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25/04/2016 | FRANCE | N°14BX00985

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 25 avril 2016, 14BX00985


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...Bacar a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler la délibération du conseil Général de Mayotte n° 908/2012/CG du 4 septembre 2012 relative à la prise en charge, en faveur de plusieurs conseillers généraux, de leurs frais de déplacement pour des missions hors de Mayotte.

Par un jugement n° 1200520 du 19 décembre 2013, le tribunal administratif de Mayotte a annulé cette délibération.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire, enregistrée le 28 mars

2014, complétée par un mémoire ampliatif enregistré le 5 mai 2014, le département de Mayotte, rep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...Bacar a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler la délibération du conseil Général de Mayotte n° 908/2012/CG du 4 septembre 2012 relative à la prise en charge, en faveur de plusieurs conseillers généraux, de leurs frais de déplacement pour des missions hors de Mayotte.

Par un jugement n° 1200520 du 19 décembre 2013, le tribunal administratif de Mayotte a annulé cette délibération.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire, enregistrée le 28 mars 2014, complétée par un mémoire ampliatif enregistré le 5 mai 2014, le département de Mayotte, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 décembre 2013, qui a annulé la délibération du conseil Général de Mayotte n° 908/2012/CG du 4 septembre 2012 relative à la prise en charge, en faveur de plusieurs conseillers généraux, de leurs frais de déplacement pour des missions hors de Mayotte.

2°) de rejeter la demande de M. Bacar présentée devant le tribunal administratif de Mayotte ;

3°) de mettre à la charge de M. Bacar la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Philippe Delvolvé, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., représentant le département de Mayotte.

Considérant ce qui suit :

1. Par sa délibération n° 895/2012/CG en date du 4 septembre 2012, le conseil général de Mayotte a décidé de procéder à une modification du code général des impôts applicable à Mayotte. Le département de Mayotte relève appel du jugement du 19 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a annulé, à la demande de M. Bacar, conseiller général, cette délibération.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le département de Mayotte soutient que le tribunal administratif de Mayotte s'est fondé sur un moyen qui n'était pas soulevé par M. Bacar.

3. Aux termes de l'article L. 3121-18 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil général a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires du département qui font l'objet d'une délibération. " Aux termes de l'article L. 3121-19 du même code : " Douze jours au moins avant la réunion du conseil général, le président adresse aux conseillers généraux un rapport, sous quelque forme que ce soit, sur chacune des affaires qui doivent leur être soumises. / (...) Sans préjudice des dispositions de l'article L. 3121-18, en cas d'urgence, le délai prévu au premier alinéa peut être abrégé par le président sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. / Le président rend compte dès l'ouverture de la séance du conseil général, qui se prononce sur l'urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l'ordre du jour d'une séance ultérieure. ".

4. Pour annuler la délibération contestée, les premiers juges ont considéré qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que les élus aient disposé en temps utile, au regard des dispositions législatives instituant le délai abrégé, d'un rapport portant sur la question de la modification du code général des impôts, ni même que l'ordre du jour complémentaire leur ait été remis en temps utile. Le département de Mayotte soutient que M. Bacar n'a jamais soutenu que l'ordre du jour complémentaire n'avait pas été remis en temps utile aux conseillers généraux. Cependant, il ressort des pièces de première instance que M. Bacar a expressément soutenu devant les premiers juges, dans son mémoire ampliatif enregistré le 5 octobre 2012, que le projet de délibération n'a été soumis que le jour de la session du conseil général, et qu'elle " est intervenue sans rapport ni projet de délibération " et " sans communication de rapport préalable ". Il a également entendu contester le fait qu'un ordre du jour complémentaire comportant la délibération en litige leur ait été remis avant la séance du conseil général au cours de laquelle elle a été adoptée. Ainsi, les premiers juges ont statué sur un moyen soulevé par le demandeur de première instance et n'ont donc pas entaché leur jugement d'irrégularité.

Sur la légalité de la délibération n° 895/2012/CG en date du 4 septembre 2012 :

5. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, il ressort des pièces du dossier que la convocation remise le 21 août 2012 aux conseillers généraux de Mayotte en vue de la séance du 4 septembre 2012 comportait un ordre du jour sur lequel n'apparaissait pas la question de la prise en charge des frais de déplacement des élus pour des prochaines missions hors de Mayotte. Le département de Mayotte soutient que la procédure d'urgence a été mise en oeuvre à l'égard de cette délibération, que l'affaire a été examinée en commission le 30 août 2012 et qu'un ordre du jour complémentaire intégrant cette question a été " remis en mains propres aux conseillers généraux au moins un jour franc avant la séance publique ". Cependant, le département de Mayotte ne justifie nullement de la transmission aux élus de l'ordre complémentaire ou du rapport relatif à la délibération en litige avant la tenue de la réunion du conseil général du 4 septembre 2012. Le directeur des affaires juridiques et des assemblées a attesté le 30 octobre 2012 que " les conseillers généraux ont été convoqués afin d'examiner trois rapports qui leur ont été remis dans les délais légaux ". Cependant, les rapports en question portent sur les trois délibérations initialement inscrites à l'ordre du jour. Le compte rendu de la séance du 4 septembre 2012 indique, en outre, que " après l'ouverture de la séance ", le président a " proposé l'inscription de trois rapports à l'ordre du jour complémentaire, en insistant sur le caractère urgent de ceux-ci ". De tels éléments sont de nature à établir que l'ordre du jour a bien été complété le jour même de la séance et que les élus concernés n'ont reçu aucune information sur la délibération préalablement à celle-ci. Si, en appel, le département de Mayotte produit une attestation de M. D...B..., en date du 30 avril 2014, secrétaire général du conseil général de Mayotte, aux termes de laquelle il indique que " les élus du conseil général ont bien reçu le rapport portant sur la question de la prise en charge de frais de déplacement hors de Mayotte des élus du conseil général le 21 août 2012 ", une telle attestation, établie plus d'un an et demi après la réunion du conseil général en litige, et en contradiction avec les pièces du dossier, n'est pas de nature à établir la réalité de l'information suffisante prévue aux articles L. 3121-18 et L. 3121-19 du code général des collectivités territoriales. De plus, et contrairement à ce que soutient le département, une telle information dans les délais prévus par ces dispositions sur une délibération portant engagement de dépenses à la charge de la collectivité, constitue une garantie pour les élus. Dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal administratif de Mayotte a estimé que la délibération contestée était entachée d'illégalité.

6. Il résulte de ce qui précède que le département de Mayotte n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Mayotte a annulé la délibération du conseil général de Mayotte n° 908/2012/CG du 4 septembre 2012 relative à la prise en charge, en faveur de plusieurs conseillers généraux, de leurs frais de déplacement pour des missions hors de Mayotte.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. Bacar au titre des frais exposés par le département de Mayotte et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1 : La requête du département de Mayotte est rejetée.

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N° 14BX00985 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00985
Date de la décision : 25/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-01-02-01-03-01 Collectivités territoriales. Commune. Organisation de la commune. Organes de la commune. Conseil municipal. Délibérations. Délibérations intervenues à la suite d'une procédure irrégulière.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Philippe DELVOLVÉ
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : CABINET JORION AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-04-25;14bx00985 ?
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