Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures :
L'association départementale des pupilles de l'enseignement public (ADPEP) de la Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler les arrêtés du préfet de La Réunion des 26 septembre 2006 et 29 mars 2007 ordonnant le reversement par l'ADPEP de la Réunion de la somme de 2 255 758 euros à la fondation Père Favron.
Par un jugement n° 0700940 du 15 juillet 2010, le tribunal administratif de La Réunion a annulé ces deux arrêtés.
La fondation Père Favron a formé tierce opposition à ce jugement.
Par un jugement n° 1100420 du 30 avril 2014, le tribunal administratif de La Réunion a admis la tierce opposition, a déclaré le jugement n° 0700940 du 15 juillet 2010 nul et non avenu et a rejeté la demande d'annulation des arrêtés du préfet de La Réunion des 26 septembre 2006 et 29 mars 2007.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 août 2014 et un mémoire complémentaire du 22 juin 2016, présentés par MeB..., l'association départementale des pupilles de l'enseignement public (ADPEP) de la Réunion, représentée par son président en exercice, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1100420 du 30 avril 2014 du tribunal administratif de La Réunion ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet de La Réunion des 26 septembre 2006 et 29 mars 2007.
Elle soutient que :
- la tierce opposition était tardive et donc irrecevable, la fondation Père Favron ayant eu connaissance du jugement du 15 juillet 2010, dès le 9 novembre 2010 ;
- le montant de la somme qu'elle devait reverser à la fondation Père Favron a été évalué à un montant excessif, selon la méthode comptable applicable en cas de rachat de société, cette méthode n'étant pas transposable à un transfert d'activité d'une association à une autre ;
- les arrêtés de reversement ne tiennent pas compte de la quote-part de frais généraux due entre les différents établissements de l'ADPEP, ni des charges qui ont été rejetées à tort par l'administration ;
- elle ne dispose plus des fonds réclamés ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2015, la fondation Père Favron, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'ADPEP de la Réunion en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête, non signée, est irrecevable ;
- par un arrêté du préfet de la Réunion, du 7 juin 2006 devenu définitif, l'autorisation d'exploiter un foyer d'accueil médicalisé (FAM) et un centre médico psycho-pédagogique (CMPP) a été retirée à l'ADPEP de la Réunion et lui a été transférée et les deux arrêtés contestés des 26 septembre 2006 et 29 mars 2007 ont fixé les sommes devant lui être reversées ;
- sa tierce-opposition au jugement du 15 juillet 2010, qui ne lui a pas été notifié, était recevable ;
- ce jugement devait être annulé, car la demande de l'ADPEP de la Réunion était tardive et, en tout cas, mal fondée, le montant des sommes à reverser ayant été déterminé conformément à l'article L. 313-19 du code de l'action sociale et des familles et sur la base des comptes administratifs de l'ADPEP de la Réunion.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la fondation Père Favron.
Considérant ce qui suit :
1. Le préfet de la Réunion a décidé par des arrêtés du 7 juin 2006 devenus définitifs, de fermer un foyer d'accueil médicalisé (FAM) et un centre médico-psycho pédagogique (CMPP) exploités par l'association départementale des pupilles de l'enseignement public (ADPEP) de la Réunion. Par ses arrêtés du 26 septembre 2006 et du 29 mars 2007, le préfet a fixé à 2 255 758 euros le montant de la somme globale que l'ADPEP de la Réunion devait reverser, sur le fondement de l'article L. 313-19 du code de l'action sociale et des familles, à la fondation Père Favron à la suite de la fermeture de ces deux établissements. Par un jugement n° 0700940 du 15 juillet 2010, le tribunal administratif de La Réunion a annulé, à la demande de l'ADPEP de la Réunion, ces deux arrêtés. La fondation Père Favron a formé tierce-opposition à ce jugement et par un nouveau jugement n° 1100420 du 30 avril 2014, le tribunal administratif de La Réunion a admis la tierce-opposition, a déclaré le jugement du 15 juillet 2010 nul et non avenu et a rejeté la demande d'annulation des arrêtés du préfet de la Réunion des 26 septembre 2006 et 29 mars 2007. L'ADPEP de la Réunion relève appel du jugement du 30 avril 2014 du tribunal administratif de La Réunion.
Sur la recevabilité de la tierce-opposition :
2. L'article R. 832-1 du code de justice administrative permet à toute personne de former tierce-opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, lorsqu'elle n'a pas été présente ou régulièrement appelée dans l'instance ayant abouti à cette décision. En vertu de l'article R. 832-2 du même code, le délai de deux mois pour former tierce opposition ne court qu'à l'égard de personnes à qui la décision a été régulièrement notifiée ou signifiée.
3. Il est constant que comme l'a relevé le tribunal administratif, la fondation Père Favron n'a été ni appelée, ni présente, ni représentée dans l'instance ayant abouti à ce jugement. L'ADPEP de la Réunion se borne, comme en première instance, à soutenir que la fondation Père Favron avait acquis connaissance du jugement du 15 juillet 2010 plus de deux mois avant la date de l'enregistrement de sa tierce opposition. Mais, ainsi que l'ont estimé les premiers juges, seule une notification régulière du jugement, comportant l'indication des voies et délais de recours, est susceptible de faire courir, à l'encontre des personnes n'ayant été ni appelées, ni présentes ni représentées dans l'instance, le délai de deux mois pour former tierce-opposition. Et en l'espèce, il est constant que le jugement du 15 juillet 2010 n'a pas été notifié à la fondation Père Favron.
