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18/07/2016 | FRANCE | N°16BX01073

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 18 juillet 2016, 16BX01073


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2016 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, ensemble l'arrêté du 10 février 2016 portant placement en rétention administrative pour une durée de cinq jours.

Par un jugement n° 1600663 du 15 février 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de

Toulouse a renvoyé en formation collégiale le jugement des conclusions dirigées contre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2016 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, ensemble l'arrêté du 10 février 2016 portant placement en rétention administrative pour une durée de cinq jours.

Par un jugement n° 1600663 du 15 février 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a renvoyé en formation collégiale le jugement des conclusions dirigées contre le refus de titre, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 mars 2016 et un mémoire complémentaire enregistré le 13 mai 2016, M. C... A..., représenté par la Selarl Sylvain Laspalles, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement en tant qu'il a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 22 janvier 2016 en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, et contre l'arrêté du 10 février 2016 portant placement en rétention administrative pour une durée de cinq jours ;

2°) d'annuler les décisions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi que les entiers dépens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la Directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Antoine Bec, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...demande à la cour de réformer le jugement du 15 février 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 22 janvier 2016 du préfet de la Haute-Vienne en ce qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, ensemble l'arrêté du 10 février 2016 portant placement en rétention administrative pour une durée de cinq jours.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. La décision portant obligation de quitter le territoire français découlant nécessairement de la décision de refus de titre de séjour opposé à M.A..., sa motivation se confond avec celle du refus de titre de séjour, laquelle en l'espèce vise les dispositions dont elle fait application et se fonde sur ce qu'il déclare être entré en France en avril 2012, sans établir la date ni la régularité de son arrivée sur le territoire national, et sur ce qu'il ne justifie pas de la réalité de son union ni de sa vie commune avec celle qu'il présente comme sa compagne, laquelle est domiciliée.dans un département distinct de celui où il réside et a eu un enfant en 2014 d'un autre lit, non plus que de la réalité et de l'intensité de ses attaches avec les enfants issus de cette union L'obligation de quitter le territoire français est ainsi suffisamment motivée en fait, et cette motivation révèle que le préfet de la Haute-Vienne a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé.

Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de la situation de M. A...doivent être écartés.

3. Les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne sont pas en elles-mêmes invocables par un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement telle qu'une obligation de quitter le territoire français, celui-ci peut néanmoins utilement faire valoir que le principe général du droit de l'Union, relatif au respect des droits de la défense, impose qu'il soit préalablement entendu et mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure d'éloignement envisagée.

4. Lorsqu'il sollicite la délivrance d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, M. A...a été à même de préciser les motifs pour lesquels il demandait un titre de séjour et a pu produire tous éléments en faveur de cette demande. Il avait la faculté, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux.

Lorsque, comme en l'espèce, la décision faisant obligation de quitter le territoire français intervient concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, dont elle découle nécessairement, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour et le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour. Le moyen tiré de la méconnaissance de son droit à être entendu préalablement doit par suite être écarté.

5. Les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile déterminent l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises la décision par laquelle l'autorité administrative fait obligation à l'étranger de quitter le territoire français. Par suite le moyen tiré par M. A...de la méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration est inopérant et doit être écarté.

6. M. A...serait entré en France en 2012, à l'âge de trente-neuf ans et s'il se prévaut de la présence en France de sa compagne, celle-ci réside, avec les deux enfants qui seraient issus de cette union en 2007 et 2009, dans un autre département que celui où il est domicilié,.dans un département distinct de celui où il réside et a eu un enfant en 2014 d'un autre lit, non plus que de la réalité et de l'intensité de ses attaches avec les enfants issus de cette union M.A..., qui prétend seulement leur rendre visite régulièrement, n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ces enfants, et ne peut utilement se prévaloir du dépôt d'une déclaration commune de situation pour les prestations familiales et les aides au logement, postérieure à la décision contestée. Les attestations rédigées par MmeB..., qui restent muettes sur la raison de la résidence séparée de M.A..., sont à cet égard dépourvues de force probante. Il ne justifie pas ainsi de la réalité de ses attaches personnelles en France et n'établit pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine.

Le moyen tiré de l'atteinte porté au droit au respect de sa vie privée et familiale qu'il tient de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit par suite être écarté.

7. Eu égard aux liens de M. A...avec ses enfants, son départ n'est pas de nature à porter à leur intérêt une atteinte contraire aux stipulations de la convention internationale des droits de l'enfant.

