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21/06/2016 | FRANCE | N°15BX00932

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 21 juin 2016, 15BX00932


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté intercommunale du nord de la Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner solidairement Mme Marais-Tessier, M. C..., la société I2M, et leur assureur commun, la mutuelle des architectes français (MAF), la société dionysienne d'aménagement et de construction (SODIAC), et son assureur, la société Allianz Iard, les sociétés Socetem, Incom, et Blin et Misery, et leur assureur commun la Lloyd's de Londres, la société Socotec Réunion, et son assureur la société A

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté intercommunale du nord de la Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner solidairement Mme Marais-Tessier, M. C..., la société I2M, et leur assureur commun, la mutuelle des architectes français (MAF), la société dionysienne d'aménagement et de construction (SODIAC), et son assureur, la société Allianz Iard, les sociétés Socetem, Incom, et Blin et Misery, et leur assureur commun la Lloyd's de Londres, la société Socotec Réunion, et son assureur la société Axa France Iard, la société " Cenergi développement Océan indien ", la société " Atelier menuiserie construction ", la société " Construction métal de l'Océan indien " (CMOI), et leur assureur commun la société d'assurance " mutuelle du bâtiment et des travaux publics " (SMABTP), la société bourbonnaise de travaux publics et de construction (SBTPC), et son assureur la société Assurances générales de France (AGF), la société Socométal, la société " Sesta/Xerus/Icart ", la société Xerus/Sris, et leur assureur commun la société Groupama océan indien, la société " B et M structure " et son assureur la société " L'auxiliaire ", à lui verser la somme de 1,5 million d'euros en réparation des désordres constatés sur le parc des expositions de Saint-Denis à l'issue des travaux réceptionnés le 16 juin 2008.

Par un jugement n° 1101073 du 11 décembre 2014, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mars 2015 et des mémoires présentés les 29 septembre 2015 et 10 décembre 2015, la Communauté intercommunale du nord de la réunion (ci-après CINOR), représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Réunion du 11 décembre 2014 ;

2°) de condamner :

- Mme D...Marias-Tessierà payer à la CINOR la somme de 300 000 euros à titre contractuel pour défaut de conseils ;

- MmeF..., M. E...C...et ensemble, les sociétés I2M, Socetem et Incom à lui verser chacun(e) un tiers de la somme de 17 915,03 euros au titre des désordres D1, D2, D6 et D7 ;

- La société CMOI à lui verser la somme de 9 146,86 euros au titre des désordres D1 et D5 ;

- La société SBTPC à lui verser la somme de 24 547,04 euros au titre du désordre D2 ;

- La société Socometal à lui verser la somme de 9 846,15 euros au titre des désordres D1 et D6 ;

- La société Icart/Sesta/Xeros à lui verser la somme de 4 347,52 euros au titre des dommages D7 et D8 ;

3°) d'assortir ces sommes des intérêts légaux à compter du 10 novembre 2011, date d'enregistrement de sa demande par le greffe du tribunal administratif de La Réunion ;

4°) d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 11 novembre 2012 ;

5°) de mettre à la charge de chaque intimé une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) de condamner solidairement l'ensemble des intimés aux dépens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- les observations de MeB..., représentant la société I2M, Mme Marais-Tessieret M.C.en Guadeloupe

Considérant ce qui suit :

