Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...F...a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du président de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Iles de la Guadeloupe du 16 septembre 2011 lui infligeant la sanction d'exclusion temporaire de quatre jours.
Par un jugement n° 1300271 du 12 juin 2014, le tribunal administratif de la Martinique, auquel la demande de M. F...a été attribuée en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative par une ordonnance du 16 avril 2003 du président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat, a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 septembre 2014 et un mémoire en réplique enregistré le 22 mai 2015, M.F..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 12 juin 2014 ;
2°) d'annuler la décision contestée du 16 septembre 2011 ;
3°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie des Iles de la Guadeloupe la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;
- l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée française de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, des chambres de commerce et d'industrie et des groupements consulaires ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laurent Pouget,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant M. F...et de Me C...E..., représentant la société aéroportuaire Guadeloupe Pôle Caraïbes et la chambre de commerce et d'industrie de région des Iles de Guadeloupe.
Considérant ce qui suit :
1. Le président de la chambre de commerce et d'industrie des Iles de la Guadeloupe, gestionnaire de l'aéroport Pôle Caraïbe à Pointe-à-Pitre, a prononcé le 16 septembre 2011 une sanction d'exclusion temporaire de quatre jours à l'encontre de M.F..., sapeur-pompier affecté au service de sauvetage et de lutte contre l'incendie des aéronefs, au motif que celui-ci a quitté son poste prématurément dans la nuit du 21 au 22 août, en méconnaissance des règles de sécurité. M. F...relève appel du jugement du 12 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande d'annulation de cette décision du 16 septembre 2011.
Sur l'intervention de la société aéroportuaire Guadeloupe Pôle Caraïbes :
2. Il est constant qu'à la date des faits ayant donné lieu à la sanction disciplinaire en litige, M.F..., agent de la CCI des Iles de la Guadeloupe, était mis à la disposition de la société aéroportuaire Guadeloupe Pôle Caraïbes, concessionnaire exploitant l'aéroport Pôle Caraïbes de Pointe-à-Pitre. Le présent arrêt, qui se prononce sur un litige disciplinaire né de la manière de servir de M. F...dans le cadre de cette mise à disposition, est susceptible de préjudicier aux droits et intérêts de la société aéroportuaire Guadeloupe Pôle Caraïbes. Par suite, il y a lieu d'admettre l'intervention de cette société.
Sur la légalité de la sanction :
En ce qui concerne la légalité externe :
3. En vertu de l'article 36 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie, les mesures disciplinaires applicables aux agents titulaires sont : " 1° L'avertissement, 2° Le blâme avec inscription au dossier, 3° L'exclusion temporaire sans rémunération d'un à quinze jours, 4° L'exclusion temporaire sans rémunération supérieure à quinze jours, 5° La révocation. Dans toute la mesure du possible, un principe de progressivité est appliqué ". Selon l'article 37 du même statut : " Les sanctions prévues à l'article 36 2°, 3° (...) sont prononcées par le président de la compagnie consulaire ou son délégataire. Toutefois (...) la révocation doivent être prononcées après consultation de la commission paritaire locale (...) / Avant toute sanction prévue à l'article 36 2°, 3° (...), l'agent doit pouvoir prendre connaissance de son dossier, être informé des faits qui lui sont reprochés et pouvoir présenter sa défense devant le président de la commission paritaire locale. Il peut se faire assister de tout défenseur de son choix. Toute sanction doit être motivée et notifiée à l'agent par écrit (...) ".
4. M. F...soutient que la procédure ayant conduit à sa sanction est entachée d'irrégularité dans la mesure où, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 37 du statut des personnels des chambres de commerce et d'industrie, il a été convoqué à un entretien préalable avec le directeur général de l'aéroport et non avec le président de la commission paritaire locale. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si M. F...a certes été convoqué à un entretien préalable avec le directeur général de l'aéroport le lundi 29 août 2011, le courrier de convocation lui indiquait qu'il pourrait prendre connaissance de son dossier et être également entendu par le président de la CCI s'il en exprimait le souhait. Dans ces conditions M. F... doit être regardé comme ayant été mis en mesure de présenter sa défense devant le président de la commission paritaire selon les modalités prévues par les dispositions statutaires applicables, faculté dont il est d'ailleurs constant qu'il n'a pas cherché à user. Il n'est par suite pas fondé à soutenir que la procédure disciplinaire serait entaché d'irrégularité en raison d'une méconnaissance de ces dispositions.
