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13/10/2016 | FRANCE | N°14BX03071

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 13 octobre 2016, 14BX03071


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Saint-Sulpice à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des préjudices subis du fait du non-respect d'une promesse de renouvellement d'autorisation d'occupation du domaine public.

Par un jugement n° 1001675 du 2 septembre 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 novembre 2014 et un mémoire enregistré le 1

2 juillet 2016, M.D..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Saint-Sulpice à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des préjudices subis du fait du non-respect d'une promesse de renouvellement d'autorisation d'occupation du domaine public.

Par un jugement n° 1001675 du 2 septembre 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 novembre 2014 et un mémoire enregistré le 12 juillet 2016, M.D..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 2 septembre 2014 ;

2°) de condamner la commune de Saint-Sulpice à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Sulpice une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. D...soutient que :

- le jugement attaqué est bien joint à sa requête comme la lettre du 30 octobre accompagnant cet envoi ;

- le maire n'a pas tenu sa promesse, exprimée dans la lettre du 20 octobre 2005, de maintenir pour au moins trois ans l'autorisation d'occupation du domaine public délivrée en 1992 et renouvelée à 23 reprises, alors que le conseil municipal ne s'est pas opposé à un transfert de cette autorisation, pour l'activité commerciale qu'il exerce, au bénéfice de son successeur ;

- le maire n'a pas non plus respecté sa promesse exprimée dans la lettre du 30 mars 1992 de mettre à sa disposition un autre emplacement en cas de besoin en lui demandant le 4 décembre 2006 de démonter son chalet en raison des travaux prévus sur le mail Georges Spénale sans lui proposer un autre lieu d'implantation, alors même qu'il en existe plusieurs à proximité ;

- le délai que le maire lui avait accordé le 1er décembre 2006 pour déposer une nouvelle demande d'autorisation d'occupation du domaine sur un autre lieu n'a pas davantage été respecté ;

- le caractère d'intérêt général des travaux réalisés sur l'emplacement qu'il occupait n'est pas démontré. En outre, les travaux réalisés ne font pas obstacle à la remise en place du chalet ;

- l'ensemble de ces manquements constituent des fautes de nature à engager la responsabilité de la commune ;

- du fait des promesses non tenues, il n'a finalement pas pu vendre son commerce, ni au successeur prévu qui lui en proposait 35 000 euros, ni à toute autre personne. Etant dans l'impossibilité de vendre son commerce ou de l'exploiter, il s'est retrouvé sans rien dans une situation très pénible, cause d'un préjudice moral qui devra être indemnisé à hauteur de 15 000 euros en plus du préjudice matériel qui peut être évalué à 35 000 euros ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, il s'est constitué une clientèle pour le commerce qu'il a exploité pendant de nombreuses années, activité qui était cessible et dont la valeur a été estimée à 35 000 euros dans l'acte sous-seing privé conclu avec son successeur. Le renouvellement de la convention promis par le maire était une condition essentielle et suspensive de la vente. Les fautes de la commune ont eu pour conséquence la disparition de son commerce et lui ont occasionné un préjudice important.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2015, la commune de Saint-Sulpice, prise en la personne de son maire, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. D...d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune fait valoir que :

- la requête est irrecevable en l'absence du jugement attaqué dans les pièces jointes au mémoire introductif d'instance ;

- le courrier du 20 octobre 2005 dont se prévaut le requérant n'est en aucun cas assimilable à l'engagement de délivrer une autorisation d'occupation du domaine public, ni à celui de renouveler la permission de voirie du 4 mai 1992, puisqu'une telle démarche ne relève pas de la compétence de la commune mais de celle du conseil général, sur le domaine duquel était implanté le chalet. La convention du 8 avril 1992 signée avec elle en sa qualité de gestionnaire ne portait que sur les modalités de mise à disposition de la dépendance du domaine public routier. Le compromis de vente distingue d'ailleurs les compétences de chacune des deux collectivités. Aucun engagement ferme du maire n'a été notifié à l'intéressé s'agissant de la conclusion d'une nouvelle convention d'occupation du domaine départemental pour une durée de trois ans, soumise au demeurant à des conditions tenant notamment à la mise aux normes des installations ;

