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07/06/2016 | FRANCE | N°15BX02042

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 07 juin 2016, 15BX02042


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La région Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion :

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", " France engineering division technique " (FEDT), " Menighetti programmation ", " Grands travaux de l'océan indien " (GTOI) et la société de développement et de gestion d'immobilier social (SODEGIS) à lui verser la somme de 62 225 euros HT au titre de l'oxydation des charpentes métalliques du lycée de Vincendo, à Saint-Joseph ;

- de condamner solidairemen

t les sociétés FEDT et GTOI à lui verser les sommes de 18 170 euros HT au titre des béto...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La région Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion :

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", " France engineering division technique " (FEDT), " Menighetti programmation ", " Grands travaux de l'océan indien " (GTOI) et la société de développement et de gestion d'immobilier social (SODEGIS) à lui verser la somme de 62 225 euros HT au titre de l'oxydation des charpentes métalliques du lycée de Vincendo, à Saint-Joseph ;

- de condamner solidairement les sociétés FEDT et GTOI à lui verser les sommes de 18 170 euros HT au titre des bétons éclatés et des fissures infiltrantes, 9 300 euros HT au titre de l'affaissement du terrain et 51 043 euros HT au titre des dysfonctionnements des jalousies ;

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, " Socotec Réunion ", GTOI et SODEGIS à lui verser les sommes de 367 882 euros HT au titre des fuites en toiture et 848,31 euros au titre de la location d'échafaudages nécessaires à l'inspection de la toiture du gymnase ;

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis " et GTOI à lui verser les sommes de 3 180 euros HT au titre de la réfection des peintures du logement de fonction et des joints d'étanchéités des panneaux polycarbonates et 25 500 euros HT au titre des désordres affectant les peintures extérieures ;

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", GTOI et SODEGIS à lui verser la somme de 23 600 euros HT au titre des menuiseries extérieures ;

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", Cotel, " Socotec Réunion " et SODEGIS à lui verser les sommes de 5 850 euros HT au titre des oxydations diverses du bâtiment du lycée, 20 094, 27 euros HT au titre du changement des cellules et du transformateur, 684,77 euros au titre de la réalisation des protections sur les ventilations et le transformateur et 14 784,95 euros HT au titre des frais engagés sur les installations de climatisation ;

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", " Socotec Réunion ", GTOI et SODEGIS à lui verser les sommes de 10 800 euros HT au titre des désordres affectant le portail du lycée, 18 261 euros HT au titre de l'invasion de termites ;

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, " Socotec Réunion ", " Menighetti programmation ", GTOI et SODEGIS à lui verser la somme de 56 569,26 euros HT au titre des frais engagés pour l'habillage des débords de toiture ;

- de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Cotel, " Socotec Réunion ", GTOI et SODEGIS à lui verser les sommes de 45 473,44 euros HT au titre des frais d'expertise et 95 827,53 euros au titre des mesures conservatoires ;

- de condamner la société " Georges Torcatis " à lui verser la somme de 1 105 euros HT au titre des pénétrations d'eau par les grilles de ventilation ;

- de condamner la société GTOI à lui verser la somme de 2 845,96 euros au titre de la réalisation des travaux sur les toitures des logements ;

- d'assortir ces condamnations du paiement des intérêts à compter du 27 mai 2008 et de leur capitalisation à compter du 27 mai 2009.

Par un jugement n° 1201101 du 6 mars 2015, le tribunal administratif de La Réunion a condamné la SODEGIS à verser à la région Réunion une indemnité de 644 342,56 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la réclamation préalable, en date du 27 mai 2008, cette somme devant être capitalisée pour porter elle-même intérêts à compter d'une année échue après cette date et à chaque date anniversaire de cette demande. Il a mis à la charge de la SODEGIS la somme de 3 000 euros à verser à la région au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il a rejeté le surplus des conclusions de la région et l'ensemble des conclusions présentées par les constructeurs.

Procédure devant la cour :

I - Par une première requête, enregistrée le 16 juin 2015 sous le n° 15BX02042, et quatre mémoires enregistrés respectivement les 28 juillet 2015, 1er septembre 2015, 30 décembre 2015 et 5 février 2016, la SODEGIS, représentée par Me C... et Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 6 mars 2015 ;

2°) de rejeter la demande de la région Réunion ;

3°) de mettre à la charge de la région Réunion la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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II - Par une seconde requête, enregistrée le 10 août 2015 sous le n°15BX02798, et un mémoire en réplique enregistré le 5 février 2016, la SODEGIS, représentée par Me C... et Me B..., demande à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Saint-Denis du 6 mars 2015 ;

2°) de mettre à la charge de la région Réunion la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sylvie Cherrier ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la société Sodegis, de MeA..., représentant la région Réunion, de MeD..., représentant la société d'architectes Georges Torcatis, de MeE..., représentant la société les Grands Travaux de l'Océan Indien.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes d'une délibération en date du 18 octobre 1996, la commission permanente de la région Réunion a décidé de construire un lycée à Vincendo, sur le territoire de la commune de Saint-Joseph. Par une convention signée le 27 octobre 1997, elle a délégué la maîtrise d'ouvrage pour cette opération à la société de développement et de gestion d'immobilier social (SODEGIS). Par un marché en date du 3 novembre 1997, la maîtrise d'oeuvre a été confiée à un groupement conjoint, composé des sociétés " Georges Torcatis ", mandataire du groupement, FEDT, bureau d'études " VRD-Structure ", et Cotel, bureau d'études " fluides ". Par un marché signé le 25 novembre 1997, une mission de contrôle a été confiée à la société Socotec. Une mission de coordinateur de sécurité a par ailleurs été attribuée à la société Bureau Véritas. Par acte d'engagement signé le 7 août 1998, la réalisation de l'ensemble des travaux de construction du Lycée et de ses équipements sportifs a été confiée à la société " Grands travaux de l'océan indien " (GTOI), laquelle en a sous-traité une partie. La réception des travaux concernant les zones A et B du lycée, la salle de restauration et les logements de fonction a été prononcée avec réserves par une décision du 12 novembre 1999, avec effet au 6 septembre 1999. La réception des travaux concernant les équipements sportifs couverts (gymnase et salle EPC) et le logement du gardien a été prononcée par décision du 23 décembre 1999, avec effet au 9 novembre 1999. Enfin, la réception des travaux concernant la zone C du lycée et le centre de documentation a été prononcée avec réserves, avec effet le 18 octobre 1999. Des désordres ont commencé à apparaître au cours du mois de décembre 1999. Par ordonnance du président du tribunal administratif de La Réunion du 27 octobre 2005, un expert a été désigné à la demande de la région Réunion. Il a déposé son rapport le 30 novembre 2007. Par ordonnance du 17 décembre 2007, ses honoraires ont été liquidés à la somme de 45 473,44 euros toutes taxes comprises et mis à la charge de la région Réunion. Celle-ci a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner solidairement les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Cotel Ingénierie, Socotec Réunion, Menighetti Programmation, GTOI et SODEGIS à lui verser diverses sommes en réparation des dommages ayant affecté le lycée et ses équipements, ainsi qu'à lui rembourser les frais d'expertise et les sommes engagées au titre des mesures conservatoires. Elle demandait également, à titre subsidiaire, la condamnation du maître d'ouvrage délégué au titre de sa responsabilité contractuelle.

2. Par une requête n° 15BX02042, enregistrée le 16 juin 2015, la SODEGIS relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de La Réunion l'a condamnée à verser à la région Réunion la somme de 644 342,56 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 mai 2008, date de réception de la réclamation préalable, et de la capitalisation des intérêts à compter d'une année échue après cette date et à chaque date anniversaire. Par la voie de l'appel provoqué, et pour le cas où il serait fait droit à la demande de la SODEGIS, la région Réunion demande que les constructeurs soient condamnés, sur le terrain de la garantie décennale, à l'indemniser au titre des différents désordres qui ont affecté le lycée Vincendo, tels qu'ils ont été identifiés par l'expert. La société " Georges Torcatis ", la société Cotel Ingénierie, la société FEDT, la société Menighetti Programmation, la société Socotec Réunion et la société GTOI demandent enfin, également par la voie de l'appel provoqué, à être dégagées de toute responsabilité et, pour le cas où leur responsabilité serait retenue, à être garanties par les autres sociétés impliquées dans le marché. Par une seconde requête enregistrée le 10 août 2015, sous le n° 15BX02798, la SODEGIS demande par ailleurs à la cours d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 6 mars 2015.

3. Les requêtes n° 15BX02042 et 15BX02798 sont dirigées contre le même jugement. Il convient par conséquent de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur la requête n° 15BX02042 :

Sur la recevabilité de la requête :

4. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite (...) ". Aux termes de l'article R. 811-5 de ce code : " Les délais supplémentaires de distance prévus à l'article R. 421-7 s'ajoutent aux délais normalement impartis (...) ". Enfin, l'article R. 421-7 du même code dispose que : " Lorsque la demande est portée devant un tribunal administratif qui a son siège en France métropolitaine ou devant le Conseil d'Etat statuant en premier et dernier ressort, le délai de recours prévu à l'article R. 421-1 est augmenté d'un mois pour les personnes qui demeurent (...) à La Réunion (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier transmis par le tribunal administratif de La Réunion que le jugement attaqué a été notifié à la SODEGIS par un courrier daté du 12 mars 2015 qu'elle a reçu le 17 mars 2015, comme en atteste l'avis de réception postale retourné au tribunal. Par suite, sa requête, qui a été enregistrée au greffe de la cour le 16 juin 2015, n'est pas tardive.

