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04/10/2016 | FRANCE | N°16BX01133

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2016, 16BX01133


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...épouse C...et M. D...C...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les arrêtés du 26 octobre 2015, par lesquels le préfet des Hautes-Pyrénées a refusé de leur délivrer à chacun un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français, au plus tard le 15 juillet 2016, et a fixé l'Albanie comme pays de renvoi.

Par un jugement n° 1502412 et n° 1502413 du 10 mars 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

:

Par une requête enregistrée le 4 avril 2016, M. et MmeC..., représentés par Me E..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...épouse C...et M. D...C...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les arrêtés du 26 octobre 2015, par lesquels le préfet des Hautes-Pyrénées a refusé de leur délivrer à chacun un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français, au plus tard le 15 juillet 2016, et a fixé l'Albanie comme pays de renvoi.

Par un jugement n° 1502412 et n° 1502413 du 10 mars 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 avril 2016, M. et MmeC..., représentés par Me E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 mars 2016 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler les arrêtés des 26 octobre 2015 du préfet des Hautes-Pyrénées ;

3°) d'enjoindre au préfet de Hautes-Pyrénées de leur délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut, d'enjoindre à l'autorité préfectorale de réexaminer leur situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de leur délivrer une autorisation de séjour durant cet examen ;

4°) de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de leur conseil d'une somme de 2 500 euros, en application des dispositions combinées de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi sur l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de Etat.

.........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Frédéric Faïck a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et MmeC..., de nationalité albanaise, entrés en France avec leurs deux enfants mineurs, le 27 février 2013, selon leurs déclarations, pour y solliciter l'asile qui leur a été refusé par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) du 6 février 2014 confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), le 30 janvier 2015, relèvent appel du jugement n° 1502412 et n° 1502413 du 10 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Pau a, après les avoir jointes, rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 26 octobre 2015 par lesquels le préfet des Hautes-Pyrénées a refusé de leur délivrer à chacun un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français, au plus tard le 15 juillet 2016, et a fixé l'Albanie comme pays de renvoi.

2. Par deux décisions du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux du 19 avril 2016, M. et Mme C...ont été tous deux admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, les conclusions tendant à ce que soit prononcée l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) ", et qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé ( ...) Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / L'étranger mentionné au 11° de l'article L. 313-11 qui ne remplirait pas la condition de résidence habituelle peut recevoir une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement. ". Enfin, aux termes de l'article L. 511-4 du code précité : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...) ".

4. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mme C..., le préfet des Hautes-Pyrénées s'est fondé notamment sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé (ARS) du 12 août 2015, duquel il ressort que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut est de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il existe dans le pays dont elle est originaire un traitement approprié pour sa prise en charge médicale. Pour contester la décision attaquée, Mme C...soutient qu'elle souffre de graves troubles psychologiques liés à des événements traumatisants qu'elle a endurés en Albanie, son pays d'origine, où elle allègue avoir été victime de viol, et qu'en raison du lien entre la pathologie dont elle est atteinte et ces événements traumatisants, il est impossible d'envisager un traitement effectivement approprié dans ce pays. Cependant, si les certificats médicaux produits par Mme C... établissent la réalité des troubles psychologiques sévères dont elle est atteinte et le traitement que nécessite son état de santé, ni ces certificats ni aucune pièce du dossier ne permettent de tenir pour établie la réalité des événements traumatisants que Mme C... aurait personnellement vécus en Albanie qui seraient à l'origine directe de sa pathologie dépressive, événements dont le récit n'a, au demeurant, pas été jugé crédible par les autorités compétentes en matière d'asile. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas contesté par la requérante que le traitement approprié à son état de santé est disponible dans son pays d'origine et qu'elle ne justifie d'aucune circonstance humanitaire exceptionnelle justifiant son admission au séjour, le préfet des Hautes-Pyrénées n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité sur ce fondement. Pour les mêmes motifs doit être également écarté le moyen, tiré de ce que la décision obligeant Mme C...à quitter le territoire français serait entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code.

5. M. et Mme C...reprennent en appel les moyens déjà soulevés en première instance et tirés de ce que les refus de séjour et les décisions portant obligation de quitter le territoire français sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation de leur situation et de leurs conséquences disproportionnées sur leur situation personnelle et familiale, et portent au droit au respect de leur vie familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises et méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ils ne se prévalent d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

6. En l'absence d'illégalité des refus de titre de séjour contestés, le moyen tiré du défaut de base légale des décisions portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

7. Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 pris en application de l'article R. 313-22 du CESEDA : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. ".

8. Il incombe au préfet de prendre en considération les modalités d'exécution d'une éventuelle mesure d'éloignement dès le stade de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA afin de disposer d'une information complète sur l'état de santé de l'étranger, y compris sur sa capacité à voyager sans risque à destination de son pays d'origine. Si le médecin de l'agence régionale de santé, qui n'est pas tenu de le faire, ne s'est pas prononcé sur le point de savoir si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine, il appartient au préfet d'examiner cette question, dès lors qu'il estime qu'un traitement approprié existe dans ce pays et qu'il ressort des éléments du dossier qui lui a été soumis que l'état de santé de l'étranger malade suscite des interrogations sur sa capacité à supporter le voyage vers son pays d'origine.

9. Il ressort des pièces du dossier que l'avis émis le 12 août 2015 par le médecin de l'agence régionale de santé, qui indique, d'une part, que l'état de santé de Mme C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, d'autre part, qu'il existe un traitement approprié en Albanie, comporte les mentions requises par les dispositions précitées de l'arrêté du 9 novembre 2011. Il ne résulte ni de ces dispositions, ni d'aucun autre texte que le médecin de l'agence régionale de santé soit, à peine d'irrégularité de la procédure, systématiquement tenu de mentionner si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque. Il ressort également des pièces du dossier que le préfet qui, dans son arrêté, a précisé : " Après avoir procédé à un examen approfondi de la situation personnelle de Mme C...B..., suite à ses déclarations et au vu des éléments produits et après avoir constaté que le séjour irrégulier de l'intéressée et l'absence d'obstacle à ce qu'elle quitte le territoire français justifient la présente décision ", doit, ce faisant, être regardé comme ayant examiné la capacité à voyager sans risque de l'intéressé. En tout état de cause, il ressort des éléments du dossier qui lui a été soumis que l'état de santé de l'étranger malade ne suscitait pas des interrogations sur sa capacité à supporter le voyage vers son pays d'origine. Ni le certificat médical établi le 30 mars 2016 par un médecin généraliste postérieurement à l'arrêté contesté, ni aucune autre pièce du dossier ne permettaient de soulever des interrogations sur la capacité de l'intéressée à supporter à la date de l'arrêté attaqué un voyage vers l'Albanie. Dans ces conditions, le préfet, qui était suffisamment éclairé sur la situation de MmeC..., a pu régulièrement se prononcer en l'absence d'une telle indication.

Exception tiré de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français :

10. En l'absence d'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré du défaut de base légale des décisions portant fixation du pays de renvoi doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 mars 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et leurs demandes tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme C...tendant au bénéfice de l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. et Mme C...est rejetée.

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N° 16BX01133


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01133
Date de la décision : 04/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : MARKHOFF

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-04;16bx01133 ?
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