1. En 2004, la communauté intercommunale du nord de la Réunion (ci-après CINOR) a entrepris des travaux d'extension et de rénovation du parc des expositions de Saint-Denis. Par une convention du 1er octobre 2004, elle a délégué la maîtrise d'ouvrage pour cette opération à la Société dionysienne d'aménagement et de construction (SODIAC). Par un marché en date du 21 mars 2005, la maîtrise d'oeuvre a été confiée à un groupement conjoint, composé de MmeF..., mandataire du groupement, M.C..., la société Incom, la Sté I2M et la société Socotem. Une mission " ordonnancement, pilotage et coordination " (OPC) a été confiée à la société " BlinetMisery " et la mission " contrôle " a été attribuée à la société Socotec. Les lots 1 (VRD/Espaces verts) et 2 A (gros oeuvre/cloisons lourdes/étanchéité) ont été confiés à la SCBTP. Le lot 2 D (Métallerie) a été attribué à la Socométal. Le lot 3 (charpente/couverture/menuiseries extérieures) a été attribué à la société CMOI. Le lot 4 (climatisation, ventilation) a été attribué à la SAS Sesta/Xerus/Icart. La réception de l'ouvrage a été prononcée avec réserves, pour les lots autres que le lot n° 9, le 25 janvier 2010, avec effet au 21 octobre 2009. A la suite de l'apparition de désordres, un expert a été désigné à la demande de la CINOR, par ordonnance du président du tribunal administratif de La Réunion du 18 septembre 2012. Cet expert a déposé son rapport le 7 août 2013. La CINOR a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner de manière solidaire et indivisible l'ensemble des personnes et entreprises précitées qui sont intervenues dans le projet d'extension et de rénovation du parc des expositions de Saint-Denis ainsi que leurs assureurs respectifs, à lui verser la somme de 1,5 million d'euros toutes taxes comprises, sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs. Elle a également demandé au tribunal, subsidiairement, de condamner la SODIAC au titre de sa responsabilité contractuelle. La CINOR relève appel du jugement n° 1101073 du 11 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Sur la recevabilité de la requête :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1 (...). ". Selon l'article R. 811-5 du même code : " Les délais supplémentaires de distance prévus à l'article R. 421-7 s'ajoutent aux délais normalement impartis (...). ". En vertu de l'article R. 421-7 de ce code : " Lorsque la demande est portée devant un tribunal administratif qui a son siège en France métropolitaine ou devant le Conseil d'Etat statuant en premier et dernier ressort, le délai de recours prévu à l'article R. 421-1 est augmenté d'un mois pour les personnes qui demeurent..., en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises (...) ".

3. Il ressort des accusés de réception versés au dossier de première instance que le jugement attaqué a été notifié à la CINOR le 15 décembre 2015. Le délai d'appel de cette collectivité étant de trois mois, en application des articles R 811-2, R 811-5 et R 421-7 du code de justice administrative, la requête de la CINOR, enregistrée au greffe de la cour le 13 mars 2015, n'est pas tardive.

4. En second lieu, le fait que la CINOR n'ait pas, en première instance, précisé dans quelle mesure les désordres invoqués étaient imputables à chacun des constructeurs, sur le fondement de l'article 1792 du code civil, ne fait pas obstacle à ce qu'elle soit recevable, en appel, à demander la condamnation de chacun des intervenants au marché en litige, sur le fondement de leur responsabilité décennale, à réparer les désordres qui leur sont imputables. Par suite, la fin de non-recevoir invoquée sur ce point par la CMOI ne peut qu'être écartée.

Sur les conclusions de la CINOR tendant à l'engagement de la responsabilité contractuelle de MmeF... :

5. Dans sa demande de première instance, la CINOR a sollicité la condamnation solidaire du maître d'ouvrage délégué, des constructeurs ainsi que de leurs assureurs respectifs, à lui verser la somme globale de 1,5 million d'euros sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs prévue par les articles 1792 et suivants du code civil, ainsi que la responsabilité civile de la SODIAC, maître d'ouvrage délégué, " à raison de la nature du contrat qui lie la CINOR à la SODIAC ". Après le dépôt du rapport de l'expert, la CINOR n'a pas davantage précisé ses demandes de première instance.

6. En appel, la CINOR demande à la cour de condamner MmeF..., architecte, au motif qu'elle aurait méconnu ses obligations contractuelles de conseil. La CINOR fait en effet valoir que Mme Marais-Tessiera commis une faute dans la conception du hall D à défaut d'avoir veillé à ce que la température à l'intérieur de ce hall soit inférieure de quelques degrés à la température extérieure, ainsi que l'avait pourtant exigé la CINOR en lui laissant pour y parvenir la possibilité d'opter pour une ventilation naturelle, mécanique ou une climatisation. Ainsi, les conclusions d'appel de la CINOR qui tendent à l'engagement de la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre pour défaut de conseil sont fondées sur une cause juridique distincte de celle invoquée dans sa demande de première instance fondée sur la responsabilité décennale, et constituent donc une demande nouvelle en appel. Par suite, les conclusions de la CINOR dirigées contre Mme Marais-Tessiersont irrecevables.

Sur les conclusions de la CINOR tendant à l'engagement de la responsabilité décennale des constructeurs :

En ce qui concerne le désordre D1 relatif à la défaillance des portes métalliques :

S'agissant du caractère décennal de ce désordre :

7. Il résulte de l'instruction que compte tenu de leur dimension et de leur positionnement, les portes métalliques MM5-MM6 et MM9 et les issues de secours qui y sont incorporées sont difficiles à manoeuvrer. S'agissant d'un bâtiment recevant du public, les difficultés à manoeuvrer les portes métalliques et les issues de secours sont de nature à empêcher le fonctionnement normal de l'ouvrage, compte tenu des dangers auxquels ces difficultés exposent les usagers. Ainsi, et quand bien même ces portes fonctionnent depuis quatre ans, le désordre sus-évoqué est de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination.