Sur la régularité du jugement en tant qu'il statue sur les droits de la région à l'égard de la SODEGIS :

6. Dans sa requête introductive d'instance devant le tribunal administratif, la région Réunion a demandé que la SODEGIS soit condamnée solidairement avec les constructeurs au titre des désordres affectant le lycée d'enseignement général et technologique de Vincendo en se fondant, à titre principal sur le terrain de la garantie décennale et, à titre subsidiaire, sur le terrain des obligations contractuelles résultant du contrat de maîtrise d'ouvrage déléguée conclu le 27 octobre 1997. Or, dans le jugement attaqué du 6 mars 2015, le tribunal administratif a fait droit aux conclusions de la région en se fondant sur le moyen tiré de la responsabilité contractuelle de la SODEGIS, sans avoir au préalable écarté le moyen tiré de la garantie décennale des constructeurs. Le tribunal administratif a ainsi fondé sa décision sur un moyen relevé d'office dans la mesure où un tel moyen, présenté par la région à titre subsidiaire, ne pouvait être regardé comme soulevé devant lui avant que le moyen invoqué à titre principal n'ait été expressément écarté. Ce faisant, et dès lors qu'un tel moyen n'est pas d'ordre public, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité en tant qu'il a condamné la SODEGIS à verser à la région Réunion la somme de 644 342,56 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la réclamation préalable, en date du 27 mai 2008 et de la capitalisation des intérêts à compter d'une année échue après cette date et à chaque date anniversaire. Il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué en tant que, par ses articles 1er,2 et 3 il a condamné la SODEGIS au profit de la région, et de statuer par voie d'évocation sur les conclusions que la région a présentées en première instance à l'encontre de la SODEGIS.

Sur la responsabilité de la SODEGIS à l'égard de la région Réunion :

En ce qui concerne la garantie décennale :

7. Il résulte de l'article 1792 du code civil que sont seuls responsables envers le maître de l'ouvrage des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination les personnes ayant la qualité de constructeur. En sa qualité de mandataire de la région Réunion, la SODEGIS, maître d'ouvrage délégué, n'a pas la qualité de constructeur au sens desdites dispositions. Aussi, cette société est-elle fondée à soutenir que sa responsabilité ne peut être recherchée sur le terrain de la garantie décennale.

En ce qui concerne la responsabilité contractuelle :

8. Contrairement à ce que soutient la SODEGIS, la région Réunion a invoqué devant le tribunal administratif, à titre subsidiaire, sa responsabilité contractuelle. Aussi, la fin de non-recevoir tirée de ce que cette responsabilité n'a été invoquée qu'en appel doit-elle être rejetée.

9. Aux termes de l'article 5 de la convention de mandat conclue le 27 octobre 1997, la SODEGIS avait notamment pour mission d'assurer le " suivi du chantier sur les plans techniques, financier et administratif ". Dans ce cadre, l'article 11 de cette même convention prévoit, d'une part qu'elle " assurera la gestion des marchés dans les conditions prévues par le code des marchés publics, de manière à garantir les intérêts de la Collectivité ", " délivrera les ordres de service ayant des conséquences financières ", " vérifiera les situations de travaux préalablement contrôlées par le maître d'oeuvre " et, d'autre part, qu'elle " devra être représentée lors des différents contrôles pour essais à effectuer (sécurité, etc.) " et " s'efforcera de trouver des solutions pour remédier aux anomalies constatées dans le déroulement des travaux (délais), la qualité des prestations ou le non-respect des marchés et en informera la Collectivité ". Enfin, il résulte de l'article 16.1 de ladite convention que dans le cas où des réserves auraient été faites à la réception, ou des désordres dénoncés pendant la période de parfait achèvement, il lui appartiendra de " suivre la levée des réserves ou la réparation des désordres ".

S'agissant de l'oxydation des charpentes métalliques et des fuites en toiture :

10. La région soutient que la SODEGIS a contribué à ces désordres dès lors qu'elle s'est abstenue de dénoncer l'absence de cohérence entre le CCTP du lot " Charpente ", qui ne prévoit pas de complément anticorrosion à la charge du charpentier, et le CCTP du lot " Peintures ", qui prévoit que la peinture sera appliquée sur des éléments de charpente et des éléments en acier noir ayant reçu un complément anticorrosion réalisé par le charpentier. Cependant, et outre que la rédaction des CCTP incombait au maître d'oeuvre et non au maître d'ouvrage délégué, aucune stipulation de la convention de maîtrise d'ouvrage ne mettait à la charge de la SODEGIS le soin de vérifier l'adéquation des différents CCTP afférents à chaque lot. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que des anomalies auraient été constatées en cours de chantier concernant l'insuffisance de protection anticorrosion sur les éléments de la charpente métallique et sur les chéneaux du gymnase. Dans ces conditions, la responsabilité contractuelle de la SODEGIS ne saurait être mise en jeu concernant ces désordres.

S'agissant du défaut d'étanchéité des menuiseries extérieures :

11. La région, qui se contente de faire valoir que la SODEGIS n'a pas veillé à l'exécution correcte des travaux et a manqué à son devoir d'information envers le maître d'ouvrage, n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

S'agissant de l'oxydation des matériels :

12. Si la région fait valoir que ces désordres sont consécutifs à une sous-estimation de l'agressivité du milieu ambiant ainsi qu'à un choix de leur emplacement ne permettant pas de répondre à l'exigence d'entretien aisé mentionnée dans le programme architectural, technique et fonctionnel de l'opération, elle ne précise pas en quoi la SODEGIS aurait manqué sur ces points à ses obligations contractuelles. Par suite, la responsabilité contractuelle de cette société ne saurait être mise en jeu à ce titre.

S'agissant de l'invasion des termites :

13. La région fait valoir que la SODEGIS n'a pas surveillé convenablement l'exécution des travaux, n'a pas pris les mesures nécessaires afin de permettre d'évacuer les matériaux de coffrage abandonnés par la société GTOI sous les gradins du gymnase et a manqué à son devoir d'information à ce titre envers le maître d'ouvrage. Toutefois, et outre qu'il ne ressort pas des stipulations mentionnées au point 12 ci-dessus qu'il revenait à la SODEGIS de surveiller la réalisation du traitement anti-termites mis à la charge de la société GTOI, l'abandon par cette dernière de matériaux de coffrage sous les gradins du gymnase n'a fait l'objet d'aucune réserve lors des opérations de réception. Aussi n'incombait-il pas davantage à la SODEGIS de s'assurer de leur évacuation dans le cadre de sa mission de suivi de la levée des réserves. Dans ces conditions, sa responsabilité contractuelle ne saurait être engagée à ce titre.

14. Il résulte de ce qui a été dit aux points 9 à 13, et sans qu'il soit besoin de déterminer si elle a ou non obtenu quitus de sa mission technique dans les conditions prévues par l'article 16.1 de la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée, que la région n'est pas fondée à rechercher la responsabilité contractuelle de la SODEGIS.

15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 14 que les conclusions par lesquelles la région a demandé au tribunal administratif la condamnation de la SODEGIS à réparer les préjudices subis et à supporter les frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.

Sur les conclusions de la région Réunion dirigées contre les constructeurs :

16. La situation de la région Réunion étant aggravée en raison de l'admission de l'appel principal formé par la SODEGIS, la région est recevable à demander, par la voie de l'appel provoqué, la condamnation des constructeurs à réparer les désordres.

En ce qui concerne la mise en jeu de la garantie décennale et le montant des sommes dues à la région :

17. Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité au titre de la garantie décennale, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. Les désordres ayant fait l'objet de réserves à la réception ne peuvent toutefois engager la responsabilité des constructeurs que sur le seul fondement de leur responsabilité contractuelle aussi longtemps que ces réserves n'ont pas été levées.

18. En l'espèce, la réception du lycée, qui s'est opérée en trois étapes successives, a donné lieu, dans les trois cas, à un certain nombre de réserves qui ont été précisées sur une liste jointe à chacun des trois procès-verbaux de réception. Alors que la SODEGIS soutient que ces réserves avaient toutes été levées au mois d'octobre 2002, ce que ne conteste aucun des constructeurs ayant participé à la réalisation de l'ouvrage, la région fait valoir qu'à la date du 15 octobre 2002, des prestations demeuraient à réaliser ou à reprendre, telles que la peinture du hall d'entrée et du logement du proviseur adjoint, la réparation d'une fuite dans le lot A 309, la reprise de la colonne d'ascenseur.

19. Il résulte cependant de l'instruction que par un courrier du 4 novembre 2002, la SODEGIS a informé la région que, au vu de la réception de trois postes de travaux et de différentes réserves du parfait achèvement, ainsi que de la visite de levée des réserves de parfait achèvement notifiée par le maître d'oeuvre le 8 octobre 2002, ce qui suppose que les réserves faites à la réception avaient nécessairement été préalablement levées, elle procédait " à la main levée des actes de cautionnement de la retenue de garantie de marché et de l'avenant n° 1 du marché de GTOI ", laquelle était l'unique titulaire du marché de travaux afférents à la réalisation du lycée. Par ailleurs, le procès-verbal de levée de réserves du " parfait achèvement " en date du 12 janvier 2004, établi par le mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, la société " Georges Torcatis ", indique que " au vu des comptes-rendus de la maîtrise d'ouvrage, de l'architecte (08/10/02), j'atteste par la présente que la GPA est levée et que les garanties décennales prennent le relais sur cette opération ". Enfin, en réponse à la deuxième demande de quitus qui lui a été adressée par la SODEGIS le 26 juillet 2005, la région a répondu, par courrier du 19 août 2005, qu'il convenait de lui transmettre l'attestation d'assurance afin qu'elle procède au paiement du solde et donne à la société quitus de sa mission, sans faire mention d'aucune réserve qui n'aurait alors pas été levée.

20. Dans ces conditions, l'ensemble des réserves émises lors de la réception du lycée Vincendo doivent être regardées comme ayant été levées préalablement à l'introduction de la demande de la région Réunion devant le tribunal administratif.