- contrairement à ce que soutient M.D..., le courrier du 20 mars 1992 ne constitue pas un engagement inconditionnel de ne jamais remettre en cause la convention fixant les modalités d'occupation du domaine public départemental, compte tenu notamment du caractère précaire et révocable d'un tel contrat. En mettant fin à cette convention qui n'avait plus lieu d'être faute d'autorisation d'occupation du domaine public départemental, dont il n'est pas même allégué qu'elle aurait été demandée, et en raison des travaux envisagés à cet endroit, la commune n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;

- si le maire a indiqué dans son courrier du 1er décembre qu'il serait " dans l'obligation de refuser toute nouvelle autorisation d'occuper le domaine public qui [lui] parviendrait après le 31 décembre 2006 ", cela ne signifiait ni que toute demande d'occuper le domaine public à compter de cette date serait refusée, ni que toute demande formulée avant le 31 décembre 2006 pour une occupation après cette date, serait examinée, voire accordée. Les travaux d'aménagement prévus sur le mail Georges Spénale à compter de la seconde quinzaine du mois de janvier 2007 impliquaient nécessairement que les dépendances du domaine privé soient libérées de toute occupation afin que le chantier puisse être mis en place. On ne peut dans ces conditions reprocher au maire de ne pas avoir respecté un délai qui n'avait jamais été accordé ;

- le compromis de vente, signé le 30 janvier 2006 conditionnait la vente à la réalisation d'un certain nombre de conditions, lesquelles devaient être satisfaites avant le 15 avril 2006 au plus tard. Le requérant n'établit pas que les acquéreurs ait obtenu le prêt qu'ils devaient solliciter auprès d'un établissement bancaire ni que ceux-ci aient sollicité et obtenu la délivrance d'une permission de voirie auprès du conseil général. Les décisions des 4 et 28 décembre 2006 n'ont pu avoir pour effet d'empêcher une vente qui était déjà devenue caduque depuis le 16 avril 2006, faute notamment pour les acquéreurs d'avoir levé les conditions suspensives. Le lien de causalité entre les fautes alléguées et les préjudices dont M. D...demande 1'indemnisation n'est par suite pas établi ;

- s'agissant des préjudices, à titre infiniment subsidiaire, M. D...ne saurait demander réparation pour la disparition d'un " fonds de commerce " qu'il n'a, en tout état de cause, pas pu instaurer sur le domaine public départemental. Il n'avait pas droit au renouvellement d'une autorisation précaire et révocable et l'abrogation d'une autorisation décidée dans l'intérêt de la conservation ou de l'utilisation normale du domaine conformément à son affectation n'ouvre aucun droit à indemnisation ;

- la fin de la convention portant sur les modalités d'occupation du domaine public départemental en litige n'a pas eu pour effet de déposséder M. D...de l'enseigne, du mobilier et du matériel utilisés pour son activité. Il en est resté propriétaire, et rien ne l'empêchait de procéder à leur vente. L'acte sous-seing privé concernait d'ailleurs uniquement le mobilier utile à l'exploitation de son activité de restauration, dont il n'est pas établi qu'il en serait toujours propriétaire ;

- le préjudice moral invoqué par le requérant n'est pas démontré. M. D...était conscient que l'occupation n'était pas pérenne et qu'il pouvait être conduit à quitter le domaine public. Par ailleurs, l'évacuation du domaine public est motivée par la réalisation de travaux exécutés dans l'intérêt de la dépendance domaniale occupée. La demande de remise en état du site occupé était donc justifiée par un motif d'intérêt général.

L'ordonnance du 13 juin 2016 a fixé la clôture de l'instruction au 18 juillet 2016 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-André Braud,

- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 4 mai 1992, le département du Tarn a délivré à M. D...l'autorisation d'occuper le domaine public départemental sur un emplacement situé avenue Auguste Milhès, désormais dénommée mail Georges Spénale, sur le territoire de la commune de Saint-Sulpice aux fins d'y exploiter un commerce de restauration rapide dénommé " Le petit chalet ". La commune de Saint-Sulpice, à qui la gestion de ce domaine a été déléguée par le département, a conclu le 8 avril 1992 avec M. D...une convention définissant les modalités de mise à disposition de cet emplacement pour une durée de six mois renouvelable tacitement. Cette convention a été renouvelée sans interruption et pour la même durée jusqu'en 2005. M. D... a signé le 30 janvier 2006 un compromis de vente de son fonds de commerce, pour un prix de 35 000 euros, assorti de conditions suspensives dont la signature par la commune, laquelle ne s'était pas opposée au transfert, d'une nouvelle convention avec son successeur. Par deux courriers en date des 1er et 4 décembre 2006, le maire de Saint-Sulpice a informé M. D... de la réalisation au début de l'année 2007 de travaux sur le mail Georges Spénale et l'a en conséquence invité à démonter son chalet. Puis par une décision en date du 28 décembre 2006, le maire de Saint-Sulpice a refusé de renouveler la convention conclue le 8 avril 1992. M. D..., après que sa réclamation préalable a été rejetée le 15 février 2010, a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Sulpice à l'indemniser des préjudices matériel et moral résultant de ce refus. M. D...relève appel du jugement du 2 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur la responsabilité :

2. En premier lieu, si, dans son courrier du 20 octobre 2005, le maire de Saint-Sulpice a confirmé à M. D...que le conseil municipal ne s'opposait pas " à une éventuelle transmission de (son) activité professionnelle sur le site " en souhaitant que le " successeur conserve une exploitation identique " et qu'il était " prêt à négocier une convention d'occupation du domaine public qui porterait l'autorisation à trois années ", M. D...ne saurait être regardé, compte tenu des termes ainsi employés, comme disposant d'un engagement ferme et définitif de la commune concernant le renouvellement de la convention d'occupation du domaine public dont il bénéficiait. Il en résulte que la responsabilité pour faute de la commune à raison de promesses non tenues ne peut, dès lors, et en tout état de cause, être engagée de ce chef vis-à-vis de M.D....

3. En deuxième lieu, aux termes de l'acte sous-seing privé conclu le 30 janvier 2006 entre M. D...et son successeur, la vente devait intervenir au plus tard le 30 avril 2006, sous réserves de la levée de plusieurs conditions suspensives avant le 15 avril 2006 comprenant notamment d'une part, l'obtention par l'acquéreur d'une autorisation d'occupation du domaine public départemental, d'autre part le renouvellement de la convention d'exploitation par la commune de Saint-Sulpice au bénéfice de ce dernier, et enfin l'obtention d'un prêt bancaire. Il ne résulte pas de l'instruction et M. D...n'établit ni même n'allègue que le président du conseil général du Tarn aurait délivré cette autorisation. Par suite, le tribunal a estimé à juste titre que dans la mesure où le compromis de vente était devenu caduc dès lors qu'au moins une autre des conditions suspensives de la vente n'avait pas été levée, la décision de la commune de Saint-Sulpice, intervenue à la fin de l'année 2006 de ne pas renouveler la convention définissant les modalités de mise à disposition de l'emplacement et de lui demander de démonter son installation en raison de travaux d'aménagement de l'esplanade, engagés exclusivement dans l'intérêt du domaine public et conformes à sa destination, ne pouvait être regardée comme étant la cause de l'échec de cette vente et ne peut donc être utilement invoquée pour engager la responsabilité de la commune de Saint-Sulpice.

4. En troisième lieu, eu égard au caractère révocable et personnel d'une autorisation d'occupation du domaine public, celle-ci ne pouvait, à la date de la décision attaquée, donner lieu à la constitution d'un fonds de commerce dont l'occupant serait propriétaire. Par suite, l'exploitant qui occupait le domaine public ne pouvait prétendre à l'indemnisation de la perte d'un tel fonds. Les conclusions en ce sens de M. D...ne peuvent par suite, et tout état de cause, qu'être rejetées.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Sulpice, que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande indemnitaire.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de faire droit à aucune des conclusions des parties tendant à l'application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Sulpice tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et à la commune de Saint-Sulpice. Copie en sera adressée pour information au département du Tarn.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2016.

Le rapporteur,

Paul-André BRAUDLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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No 14BX03071


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX03071
Date de la décision : 13/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Domaine - Domaine public - Régime - Occupation - Utilisations privatives du domaine.

Domaine - Domaine public - Régime - Contentieux de la responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : LAZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-13;14bx03071 ?
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