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08/06/2015 | FRANCE | N°14BX01438

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 08 juin 2015, 14BX01438


Vu la requête enregistrée par télécopie le 14 mai 2014 et régularisée par courrier le 30 juin suivant, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par Me A...;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204336 du 13 mars 2014 du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 octobre 2012 par laquelle le directeur-adjoint du travail de l'unité territoriale de la Gironde de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Aquitain

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Vu la requête enregistrée par télécopie le 14 mai 2014 et régularisée par courrier le 30 juin suivant, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par Me A...;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204336 du 13 mars 2014 du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 octobre 2012 par laquelle le directeur-adjoint du travail de l'unité territoriale de la Gironde de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Aquitaine a autorisé son licenciement de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) " Bois Gramond ", situé à Eysines, relevant de l'association pour le développement et la gestion des équipements sociaux, médico-sociaux et sanitaires (ADGESSA) ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'ADGESSA et de l'Etat les sommes de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2015 :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

- les observations de Me Meliande, avocat de l'association pour le développement et la gestion des équipements sociaux, médico-sociaux et sanitaires (ADGESSA) ;

1. Considérant que, le 10 septembre 2012, l'association pour le développement et la gestion des équipements sociaux, médico-sociaux et sanitaires (ADGESSA), qui gère principalement des établissements pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), a demandé au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Aquitaine d'autoriser le licenciement de Mme C...B..., membre du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), recrutée le 20 août 2009 en qualité d'agent de service logistique (ASL) au sein de l'EHPAD " Bois Gramond ", situé à Eysines ; que Mme B...fait appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 mars 2014 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 octobre 2012 par laquelle le directeur-adjoint du travail de l'unité territoriale de la Gironde de la DIRECCTE a autorisé son licenciement pour inaptitude médicale ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 4624-1 de ce code, qui est applicable lorsque le médecin du travail apprécie l'aptitude du salarié à reprendre un emploi approprié en application des dispositions précitées de l'article L. 1226-2 du même code : " En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail. " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 1226-2 du code du travail que le médecin du travail doit indiquer, dans les conclusions écrites qu'il rédige à l'issue de visites médicales de reprise, les considérations de fait de nature à éclairer l'employeur sur son obligation de proposer au salarié un emploi approprié à ses capacités et notamment les éléments objectifs portant sur ces capacités qui le conduisent à recommander certaines tâches en vue d'un éventuel reclassement dans l'entreprise ou, au contraire, à exprimer des contre-indications ; qu'une telle obligation, qui ne contraint pas le médecin à faire état des considérations médicales qui justifient sa position, peut être mise en oeuvre dans le respect du secret médical ; qu'elle s'impose également à l'inspecteur du travail ou au ministre du travail le cas échéant, lorsque celui-ci, en cas de difficulté ou de désaccord, est amené à décider de l'aptitude professionnelle du salarié ;