S'agissant de l'oxydation des charpentes métalliques :

21. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif, qu'une oxydation affecte la charpente métallique du lycée et le gymnase ainsi que les parties enterrées qui supportent l'escalier du patio central. Cette oxydation, due principalement à une protection insuffisante contre l'agressivité du milieu ambiant, le site se trouvant exposé aux vents dominants chargés d'embruns marins, n'était pas apparente au moment de la réception des travaux. Elle est de nature à fragiliser les éléments sur lesquels elle porte et donc à compromettre la solidité de l'ouvrage. Par suite, elle engage la responsabilité décennale des constructeurs. L'expert a considéré qu'il pouvait y être remédié par un traitement de la charpente consistant à égrener, poncer, brosser et apposer un inhibiteur de rouille, pour un montant total de 37 500 euros concernant le lycée et de 25 000 euros concernant le gymnase, le coût du remplacement des éléments détériorés ayant par ailleurs été évalué à un montant forfaitaire de 3 000 euros. Le montant des réparations ainsi rendues nécessaires doit par conséquent être fixé à 65 500 euros HT. L'expert a par ailleurs relevé que les chéneaux métalliques de la charpente du gymnase n'avaient pas fait l'objet d'un entretien approprié de la part de la région, compte tenu de l'agressivité du milieu ambiant. Si la société GTOI fait valoir que la responsabilité du maître d'ouvrage doit également être retenue en raison du choix du site dont il n'ignorait pas qu'il était particulièrement exposé aux vents et aux embruns, cette circonstance n'est toutefois pas de nature à engager la responsabilité de la région au titre de l'oxydation des charpentes métalliques dès lors que la survenance de ce dommage aurait pu être évitée par le choix et la mise en oeuvre de matériaux de construction et de procédés de protection adaptés. Aussi la région Réunion, à laquelle il convient d'imputer 5 % du dommage du fait de ses carences concernant l'entretien de certains éléments de la charpente, est-elle fondée à demander que la somme qui lui est due au titre de ce désordre soit fixée à 62 225 euros HT.

S'agissant des bétons éclatés sur le garde-corps de la coursive :

22. Selon l'expert, ce désordre est dû à un défaut d'enrobages ponctuels, aggravé par la pénétration d'eau en rives de coursive non étanchées. Dès lors qu'il est de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage, il relève de la garantie décennale des constructeurs. Pour évaluer le montant de la réparation due à ce titre à la région, l'expert s'est fondé sur un devis établi par la société GTOI, joint en annexe 48 de son rapport, aux termes duquel le garde corps des coursives comporte dix-sept bétons éclatés dont la reprise présente un coût unitaire de 400 euros HT. Par suite, la réparation due à la région Réunion au titre de ce dommage doit être fixée à 6 800 euros HT.

S'agissant de l'affaissement du terre-plein :

23. Il résulte du rapport d'expertise que l'affaissement de la bâche à eau, qui a entraîné l'affaissement du terre-plein central servant au stationnement des véhicules, est dû à la rupture de la canalisation d'eaux pluviales en amont de la bâche, ayant entraîné la circulation d'eau souterraine non canalisée. Ce désordre, qui compromet la solidité de la voie qui surplombe ladite bâche, et qui affecte par ailleurs également la circulation des véhicules et des piétons, est de nature décennale. Pour y remédier il convient, selon l'expert, de consolider la bâche à eau au moyen d'une reprise en sous-oeuvre par micropieux, de procéder à une réfection de la canalisation d'eaux pluviales concernée ainsi que des fissures de la bâche et de reprendre la chaussée et les trottoirs avec du béton bitumeux ainsi qu'une géogrille de renfort anti-fissures, pour un montant total de 93 000 euros HT. Il y a lieu, par suite, de fixer le montant de la réparation due à ce titre à la région Réunion à la somme de 93 000 euros HT.

S'agissant des fuites en toitures :

Quant aux fuites au-dessus des salles de classe avec endommagement des faux plafonds et au-dessus de la salle de restauration des élèves :

24. L'expert a constaté d'importantes fuites en toiture dans les salles de classes, le local informatique ainsi que dans la salle de restauration, lesquelles se traduisent par l'inondation des salles concernées en cas de forte pluie. Un tel phénomène est de nature à faire obstacle à une utilisation normale de l'ouvrage et à le rendre impropre à sa destination qui est d'accueillir les élèves et les matériels de façon pérenne, dans un contexte sécurisé. Il ressort du rapport d'expertise que ces fuites ont pour origine un effet de pile résultant du contact entre les tôles nervurées en aluminium qui recouvrent ces salles et les pannes sur lesquelles elles reposent. Ces pannes ont été galvanisées en continu et donc protégées par zinc fondu. Elles sont dès lors conformes au DTU 40.36 qui autorise les contacts de l'aluminium avec les éléments métalliques pourvus d'un revêtement à base de zinc. Néanmoins, en raison de l'absence de complément anticorrosion sur les éléments de la charpente, notamment sur les pannes, et eu égard à la forte exposition du site aux embruns, la simple galvanisation des pannes s'est avérée insuffisante pour éviter l'effet de pile susmentionné. Il en est résulté un percement de la couverture en aluminium au niveau des pannes. Ce désordre est imputable à des carences dans l'élaboration du CCTP afférent au lot " charpente " et dans le suivi de la réalisation des travaux, ainsi qu'à une exécution défectueuse de ceux-ci. Selon l'expert, il est également imputable pour partie à la région, ce que ne conteste d'ailleurs pas celle-ci, dès lors qu'elle a tardé à faire installer des sous-rives dans les parties fermées du lycée. Il sera fait une juste appréciation de sa part de responsabilité à ce titre en la fixant à 5 % du dommage. Afin de remédier aux désordres, l'expert a préconisé le remplacement de la couverture du lycée et de la salle de restauration, pour un montant de 277 240 euros HT. Dans ces conditions, la réparation due à ce titre à la région doit être fixée à 263 378 euros HT.

Quant aux fuites en toiture du gymnase :

25. L'inspection de la toiture du gymnase a permis de constater une oxydation des fixations de toiture. Alors même que, comme le fait valoir la société " Georges Torcatis ", l'expert n'a pu procéder à un constat décisif quant à la réalité et à l'importance des fuites en toiture, le rapport d'expertise faisant simplement état de " coulures dénoncées à plusieurs reprises par les utilisateurs " du gymnase, l'oxydation des fixations en toiture a bien été constatée et, les mêmes causes produisant les mêmes effets, dès lors que la couverture du gymnase a été conçue et réalisée selon les mêmes principes et avec les mêmes matériaux que celles du lycée et de la salle de restauration, et se trouve soumise aux mêmes aléas climatiques, le phénomène d'électrolyse relevé sur les secondes, s'est également nécessairement produit sur la première. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 24 ci-dessus, le désordre en résultant est de nature à rendre le gymnase impropre à sa destination et engage dès lors la responsabilité décennale des constructeurs. Comme pour le lycée et la salle de restauration, l'expert a considéré que la seule solution susceptible de faire disparaître un tel désordre consistait à changer la couverture du gymnase, pour un coût de 110 004 euros HT. Comme précédemment, et dès lors que ce désordre est partiellement imputable à la région, dont la part de responsabilité doit être fixée à 5 %, la réparation qui lui est due à ce titre doit être fixée à 104 504 euros HT, à laquelle il convient d'ajouter la somme de 848,31 euros TTC, correspondant à 95 % des frais d'échafaudage qu'elle a exposés dans le cadre de l'inspection de la toiture du gymnase.

Quant aux fuites en toiture dans le bâtiment CDI et dans les logements de fonction :

26. Comme pour les autres bâtiments du lycée, les fuites en toiture constatées dans le bâtiment CDI et dans les logements de fonction sont de nature à rendre ces parties du lycée impropres à leur destination et engagent par suite la responsabilité décennale des constructeurs.

27. Pour ce qui concerne le bâtiment CDI, les fuites constatées dans la coursive sont dues à la dégradation des joints entre les tôles translucides et les supports, en raison de l'agressivité du milieu ambiant. L'expert a estimé que la réparation de ce désordre nécessitait de reprendre les joints d'étanchéité des panneaux polycarbonate, pour un coût qu'il convient de fixer à 1 500 euros HT.

28. S'agissant du logement de fonction Ouest, les fuites étaient dues à l'insuffisance de hauteur des tôles de rives. La société CMOI, sous-traitant de la société GTOI, est intervenue pour mettre en place des tôles de rives plus larges, ce qui a permis de mettre fin au désordre. Le coût de cette intervention, acquitté par la région, s'est élevé à 1 302 euros TTC. Ces fuites se sont par ailleurs traduites par la dégradation des peintures et du plafond du logement concerné, dont l'expert a évalué la reprise à un coût de 1 680 euros HT.

29. Enfin, la société ADP est intervenue au mois de mai 2005, sur la toiture d'un autre logement de fonction, afin d'effectuer une opération similaire à celle réalisée par la société CMOI sur le logement de fonction Ouest, à savoir la mise en place de tôles de rive plus larges. Elle a également traité les chevilles et les visses en toiture de trois des quatre logements, et appliqué un traitement anticorrosion ainsi que du bitume sur la noue latérale. Le coût de cette intervention, également acquitté par la région, s'est élevé à 1 543,96 euros TTC.

Quant aux fuites en toiture au niveau du chéneau central du bâtiment de restauration :

30. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que ces fuites sont dues à un décollement ponctuel de l'étanchéité dont l'expert a estimé qu'il était consécutif à un défaut d'entretien du chéneau, lequel avait été réalisé en béton armé. L'expert a considéré que ce désordre, dont le coût de reprise a été fixé à la somme de 800 euros HT, était entièrement imputable à la région, qui avait manqué à son obligation d'entretien. Par suite, ce désordre n'est pas au nombre de ceux qui relèvent de la garantie décennale.

S'agissant du défaut d'étanchéité des menuiseries extérieures :

31. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les menuiseries extérieures sont affectées d'un défaut d'étanchéité avec multiples coulures dans le lycée, le logement Est, le logement central et le logement Ouest. Ce défaut d'étanchéité se traduit par des infiltrations d'eau pouvant être très importantes, notamment en cas de forte pluie, présentant un danger pour les usagers du lycée, que se trouvent ainsi soumis à des risques de chute, voire d'électrocution. Un tel désordre est dès lors de nature à rendre les parties concernées du lycée impropres à leur destination et engagent par suite la responsabilité décennale des constructeurs. La reprise de ces désordres, qui consiste à refaire l'étanchéité en périphérie des menuiseries et à reprendre les peintures intérieures qui ont été détériorées par les infiltrations d'eau, doit être fixée à 23 600 euros HT, soit 15 600 euros au titre de la réfection de l'étanchéité des menuiseries et 8 000 euros au titre de la reprise des peintures.

