Vu la décision n° 360850 du 30 décembre 2014, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 15BX00072, par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, en premier lieu, annulé l'arrêt n° 11BX00970 du 10 mai 2012 de la cour administrative d'appel de Bordeaux qui a annulé, sur la requête de la commune de Biarritz, le jugement n° 0901094 du 22 février 2011 du tribunal administratif de Pau déchargeant la société anonyme Groupe Patrice Pichet de l'obligation de payer la somme de 30 451,56 euros correspondant au montant d'une participation pour non réalisation de deux places de stationnement, augmenté des frais de poursuite, et qui a rejeté les conclusions de cette société tendant au versement d'intérêts moratoires, en deuxième lieu, renvoyé l'affaire à la cour ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 février 2015, présenté pour la SAS Promotion Pichet, représentée par son représentant légal en exercice, venant aux droits de la SA Groupe Patrice Pichet, par Me Cornille, avocat, qui conclut au rejet de la requête de la commune de Biarritz, à la condamnation de cette collectivité à lui restituer la somme de 30 451,56 euros ainsi qu'à lui payer celle de 1 988 euros, à parfaire, au titre des intérêts moratoires à compter du 9 octobre 2008 et à mettre à la charge de cette commune une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2015 :
- le rapport de M. Jean-Michel Bayle, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public ;
- les observations de Me Fouchet, avocat de la société anonyme Groupe Patrice Pichet ;
1. Considérant que la société anonyme Groupe Patrice Pichet a obtenu, par arrêté du maire de la commune de Biarritz du 20 avril 2007, un permis de construire en vue du " changement de destination " d'un " local commercial " situé 9 avenue de Verdun, par l'" aménagement d'une agence immobilière (bureaux) " rendant nécessaires les " réaménagements intérieurs, modification des vitrines, ravalement " dudit local ; qu'au titre des dispositions financières de ce permis de construire, le maire a mis à la charge de la pétitionnaire, sur le fondement de l'article UA 12 du plan local d'urbanisme, une participation pour non réalisation de deux aires de stationnement, d'un montant total de 29 564,56 euros ; que, pour obtenir le règlement de cette somme, l'autorité municipale a émis à l'endroit de la SA Groupe Patrice Pichet un titre exécutoire le 7 juin 2007 ; qu'à défaut de paiement dans le délai indiqué, le comptable du Trésor a adressé à cette société, le 21 septembre 2008, un commandement de payer la somme précitée, outre celle de 887 euros au titre des frais de poursuite, soit un total de 30 451,56 euros ; que la SA Groupe Patrice Pichet a réglé cette somme le 9 octobre 2008, mais a formulé, par lettre du 27 octobre 2008 reçue le 31 octobre, une réclamation contre la mise à sa charge de ladite participation, auprès de la commune de Biarritz ; que n'ayant obtenu de réponse explicite, elle a saisi le tribunal administratif de Pau qui lui a accordé la restitution de la somme de 30 451,56 euros, par jugement du 22 février 2011 ; que, toutefois, la présente cour a, par arrêt du 10 mai 2012, annulé ce jugement, remis la somme en litige à la charge de la SA Groupe Patrice Pichet et rejeté le recours incident de celle-ci tendant au paiement d'intérêts moratoires ; que, sur pourvoi de cette dernière, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, par décision du 30 décembre 2014, annulé l'arrêt susmentionné de la cour et renvoyé l'affaire devant la cour ; que la SAS Promotion Pichet, qui vient aux droits de la SA Groupe Patrice Pichet, demande qu'il soit enjoint à la commune de Biarritz de lui restituer la somme de 30 451,56 euros, augmentée d'un montant de 1 988 euros, à parfaire, au titre d'intérêts moratoires ;
Sur l'appel principal :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande devant les premiers juges :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, auquel les dispositions de l'article R. 332-23 du code de l'urbanisme, de nature règlementaire, ne font pas obstacle : " (...) 2° L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite " ; qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant une juridiction administrative, d'établir la date à laquelle la décision attaquée a été régulièrement notifiée à l'intéressé ;
