Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2014, présentée pour Mme A...C...B..., demeurant..., par Me Lamazière, avocat ;
Mme C...B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1402445 du 24 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 19 mai 2014 par lequel le préfet de la Dordogne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord du 9 octobre 1987 entre la République française et le royaume du Maroc en matière de séjour et de l'emploi ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
Vu le code de justice administrative ;
L'affaire ayant été dispensée de conclusions sur proposition du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2015 :
- le rapport de M. Paul-André Braud, premier conseiller ;
1. Considérant que Mme C...B..., ressortissante marocaine née en 1939, est entrée en France le 21 février 2012 sous couvert d'un visa de court séjour " ascendant non à charge " à entrées multiples d'une durée de 90 jours délivré par les autorités consulaires françaises à Casablanca ; qu'elle a bénéficié d'un titre de séjour en France en qualité d'étranger malade qui expirait le 6 janvier 2014 ; qu'elle relève appel du jugement n° 1402445 du 24 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Dordogne en date du 19 mai 2014 lui refusant le renouvellement de son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;
Sur la légalité de l'arrêté :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes même de l'arrêté en litige que le préfet, en décrivant les conditions du séjour en France de MmeB..., la teneur de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et ses attaches familiales en France et au Maroc, n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et familiale ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable aux ressortissants marocains : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11º) A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) ; Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en a fait la demande sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays de renvoi ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;
5. Considérant que le médecin de l'agence régionale de santé, dans son avis du 11 mars 2014 dont le contenu est conforme aux dispositions précitées de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, a estimé que le défaut de prise en charge médicale de Mme C...B..., qui souffre d'un diabète non insulinodépendant ayant entraîné une cécité d'un oeil et d'une cardiopathie ayant nécessité la pose d'un stimulateur cardiaque, ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé et qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine ; que les certificats médicaux que Mme B...produit indiquant notamment un état de santé général assez satisfaisant, l'absence d'anomalies à la suite d'un examen clinique ou la nécessité d'un suivi régulier ne permettent pas de remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé sur ces deux points ; que ces certificats ne révèlent pas, contrairement à ce qu'elle soutient, une aggravation de cet état ; qu'il n'est par suite pas établi que le préfet de la Dordogne aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de renouveler le titre de séjour de Mme B...;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'en faisant état dans sa requête des éléments relatifs à sa situation familiale et en visant l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, Mme C...B...doit être regardée comme soulevant le moyen tiré de la méconnaissance de cet article, aux termes duquel : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (... ) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;
7. Considérant que Mme C...B...fait valoir qu'elle est veuve depuis 2007, que les affections dont elle souffre sont lourdes et nécessitent la présence de ses enfants qui résident en France et qui l'aident dans les actes de la vie courante, que son fils qui vit à Casablanca est handicapé et ne peut s'occuper d'elle, et que ses deux filles qui résident au Maroc, lesquelles sont sans emploi et élèvent des enfants, sont dans l'incapacité matérielle de la prendre en charge ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que Mme C...B...est entrée en France en 2012 ; que si quatre de ses enfants, dont au moins une a acquis la nationalité française, résident en France, elle n'est pas dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine où résident, ainsi qu'il a été dit, trois de ses enfants et où elle a vécu soixante-douze ans ; qu'il n'est pas établi que ses filles divorcées ne pourraient la prendre en charge ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la décision de refus de séjour ne peut être regardée comme ayant porté au droit de Mme C...B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que le préfet de la Dordogne n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées ;
8. Considérant enfin que Mme C...B...ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de son recours contre la décision de refus de séjour qui lui a été opposée par le préfet de la Dordogne, qui n'implique pas par elle-même son éloignement à destination d'un pays déterminé, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant que Mme C...B..., en invoquant " des données personnelles, familiales et sanitaire, qui prohibent un éloignement du territoire en l'état actuel de sa santé " doit être regardée comme soulevant, d'une part, la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lesquelles : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " et d'autre part, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
10. Considérant que la requérante n'établit pas que, contrairement à ce qu'a estimé le médecin de l'agence régionale de santé, son état de santé ne lui permettrait pas de voyager sans risque vers son pays d'origine ; que, pour les motifs précédemment exposés au point 5, Mme C...B...ne peut être regardée comme entrant dans le champ d'application des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté ;
11. Considérant que, pour les motifs énoncés au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit également être écarté ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
12. Considérant que Mme C...B...n'établit pas qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Maroc ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi méconnaîtrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...B...est rejetée.
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No 14BX03355