S'agissant du dysfonctionnement des jalousies :

32. Sur la façade intérieure du lycée, l'ensemble des fenêtres est équipé de jalousies. Le lycée en compte, en tout, deux-cent-soixante. Il ressort du rapport d'expertise que ces jalousies présentent, pour deux tiers d'entre elles, un défaut d'étanchéité et un dysfonctionnement, lequel se traduit par l'impossibilité de les actionner après un certain temps d'utilisation, la poignée tournant alors dans le vide. Les jalousies se trouvent dès lors bloquées, soit en position ouverte, soit en position fermée. Un tel désordre, qui affectera à plus ou moins long terme l'ensemble des jalousies des bâtiments, dès lors que le dysfonctionnement constaté a une origine structurelle, fait obstacle à une ventilation adaptée des salles concernées. Il est donc de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination, a fortiori dans une région à climat chaud et humide, caractérisée par des périodes de fortes pluies. Il relève par conséquent de la garantie décennale des constructeurs. L'expert a chiffré la reprise du mécanisme de fermeture de l'ensemble des jalousies à la somme de 49 043 euros HT, à laquelle il faut ajouter 2 000 euros HT au titre de la reprise des joins et vitrages, soit un total de 51 043 euros HT.

S'agissant des fissures infiltrantes :

33. L'expert a constaté la présence de fissures infiltrantes dans les murs de façade du lycée ainsi qu'en linteaux des baies d'un logement de fonction situé en rez-de-chaussée. Lorsqu'il pleut, l'eau s'écoule des murs à l'intérieur des locaux, et recouvre des surfaces plus ou moins étendues, selon la durée et la vigueur de la pluie. Il en résulte un risque de glissades et de chutes pour les utilisateurs desdits locaux, ainsi que, le cas échéant, un risque d'électrocution. Un tel désordre est de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination et relève par conséquent de la garantie décennale dont sont redevables les constructeurs. Pour évaluer le montant de la réparation due à ce titre à la région, l'expert s'est fondé sur le devis établi par la société GTOI mentionné au point 22 ci-dessus, joint en annexe 48 de son rapport, aux termes duquel la reprise des vingt-et-une fissures relevées sur les murs du lycée et du logement de fonction du proviseur doit être fixé à 7 350 euros HT, soit 350 euros par fissure, auquel il convient d'ajouter un montant de 2 520 euros HT, au titre des travaux de reprise des peintures associées. Par suite, la réparation due à la région Réunion au titre de ce dommage doit être fixée à 9 870 euros HT.

S'agissant de l'oxydation des installations de la centrale de climatisation sur toiture :

34. Il résulte de l'instruction que la machinerie de la centrale de climatisation a été placée sur le toit du lycée, face aux vents et aux embruns. Aucun dispositif spécifique de protection n'a été prévu et, dès lors, le sel porté par les vents s'infiltre dans l'ensemble des circuits et équipements, accélérant ainsi l'oxydation des matériaux, tant au niveau de la motorisation de la centrale, que du condensateur, des vannes, et des vases de décantation. Il en est résulté une détérioration importante et anormale des équipements de la centrale. Sa motorisation a ainsi dû être changée au mois de mars 2004, pour un montant de 15 202,15 euros TTC, après seulement quatre années de fonctionnement, le degré très important d'oxydation des autres composants rendant par ailleurs leur fonctionnement incertain, voir impossible. Diverses pièces ont par ailleurs été remplacées, au cours du même mois, pour un montant de 1 225,59 euros TTC, en raison de l'oxydation excessive des pièces d'origine. Ces désordres, dus notamment à des erreurs dans la conception et la réalisation de l'installation, rendent l'ouvrage impropre à sa destination et relèvent de la garantie décennale des constructeurs quand bien même la centrale de climatisation constituerait, ainsi que le fait valoir la société Cotel Ingénierie, un élément dissociable de l'ouvrage.

35. Il résulte du rapport de l'expert que le montant total des réparations encore à réaliser sur la centrale de climatisation, consistant à remplacer les éléments détériorés par la rouille et à traiter les ossatures conservées, s'élève à 6 500 euros HT. L'expert a par ailleurs relevé que les désordres constatés devaient pour partie être imputés à la région en raison d'un défaut d'entretien et de l'absence de contrat de maintenance. Il a toutefois également indiqué que cet équipement était difficile d'accès et ce alors même que la société Menighetti Programmation avait recommandé, en page 10 du programme détaillé, de concevoir l'accessibilité des surfaces dans l'objectif d'un entretien aisé, de tenir compte, dans le choix des matériaux, de leur résistance aux dégradations, et de ne prévoir aucun entretien pour les éléments de construction d'accès difficile. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de la part du dommage imputable à la région Réunion en la fixant à 10 %. La réparation qui est lui due à ce titre doit par suite être fixée à 5 850 euros HT, au titre de la réfection de divers équipements de la centrale, à laquelle il convient d'ajouter la somme de 14 785 euros TTC au titre du remplacement de la motorisation et de diverses pièces effectué en 2004.

S'agissant du poste de transformation :

36. Comme pour la centrale de climatisation, le poste de transformation, qui a été placé également en toiture, a fait l'objet d'une dégradation anormale de ses composants. La transformateur initial a ainsi dû être remplacé dès le mois de janvier 2004, après seulement cinq années d'utilisation, à la suite de son explosion sous l'action d'un flash provoqué par l'eau au contact des bornes, le second transformateur se trouvant, après simplement une année d'utilisation, dans un état de dégradation avancé, dû à la présence d'eau à l'intérieur même du transformateur, les bornes de l'équipement, fortement oxydées, devenant sources de flashs électriques. Cette oxydation excessive a notamment touché les cellules du transformateur, lesquelles ont dû être remplacées pour un montant, acquitté par la région de 22 326,96 euros TTC. Les dysfonctionnements du transformateur, lequel intervient dans l'alimentation en électricité de l'ensemble des locaux et équipements du lycée, sont de nature à rendre cet ouvrage impropre à sa destination et engagent ainsi la responsabilité des constructeurs au titre de la garantie décennale. De même que pour la centrale de climatisation, outre une erreur initiale dans le choix de l'emplacement du transformateur et une insuffisante protection de celui-ci contre les éléments naturels, s'agissant notamment de l'agressivité particulière du milieu ambiant, les désordres constatés sont également dus à un défaut d'entretien imputable à la région, dont la part de responsabilité dans la survenance de ce désordre devra, compte tenu des difficultés d'accès au transformateur, être fixée à 10 %. Il convient en conséquence de fixer la réparation due à ce titre à la région Réunion à la somme de 20 094 euros TTC.

S'agissant des mécanismes enterrés des portails du lycée :

37. Le lycée Vincendo compte quatre portails à double battants, pour lesquels chaque battant est doté d'une motorisation spécifique, et cinq portails à battant unique. Il résulte de l'instruction que les mécanismes de ces portails automatiques sont encastrés dans le sol, selon les prescriptions de la maîtrise d'oeuvre, l'expert ayant par ailleurs relevé que les évacuations d'eau de pluie de ces mécanismes avaient été mal réalisées. Il en résulte un fonctionnement aléatoire de ces portails, malgré des interventions régulières d'une société spécialisée, qui expose les usagers à des risques graves et font par ailleurs obstacle à une sécurisation efficace des accès. De tels désordres, en raison de leur caractère récurrent et généralisé, rendent l'ouvrage que constitue le lycée impropre à sa destination et engagent, contrairement à ce que soutient la société GTOI, la responsabilité décennale des constructeurs envers le maître d'ouvrage, quand bien même ils affectent des éléments dissociables de l'ouvrage. L'expert a préconisé le remplacement des mécanismes des cinq portails alors hors service par des vérins apparents, pour un coût total de 12 000 euros HT, soit 2 400 euros HT par portail. Si la société GTOI soutient que le devis de la société Delta Système, sur lequel se serait fondé l'expert, prévoit des modifications et des améliorations excédant les travaux de remise en état nécessaires pour mettre fin au désordre, elle ne l'établit pas. L'expert a par ailleurs relevé un défaut d'entretien ainsi qu'une absence de contrat de maintenance des portails, de nature à atténuer la responsabilité des constructeurs. Toutefois, et comme pour la centrale de climatisation et le poste de transformation, il a également constaté que le fait d'avoir prévu des mécanismes enterrés, outre que cela n'était guère adapté au regard des conditions climatiques, rendait difficile leur entretien régulier et méconnaissait ainsi les recommandations du programmiste. Il sera fait une juste appréciation de la part de responsabilité de la région, en la fixant à 10 %. Il convient par suite de fixer la réparation qui lui est due à ce titre par les constructeurs à la somme de 10 800 euros HT.

S'agissant de l'invasion de termites :

38. La région soutient que les termites ont envahi " le dépôt Nord et le dessous des gradins ". Elle ne donne toutefois aucune précision quant aux dommages qui en seraient résultés sur les ouvrages concernés. Le rapport de l'expert ne permet pas davantage d'établir que la présence de termites relevée dans le " dépôt Nord " et sous les gradins du gymnase aurait compromis la solidité de ces ouvrages ou les auraient rendus impropres à leur destination. Dans ces conditions, la responsabilité décennale des constructeurs ne peut être recherchée de ce fait.

S'agissant de la pénétration d'eau par les grilles de ventilation :

39. Contrairement à ce que soutient la région, l'expert n'a pas considéré que la pénétration d'eau par les grilles de ventilation présentait un caractère décennal mais a au contraire qualifié ce désordre de " simple inconvénient ". En l'absence de toute précision apportée par la région quant aux conséquences de ce désordre sur la solidité et l'utilisation de l'ouvrage, il ne peut être regardé comme engageant la responsabilité des constructeurs au titre de la garantie décennale.