S'agissant de l'imputabilité du désordre :

8. Les onze portes métalliques MM5-MM6 et MM9 et les douze blocs porte aluminium de remplissage des vantaux pour les portes référencées MM5 ont été installés par la société CMOI titulaire du lot " charpente - couverture - serrurerie ". Il résulte de l'expertise judiciaire que le désordre affectant l'ouverture de ces portes résulte d'un défaut d'exécution imputable à la société CMOI et de défauts de conception et de surveillance des travaux imputables au groupement de maîtrise d'oeuvre, lequel n'avait pas prévu un système de blocage des portes métalliques en position ouverte.

9. En premier lieu, la CINOR demande, en se fondant sur le chiffrage réalisé par l'expert désigné en référé, la condamnation de la société CMOI à lui verser une somme de 7 080 euros hors taxe et hors frais de maîtrise d'oeuvre en réparation de ce désordre. Eu égard à ce qui vient d'être dit, la CINOR a droit à obtenir la condamnation de cette société dans cette mesure.

10. En second lieu, la CINOR sollicite également la condamnation solidaire des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre à supporter le coût de l'adjonction de barres amovibles pour les portes en aluminium.

11. D'une part, afin de s'exonérer de leur responsabilité décennale, les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre font valoir le caractère purement conjoint et non solidaire de leur groupement. Cependant, le tableau mentionnant la répartition des rémunérations qui a été annexé à l'acte d'engagement, eu égard à son imprécision, ne saurait suffire à justifier l'existence d'une répartition des tâches entre les différents membres de ce groupement opposable au maître d'ouvrage. Ainsi, le groupement de maîtrise d'oeuvre doit être regardé comme un groupement solidaire. D'autre part, les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre ne sauraient, pour s'exonérer de leur responsabilité décennale, soutenir qu'ils n'auraient pas pris part à la conception des portes en cause dès lors qu'un groupement de maîtrise d'oeuvre a nécessairement, à raison de sa mission d'architecture, une mission de direction et de surveillance des travaux. Par suite, ce groupement doit supporter les conséquences financières des désordres affectant les portes défectueuses. Selon l'expert, la somme due à ce titre par le groupement de maîtrise d'oeuvre se chiffre à 2 240 euros hors taxes. Dans ces conditions, MmeF..., M.C..., la société Incom, la société I2M et la société Socetem, qui ne contestent pas le chiffrage de l'expert, doivent ainsi être solidairement condamnés à verser à la CINOR, ainsi qu'elle le demande, la somme de 2 240 euros hors taxes, au titre de la défaillance des fixations de ces portes.

S'agissant des conclusions d'appel en garantie de la SARL I2M, Mme Marais-Tessieret M. E...C...à l'encontre de la société CMOI :

12. A l'appui de leurs conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société CMOI, les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre se bornent à faire valoir qu'ils n'ont eux-mêmes commis aucune faute. Cependant, à défaut d'établir que la société CMOI aurait commis des manquements aux règles de l'art ou qu'elle aurait méconnu des dispositions législatives ou réglementaires dans la réalisation des portes métalliques ayant donné lieu à la survenance du désordre D1, leurs conclusions d'appel en garantie dirigées contre cette société doivent être rejetées.

En ce qui concerne le désordre D1 relatif à l'absence d'étanchéité des portes métalliques :

13. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les quatre portes " issue de secours " incorporées dans les portes MM5 ne disposent pas d'un espace sous vantaux de nature à assurer le maintien de la structure hors d'air et hors d'eau. Ce désordre, qui a fait l'objet de réserve lors de la réception de l'ouvrage, n'est toutefois pas de nature à rendre celui-ci impropre à sa destination. Par suite, les conclusions de la CINOR tendant à la condamnation de la société Socometal à l'indemniser des conséquences dommageables de ce désordre doivent être rejetées.

