Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F...A...a demandé au tribunal administratif de Saint-Denis d'annuler la décision du 25 juillet 2011 par laquelle le directeur du secrétariat général du siège du groupe La Poste lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans, dont six mois avec sursis et d'enjoindre à La Poste de le réintégrer dans ses fonctions et de reconstituer sa carrière.
Par un jugement n° 1200123 du 10 octobre 2013, le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 janvier 2014 et le 4 août 2015, M. A..., représenté par Me D...puis par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint-Denis ;
2°) d'annuler la décision du 25 juillet 2011 par laquelle le directeur du secrétariat général du siège du groupe La Poste lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans, dont six mois avec sursis, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux du 12 octobre 2011 ;
3°) d'enjoindre à La Poste de le réintégrer dans ses fonctions et de reconstituer sa carrière, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre la à la charge de La Poste la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;
- le décret n° 2010-191 du 26 février 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,
- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant La Poste.
Considérant ce qui suit :
1. M. F...A...a intégré le ministère des postes et télécommunications en 1976. A la suite de la réforme du service public des postes et télécommunications par la loi du 2 juillet 1990, il a choisi d'intégrer le corps de reclassification d'agent de maîtrise en 1993. A partir de 1994, il a occupé un emploi de conseiller, puis de conseiller financier à partir de 1998. En 2006, il a bénéficié d'une promotion dans le grade de " cadre de premier niveau " sur un poste de conseiller clientèle au Tampon (La Réunion). En 2009, des faits relatifs à des opérations financières irrégulières effectuées par M. A...pour le compte de l'association " Foyer du Sacré Coeur " dont il était le trésorier, ont été portées à la connaissance de La Poste, qui a déposé plainte avec constitution de partie civile contre celui-ci le 16 septembre 2010. Après procédure disciplinaire, une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans, dont six mois avec sursis, a été prise à son encontre le 14 avril 2011.E..., le directeur des opérations des ressources humaines, après avoir, le 25 juillet 2011, retiré la sanction a, le même jour, édicté une sanction identique. M. A...fait appel du jugement du tribunal administratif de Saint-Denis du 10 octobre 2013 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans, dont six mois avec sursis qui lui a été infligée le 25 juillet 2011 ainsi qu'à sa réintégration et à la reconstitution de sa carrière.
Sur la régularité du jugement :
2. M. A...fait valoir qu'il n'a pas eu le temps de produire avant la clôture de l'instruction, c'est-à-dire, en l'absence d'ordonnance de clôture, trois jours francs avant la tenue de l'audience le 12 septembre 2013, soit le 9 septembre, des observations en réplique au premier et unique mémoire en défense de La Poste, qui lui a été communiqué le 6 septembre 2013.
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le tribunal administratif de Saint-Denis a, le 8 avril 2013, adressé à La Poste sur le fondement de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, une mise en demeure de produire dans le délai d'un mois ses observations en réponse au recours de M.A..., enregistré le 3 février 2012. Ce courrier, qui a été notifié à La Poste le 15 avril 2013, rappelait en outre qu'en vertu de l'article R. 612-6 du même code, La Poste serait réputée avoir acquiescé aux faits, dès lors qu'elle ne produirait pas dans le délai imparti par la mise en demeure.
4. Il ressort également des pièces du dossier que, par des avis d'audience notifiés le 31 juillet 2013 à M. A...et le 2 août 2013 à La Poste, l'audience a été fixée au 12 septembre 2013. La Poste n'a, malgré la mise en demeure qui lui avait été faite, produit son mémoire en défense que le 6 septembre 2013, mémoire notifié ce même jour à M. A...E..., d'une part, alors que La Poste était réputée avoir acquiescé aux faits, il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal ne s'est pas fondé sur les écritures de La Poste pour rejeter la demande de M.A.... D'autre part, il appartenait à M.A..., s'il le jugeait utile, de produire des observations dans le délai de trois jours qui lui était imparti ou de solliciter de la juridiction le renvoi de l'audience. En outre, il était représenté à cette audience, alors que La Poste ne l'était pas, et son conseil a ainsi pu présenter à cette occasion l'ensemble des observations qu'appelait de sa part le mémoire en défense de La Poste. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, le principe du contradictoire n'a pas été méconnu. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit ainsi être écarté.