S'agissant de la dégradation des peintures extérieures :

40. L'expert a relevé un phénomène de faïençage de la peinture appliquée sur les façades du lycée exposées au rayonnement solaire. Ce faïençage est dû selon lui à la différence d'élasticité entre le revêtement imperméable sous-jacent et le feuil de peinture qui a été apposé dessus. Le local CDI ne présente pas un tel faïençage mais le feuil de peinture y est devenu complètement mat sur les parties exposées au rayonnement solaire. L'expert a par ailleurs constaté un décollement ou un boursouflement du revêtement en plusieurs endroits en pied de façade, dû à la remontée, par capillarité, de l'humidité du sol, une détérioration du revêtement en différentes zones autour des baies, vraisemblablement due à des sous-épaisseurs du revêtement sur les appuis de baies et, sur certains voiles de façade, des détériorations importantes du revêtement, localisées de façon régulière en surfaces circulaires, correspondant selon lui à des zones sur lesquelles des trous, rebouchés au mortier, auraient été couverts trop rapidement par un revêtement imperméable. L'ensemble de ces désordres, s'ils présentent indubitablement, comme le relève d'ailleurs l'expert, un caractère inesthétique, ne sont toutefois pas de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination ou à en compromettre la solidité. La responsabilité des constructeurs au titre de la garantie décennale n'est, par suite, pas susceptible d'être engagée à ce titre.

S'agissant des " protections sur ventilations transformateur " :

41. La région Réunion fait état d'un paiement d'un montant de 760,87 euros TTC au titre de la " protection des ventilations et du transformateur ". A défaut de facture établissant la réalité de ce paiement et en l'absence de toute précision quant au désordre ainsi réparé, la demande formée à ce titre par la région ne pourra qu'être écartée.

S'agissant de l'habillage des débords de toitures :

42. Le marché de travaux conclu par la région avec la société GTOI a fait l'objet d'un avenant n° 2 ayant notamment pour objet la pose de sous-rives en débord des toitures extérieures du lycée. Ces travaux supplémentaires étaient destinés à enrayer la corrosion excessive des éléments métalliques situés en sous-face de la toiture et à assurer l'étanchéité à l'air et à l'eau, les infiltrations d'eau pouvant s'avérer importantes cas de pluie fouettante. Ces travaux, dont le montant s'est élevé à 59 546,59 euros TTC, avaient dès lors pour objet de prévenir l'apparition, voire l'aggravation, des désordres consécutifs à la corrosion d'éléments métalliques et aux infiltrations. Ils ne peuvent par suite être regardés comme strictement nécessaires à la réparation des désordres résultant de l'oxydation de la charpente et des fuites en toiture. Leur coût ne peut par conséquent pas être mis à la charge des constructeurs dans le cadre de la garantie décennale dont ils sont redevables envers le maître de l'ouvrage.

S'agissant des mesures conservatoires :

43. La région Réunion a sollicité la condamnation solidaire des sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Cotel Ingénierie, Socotec Réunion et GTOI à lui verser la somme de 95 827, 53 euros TTC au titre des " mesures conservatoires ". Ces mesures ont porté sur le changement des cellules du transformateur, la réalisation de protections sur les ventilations et le transformateur, la location d'échafaudages pout l'inspection de la toiture du gymnase, la centrale de climatisation, la pose de sous-vires en débords des toitures. Dans la mesure où ces différents chefs de préjudice ont fait l'objet de demandes en réparation spécifiques qui ont d'ailleurs été examinées aux points précédents, la demande présentée au titre des " mesures conservatoires ", qui présente un caractère redondant, ne pourra qu'être rejetée.

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :

44. Le montant du préjudice dont la région Réunion est fondée à demander la réparation aux constructeurs à raison des désordres affectant le lycée Vincendo correspond aux frais qu'elle doit engager pour les travaux de réfection. Ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître d'ouvrage ne relève d'un régime fiscal lui permettant normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle qu'il a perçue à raison de ses propres opérations, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Dans ces conditions, les sommes dues à la région au titre des travaux à réaliser, indiquées en montants hors taxe aux points précédents, devront être augmentées de la taxe sur la valeur ajoutée au taux applicable à La Réunion, soit 8,5 %.

S'agissant des intérêts et de leur capitalisation :

45. Dans la mesure où les dates de réception des sommations de payer adressées par la région aux différents constructeurs ne sont pas établies, et que ces dates font par ailleurs l'objet d'une contestation, de la part notamment des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre, les condamnations prononcées ci-dessus porteront intérêt au taux légal à compter du 30 septembre 2012, date d'enregistrement de la demande introductive d'instance devant le tribunal administratif, en application de l'article 1153 du code civil. Ces intérêts seront capitalisés le 30 novembre 2013, puis à chaque date d'anniversaire, pour produire eux-mêmes intérêts.

En ce qui concerne les responsabilités encourues par les constructeurs :

S'agissant de la responsabilité de la société FEDT à l'égard de la région :

46. La société FEDT fait tout d'abord valoir qu'aucune demande de paiement ne lui a été adressée par la région, seule la société " Architecte Torcatis ", mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, ayant été destinataire d'une telle demande. Néanmoins, l'obligation de liaison préalable du contentieux, telle qu'elle découle des dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, n'est opposable qu'aux cocontractants de l'administration et ne trouve dès lors pas à s'appliquer dans le cas d'un recours introduit par une personne publique à l'encontre d'une personne de droit privé.

47. Le constructeur lié à d'autres dans un groupement solidaire supporte, sur le terrain de la garantie décennale, les conséquences des agissements de ses cotraitants, même en l'absence de faute, et même s'il n'a pas lui-même participé aux travaux. Cette solidarité entre les membres d'un groupement se caractérise notamment par l'absence dans le contrat liant le groupement au maître d'ouvrage d'un document définissant les tâches de chacun des membres du groupement. Si la société FEDT soutient que chaque membre du groupement conjoint de maîtrise d'oeuvre constitué entre elle et les sociétés " Georges Torcatis " et Cotel Ingénierie avait en charge des tâches déterminées, il ne résulte pas de l'instruction qu'un contrat auquel aurait été partie la région Réunion aurait fixé les tâches respectives de chacun de ces trois maîtres d'oeuvre. Le seul tableau de répartition des rémunérations annexé à l'acte d'engagement, eu égard à son imprécision, ne saurait caractériser une telle répartition des tâches. Dans ces conditions, et dès lors que l'équipe de maîtrise d'oeuvre est intervenue dans la conception de l'ouvrage, laquelle impliquait une prise en compte appropriée des contraintes inhérentes au climat tropical humide de l'île de la Réunion, et le suivi des travaux, la responsabilité décennale des sociétés " Georges Torcatis " et FEDT est, ainsi que le fait valoir la région, solidairement engagée à l'égard de celle-ci pour les désordres se rapportant à l'oxydation des charpentes métalliques et aux fuites en toiture.

48. La société FEDT fait valoir qu'elle ne peut être condamnée solidairement avec les autres constructeurs dès lors que la solidarité ne se présume pas et qu'en l'absence de clause expresse prévoyant une responsabilité solidaire de tous les constructeurs envers le maître d'ouvrage, un partage des responsabilités doit être opéré en fonction des fautes commises par les différents intervenants. Il résulte toutefois des principes qui régissent la responsabilité décennale que la société FEDT n'est pas fondée à se prévaloir, vis-à-vis du maître d'ouvrage, de l'imputabilité à d'autres constructeurs de tout ou partie des désordres litigieux, et ne peut demander en conséquence que sa responsabilité soit écartée ou limitée que dans la mesure où ces désordres, ou parties de désordres, ne lui sont pas également imputables. Or, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que l'affaissement du terre-plein est consécutif aux spécificités de son lieu d'implantation ainsi qu'à une mauvaise exécution des travaux, lesquels ont été réalisés selon une méthode d'exécution proposée par la société GTOI, avec l'accord de la société FEDT. Dans ces conditions, cette dernière société n'est pas fondée à soutenir que sa responsabilité ne serait pas engagée à l'égard de la région, et ainsi que le demande celle-ci, solidairement avec celle de la société GTOI s'agissant de ce désordre. En revanche, pour ce qui concerne le dysfonctionnement des jalousies, il résulte du rapport de l'expert que ce désordre, issu d'un vice de fabrication, est exclusivement imputable à la société Morel, sous-traitant de la société GTOI, qui a mis en place les jalousies et qui n'était pas sans ignorer leurs défauts intrinsèques, ainsi qu'au fabriquant de ces jalousies, la société SEPALUMIC. La région n'établissant ni même n'alléguant que la société FEDT serait intervenue dans le choix des jalousies ou dans les travaux afférents à leur pose, l'intéressée est fondée à soutenir que ce désordre ne lui est pas imputable et ne peut dès lors engager sa responsabilité. Si la région, enfin, demande la condamnation de la société FEDT solidairement avec la société GTOI au titre des bétons éclatés et des fissures infiltrantes, elle ne fournit pas les éléments permettant d'apprécier l'imputabilité à la société FEDT de ces désordres, pour lesquels l'expert n'a retenu que la responsabilité de la société GTOI.

S'agissant de la responsabilité de la société Cotel Ingénierie à l'égard de la région :

49. Le moyen tiré de ce que la société Cotel Ingénierie n'aurait été destinataire d'aucune demande de paiement, seule la société " Georges Torcatis ", mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, s'étant vue adresser une telle demande par la région, doit être écarté pour le motif exposé au point 46 ci-dessus.

50. Dans la mesure où le groupement de maîtrise d'oeuvre avait en charge les études techniques et le suivi des travaux concernant plus particulièrement le transformateur et la climatisation, il résulte de ce qui vient d'être dit au point 47 ci-dessus que la responsabilité de la société Cotel Ingénierie est engagée, conjointement et solidairement avec celle de la société " Georges Torcatis ", au titre des désordres ayant affecté ces installations.