4. Considérant, en premier lieu, que le législateur a ainsi entendu définir entièrement les règles de motivation qui s'appliquent aux décisions du médecin du travail et, le cas échéant, de l'inspecteur du travail ou du ministre du travail se prononçant sur l'aptitude d'un salarié à la reprise de son poste à la suite d'une maladie non professionnelle ; que, par suite, ces décisions sont soumises, en matière de motivation, aux seules prescriptions de l'article L. 1226-2 du code du travail, à l'exclusion de l'application des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'il en résulte que la décision de l'inspecteur ou du ministre du travail se prononçant sur l'aptitude d'un salarié doit comporter les considérations de fait propre à éclairer l'employeur et le salarié sur les fonctions que ce dernier serait susceptible d'exercer au sein de l'entreprise ; qu'il ressort des pièces du dossier, comme l'ont déjà relevé les premiers juges, que la décision du directeur-adjoint du travail de l'unité territoriale de la Gironde de la DIRECCTE, en date du 5 octobre 2012, est motivée en droit par référence au code du travail, et notamment à ses articles L. 1226-2, L. 2411-5, L. 2411-13 et R. 2421-8 et, en fait, par référence à l'avis émis par le médecin inspecteur du travail et aux éléments recueillis au cours de l'enquête contradictoire ; que la décision mentionne la convention collective applicable, la consultation du comité d'établissement et des délégués du personnel, l'effort infructueux de reclassement et l'absence de lien entre le licenciement et le mandat exercé par la salariée ; que, dès lors, la décision contestée ne méconnaît pas les dispositions des articles L. 1226-2 et R. 2421-5 du code du travail ; que Mme B...ne saurait utilement soutenir que la motivation de la décision du 5 octobre 2012 méconnaîtrait la circulaire du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 30 juillet 2012 DGT n° 07/2012 relative aux décisions administratives en matière de rupture ou de transfert du contrat de travail des salariés protégés publiée au bulletin officiel du ministère laquelle n'a, en tout état de cause, pas de valeur réglementaire ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le médecin du travail a indiqué, dans le cadre de ses fiches de visite des 12 juin et 26 juin 2012, que Mme B... était apte à reprendre son travail uniquement en poste de nuit ; que ce même praticien a rendu un nouvel avis d'inaptitude similaire le 2 juillet 2012, au titre de la première visite de reprise ; qu'à la suite de ces trois avis d'inaptitude à un travail d'ASL de jour, l'EHPAD " Bois Gramond ", relevant de l'association ADGESSA, a sollicité les conclusions écrites du médecin du travail en vue du reclassement de la salariée le 12 juillet 2012 ; que ce praticien a conclu, à la suite de la visite d'entreprise pour reclassement du 12 juillet " qu'il existe dans votre entreprise un poste de travail de nuit compatible avec les capacités physiques restantes de travail de MmeB... " ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'ADGESSA n'aurait pas, au titre de son obligation de recherche de reclassement, sollicité les conclusions écrites du médecin du travail après le deuxième avis d'inaptitude doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si les préconisations du médecin du travail étaient d'affecter Mme B...sur un poste d'agent de service de nuit en excluant toute autre solution de reclassement, l'employeur, qui en matière de recherche de reclassement, est tenu à une obligation de moyens et non de résultats, n'est tenu ni de créer un poste de travail spécifique pour un salarié en situation d'inaptitude ni de proposer des permutations aux autres salariés ; que néanmoins, l'association a, d'une part, interrogé tous ses établissements qui lui ont fait savoir qu'aucun poste vacant ne correspondait à la formation de la requérante et, d'autre part, a proposé aux ASL de nuit des permutations avec un travail de jour, proposition qui n'a pas été agréée ; que dans ces conditions, dès lors que l'aménagement du poste actuel de la salariée ne pouvait être envisagé et qu'aucun poste correspondant à l'aptitude de Mme B...n'était vacant, compte tenu de la petite taille de la structure, le moyen tiré de ce que l'ADGESSA n'aurait pas tenté de proposer à Mme B...un poste aménagé ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu qu'à la suite du quatrième avis d'inaptitude du médecin du travail du 17 juillet 2012, effectué au titre de la deuxième visite de reprise, mentionnant que Mme B...était " inapte à la reprise au poste habituellement occupé de jour, mais reste apte à occuper un poste d'agent des services logistiques de nuit ", l'ADGESSA a, le 18 juillet 2012, adressé des courriels à l'ensemble de ses différents établissements afin de rechercher un emploi compatible avec les capacités physiques de la salariée et les préconisations du médecin du travail ; qu'elle a également, comme cela a été dit, proposé des permutations aux agents de services travaillant de nuit sur des postes de jour ; que par suite, le moyen tiré de ce que l'ADGESSA ne se serait pas livrée à une recherche effective et sérieuse de postes compatibles avec l'état de santé de la requérante et n'aurait ainsi pas satisfait à son obligation de recherche de reclassement doit être écarté ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que Mme B...fait valoir que l'employeur aurait dû lui réserver le poste de veilleur de nuit vacant en juin 2012, dès lors qu'il était informé, à cette date, de son inaptitude à travailler de jour et de son aptitude, reconnue par le médecin du travail, pour un travail de nuit ; que, toutefois, seul l'examen, pratiqué par le médecin du travail dont doit bénéficier le salarié à l'issue des périodes de suspension lors de la reprise du travail, met fin à la période de suspension du contrat de travail ; qu'en l'espèce, les fiches médicales d'aptitude établies par le médecin du travail les 12 et 26 juin 2012, préalablement à la reprise du travail, d'ailleurs dénommées de " pré-reprise du travail ", ne constituent pas la visite de reprise qui, seule, met fin à la période de suspension du contrat de travail ; qu'il suit de là, qu'en juin 2012, alors même que le médecin du travail avait estimé que l'intéressée était apte à occuper un poste d'agent de services logistiques de nuit, l'employeur n'était pas tenu de proposer à la requérante le poste de veilleur de nuit alors vacant, dès lors que la visite de reprise n'ayant pas encore eu lieu, la période de suspension du contrat de travail n'avait pas pris fin ; que le poste de veilleur de nuit sollicité par Mme B...n'étant plus vacant à l'issue des visites de reprise des 2 et 17 juillet 2012, le moyen tiré de ce que ce poste devait lui être réservé pour son reclassement doit être écarté ;

9. Considérant, en dernier lieu, que si Mme B...soutient que la demande d'autorisation de licenciement était en lien avec son mandat, ce moyen n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors au demeurant que le directeur-adjoint du travail de l'unité territoriale de la Gironde de la DIRECCTE a, dans la décision contestée, explicitement relevé l'absence de lien entre la procédure et le mandat détenu par la salariée et a donc examiné l'éventualité d'un tel lien ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat et de l'ADGESSA, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, les sommes que demande Mme B...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'association ADGESSA sur le même fondement ;

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'association ADGESSA sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 14BX01438


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX01438
Date de la décision : 08/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07 Travail et emploi. Licenciements.


Composition du Tribunal
Président : M. JOECKLÉ
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : BISIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-06-08;14bx01438 ?
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