En ce qui concerne le désordre D2 relatif à la pénétration de l'eau dans les " cours anglaises " :

14. Il résulte de l'instruction que ce désordre ayant entraîné la dégradation des conduits de ventilation et leur effondrement, est principalement lié à la pose d'un réseau PVC d'un diamètre de 50 mm au lieu du diamètre de 160 mm dans deux des cours anglaises, ce qui a réduit d'autant la capacité d'écoulement des eaux recueillies. Cependant, il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que ce désordre était apparent au moment de la réception de l'ouvrage et que l'ampleur et la gravité de ses conséquences pouvaient être appréhendées dès cette réception. Ainsi, la CINOR ne saurait demander la condamnation de la société SBTPC et du groupement de maîtrise d'oeuvre à l'indemniser des conséquences dommageables de ce désordre.

En ce qui concerne le désordre D5 relatif aux infiltrations dans le hall C :

15. Il résulte de l'expertise que ce désordre est lié à l'absence de mise en place du châssis de type jalousie à lames orientables. Toutefois, ce désordre, qui était apparent au moment de la réception de l'ouvrage et dont toutes les conséquences pouvaient alors être appréhendées, n'a pas fait l'objet de réserve. Par suite, la société CMOI ne peut être condamnée à réparer les conséquences dommageables de ce désordre sur le fondement de la garantie décennale.

En ce qui concerne le désordre D6 relatif aux infiltrations dans le hall D :

16. Il résulte de l'instruction que ce désordre relatif aux infiltrations dans le hall D est imputable au fait que l'ensemble de parisiennes mis en place par la société Socometal en pignon nord du hall D se compose de lames en forme de " ventelles " qui ne sont pas étanches entre elles et permettent ainsi à l'eau de s'infiltrer par les grilles de ventilation lors de pluies intenses accompagnées de vent. Or, ce désordre, qui au demeurant était décelable lors de la réception de l'ouvrage, ne présente pas, eu égard à sa nature et à son importance relative, un caractère décennal. Ainsi, la CINOR ne saurait solliciter la condamnation de la société Socométal et du groupement de maîtrise d'oeuvre à l'indemniser de celui-ci sur le fondement de leur garantie décennale.

En ce qui concerne le désordre D7 relatif aux infiltrations dans le plafond de la cuisine :

17. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert, que le désordre relatif aux infiltrations d'eau au niveau du plafond de la cuisine était décelable et apparent lors de la réception de l'ouvrage. De même, il ne résulte pas de l'instruction que l'ampleur et la gravité de ses conséquences ne pouvaient être appréhendées dès cette réception. Ainsi, la CINOR ne saurait demander la condamnation des sociétés Icart/Sesta/Xeros et GIE Sris et du groupement de maîtrise d'oeuvre à l'indemniser des conséquences dommageables de ce désordre sur le fondement de leur garantie décennale.

En ce qui concerne le désordre D8 affectant la climatisation :

18. Le désordre D8 concernant les fuites sur le réseau de climatisation entraîne des sinistres sur les faux plafonds. Il résulte de l'expertise que ce désordre n'était pas apparent lors de la réception de l'ouvrage. Ce désordre, lié à des défauts de calorifugeage ou d'isolation des tuyauteries de climatisation ou de ventilation, bien qu'il ait été qualifié de " minime " par l'expert, a contraint la CINOR à interrompre la climatisation dans les bureaux le temps des travaux. Dans ces conditions, ce désordre, qui a engendré l'interruption de la climatisation dans les bureaux de l'ouvrage, doit être regardé, s'agissant d'une construction située à la Réunion, comme de nature à compromettre l'usage de l'immeuble et à le rendre impropre à sa destination. Par suite, la CINOR est fondée à demander la condamnation de la société Icart/Sesta/Xeros à lui verser la somme de 2 600 euros HT, sur le fondement de sa garantie décennale, en réparation de ce dernier désordre.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

19. Le montant du préjudice dont le maître de l'ouvrage est fondé à demander réparation en raison de désordres affectant la construction en cause correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection. Ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable de ce coût, lorsque ladite taxe grève les travaux. Si néanmoins le montant de l'indemnisation doit, lorsque le maître de l'ouvrage relève d'un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle qu'il a perçue en raison de ses propres opérations, être diminué du montant de la taxe ainsi déductible ou remboursable, il n'en va pas ainsi en l'espèce, s'agissant de travaux exécutés directement pour le compte de la CINOR. Ainsi, la CINOR est fondée à demander que les condamnations prononcées à son bénéfice soient majorées du montant de la taxe sur la valeur ajoutée au taux de 8,5 % applicable à la Réunion.

