". Aux termes de l'article L. 54 A du livre des procédures fiscales : " Sous réserve des dispositions des articles L. 9 et L. 54, chacun des époux a qualité pour suivre les procédures relatives à l'impôt dû à raison de l'ensemble des revenus du foyer. Les déclarations, les réponses, les actes de procédure faits par l'un des conjoints ou notifiés à l'un d'eux sont opposables de plein droit à l'autre ".

13. Le législateur a, par ces dispositions, entendu donner à chacun des époux qualité pour suivre les procédures relatives à l'imposition commune due à raison de l'ensemble des revenus du foyer, quand bien même les intéressés seraient, à la date de ces procédures, séparés ou divorcés. La proposition de rectification adressée le 15 mai 2006 à M.C..., auquel Mme B... était mariée durant les années d'imposition en litige, sont ainsi opposables à la requérante. La circonstance que cette proposition n'a pas été envoyée à la nouvelle adresse de la contribuable est dès lors sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. En outre, la requérante ne peut utilement invoquer, en se fondant sur l'article L. 80 du livre des procédures fiscales, le contenu de l'instruction du 27 janvier 1997 qui, traitant de questions touchant à la procédure d'imposition, ne peuvent pas être regardées comme comportant " une interprétation de la loi fiscale " au sens dudit article.

14. En troisième lieu, Mme B...soutient que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité dans la mesure où la vérification de la comptabilité de la société aurait débuté avant que ne soit adressé à son époux l'avis de vérification du 26 janvier 2006 et la première intervention sur place.

15. Aux termes de l'article L. 47 B du livre des procédures fiscales : " Au cours d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle, l'administration peut examiner les opérations figurant sur des comptes financiers utilisés à la fois à titre privé et professionnel et demander au contribuable tous éclaircissements ou justifications sur ces opérations sans que cet examen et ces demandes constituent le début d'une procédure de vérification de comptabilité. / Au cours d'une procédure de vérification de comptabilité, l'administration peut procéder aux mêmes examens et demandes, sans que ceux-ci constituent le début d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle. / L'administration peut tenir compte, dans chacune de ces procédures, des constatations résultant de l'examen des comptes ou des réponses aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, et faites dans le cadre de l'autre procédure conformément aux seules règles applicables à cette dernière. ".

16. Il résulte de l'instruction, et en particulier du courrier adressé aux époux C...le 11 janvier 2006, que c'est uniquement dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle des épouxC..., lequel a débuté le 21 septembre 2005, qu'une demande d'assistance administrative avait été présentée aux autorités espagnoles le 8 décembre 2005. Ainsi, cette démarche de consultation des autorités espagnoles n'était pas intervenue dans le cadre de la vérification de la comptabilité de la société de M. C...mais à l'occasion de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle des épouxC..., un examen qui n'a d'ailleurs abouti à aucune rectification. En outre, le rapport des autorités espagnoles a finalement été transmis à l'administration postérieurement à l'envoi aux époux C...de l'avis de vérification de la comptabilité de la société. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure sur ce point doit être écarté.

17. En quatrième lieu, les redressements assignés au foyer de M. et Mme C...au titre des revenus fonciers et d'une plus-value ont régulièrement fait l'objet, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, d'une proposition de rectification du 21 décembre 2005.

Sur le bien-fondé des impositions :

18. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. ". Selon l'article 39-1 de ce code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...). ". Aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, ou des revenus d'exploitations agricoles imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (...) ". Enfin, selon l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ".

19. Les impositions en litige ayant été à bon droit établies d'office, il appartient à Mme B... de démontrer le caractère exagéré des impositions qu'elle conteste.

20. Mme B...soutient que le montant des bénéfices imposables tel qu'évalué par l'administration serait exagéré et ne correspondrait pas à la réalité économique de l'entreprise. Elle reproche au vérificateur d'avoir procédé à cette reconstitution en se fondant uniquement sur les factures et les comptes bancaires de l'année 2000, et non sur les éléments comptables concernant les années 2001 à 2003.

21. Il résulte cependant de l'instruction, qu'à la suite du défaut de présentation de la comptabilité de la société Patrick C...Design SL, défaut constaté par un procès-verbal du 10 février 2006, l'administration a, pour évaluer les bénéfices imposables réalisés en France au cours de l'année 2000, reconstitué les recettes de cet établissement à partir des factures clients fournies par l'intéressé au cours des opérations de contrôle. A défaut de production d'éléments justificatifs pour les années 2001 à 2004, le vérificateur a finalement déterminé le chiffre d'affaires réalisé au cours de ces années en appliquant une majoration forfaitaire de 5 % par an à partir des chiffres communiqués pour l'année 2000. Cette évaluation d'office n'a d'ailleurs pas été contestée par le représentant légal de la société. Afin d'établir le caractère exagéré de cette reconstitution concernant les années 2001 à 2003, Mme B...produit en appel les comptes d'exploitation de la société Patrick C...Design SL, qui font apparaître des chiffres d'affaires à hauteur de 20 574,65 euros, 17 104,28 euros et 32 046 euros au titre des années 2001 à 2003 alors que l'administration avait retenu, pour ces trois années, des chiffres d'affaires à hauteur de 63 657 euros, 66 840 euros et 70 182 euros. Toutefois, ces comptes d'exploitation, qui ne sont pas accompagnés des livres comptables retraçant l'activité de la société, ni de pièces justificatives, et n'avaient d'ailleurs jamais été présentés auparavant à l'administration, ne sauraient, par eux-mêmes, suffire à établir que les chiffres d'affaires qu'ils mentionnent concerneraient l'activité déployée en France par la société. Dès lors que la reconstitution en litige ne porte que sur le chiffre d'affaires réalisé en France, la requérante ne saurait se prévaloir utilement des déclarations déposées par la société Patrick C...Design SL auprès des autorités espagnoles. Enfin, Mme B...n'établit pas que l'administration n'aurait pas tenu compte de la réalité économique de l'entreprise alors que le vérificateur a appliqué, s'agissant de l'évaluation des charges, un abattement forfaitaire de 50% sur les produits évalués d'office, bien qu'aucune facture ne lui ait été présentée. Dans ces conditions, Mme B...n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère exagéré de la reconstitution opérée par l'administration.

22. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

2

N° 15BX00972


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00972
Date de la décision : 06/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : BRUNNER

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-12-06;15bx00972 ?
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