S'agissant de la responsabilité de la société " Georges Torcatis " à l'égard de la région :

51. Eu égard à ce qui a été dit au point 47 ci-dessus, la société " Georges Torcatis " ne peut utilement invoquer son absence de participation aux travaux réalisés par les autres maîtres d'oeuvre membres du groupement pour échapper à sa responsabilité à l'égard de la région, s'agissant des désordres relevant de la garantie décennale imputables à la maîtrise d'oeuvre pour lesquels la région recherche sa responsabilité, c'est-à-dire les désordres se rapportant à l'oxydation des charpentes métalliques et aux fuites en toiture, déjà évoqués au point 47, ceux concernant la centrale de climatisation et le transformateur, déjà évoqués au point 50, les désordres affectant les menuiseries extérieures, la maîtrise d'oeuvre ayant notamment pour mission de veiller, dans le cadre du contrôle de l'exécution des travaux, à une correcte application du mastic d'étanchéité, les désordres affectant le bâtiment CDI et le logement de fonction Ouest également imputables au suivi du chantier dont la maîtrise d'oeuvre avait la charge, enfin les désordres affectant les mécanismes des portails dont la maîtrise d'oeuvre avait en charge la conception.

S'agissant des conclusions d'appels en garantie présentées par la société " Georges Torcatis " :

52. Les conclusions d'appel en garantie dirigées par cette société contre la région Réunion ne sauraient être accueillies dès lors que celle-ci, envers laquelle est engagée la garantie décennale des constructeurs, ne saurait être tenue de garantir un constructeur au titre d'une condamnation prononcée sur ce terrain.

Quant à l'oxydation des charpentes métalliques :

53. Il ne résulte pas de l'instruction qu'une quelconque convention aurait défini les tâches respectives de la société " Georges Torcatis " et des sociétés FEDT et Cotel Ingénierie. Dans ces conditions, et dès lors que la société " Georges Torcatis " ne fait état que d'un manquement de la société FEDT à ses obligations contractuelles, ses conclusions d'appel en garantie dirigées contre cette société ne sauraient être accueillies.

54. La société " Georges Torcatis " demande également à être garantie par les sociétés GTOI et Menghetti Programmation. Toutefois, en se contentant de faire valoir que " l'expert a mis à la charge de la société Menighetti Programmation une part de responsabilité résiduelle de 5 % ", elle n'établit pas que cette société aurait commis des fautes de nature à engager sa responsabilité vis-à-vis du groupement de maîtrise d'oeuvre. Par ailleurs, la circonstance selon laquelle le CCTP du lot A8, " Peintures ", indiquait que les éléments de la charpente devaient faire l'objet d'une protection supplémentaire au moyen d'une peinture anticorrosion à la charge du titulaire du lot A4, " Charpente-couverture ", ne permet pas d'établir, en l'absence de tout autre élément avancé par la société " Georges Torcatis ", que le titulaire de ce dernier lot aurait commis une faute de nature à engager la responsabilité de la société GTOI envers la maîtrise d'oeuvre.

Quant aux fuites en toiture :

55. En se bornant à faire valoir que les fuites en toitures constatées dans le lycée et la salle de restauration se rattachent " aux désordres d'oxydation des charpentes métalliques " et que " seules les sociétés CMOI et FEDT sont concernées par ces désordres ", la société " Georges Torcatis " n'établit pas que les sociétés GTOI et FEDT auraient commis une faute susceptible de justifier qu'elles la garantissent des condamnations prononcées à son encontre.

56. Pour ce qui concerne les fuites en toiture dans le bâtiment CDI, l'expert a considéré qu'elles étaient dues exclusivement à la mauvaise qualité des joints d'étanchéité posés par le sous-traitant de la société GTOI. La société " Georges Torcatis " est par suite fondée à demander que cette dernière société la garantisse intégralement au titre de ce désordre.

Quant au défaut d'étanchéité des menuiseries extérieures :

57. Il résulte du rapport de l'expert que ce désordre est dû à un défaut manifeste du joint sous appui de baie, lequel présente un défaut d'adhérence et une épaisseur irrégulière avec des manques, l'entreprise Morel, qui a réalisé ces joints en qualité de sous-traitant de GTOI, ayant par ailleurs reconnu qu'elle n'avait pas travaillé dans de bonnes conditions. Si la société " Georges Torcatis " demande à être intégralement garantie par la société GTOI, la société SODEGIS ayant été mise hors de cause, il résulte de l'instruction que le groupement de maîtrise d'oeuvre, qui était chargé de la direction de l'exécution des contrats de travaux et de l'assistance lors des opérations de réception, n'a émis aucune réserve à cette occasion alors même que les défauts relevés par l'expert étaient visibles à l'oeil nu. Par suite, et dès lors que ce désordre est en partie imputable à une faute de la maîtrise d'oeuvre qui peut être évaluée à 15 %, il convient de condamner la société GTOI à garantir la société " Georges Torcatis " à hauteur de 85 % du montant de la réparation due à ce titre à la région.

Quant à l'oxydation des installations de la centrale de climatisation sur toiture :

58. Si la société " Georges Torcatis " fait valoir que " l'expert retient très clairement la responsabilité (...) de la société Socotec, intervenue en qualité de contrôleur technique ", elle ne donne aucune précision quant aux fautes que cette société aurait commises, de nature à engager sa responsabilité envers les maîtres d'oeuvre. Aussi, les conclusions présentées par la société " Georges Torcatis " tendant à ce que la société Socotec Réunion la garantisse des condamnations prononcées à son encontre ne peuvent être accueillies. Quant à ses conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société Cotel Ingénierie, elles doivent être écartées pour les motifs exposés au point 47 ci-dessus.

Quant aux mécanismes enterrés des portails du lycée :

59. Si, comme le fait valoir la société " Georges Torcatis ", l'expert a effectivement relevé que les évacuations d'eau de pluie des mécanismes des portails avaient été mal réalisées par la société Les Maisons Créoles, sous-traitant de la société GTOI, il a également considéré que les désordres constatés trouvaient partiellement leur origine dans un défaut de conception et, plus particulièrement, dans la décision prise par la maîtrise d'oeuvre d'encastrer ces mécanismes dans le sol, alors que, compte tenu de l'humidité et des conditions climatiques, un mécanisme hors sol aurait été plus adapté. La société " Georges Torcatis " n'est par suite pas fondée à demander que les sociétés GTOI et Socotec Réunion la garantissent en totalité au titre de ce désordre.

S'agissant de la responsabilité de la société GTOI à l'égard de la région :

60. Les constructeurs ne peuvent s'exonérer de leur responsabilité au titre de la garantie décennale qu'en cas de force majeure ou de faute du maître de l'ouvrage. Les sujétions imprévues dont se prévaut la société GTOI, qui ne peuvent être assimilées à un cas de force majeure, ne sont dès lors pas susceptibles de constituer une cause exonératoire de responsabilité.

61. La société GTOI fait par ailleurs valoir que le site d'implantation choisi par le maître d'ouvrage délégué pour la réalisation du projet est particulièrement exposé aux intempéries et que cet élément doit être pris en compte pour atténuer sa responsabilité. Toutefois, l'île de la Réunion est, compte tenu de sa situation géographique, soumise à un climat tropical humide, et la commune de Saint-Joseph, située sur la côte, se trouve de ce fait confrontée aux aléas climatiques d'une influence marine. Or, la société GTOI n'établit pas que le site d'implantation du projet se trouverait soumis à un aléa climatique excédant celui auquel on doit s'attendre dans une commune telle que Saint-Joseph. A cet égard, si la société Menighetti Programmation a souligné, au titre des contraintes particulières caractérisant le terrain d'assiette du projet, la topographie difficile, la pollution du site par un dépôt d'ordure, le traitement des eaux usées et pluviales à prévoir en autonome, ainsi que la situation du futur lycée, " coincé " derrière le collège, et ses dessertes limitées, elle n'a nullement donné une importance particulière aux conditions climatiques. Il appartenait aux constructeurs d'adapter les solutions techniques proposées au regard de ces conditions qu'ils ne pouvaient ignorer. Le maître d'ouvrage délégué ne saurait dès lors être regardé comme ayant commis au regard des facteurs climatiques une faute dans le choix du lieu d'implantation de l'ouvrage susceptibles d'atténuer la responsabilité des constructeurs et en particulier de la société GTOI.

62. S'agissant par ailleurs des fautes qu'aurait commises la région dans l'entretien des ouvrages, elles ont d'ores et déjà donné lieu à une exonération partielle de responsabilité pour les constructeurs, ainsi qu'il a été dit aux points 21, 24, 25, 35, 36 et 37, la société GTOI n'établissant ni même n'alléguant que la part de responsabilité de la région, telle qu'elle a été fixée par l'expert, aurait été sous-évaluée.

63. Contrairement à ce que soutient la société GTOI, lorsqu'un ou plusieurs constructeurs sont à l'origine d'un même dommage, le juge administratif peut valablement prononcer à leur encontre une condamnation in solidum, laquelle doit être distinguée, quant à ses effets, de la solidarité prévue à l'article 1202 du code civil.

Quant aux mécanismes enterrés des portails du lycée :

64. Les désordres affectant ces mécanismes étant imputables à la société GTOI qui était responsable de leur installation, ses conclusions tendant à ce que sa responsabilité soit limitée à 10 % ne peuvent qu'être rejetées.

Quant à l'oxydation des charpentes métalliques :

65. Il résulte du rapport d'expertise que le CCTP du lot A8, " Peintures ", indiquait que les éléments de la charpente devaient faire l'objet d'une protection supplémentaire au moyen d'une peinture anticorrosion à la charge du titulaire du lot A4, " Charpente-couverture ", le CCTP de ce dernier lot prévoyant simplement une protection des éléments de la charpente contre la corrosion par galvanisation après soudage ou usinage, sans toutefois prévoir, en sus, la pose d'une peinture anticorrosion. Selon l'expert, ce complément anticorrosion était néanmoins indispensable et son absence s'est traduite par une oxydation excessive des éléments de la charpente de nature, à terme, à compromettre la solidité de l'ouvrage. Si la responsabilité du maître d'oeuvre, auquel il revenait de préparer les CCTP afférents à chaque lot, est engagée, le CCTP du lot A4, " Charpente-couverture ", prévoyait expressément que " l'Entrepreneur doit prendre connaissance des CCTP des autres lots, suivre l'ensemble des travaux, s'entendre avec les autres entreprises sur ce que ces travaux ont de commun, (...) ". Dans ces conditions, il revenait à la société GTOI, unique titulaire du marché de travaux signé pour la réalisation du lycée Vincendo, de s'assurer de la cohérence des CCTP entre eux. Elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que sa responsabilité ne peut être engagée au titre de ce désordre.