En ce qui concerne la légalité interne :
5. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
6. Le point 3.1 de la rubrique " niveau de protection " du document intitulé " les consignes opérationnelles du service de sauvetage et de lutte contre l'incendie des aéronefs de Pointe-à-Pitre " prévoit que les mouvements d'aéronefs, qui ont lieu habituellement entre 06h00 et minuit, donnent lieu, pour la tranche 06h00/13h00, à un niveau de protection 7 impliquant la présence de quatre pompiers et d'un chef de manoeuvre et, pour la tranche horaire 13h00/24 h00, à un niveau de protection 9 impliquant la présence de six pompiers et un chef de manoeuvre. Ce même document prévoit qu'en cas " de retard d'aéronefs correspondant aux classes d'avions 9 et 8 au-delà de 00h00, le niveau de protection 9 est maintenu et assuré par la disponibilité de l'équipe SSLIA complète (7 personnels) ". Et, aux termes du 4° de l'article 2 de l'annexe au protocole de fin de conflit signé le 23 juin 2009 entre la chambre de commerce et d'industrie de Pointe-à-Pitre et le syndicat Ultea Ugtg, relative à l'organisation provisoire du tour du service et validée par la commission paritaire locale dans sa séance du 23 juillet 2009 : " Toute heure effectuée après la garde finissant à 24 heures, à la demande du chef de manoeuvre, sera décomptée en heures supplémentaires, tous les agents de l'équipe ayant l'obligation de rester après le dernier mouvement d'avion programmé, y compris les aléas. Si le dernier mouvement d'avion est un " gros porteur ", la deuxième garde restera en poste une heure après le dernier décollage. Dans tous les autres cas de trafic, la règle de 15 minutes fixée par la règlementation s'appliquera (sans pouvoir vaquer avant 24 heures ".
7. Ainsi, et si le trafic aérien sur la plateforme aéroportuaire Pôle Caraibes s'achève habituellement à 24h00 pour une reprise à 06h00 le lendemain, il résulte de ce qui précède que le maintien sur place d'un effectif de sapeurs-pompiers au-delà de minuit est requis dans les conditions susmentionnées, à savoir notamment jusqu'à une heure après le dernier décollage, en cas de mouvements d'avions gros porteurs et, dans tous les cas, jusqu'à quinze minutes après le dernier décollage.
8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la main-courante du service de sauvetage et de lutte contre l'incendie des aéronefs, que le personnel de ce service a été prévenu le 21 août 2011 à 21h23 par le chef de manoeuvre que le dernier mouvement programmé pour la nuit serait celui d'un Boeing 747 d'Air France, à 00h30. Toutefois, à 22h22, la main-courante mentionne l'arrivée d'un Airbus A 320 d'Air France prévue à 00h30 et le report du départ du Boeing à 01h00. Puis, à 01h18, la main-courante porte la mention du décollage ultérieur de l'Airbus. Ce dernier a finalement décollé à 02h00, alors que seul le chef de manoeuvre demeurait sur place, M. F...et ses collègues pompiers de la deuxième garde ayant quitté les lieux dès 01h18.
9. M. F...soutient qu'aucun élément n'atteste de ce qu'il aurait effectivement reçu avant son départ de l'aéroport l'information relative au redécollage de l'Airbus A 320 et ajoute que cet aéronef de classe 7 n'est pas un gros porteur requérant le maintien d'un niveau de protection 9. Toutefois, il est constant que M. F...n'a quitté l'aéroport que dix-huit minutes après le décollage du Boeing 747, dont il a nécessairement eu connaissance contrairement à ce qu'il prétend. Or, il est constant que cet aéronef fait partie de la catégorie des avions gros porteur de classe 9, ce qui impliquait donc, en application de la réglementation précitée, et quels qu'aient pu être les termes de l'arrêté de réquisition de M.F..., que l'intéressé reste en tout état de cause à son poste jusqu'à 02h00, heure de décollage de l'Airbus. Le requérant ne conteste pas, par ailleurs, avoir quitté les lieux sans l'autorisation du chef de manoeuvre lequel, au moment même de son départ prématuré, mentionnait sur la main courante le décollage prochain de cet Airbus, manoeuvre qui requérait en toute hypothèse le maintien d'un effectif de sapeurs pompiers. Dans ces conditions, M.F..., lequel ne peut sérieusement prétendre que les vols considérés devaient être regardés comme les premiers vols de la journée du 22 août ni invoquer un manque de clarté des instructions contenues dans les consignes opérationnelles et le protocole du 23 juin 2009, a commis une faute dans l'exercice de ses fonctions de nature à justifier une sanction. Eu égard à la nature de la mission de l'intéressé et aux enjeux de celle-ci en termes de sécurité pour les personnes et les biens, la sanction d'exclusion temporaire de quatre jours sans rémunération qui lui a été infligée par la décision contestée du 16 septembre 2011, laquelle repose sur des faits matériellement établis, n'est pas disproportionnée au regard de la gravité de cette faute, qui a conduit au décollage d'un aéronef dans des conditions de sécurité inadaptées.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CCI des Iles de la Guadeloupe, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. F...et non compris dans les dépens. La société aéroportuaire Guadeloupe Pôle Caraïbes, qui n'a pas la qualité de partie à l'instance, ne peut prétendre pour sa part au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. F...le versement à la CCI des Iles de la Guadeloupe d'une somme de 300 euros sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE
Article 1er : L'intervention de la société Guadeloupe Pôle Caraïbes est admise.
Article 2 : La requête de M. F...est rejetée, ainsi que les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la société Guadeloupe Pôle Caraïbes.
Article 3 : M. F...versera la somme de 300 euros à la CCI des Iles de la Guadeloupe en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 14BX02739