Sur les conclusions en annulation :
5. En premier lieu, lorsque l'autorité administrative retire une sanction infligée à un fonctionnaire et qu'elle édicte une nouvelle sanction à raison des mêmes faits, elle n'est pas tenue d'inviter l'intéressé à prendre à nouveau connaissance de son dossier ni de saisir à nouveau le conseil de discipline lorsque ces formalités ont été régulièrement accomplies avant l'intervention de la décision initiale. Il n'est pas contesté par M. A...que ces formalités ont été régulièrement accomplies avant l'édiction de la première sanction en date du 14 avril 2011. Il n'établit pas non plus qu'il y aurait eu un changement dans les circonstances de droit ou de fait entre le 14 avril et le 25 juillet 2011. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que M. A...n'était pas fondé à soutenir que la sanction prononcée le 25 juillet 2011 serait entachée d'un vice de procédure au seul motif que les formalités susmentionnées n'ont pas été à nouveau accomplies entre ces deux dates.
6. En deuxième lieu, la sanction litigieuse fait grief à M. A...d'avoir mis à profit ses fonctions pour effectuer des " détournements de fonds sur le compte-chèques d'une association au profit de tiers, par versements et retraits frauduleux sur un compte pivot, à l'insu du titulaire du compte ", d'avoir falsifié des signatures, d'avoir enregistré des opérations financières en dehors de la présence des clients et d'avoir utilisé des formules d'opérations signées par anticipation. M. A...conteste l'exactitude matérielle des seuls faits de détournements de fonds qui lui sont reprochés.
7. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier du rapport établi en 2009 par le service national d'enquêtes de La Poste que M. A...a effectué des opérations financières consistant en une mise à profit de ses fonctions pour effectuer des versements sur le compte de l'association " Foyer du Sacré Coeur ", association loi de 1901 dont l'activité est l'hébergement médical pour personnes âgées, par versements et retraits frauduleux sur un compte pivot à l'insu du titulaire du compte, des retraits étant effectués sur les livrets A des pensionnaires, suivis de versements sur le compte de l'association puis de retraits en espèces au profit de tiers. Il ressort également de ce rapport d'enquête que M. A...a reconnu avoir procédé à l'ensemble des opérations financières qui y sont décrites. Il a au demeurant été condamné à trois mois de d'emprisonnement avec sursis par le tribunal de grande instance de Saint-Pierre réuni en formation correctionnelle le 19 mars 2015, lequel a retenu à son encontre les chefs d'accusation d'usage de faux en écriture et d'abus de confiance, estimant que les " détournements reprochés sont caractérisés " et ce, même en l'absence de préjudice financier ou matériel ou d'enrichissement personnel. Dans ces conditions, M. A...ne conteste pas utilement la matérialité des faits en se bornant à faire valoir, pour soutenir qu'il n'avait pas commis de détournement de fonds au sens des dispositions de l'article 314-1 du code pénal, que l'association n'a pas porté plainte contre lui, qu'il n'était animé d'aucune intention malveillante, n'avait eu pour but que de faciliter la vie de l'association dans laquelle il était bénévole depuis 1992, n'avait poursuivi aucun but d'enrichissement personnel et que le jugement correctionnel précité n'avait pas retenu la qualification de " détournements de fonds ". Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la sanction contestée aurait été prononcée sur le fondement de faits matériellement inexacts, s'agissant des détournements de fonds qui lui sont reprochés.
8. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
9. Les faits qui viennent d'être décrits, ainsi que les faits de falsification de signatures, d'enregistrements d'opérations financières en dehors de la présence des clients et d'utilisation de formules d'opérations signées par anticipation dont M. A...ne conteste pas la matérialité, doivent être regardés comme constitutifs de manquements d'une particulière gravité aux obligations professionnelles qui incombent à un cadre de La Poste. Les circonstances, alléguées par l'intéressé, selon lesquelles ces pratiques seraient répandues, que les sommes en jeu seraient modiques, qu'il n'y avait pas d'intention frauduleuse de sa part, alors que ni La Poste ni aucun client n'ont subi de préjudice, qu'il ne poursuivait aucun but d'enrichissement personnel ou qu'il a toujours eu une carrière exemplaire, sont sans incidence sur la qualification juridique des faits (en tout état de cause, les faits de détournements de fonds justifiaient à eux seuls la sanction qui a été édictée). Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que l'autorité disciplinaire n'avait pas, en l'espèce, pris une sanction disproportionnée en décidant l'exclusion temporaire de M. A...pour une durée de deux ans dont six mois avec sursis.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A...n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent pas être accueillies.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A...sur ce fondement. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 500 euros que demande La Poste sur le même fondement.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : M. A...versera à La Poste la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 14BX00233