Quant aux fuites en toiture dans le lycée, la salle de restauration et le gymnase :

66. Comme il a été plus haut, au point 24, ces fuites en toiture ont pour origine un effet de pile entre les tôles nervurées et les pannes, en raison notamment de l'absence de revêtement anticorrosion sur lesdites pannes, qui constituent des éléments de la charpente. Compte tenu de ce qui vient d'être dit, un tel désordre est pour partie imputable à la société GTOI qui n'est dès lors pas fondée à demander à être exonérée de toute responsabilité à ce titre.

Quant à l'affaissement du terre-plein :

67. Si la société GTOI fait valoir que ce désordre ne lui est pas imputable, elle n'établit pas, par les arguments dont elle se prévaut, que la rupture de la canalisation d'eaux pluviales ayant entraîné l'affaissement de la bâche à eau, et donc du terre-plein la surplombant, serait étrangère à l'exécution des travaux dont elle avait la charge. Dans ces conditions, ses conclusions tendant à être dégagée de toute responsabilité à ce titre ne peuvent être accueillies.

68. Cette société demande par ailleurs à la cour de prendre en compte un devis du 6 septembre 2005, d'un montant de 3 605 euros HT, correspondant à des travaux qu'elle aurait réalisés à ses frais, à la demande de la région Réunion. Néanmoins, en l'absence de toute précision sur les travaux dont s'agit, et à défaut d'avoir produit le devis dont elle fait état, ses conclusions en ce sens doivent être rejetées.

Quant à la réfection de la peinture du logement de fonction :

69. Si la société GTOI fait valoir que sa responsabilité ne saurait être engagée au titre de ces travaux qui ont été réalisés par la société CMOI, son sous-traitant, la demande ainsi formulée n'est pas assortie de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien fondé.

Quant au défaut d'étanchéité des menuiseries extérieures :

70. La société GTOI allègue qu'il incombait à l'entreprise sous-traitante des lots A10-2 et B10-2 de prendre toutes les dispositions nécessaires prévues au CCTP afin d'assurer l'étanchéité des menuiseries extérieures, qu'elle-même n'avait pas à s'immiscer dans l'exécution de ces travaux et que le désordre en cause résulte d'un défaut d'exécution relevant ainsi de la seule responsabilité de son sous-traitant. Néanmoins, la société GTOI est tenue de répondre envers le maître d'ouvrage des fautes commises par le sous-traitant auquel elle a fait appel. Par suite, et dès lors que, comme il a été dit au point 57, le désordre est dû principalement aux erreurs commises par l'entreprise Morel dans la réalisation du joint sous appui de baie, elle n'est pas fondée à soutenir que sa responsabilité ne peut être engagée à ce titre

Quant au dysfonctionnement des jalousies :

71. Il résulte de ce qui a été dit au point 32 ci-dessus que le dysfonctionnement des jalousies a une origine structurelle. Si l'expert a considéré que, à l'exception de la responsabilité incombant à la société Morel, dont doit répondre la société GTOI, au titre des défauts de montage, la responsabilité du fabricant, la société SEPALUMIC, devait être regardée comme pleine et entière s'agissant du dysfonctionnement affectant les jalousies elles-mêmes, cette circonstance n'est pas de nature à exonérer la société GTOI de sa responsabilité envers la région, mais lui permet simplement d'exercer, si elle s'y croit fondée, une action récursoire contre la société SEPALUMIC.

Quant à la location d'un échafaudage et aux travaux sur les toitures des logements de fonction :

72. La société GTOI soutient que les frais engagés par la région au titre, d'une part de la location d'un échafaudage afin d'inspecter la toiture du gymnase et, d'autre part, du remplacement des tôles de rives sur les toitures des logements de fonction, afin notamment de mettre fin aux fuites en toitures constatées dans ces logements, ne peuvent être mis à sa charge dès lors qu'il s'agit de " frais d'investigation engagés pour le compte de la région ". Une telle allégation, outre qu'elle est erronée, n'est pas de nature à écarter sa responsabilité dans la survenance des désordres dont s'agit.

S'agissant des conclusions d'appels en garantie présentées par la société GTOI :

73. Si la société GTOI demande à être intégralement garantie par les sociétés SODEGIS, Menighetti Programmation, " Georges Torcatis ", Socotec Réunion, Cotel Ingénierie et FEDT, ainsi que par la région Réunion, de toutes condamnations mises à sa charge, ses conclusions en ce sens, qui ne sont assorties d'aucune précision, ne peuvent qu'être rejetées.

S'agissant de la responsabilité de la société Socotec Réunion à l'égard de la région :

74. En vertu des conditions particulières figurant dans la convention de contrôle technique signée le 25 novembre 1997 entre la SODEGIS, agissant au nom et pour le compte de la région Réunion, et la société Socotec Réunion, la mission de type A assignée à cette dernière porte notamment sur " la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement ", s'agissant plus particulièrement des " ouvrages d'ossature ", et recouvre, d'une part, le contrôle des documents de conception et d'exécution, sur lesquels le contrôleur doit formuler des avis et, d'autre part, le " contrôle sur chantier ", dans le cadre duquel " le contrôleur technique examine, à l'occasion de ses visites de chantier, les ouvrages et éléments d'équipements soumis à son contrôle [et] (...) adresse au maître d'ouvrage son rapport final de contrôle ".

75. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport final de contrôle technique en date du 28 avril 2000, que la société Socotec Réunion a rendu plusieurs avis sur les documents de conception et d'exécution du marché et, notamment un avis du 5 mai 1999 portant sur la charpente du lycée (bâtiments a, b et c) et un avis du 7 mai 1999 portant sur la charpente des logements. La société Socotec, qui n'a pas produit ces avis, n'établit ni même n'allègue qu'elle y aurait préconisé des mesures particulières s'agissant de la protection des éléments des charpentes métalliques. A cet égard, il ressort des " fiches de synthèse des avis " en date des 7 décembre, 14 décembre et 30 décembre 1999, que si elle a formulé plusieurs remarques sur la charpente et la couverture des bâtiments, s'agissant notamment de la nécessité, d'une part, d'ajouter des sous-rives en débords de toiture afin d'éviter une corrosion prématurée des éléments métalliques, d'autre part, de prévoir une protection supplémentaire sur les éléments métalliques exposés directement à l'air extérieur, et, enfin, de prévoir une protection complémentaire contre la corrosion des chevilles type SPIT utilisées pour la fixation de la charpente, elle n'a en revanche formulé aucun avis ou recommandation sur l'importance de prévoir un complément anticorrosion sur les pannes métalliques devant supporter les tôles en aluminium de la couverture, ou sur l'absence de mention d'un tel complément dans le CCTP du lot A4 " Charpente métallique ". Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que sa responsabilité ne serait pas engagée au titre des désordres tenant à l'oxydation des charpentes métalliques et aux fuites en toitures.

76. En vertu des mêmes conditions particulières, la mission de type F qui lui a été assignée porte notamment sur la prévention des aléas découlant d'un mauvais fonctionnement des installations telles que " les installations (...) de chauffage, conditionnement, ventilation mécanique " et les " installations électriques intérieures (courants forts) ", et recouvre en premier lieu l'examen des documents de conception, pour lesquels elle adresse un rapport au maître d'ouvrage résumant ses avis sur les documents examinés. Dans le cadre de cette mission, il lui revenait d'alerter le maître de l'ouvrage sur les inconvénients résultant d'une installation en toiture des équipements de climatisation et du poste de transformation, au regard tant des risques accrus d'oxydation de leurs composants que des difficultés d'accessibilité pour les opérations régulières de maintenance et de réparation. Elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que sa responsabilité ne serait pas engagée au titre des désordres ayant affecté le poste de transformation et la centrale de climatisation.

77. Enfin, la société Socotec Réunion s'est vue confier, aux termes des conditions particulières, une mission de type SEI, définie dans les conditions spéciales comme portant notamment sur la prévention des aléas générateurs d'accidents corporels pouvant être causés par des installations ou équipements et, plus particulièrement, des " portes automatiques ". Or, les portails automatiques relèvent de cette catégorie d'installations et si la société Socotec Réunion se prévaut de l'article 5 des conditions générales, aux termes duquel sa mission " ne s'étend pas aux espaces verts et aménagements extérieurs ni aux équipements et aménagements spécifiques des activités professionnelles, notamment aux équipements mus mécaniquement ou manuellement tels que ponts-roulants, ponts-élévateurs, chaînes de convoyage, installations scéniques, manèges et attractions de loisirs ", il résulte des stipulations de l'article 1 de la convention de contrôle technique que les pièces qui la constituent sont, par ordre décroissant, les conditions particulières de la convention, les conditions spéciales visées dans celle-ci et les conditions générales. Aussi, la société Socotec Réunion n'est-elle pas fondée à soutenir que sa mission ne s'étendait pas aux portails automatiques. Dans ce cadre, il lui incombait notamment, tant au stade de l'examen des documents de conception, qu'à celui des documents d'exécution, d'attirer l'attention de la région sur les risques de dysfonctionnement résultant de la mise en oeuvre d'un mécanisme enterré pour actionner les portails.

78. Aux termes de l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Le contrôleur technique est soumis, dans les limites de la mission qui lui est confiée par le maître de l'ouvrage, à la présomption de responsabilité édictée par les articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du code civil (...) ". Si cet article a été complété par un deuxième alinéa, issu du VI de l'article 4 de l'ordonnance du 8 juin 2005, la société Socotec Réunion ne saurait utilement s'en prévaloir envers le maître de l'ouvrage, créancier de la garantie décennale, dès lors que, d'une part, ces dispositions ne limitent la responsabilité des contrôleurs techniques qu'à l'égard des autres constructeurs et que, d'autre part, l'article 5 de la même ordonnance ne les rend opposables qu'aux marchés, contrats ou conventions conclus après le 8 juin 2005. Par suite, la société Socotec Réunion n'est pas fondée à soutenir que les particularités de sa mission excluraient qu'elle puisse être condamnée solidairement envers le maître d'ouvrage à raison des désordres à la réalisation desquels elle a concouru.