En ce qui concerne les frais de maîtrise d'oeuvre :

20. La CINOR n'établit pas que les désordres pour la réparation desquels elle a obtenu une indemnisation nécessiteraient des frais de maîtrise d'oeuvre. Il y a lieu, par suite, de rejeter ses conclusions tendant à ce que les indemnités qui lui sont allouées soient majorées de 12% au titre de ces frais de maîtrise d'oeuvre.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la CINOR est seulement fondée à demander la condamnation de la société CMOI à lui verser la somme de 7 681,80 euros TTC, la condamnation solidaire de MmeF..., de M.C..., de la société Incom, de la société I2M et de la société Socetem à lui verser la somme de 2 430,40 euros TTC, et la condamnation de la société Sesta/Xerus/Icart à lui verser la somme de 2 821 euros TTC, ainsi que la réformation en ce sens du jugement attaqué.

En ce qui concerne les intérêts et la capitalisation des intérêts :

22. La CINOR a droit au versement des intérêts au taux légal sur les sommes de 7681,80 euros, 2 430,40 euros et 2 821 euros à compter de la date d'enregistrement de sa demande par le greffe du tribunal administratif, soit le 10 novembre 2011.

23. Aux termes de l'article 1154 du code civil : " Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ". Pour l'application des dispositions précitées la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière. Le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure, sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande.

24. La CINOR demande la capitalisation des intérêts à compter du 11 novembre 2012. Cependant, elle n'a présenté une demande tendant à obtenir la capitalisation des intérêts que dans sa requête d'appel enregistrée le 13 mars 2015. A cette date les intérêts étaient dus pour une année entière. Il y a lieu, dès lors, de faire droit à cette demande à compter du 13 mars 2015, et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les frais d'expertise :

25. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat./ Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties./ L'Etat peut être condamné aux dépens ".

26. Les frais de l'expertise ordonnée par le juge administratif des référés ont été taxés et liquidés par ordonnance du président du tribunal administratif de la Réunion à la somme de 14 750,38 euros. Dans les circonstances de l'espèce, ces frais doivent être mis à la charge solidaire du groupement de maîtrise d'oeuvre et des sociétés CMOI et Sesta/Icart/Xerus.

Sur les appels en garantie de MmeF..., M.C..., la société I2M, la société Incom et la société Socetem en ce qui concerne les frais d'expertise :

27. La CINOR n'ayant commis aucune faute dans la survenance de désordres, les appels en garantie formés par MmeF..., M.C..., la société I2M, la société Incom et la société Socetem et dirigés contre la CINOR, ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetés.

28. MmeF..., M.C..., la société I2M, la société Incom et la société Socetem se bornent à soutenir qu'ils n'ont commis aucune faute, et n'établissent pas que les autres constructeurs auraient méconnu les règles de l'art ou des dispositions législatives ou réglementaires lors de la réalisation des travaux de construction. Par suite, leurs conclusions d'appel en garantie dirigées contre les autres constructeurs doivent également être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

29. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de MmeF..., de M.C..., de la société Incom, de la société I2M, de la société Socetem, de la société CMOI et de la société Sesta/Icart/Xerus le versement à la CINOR d'une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

30. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les autres parties en application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La société CMOI versera à la CINOR la somme de 7 681, 80 euros TTC au titre de l'indemnisation du désordre D1 relatif au dysfonctionnement des portes métalliques.

Article 2 : La société Icart/Sesta/Xerus versera la somme de 2 821 euros TTC à la CINOR au titre de l'indemnisation du désordre D8 concernant la climatisation.

Article 3 : MmeF..., M.C..., la société Incom, la société I2M et la société Socetem verseront solidairement la somme de 2 430,40 euros TTC à la CINOR, au titre de l'indemnisation du désordre D1 relatif au dysfonctionnement des portes métalliques.

Article 4 : Les sommes mentionnées ci-dessus porteront intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 2011. Les intérêts échus à la date du 13 mars 2015 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 5 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 14 750,38 euros, sont mis à la charge solidaire de MmeF..., de M.C..., de la société Incom, de la société I2M, de la société Socetem, de la société CMOI et de la société Sesta/Icart/Xerus.

Article 6 : MmeF..., M.C..., la société Incom, la société I2M, la société Socetem, la société CMOI et la société Sesta/Icart/Xerus verseront solidairement la somme globale de 1 500 euros à la CINOR au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le jugement n° 1101073 du 11 décembre 2014 du tribunal administratif de La Réunion est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 8 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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N° 15BX00932


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