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15/11/2016 | FRANCE | N°16BX02032

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 15 novembre 2016, 16BX02032


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1601228 du 26 mai 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 juin 2016, M.B..., représent

é par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 mai 2016 du tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1601228 du 26 mai 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 juin 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 mai 2016 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler les décisions contenues dans l'arrêté du 13 janvier 2016 du préfet de la Gironde ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour et à défaut, lui faire injonction de se prononcer à nouveau sur le droit au séjour du requérant dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et de délivrer en attendant une autorisation provisoire de séjour et de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

............................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Didier Péano,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant M.B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A...B..., né le 7 novembre 1984, de nationalité marocaine, est entré en France en décembre 2009 et a bénéficié d'un titre de séjour " travailleur saisonnier " en qualité d'ouvrier agricole du 10 décembre 2009 au 9 décembre 2012. Le 22 octobre 2012, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain. Par décision du 17 septembre 2013, le préfet de la Gironde a rejeté cette demande. Toutefois, par un arrêt du 17 novembre 2014, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé ce refus et enjoint au préfet de procéder au réexamen de la demande. Par lettre du 28 novembre 2014, le préfet a invité M. B...à se présenter aux services de la préfecture afin de se conformer à l'injonction de la cour et par l'arrêté du 13 janvier 2016, le préfet de la Gironde a refusé à nouveau de délivrer un titre de séjour à M. B...en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et en fixant le pays de renvoi. M. B...relève appel du jugement n° 1601228 du 26 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du 13 janvier 2016.

2. En premier lieu, l'arrêté du 13 janvier 2016 mentionne que par lettre du 28 novembre 2014 M. B...a été invité à se présenter à la préfecture afin de respecter l'injonction faite par la cour au préfet de procéder au réexamen de son dossier dans le cadre des dispositions de l'article 3 de l'accord franco-marocain, que M. B...a présenté un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la SARL MEDI-PEINTURE sise à Lormont en qualité de " peintre ", que, par arrêté du 1er octobre 2015, l'autorisation de travail sollicitée a été refusée, après avis de l'unité territoriale de la Gironde de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Aquitaine, pour en conclure que M. B... ne peut ainsi se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé. L'arrêté ajoute qu'il est célibataire et sans charge de famille, qu'il ne justifie pas être isolé dans son pays d'origine, ni avoir rompu tout lien avec celui-ci d'autant qu'il y est retourné régulièrement, qu'ainsi la circonstance que ses parents et ses quatre frères et soeurs, dont l'une à la nationalité française, résident en France, est sans incidence sur sa demande de titre de séjour, qu'il a demeuré au Maroc tout au moins jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans et qu'au surplus, il ne peut se prévaloir de son ancienneté de présence sur le territoire français sous couvert de son titre de séjour en qualité de " saisonnier ", qui ne lui permet pas de s'installer durablement en France. Il est vrai que l'arrêté du 13 janvier 2016 ne contient pas lui-même de précisions sur la qualification professionnelle de M.B..., son expérience, l'ancienneté de son activité professionnelle et les caractéristiques de l'emploi qu'il occupe, ainsi que sur les motifs pour lesquels la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Aquitaine a rejeté la demande d'autorisation de travail que son employeur avait présentée. Toutefois, l'arrêté du 13 janvier 2016 renvoie à l'arrêté du 1er octobre 2015 dont il n'est pas contesté qu'il était joint à la décision du préfet et par lequel la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a rejeté la demande d'autorisation de travail que son employeur avait présentée en précisant les motifs de ce refus au regard notamment de la qualification, l'expérience, l'ancienneté de l'activité professionnelle et les caractéristiques de l'emploi occupé par M. B..., ainsi que d'ailleurs les voies et délais de recours contentieux. Ainsi l'arrêté du 13 janvier 2016 qui n'était pas tenu de préciser lui-même de manière exhaustive l'ensemble des éléments tenant à la situation professionnelle de M. B...énonce suffisamment les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet a fondé son appréciation pour prendre les décisions contestées. Dès lors, l'arrêté du 13 janvier 2016 est suffisamment motivé au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979.

