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11/10/2016 | FRANCE | N°16BX00583

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 11 octobre 2016, 16BX00583


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ainsi que l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2015 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et, d'autre part, l'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2015 par lequel le préfet du Tarn l'a assigné à résidence dans le

département du Tarn pour une durée de quarante cinq jours, l'a obligé à se présen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ainsi que l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2015 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et, d'autre part, l'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2015 par lequel le préfet du Tarn l'a assigné à résidence dans le département du Tarn pour une durée de quarante cinq jours, l'a obligé à se présenter le samedi et le dimanche à la gendarmerie de Gaillac à 10 heures et lui a interdit de sortir du département du Tarn sans autorisation.

Par un jugement n° 1505579, 1505768 du 10 décembre 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, la décision fixant le pays de renvoi et la décision l'ayant assigné à résidence.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2016, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler le jugement susvisé du 10 décembre 2015 ;

3°) d'annuler l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi en date du 28 octobre 2015 ainsi que l'arrêté du 8 décembre 2015 par lequel le préfet du Tarn l'a assigné à résidence ;

4°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou à défaut d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application du seul article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n°200-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Sylvie Cherrier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant sénégalais, né le 23 mars 1997 à Dakar, déclare être entré irrégulièrement en France le 19 août 2014 muni de sa carte d'identité et d'un extrait de son acte de naissance. Il a été confié par une ordonnance du 22 août 2014 à l'aide sociale à l'enfance du département de la Haute-Garonne en qualité de mineur isolé. Le 18 novembre suivant, il a été placé auprès de la maison d'enfants à caractère social " Lucie Aubrac " à Gaillac. Le 23 mars 2015, il a souscrit un contrat d'accueil provisoire jeune majeur auprès du conseil départemental de la Haute-Garonne et a intégré, au cours de l'année scolaire 2014-2015, la maison familiale rurale (MFR) " Bel Aspect " de Gaillac, dans le cadre du dispositif d'initiation aux métiers en alternance. Il s'est inscrit en première année du certificat d'aptitude professionnelle " Installation sanitaire et thermique " pour l'année 2015-2016 au lycée Alexis Monteil à Rodez. Il a sollicité, le 30 juin 2015, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 28 octobre 2015, le préfet du Tarn a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Il a par ailleurs ordonné son assignation à résidence par un arrêté du 8 décembre 2015. M. B...relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, la décision fixant le pays de renvoi et la décision l'ayant assigné à résidence.

Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :

2. Il ressort des pièces du dossier que le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Bordeaux a, par décision du 1er mars 2016, accordé à M. B...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale dans l'instance n°16BX00583. Dès lors, les conclusions tendant à ce que soit prononcée son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

En ce qui concerne la légalité du refus de titre de séjour, invoqué par la voie de l'exception à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, la décision du 28 octobre 2015 portant refus de titre de séjour vise les textes sur lesquels elle se fonde et précise les éléments de fait circonstanciés relatifs à la situation personnelle de M.B..., notamment les conditions de son entrée et de son séjour en France, les éléments de sa situation professionnelle et personnelle ainsi que sa situation familiale. Par suite, le moyen tiré de ce qu'elle serait insuffisamment motivée doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. ".

5. Pour refuser de délivrer à M. B... un titre de séjour " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Tarn s'est fondé, d'une part sur le motif que l'intéressé avait été inscrit, au cours de l'année 2014-2015, en classe DIMA, au cours de laquelle il avait effectué des stages découvertes, produisait une inscription en CAP de plomberie pour l'année 2015-2016 et ne détenait pas de contrat d'apprentissage, et, d'autre part, sur le motif que l'analyse des documents d'identité qu'il avait présenté révélait que son acte de naissance présentait les caractéristiques d'une contrefaçon et que l'examen osseux établissait que son âge le plus probable était de dix-neuf ans le jour de l'examen, soit plus de dix-huit ans au moment de son placement à l'Aide sociale à l'enfance.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., entré seul sur le territoire français le 19 août 2014, à l'âge de dix-sept ans et demi selon ses dires, a été placé auprès du service de l'aide sociale à l'enfance, en qualité de mineur isolé puis confié à la maison d'enfants à caractère social (MECS) de Gaillac. Il a été scolarisé au cours de l'année scolaire 2014-2015 en classe " dispositif d'initiation aux métiers en alternance " (DIMA), laquelle ne peut être regardée, eu égard à son caractère et à son objet, comme une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A la rentrée scolaire de septembre 2015, il s'est inscrit en première année de certificat d'aptitude professionnelle (CAP) " Installations sanitaires et thermiques ", au lycée professionnel Alexis Monteil à Rodez. Par suite, le 28 octobre 2015, date à laquelle a été pris l'arrêté contesté, et à laquelle sa légalité doit être appréciée, M. B...ne pouvait être regardé comme suivant depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle au sens de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce motif justifiait à lui seul le refus de titre de séjour opposé à l'intéressé et il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ce seul motif. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'erreur de fait et l'erreur de droit qui entacheraient le second motif de la décision de refus de séjour sont sans portée utile sur la légalité de celle-ci.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M.B..., entré irrégulièrement en France et qui ne justifiait, à la date de l'arrêté contesté, que d'une courte durée de séjour sur le territoire national, n'établit ni même n'allègue y disposer d'attaches familiales ou de liens stables et intenses. Il n'est par ailleurs pas dépourvu d'attaches familiales au Sénégal où résident notamment sa mère ainsi que ses trois frère et soeurs. Dans ces conditions, le refus de séjour ne peut être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et comme ayant méconnu, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.B....

9. Les éléments de la situation personnelle et familiale de M. B...ne permettent pas de le regarder comme justifiant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels. Aussi, n'est-il pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de droit et une manifeste dans l'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne les autres moyens invoqués à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

11. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que si les décisions portant obligation de quitter le territoire doivent faire l'objet d'une motivation, celle-ci se confond avec la motivation des refus de titre de séjour sur lesquels elles sont fondées. Comme il a été dit au point 3 ci-dessus, l'arrêté attaqué est, en tant qu'il emporte refus de séjour, suffisamment motivé. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait insuffisamment motivée doit être écarté.

12. En deuxième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les motifs exposés au point 8 ci-dessus.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

13. En premier lieu, cette décision, qui vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et indique que M. B...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour au Sénégal, est suffisamment motivée en droit et en fait.

14. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Eu égard à sa situation telle qu'elle a été rappelée au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la décision portant assignation à résidence :

15. En premier lieu, la décision attaquée vise l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que M. B...a fait l'objet le 28 octobre 2015 d'une décision portant obligation de quitter dans un délai de trente jours le territoire français, qu'il est néanmoins demeuré sur le territoire français et qu'il présente des garanties propres à prévenir le risque qu'il puisse se soustraire à l'exécution de la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. Elle est, par suite, suffisamment motivée en droit et en fait.

16. En deuxième lieu et dès lors que, comme il a été dit, la décision portant obligation de quitter le territoire est légale, le moyen tiré de son illégalité et invoqué par la voie de l'exception à l'encontre de la décision assignant M. B...à résidence doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

17. La présente décision, qui rejette les conclusions en annulation présentées par M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37, alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

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N° 16BX00583


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00583
Date de la décision : 11/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-11;16bx00583 ?
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