8. M. A...n'est par suite pas fondé à invoquer par la voie de l'exception l'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne la décision lui refusant un délai de départ volontaire :

9. La décision contestée vise les dispositions dont elle fait application, notamment le d) et le f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et se fonde sur l'absence de disponibilité du transport aérien et d'un document de voyage en cours de validité, et sur l'inexécution d'une précédente mesure d'éloignement. Il résulte de cette motivation que le préfet de la Haute-Vienne a examiné la situation particulière de l'intéressé et ne s'est pas estimé en situation de compétence liée. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de la situation de M. A...doivent être écartés.

10. La méconnaissance des critères énumérés par le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être utilement invoquée par M. A... à l'encontre de la décision de refus de délai de départ volontaire, qui se fonde sur le II de l'article L. 511-1 dudit code.

11. L'article L 511-II 3-a n'a pas pour effet de systématiser la notion de " risque de fuite " et d'écarter ainsi l'appréciation au cas par cas qu'impose la Directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, à laquelle cet article n'est par suite pas contraire, et ne met pas à la charge de l'étranger une preuve négative qui serait impossible à apporter, les garanties de représentation constituant un ensemble d'éléments de fait aisément constatables.

12. L'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile déterminant l'ensemble des règles de procédure auxquelles sont soumises les décisions par lesquelles l'autorité administrative fait obligation à l'étranger de quitter le territoire français, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, repris par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne peut être utilement invoqué par M. A...à l'encontre de la décision litigieuse. La seule circonstance que le préfet de la Haute-Vienne n'aurait pas expressément informé le requérant qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français le cas échéant sans délai, en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder l'intéressé comme ayant été privé de son droit à être entendu, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

13. La décision refusant un titre de séjour et celle lui faisant obligation de quitter le territoire, étant légales, ne sauraient priver la décision attaquée de base légale.

14. La délivrance le 4 septembre 2015 d'un récépissé de demande de titre de séjour, renouvelé le 4 janvier 2016, pour les besoins de l'instruction de sa demande de titre, ne saurait conférer de droit au séjour à M.A.dans un département distinct de celui où il réside et a eu un enfant en 2014 d'un autre lit, non plus que de la réalité et de l'intensité de ses attaches avec les enfants issus de cette union

15. Si M. A...fait valoir s'être présenté spontanément à la préfecture de la Haute-Vienne, il s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre en 2012, ne détient pas de document de voyage en cours de validité, et ne justifie d'aucune garantie de représentation. Dans ces conditions, le préfet a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, refuser un délai de départ volontaire à M. A...en application des dispositions du d) et du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne l'arrêté de placement en rétention :

16. L'arrêté du 10 février 2016 vise les dispositions des articles L. 551-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la décision portant obligation de quitter sans délai le territoire français du 22 janvier 2016, et se fonde sur l'absence de garanties de représentation, l'impossibilité d'assigner M. A...à résidence et de lui faire quitter immédiatement le territoire français, faute de place d'avion et de laissez-passer consulaire. En outre cette motivation révèle que le préfet de la Haute-Vienne a procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de M.A.dans un département distinct de celui où il réside et a eu un enfant en 2014 d'un autre lit, non plus que de la réalité et de l'intensité de ses attaches avec les enfants issus de cette union Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision doit par suite être écarté.

17. L'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile déterminant l'ensemble des règles de procédure auxquelles sont soumises les mesures d'éloignement, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration doit par suite être écarté comme inopérant.

18. M. A... ne présentant pas de garanties de représentation suffisantes, le préfet de la Haute-Vienne a pu, sans méconnaître les articles L. 551-1 et L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni commettre d'erreur d'appréciation, décider de placer l'intéressé dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

19. L'article L. 511-II 3-a n'a pas pour effet de systématiser la notion de " risque de fuite " et d'écarter ainsi l'appréciation au cas par cas qu'impose la Directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, à laquelle cet article n'est par suite pas contraire, et ne met pas à la charge de l'étranger une preuve négative qui serait impossible à apporter, les garanties de représentation constituant un ensemble d'éléments de fait aisément constatables.

20. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

21. Les dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

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N° 16BX01073


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 16BX01073
Date de la décision : 18/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Antoine BEC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : SELARL SYLVAIN LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-07-18;16bx01073 ?
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