3. Il ressort des termes de l'arrêté du 13 janvier 2016 qui ainsi qu'il vient d'être dit, n'avait pas à mentionner lui-même la qualification, l'expérience, l'ancienneté de l'activité professionnelle et les caractéristiques de l'emploi occupé, et des autres pièces du dossier que le préfet a procédé à un examen réel et sérieux de l'ensemble de la situation de M. B...qui en tout état de cause ne peut pas utilement faire valoir que l'arrêté du 1er octobre 2015 par lequel la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Aquitaine a rejeté la demande d'autorisation de travail que son employeur avait présentée ne lui a pas été personnellement notifié et que cette carence a eu pour effet de le priver d'une garantie de procédure, pour contester la légalité de l'arrêté du 13 janvier 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

4. De même, M. B...soutient que le préfet aurait dû mettre en oeuvre le pouvoir discrétionnaire dont il dispose pour apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, l'opportunité de lui délivrer un titre de séjour à titre de régularisation, pouvoir dont les stipulations de l'accord franco-marocain n'interdisent pas l'usage. Toutefois, comme il a déjà été dit, il n'est pas établi que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de l'ensemble de la situation de M. B...avant de lui refuser un titre de séjour à quelque titre que ce soit, qu'il n'aurait pas exercé ainsi son pouvoir discrétionnaire de régularisation et qu'il se serait mépris sur l'étendue de sa compétence.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention " salarié " lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois (...) ". Aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum et qui ne relèvent pas de l'article 1er du présent accord, reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / Après trois ans de séjour régulier en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 1er sont applicables pour le renouvellement du titre de séjour après dix ans (...) ". Enfin, l'article 9 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ".

6. Il n'est pas contesté que le contrat de travail produit à l'appui de la demande d'autorisation de travail formée par M. B...ne portant pas sur un emploi figurant sur la " liste des métiers dits en tension accessibles aux ressortissants marocains ", la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi était fondée à lui opposer, comme elle l'a fait, la situation de l'emploi dans cette profession et la circonstance que le nombre des demandeurs d'emploi dans la profession de peintre recensés en Gironde était significativement supérieur au nombre d'emplois offerts. Dans ces conditions, en lui refusant, pour ce motif, le visa de son contrat de travail, l'administration n'a commis aucune erreur d'appréciation, quelles que soient la qualification et l'expérience professionnelle de M. B... dont l'employeur n'a d'ailleurs pas répondu à la demande de renseignements complémentaires faite par courriers des 27 février et 13 mars 2015. Dès lors, M.B..., qui n'est pas fondé à soutenir que la décision du 1er octobre 2015 de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi est entachée d'illégalité, n'établit pas qu'il remplissait les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance du titre de séjour portant la mention " salarié " en vertu des stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " -1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Pour l'application des stipulations et des dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

8. Pour soutenir que la décision de refus de titre de séjour porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale, M. B...fait valoir qu'il n'a pas pu bénéficier à titre personnel du regroupement familial alors que l'ensemble de sa famille réside en France et qu'il n'a plus aucune attache familiale au Maroc, qu'il justifie d'une intégration professionnelle et qu'il est présent sur le territoire français depuis 2009 soit depuis plus de sept ans à la date de la décision. Toutefois, M. B...n'établit pas qu'il aurait résidé de façon habituelle et continue en France depuis qu'il y est entré en décembre 2009 à l'âge de vingt-neuf ans, ni avoir rompu tout lien avec le Maroc où il est retourné régulièrement étant bénéficiaire d'un titre de séjour " travailleur saisonnier " en qualité d'ouvrier agricole du 10 décembre 2009 au 9 décembre 2012. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B...célibataire et sans enfant ne disposerait plus d'aucune attache familiale au Maroc. Dans ces conditions, compte tenu notamment de la durée et des conditions du séjour en France de M. B...à la date de la décision contestée, le refus du préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, quand bien même il se serait intégré dans la société française et n'est plus susceptible d'être admis au bénéfice du regroupement familial. Par suite, cette décision n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M.B....

9. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, M. B...ne saurait se prévaloir, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision pour demander l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français. Pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 8 concernant la décision de refus de titre de séjour, le moyen tiré de ce que la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. B...doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées.

DECIDE

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

2

N° 16BX02032


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02032
Date de la décision : 15/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Didier PEANO
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : TREBESSES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-11-15;16bx02032 ?
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