S'agissant des conclusions d'appels en garantie présentées par la société Socotec Réunion :

79. La société Socotec Réunion demande à être garantie de toute condamnation prononcée à son encontre, tant en principal qu'en intérêts et en frais, par la région Réunion, la société SODEGIS, la société " Georges Torcatis ", la société FEDT, la société Cotel Ingénierie et la société GTOI. Néanmoins, ses conclusions d'appel en garantie ne peuvent être accueillies en tant qu'elles sont dirigées contre la région dès lors que celle-ci, envers laquelle est engagée la garantie décennale des constructeurs, ne peut être tenue de garantir un constructeur au titre d'une condamnation prononcée sur ce terrain. Par ailleurs, la SODEGIS a été mise hors de cause dans le présent litige. Enfin, et pour ce qui concerne les maîtres d'oeuvre et la société GTOI, les seuls arguments qu'elle avance, tenant à ce que l'expert " a stigmatisé la responsabilité de la maîtrise d'oeuvre sans aucune ambiguïté ", ne suffit pas à établir que ces parties auraient commis des fautes de nature à engager leur responsabilité envers elle. Par suite, les conclusions d'appel en garantie formées par la société Socotec Réunion ne peuvent être accueillies.

S'agissant de la responsabilité de la société Menighetti Programmation à l'égard de la région :

80. Comme il a été rappelé au point 10, il résulte de l'article 1792 du code civil que sont seuls responsables, envers le maître de l'ouvrage, des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, les personnes ayant la qualité de constructeur. La société Menighetti Programmation fait valoir que, compte tenu de sa mission, elle ne peut être assimilée à un constructeur au sens de ces dispositions. L'article 1792-1 du code civil définit toutefois le constructeur comme " tout architecte, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ", c'est-à-dire, outre les architectes, les techniciens ou personnes qui interviennent dans la conception ou l'exécution de l'ouvrage. En l'espèce, outre que la société Menighetti Programmation était liée à la région par un contrat de louage d'ouvrage au sens des dispositions de l'article 1792-1 du code civil, elle doit être regardée, en sa qualité de programmiste, comme ayant participé à la conception de l'ouvrage. Sa responsabilité vis-à-vis du maître d'ouvrage est dès lors susceptible d'être engagée sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil.

81. Il résulte par ailleurs de l'instruction que la société Menighetti Programmation a été chargée par la région Réunion, dans le cadre des études préalables à la construction du lycée Vincendo, de réaliser trois études dont une portait sur l'analyse du site. Elle est intervenue dans la phase de consultation, pour établir notamment le programme détaillé, lequel devait préciser plus particulièrement les caractéristiques techniques de l'ouvrage, s'agissant notamment des murs, sols, plafonds, éclairage, acoustiques, etc. Par suite, il lui revenait, dans le cadre de sa mission tenant tant à la conception du projet qu'à la phase de consultation des entreprises, d'alerter le maître de l'ouvrage sur la nécessité de tenir compte, dans le choix des matériaux et des options de construction, des spécificités climatiques du site et, notamment, de son exposition à des vents chargés d'embruns. Il ne ressort toutefois d'aucune pièce du dossier qu'elle aurait attiré l'attention de la région sur ce point qui, s'il peut paraître évident pour des constructeurs réunionnais habitués à cette contrainte, ne méritait pas moins d'être souligné.

82. Il résulte de ce qui précède que la société Menighetti Programmation n'est pas fondée à soutenir que sa responsabilité ne pouvait être engagée solidairement avec les autres constructeurs au titre de la garantie décennale pour ce qui concerne les désordres à raison desquels la région recherche sa responsabilité, à savoir ceux se rapportant à l'oxydation des charpentes métalliques.

S'agissant des conclusions d'appels en garantie présentées par la société Menighetti Programmation :

83. La société Menighetti Programmation demande à être garantie par les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Socotec Réunion, GTOI et SODEGIS de " toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle en principal, intérêts et frais au-delà de la proportion de 5 % retenue par l'expert ". Ces conclusions ne sont assorties d'aucun moyen et doivent par conséquent être rejetées.

Sur les frais d'expertise :

84. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens ".

85. Lorsqu'une expertise ou un constat effectué en application d'une décision du juge des référés se rattache à la détermination d'un préjudice dont l'indemnisation est demandée dans le cadre d'un recours au fond, les frais et honoraires y afférents sont compris dans les dépens de cette instance principale. Si, en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, ces frais sont en principe mis à la charge de la partie perdante, il est loisible à la formation de jugement statuant sur cette instance, au regard des circonstances particulières de l'affaire, de les mettre à la charge d'une autre partie ou de les partager entre les parties.

86. Il ressort des pièces du dossier que par une ordonnance du 17 décembre 2007, les frais d'expertise ont été liquidés et taxés à la somme de 45 473,44 euros TTC. Dans les circonstances de l'espèce, il convient de laisser à la charge de la région 10 % de ces frais et, par suite, de mettre solidairement à la charge des constructeurs la somme de 40 926 euros à ce titre.

Sur la requête n° 15BX02798 :

87. La cour statuant, par le présent arrêt, sur les conclusions de la requête de la SODEGIS tendant à l'annulation du jugement du 6 mars 2015, les conclusions de sa requête n° 15BX02798 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a dès lors pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

88. Dans les circonstances de l'espèce, la région Réunion versera à la SODEGIS la somme de 1 500 euros au titre de ces dispositions. Il convient par ailleurs de condamner solidairement les constructeurs à verser à la région, qui n'est pas la partie perdante dans le cadre de son appel provoqué, la somme de 5 000 euros au titre de ces mêmes frais. Enfin, les conclusions présentées au même titre par les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Cotel Ingénierie, Socotec Réunion, " Menighetti Programmation " et GTOI doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 15BX02798.

Article 2 : Les articles 1er, 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de La Réunion en date du 6 mars 2015 sont annulés.

Article 3 : Les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Socotec Réunion, Menighetti Programmation et GTOI sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 62 225 euros HT, augmentée de la TVA au taux de 8,5 %, au titre de l'oxydation des charpentes métalliques.

Article 4 : Les sociétés FEDT et GTOI sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 93 000 euros HT augmentées de la TVA au taux de 8,5 % au titre de l'affaissement du terre-plein.

Article 5 : Les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Socotec Réunion et GTOI sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 367 882 euros HT, augmentée de la TVA au taux de 8,5 %, au titre des fuites en toiture dans le lycée, la salle de restauration et le gymnase.

Article 6 : La société " Georges Torcatis " société GTOI est condamnée à verser à la région Réunion la somme de 3 180 euros HT, augmentée de la TVA au taux de 8,5 %, au titre de la reprise des peintures et du plafond du logement de fonction Ouest, et du remplacement des joints entre les tôles translucides et les supports du bâtiment CDI.

Article 7 : Les sociétés " Georges Torcatis " et GTOI sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 23 600 euros HT, augmentée de la TVA au taux de 8,5 %, au titre du défaut d'étanchéité des menuiseries extérieures.

Article 8 : La société GTOI est condamnée à verser à la région Réunion la somme de 51 043 euros HT, augmentée de la TVA au taux de 8,5 %, au titre du dysfonctionnement des jalousies, et les sommes de 6 800 euros HT et 9 870 euros HT, majorées de la TVA, au titre des bétons éclatés et des fissures infiltrantes.

Article 9 : Les sociétés " Georges Torcatis ", Cotel Ingénierie et Socotec Réunion, sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 5 850 euros HT, augmentée du montant de la TVA qui s'établit à 8,5 %, au titre de l'oxydation des éléments de la centrale de climatisation.

Article 10 : Les sociétés " Georges Torcatis ", Socotec Réunion et GTOI sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 10 800 euros HT, augmentée du montant de la TVA qui s'établit à 8,5 %, au titre des désordres affectant les portails du lycée.

Article 11 : Les sociétés " Georges Torcatis ", Cotel Ingénierie et Socotec Réunion sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 20 094 euros TTC au titre du changement des cellules du transformateur.

Article 12 : La société GTOI est condamnée à verser à la région Réunion la somme de 2 845,96 euros TTC au titre du remplacement des tôles de rives des logements de fonction.

Article 13 : Les sociétés " Georges Torcatis ", Cotel Ingénierie et Socotec Réunion sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 14 785 euros TTC au titre des frais engagés sur l'installation de climatisation.

Article 14 : Les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Socotec Réunion et GTOI sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 848,31 euros TTC au titre des frais d'échafaudages engagés aux fins d'inspecter la toiture du gymnase.

Article 15 : Les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Cotel Ingénierie, Socotec Réunion, Menighetti Programmation et GTOI sont solidairement condamnées à supporter les frais d'expertise pour un montant de 40 926 euros.

Article 16 : La société GTOI est condamnée, d'une part, à garantir intégralement la société " Georges Torcatis " de la condamnation à la somme de 1 500 euros HT mise à leur charge au titre des fuites en toiture dans le bâtiment CDI et, d'autre part, à garantir cette même société à concurrence de 85 % de la condamnation prononcée au titre des menuiseries extérieures par l'article 7 ci-dessus.

Article 17 : Les sommes visées aux articles 3 à 16 porteront intérêt au taux légal à compter du 30 novembre 2012, lesdits intérêts étant capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts au 30 novembre 2013, puis à chaque date anniversaire.

Article 18 : La région Réunion versera à la SODEGIS une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 19 : Les sociétés " Georges Torcatis ", FEDT, Cotel Ingénierie, Socotec Réunion, Menighetti Programmation et GTOI sont solidairement condamnées à verser à la région Réunion la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 20 : Le surplus des conclusions de l'ensemble des parties est rejeté.

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N° 15BX02042, 15BX02798


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP PIWNICA MOLINIE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 07/06/2016
Date de l'import : 15/06/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15BX02042
Numéro NOR : CETATEXT000032698635 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-06-07;15bx02042 ?
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