3. Considérant que la commune de Biarritz soutient que l'action engagée le 26 mai 2009 par la SA Groupe Patrice Pichet devant le tribunal administratif de Pau aux fins de restitution de la somme de 30 451,56 euros était irrecevable, comme étant tardive, pour avoir été présentée au-delà du délai de deux mois prévu par les dispositions précitée de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ; que, toutefois, elle n'établit pas la date de notification à cette société, du titre de recette rendu exécutoire par le maire de Biarritz le 7 juin 2007 pour le paiement de la participation en litige ; qu'elle ne justifie pas davantage de la date de notification du commandement de payer adressé à la SA Groupe Patrice Pichet le 21 septembre 2008 par le comptable du Trésor ; qu'en tout état de cause, le délai de recours a été prorogé par la réclamation formulée par ladite société auprès du maire de Biarritz le 27 octobre 2008, reçue le 31 octobre ; que l'action engagée relevant du contentieux de pleine juridiction, un nouveau délai de recours contentieux ne pouvait courir en l'absence de décision expresse de rejet de cette réclamation ; qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par la commune de Biarritz à la demande devant les premiers juges ne peut qu'être écartée ;
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " (...) Les règles édictées dans le présent article peuvent être différentes, dans une même zone, selon que les constructions sont destinées à l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à l'exploitation agricole ou forestière ou à la fonction d'entrepôt.... " ; qu'aux termes de l'article UA 12 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Biarritz : " Pour les changements d'affectation de locaux autres que les hôtels et les résidences de tourisme, la reconstruction de locaux après sinistre, les aménagements et les extensions de bâtiment, il ne sera exigé de places de stationnement que pour les besoins nouveaux engendrés par les projets, à moins que le nombre des aires existantes soit supérieur aux besoins existants. / Nombre d'aires de stationnement : (...) e - commerces, - 1 place pour 60 m2 de surface hors oeuvre nette, avec au minimum une place par commerce. / f - bureaux, services (y compris les agences bancaires, bureaux d'assurance), restaurants, - 1 place pour 30 m2 de surface hors oeuvre nette, avec un minimum d'une place par activité. / g - entrepôts, usines, dépôt, - 1 place pour 100 m2 de surface hors oeuvre nette avec un minimum d'une place par activité ; / (...) j - autres catégories : la détermination du nombre d'aires de stationnement applicable aux constructions dont la catégorie n'est pas désignée ci-dessus, sera définie par référence à la catégorie la plus proche énoncée au règlement " ; qu'en vertu de ces dispositions, le changement d'affectation de locaux n'impose, hors cas étrangers au permis de construire du 20 avril 2007, la réalisation de places de stationnement que pour les besoins nouveaux engendrés par les projets, à moins que le nombre des aires de stationnement existantes soit supérieur aux besoins ;
5. Considérant que le maire de Biarritz a estimé, dans ledit permis, que, compte tenu de l'activité de traiteur qui y était exercée, le local entrait initialement dans la catégorie " commerces ", ce qui limitait l'obligation de créer des aires de stationnement, aux besoins engendrés par le projet supérieurs à trois places ; qu'il a considéré, par ailleurs, que l'activité d'agence immobilière à laquelle la SA Groupe Patrice Pichet entendait affecter le local transformé relevait de la catégorie " bureaux, services (y compris les agences bancaires, bureaux d'assurance), restaurants " définie par le f) de l'article UA 12 ; que la règle applicable à cette catégorie imposait, eu égard à la surface du local, l'aménagement de cinq places de stationnement ; que le maire de Biarritz a ainsi évalué les besoins nouveaux à deux places de stationnement et a fixé en conséquence, dans le permis, le montant de la participation due par la pétitionnaire ; que, s'il a admis que l'activité de traiteur devait s'analyser comme un commerce au sens du e) de l'article UA 12 du plan local d'urbanisme, le tribunal administratif a estimé, en revanche, que l'activité d'agence immobilière entrait dans la même catégorie, non dans celle définie par le f), et que, par suite, cette dernière activité n'engendrait aucun besoin nouveau justifiant l'assujettissement de la pétitionnaire à une participation pour non réalisation d'aires de stationnement ;
6. Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ; que la commune de Biarritz demande à la cour, dans sa requête, de substituer au motif initial de l'assujettissement de la SA Groupe Patrice Pichet à la participation en litige, un nouveau motif tiré de ce que, d'une part, ledit local entrait initialement dans la catégorie " entrepôts, usines, dépôt " prévue par le g) de l'article UA 12 du plan local d'urbanisme compte tenu de l'activité artisanale qui y était exploitée, d'autre part, que l'activité d'agent immobilier doit être assimilée à une activité commerciale au sens du e) de cet article UA 12, et que, par suite, l'installation de l'agence de la SA Groupe Patrice Pichet rendait nécessaire la création d'une aire de stationnement ;