4. C'est également à juste titre que le tribunal administratif de La Réunion, a considéré que son jugement du 15 juillet 2010 préjudiciait aux droits de la fondation Père Favron, bénéficiaire du reversement imposé par les arrêtés préfectoraux en litige.
5. Dans ces conditions, l'ADPEP de la Réunion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de La Réunion par le jugement attaqué du 30 avril 2014 a admis la tierce-opposition à son jugement du 15 juillet 2010 formée par la fondation Père Favron.
Sur le bien-fondé de la requête de l'ADPEP :
6. Aux termes de l'article L. 313-19 du code de l'action sociale et des familles : " En cas de fermeture définitive d'un établissement ou d'un service géré par une personne morale de droit public ou de droit privé celle-ci reverse à une collectivité publique ou à un établissement privé poursuivant un but similaire les sommes affectées à l'établissement ou service fermé, apportées par l'Etat, par l'agence régionale de santé, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ou par les organismes de sécurité sociale, énumérées ci-après : / 1° Les subventions d'investissement non amortissables, grevées de droits, ayant permis le financement de l'actif immobilisé de l'établissement ou du service. Ces subventions sont revalorisées selon des modalités fixées par décret ; / 2° Les réserves de trésorerie de l'établissement ou du service constituées par majoration des produits de tarification et affectation des excédents d'exploitation réalisés avec les produits de la tarification ; / 3° Des excédents d'exploitation provenant de la tarification affectés à l'investissement de l'établissement ou du service, revalorisés dans les conditions prévues au 1° ; / 4° Les provisions pour risques et charges, les provisions réglementées et les provisions pour dépréciation de l'actif circulant constituées grâce aux produits de la tarification et non employées le jour de la fermeture. La collectivité publique ou l'établissement privé attributaire des sommes précitées peut être : / a) Choisi par le gestionnaire de l'établissement ou du service fermé, avec l'accord de l'autorité ou des autorités ayant délivré l'autorisation du lieu d'implantation de cet établissement ou service ; / b) Désigné par l'autorité compétente de l'Etat dans le département, en cas d'absence de choix du gestionnaire ou de refus par l'autorité ou les autorités mentionnées au a. L'organisme gestionnaire de l'établissement ou du service fermé peut, avec l'accord de l'autorité de tarification concernée, s'acquitter des obligations prévues aux 1° et 3° en procédant à la dévolution de l'actif net immobilisé de l'établissement ou du service. ".
7. L'ADPEP de la Réunion soutient que le montant des sommes qu'elle doit reverser n'aurait pas dû être déterminé sur la base du compte administratif de ses établissements mais à l'aide d'une méthode comptable permettant notamment de tenir compte de certaines dépenses, des décaissements effectifs et du décalage entre les documents budgétaires et ceux de sa trésorerie. L'ADPEP de la Réunion soutient à cet égard que du montant des sommes qu'elle devait reverser devaient être déduites notamment une quote-part de frais généraux qu'elle a du assumer pour le fonctionnement du siège du groupe auquel elle appartient, ainsi qu'un certain nombre de charges dont la déduction lui aurait à tort été refusée par le préfet, de même que devait être admise la constitution de certaines provisions.
8. Mais comme l'ont relevé les premiers juges, la détermination des sommes à reverser par l'ADPEP de la Réunion, résultait du compte administratif que lui avait transmis l'ADPEP et qui avait été approuvé par le préfet. Le compte administratif n'intégrait pas la prise en compte des frais de siège, dont en tout état de cause, l'ADPEP n'avait pas obtenu l'autorisation de déduction dans les conditions prévues par l'article R. 314-87 du code de l'action sociale et des familles. L'ADPEP de la Réunion qui ne saurait utilement demander au contentieux, à la cour, de s'écarter des documents comptables qu'elle a transmis au préfet, ne justifie en tout état de cause pas que les sommes dont elle soutient qu'elles ne devraient pas être incluses dans la somme de 2 255 758 euros que le préfet de La Réunion lui a demandée de reverser à la fondation Père Favron, par les arrêtés contestés, des 26 septembre 2006 et 29 mars 2007, se rattacheraient aux catégories, en relation avec des financements publics, de subventions, de réserves de trésorerie, d'excédents d'exploitations et de provisions, auxquelles renvoie l'article L. 313-19 précité du code de l'action sociale et des familles dont il lui a été fait application.
9. L'ADPEP de la Réunion soutient, enfin, qu'elle ne dispose pas des fonds correspondant aux sommes à reverser, mais de telles circonstances sont sans incidence sur la légalité de ces arrêtés.
10. Dans ces conditions, l'ADPEP de la Réunion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de La Réunion a déclaré son jugement du 15 juillet 2010 nul et non avenu.
11. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à sa requête, l'ADPEP de la Réunion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par un jugement n° 1100420 du 30 avril 2014, le tribunal administratif de La Réunion a admis la tierce-opposition de la fondation Père Favron, a déclaré le jugement du 15 juillet 2010 nul et non avenu et a rejeté la demande d'annulation des arrêtés du préfet de La Réunion des 26 septembre 2006 et 29 mars 2007.
12. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de l'ADPEP de la Réunion à verser une somme de 1 500 euros à la fondation Père Favron au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE
Article 1er : La requête de l'ADPEP de la Réunion est rejetée.
Article 2 : L'ADPEP de la Réunion versera la somme de 1 500 euros à la fondation Père Favron en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association départementale des pupilles de l'enseignement public (ADPEP) de la Réunion à la fondation Père Favron et au préfet de La Réunion.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, premier conseiller,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller
Lu en audience publique, le 21 novembre 2016
Le rapporteur,
Pierre BentolilaLe président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 14BX02436