7. Considérant que, d'une part, il résulte de l'instruction que le local en cause comprenait certes une zone de stockage pour les produits nécessaires à l'activité et un laboratoire pour la préparation des plats ; que, pour autant, l'exercice du métier de traiteur dans un local de seulement 162,70 mètres carrés de surface hors oeuvre nette comportant un espace pour la vente sur place, qui correspond à celui d'un commerce de détail, ne saurait être analysé comme une activité d'entrepôt ou de dépôt, ni comme celle d'une usine qui doit être entendue, au regard des dispositions précitées de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme, comme se rapportant à l'industrie ; que, dans ces conditions et contrairement à ce que soutient la commune de Biarritz, l'activité antérieurement exploitée dans le local concerné relève de la catégorie " commerces " pour l'application de l'article UA 12 du plan local d'urbanisme ;
8. Considérant que, d'autre part, le projet de la société pétitionnaire tendait à la transformation de ce local en agence immobilière, qui se caractérise par une activité d'intermédiaire pour l'achat, la souscription ou la vente d'immeubles comme de fonds de commerce ; que le projet comporte d'ailleurs trois bureaux de vente aménagés autour d'un vaste espace commercial ; que, s'il prévoit également un bureau pour le directeur de l'agence, un local affecté à la documentation et un autre aux archives, ces espaces ne sont pas détachables de l'activité commerciale que poursuit une telle agence ; qu'ayant ainsi une nature commerciale, comme le fait valoir la SAS Promotion Pichet, ledit projet ne créait aucun besoin nouveau par rapport à l'exploitation antérieure ; que le projet de la SA Groupe Patrice Pichet n'imposait donc pas la création de places de stationnement ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Biarritz n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a déchargé la SA Groupe Patrice Pichet de l'obligation de payer la participation qui était mise à sa charge ;
Sur le recours incident :
10. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite du commandement de payer du 21 septembre 2008, la SA Groupe Patrice Pichet a réglé au comptable public la somme réclamée de 30 451,56 euros, par chèque du 9 octobre 2008 ; que, toutefois, elle a obtenu la décharge de l'obligation de payer cette somme par jugement du tribunal administratif en date du 22 février 2011, qui a prescrit à la commune de Biarritz de lui restituer ladite somme ; que la SAS Promotion Pichet ne soutient pas que la commune de Biarritz se serait abstenue d'exécuter cette injonction ; que, si la présente cour a remis la participation en litige à la charge de la SA Groupe Patrice Pichet, par arrêt du 10 mai 2012, la SAS Promotion Pichet ne justifie pas que la somme en cause a été de nouveau payée au comptable public ; que, dans ces conditions, les conclusions de la SAS Promotion Pichet tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de lui rembourser la somme dont s'agit ne peuvent être accueillies ;
11. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de ce qui précède que la SAS Promotion Pichet peut obtenir les intérêts moratoires sur le montant réglé seulement pour la période courant du 31 octobre 2008, date de réception de la réclamation de la SA Groupe Patrice Pichet contre le titre exécutoire du 7 juin 2007, jusqu'à la date à laquelle, à la suite du jugement, le remboursement a été crédité sur les comptes de cette dernière société ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SAS Promotion Pichet la somme dont la commune de Biarritz demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la SAS Promotion Pichet formulées sur ce fondement ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Biarritz est rejetée.
Article 2 : La commune de Biarritz versera à la SAS Promotion Pichet, venant aux droits de la SA Groupe Patrice Pichet, les intérêts au taux légal sur la somme dont cette dernière a été déchargée, pour la période courant du 31 octobre 2008 à la date à laquelle les comptes de la SA Groupe Patrice Pichet ont été crédités du remboursement.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la SAS Promotion Pichet, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, est rejeté.
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N° 15BX00072