Vu la requête, enregistrée le 29 août 2013, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par Me A...;
M. C...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1000611 du 25 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Fontenilles soit condamnée à lui verser la somme de 68 385,50 euros en réparation des préjudices corporels et matériels subis à la suite de l'accident de la circulation dont il a été victime le 12 novembre 2006 sur le chemin de Soulery, et la somme de 3 000 euros pour la " résistance abusive " dont cette commune a fait preuve en refusant de l'indemniser ;
2°) de condamner la commune de Fontenilles à lui verser ces sommes ;
3°) de mettre à la charge de cette commune une somme de 5 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2015 :
- le rapport de Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;
- et les observations de Me Detre, avocat de la commune de Fontenilles ;
1. Considérant que M.C..., qui circulait à motocyclette le 12 novembre 2006, vers 19 heures, sur le chemin de Soulery situé sur le territoire de la commune de Fontenilles, a heurté un talus de terre fermant cette voie et a été grièvement blessé ; qu'il relève appel du jugement n° 1000611 du 25 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Fontenilles soit condamnée à lui verser la somme de 68 385,50 euros en réparation des préjudices corporels et matériels subis à la suite de cet accident et la somme de 3 000 euros au titre de la résistance abusive de cette commune à faire droit à sa demande indemnitaire ; que la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Garonne demande à la cour de condamner la commune de Fontenilles à lui rembourser les débours exposés pour le compte de son assuré, qui se chiffrent à la somme de 50 756,52 euros, et à lui payer la somme de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'enfin, la mutuelle d'assurance MAPA sollicite la condamnation de la commune à lui verser la somme de 1 664,68 euros en remboursement des frais de santé exposés au bénéfice de M. C...pour la période du 13 novembre 2006 au 23 janvier 2009, date à laquelle ses blessures se sont consolidées ;
Sur la recevabilité des conclusions de la Mutuelle d'assurance MAPA :
2. Considérant que ces conclusions n'ont pas été présentées par ministère d'avocat, en méconnaissance de l'article R.811-7 du code de justice administrative ; que par suite, elles ne sont pas recevables ;
Sur la responsabilité de la commune de Fontenilles :
3. Considérant qu'il appartient à la victime d'un dommage survenu à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public d'apporter la preuve du lien de causalité entre l'ouvrage public dont elle était usager et le dommage dont elle se prévaut ; que la collectivité en charge de l'ouvrage public peut s'exonérer de sa responsabilité en rapportant la preuve soit de l'entretien normal de l'ouvrage, soit de ce que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C...a été victime d'une chute sur la chaussée le 12 novembre 2006, alors qu'il circulait à motocyclette sur le chemin de Soulery qui permettait autrefois de relier la route de Cantalauze (RD 68A) à la route de Fonsorbes (D 68), à Fontenilles ; qu'il est constant que cette chute était consécutive au fait qu'il a percuté une butte de terre barrant la quasi-totalité de la chaussée ; que M. C...fait valoir que cette butte de terre n'avait pas fait l'objet d'une signalisation adéquate permettant d'alerter l'usager de sa présence et qu'elle n'était pas visible de nuit à défaut d'avoir été éclairée ; qu'il s'appuie, pour étayer ses allégations, sur le constat d'huissier établi le 19 décembre 2006, soit un mois après l'accident, les photographies annexées audit constat, ainsi que sur l'attestation d'un voisin immédiat du lieu de l'accident ;
5. Considérant d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la commune avait placé, à l'entrée du chemin de Soulery, un panneau de signalisation " voie en impasse " ; que ce panneau, s'il devait inciter les automobilistes qui empruntaient cette voie à renforcer leur vigilance, ne pouvait leur permettre, alors qu'il se situait à 600 mètres de la butte de terre coupant ce chemin, de déterminer à quelle distance de la voie se situait l'obstacle ; que si la commune de Fontenilles soutient que la butte de terre était visible par un usager normalement attentif, il ressort cependant, tant du témoignage d'une personne dont l'habitation jouxte le lieu de l'accident, que du constat d'huissier établi le 19 décembre 2006, qu'à l'heure où est survenu l'accident, il faisait " nuit noire " et qu'en l'absence d'éclairage de la butte nonobstant des habitations situées à moins de 50 mètres, celle-ci était invisible ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'un panneau réfléchissant " cédez le passage à 50 mètres " se situait de l'autre côté de la butte par rapport au sens de la marche de la motocyclette, attirant le regard et laissant penser que la voie se poursuivait sans obstacle jusqu'à lui ; que d'ailleurs, postérieurement à cet accident, la commune de Fontenilles a modifié la signalisation et procédé à l'éclairage de la voie au droit de la butte et à la mise en place de panneaux réfléchissants sur la butte elle-même ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'absence de signalisation adaptée au risque que pouvait présenter pour les usagers cette butte de terre étendue au milieu de la voie, c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré que la commune de Fontenilles ne pouvait être regardée comme apportant la preuve de l'entretien normal de la voie ;
6. Considérant d'autre part, que M. C...fait valoir que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il n'avait commis aucune imprudence de nature à exonérer la commune de sa responsabilité ; que la commune de Fontenilles ne saurait lui reprocher une connaissance suffisante des lieux dès lors qu'il résulte de l'instruction qu'occupant un emploi à Argelès-sur-Mer, il ne résidait plus à Fontenilles au moment de la mise en place de la butte, quelques mois auparavant, et n'en avait donc pas été informé ; qu'il ne résulte pas non plus de l'instruction que l'intéressé aurait roulé à une vitesse excessive au moment de percuter cet obstacle sur la voie ; qu'en outre, et contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, il n'aurait pu emprunter le passage de deux mètres situés à l'extrémité de ce talus végétal, et ainsi l'éviter, dans la mesure où des roches étaient disposées sur ce passage afin d'en restreindre l'usage aux riverains circulant à pied ; que toutefois, la présence d'un panneau " voie sans issue " à l'entrée du chemin aurait dû inciter M. C...à une particulière vigilance ; que si ce dernier fait valoir que ce panneau était difficilement visible pour un usager empruntant ce chemin par la droite, en quittant la route de Cantalauze, il ressort cependant des photographies versées au dossier que la visibilité de ce panneau n'était pas obstruée par la présence d'un abribus ni d'arbres, et que compte tenu du virage très serré à droite que devaient effectuer les usagers empruntant ce chemin dans le même sens que le requérant, ils devaient être amenés à réduire leur vitesse et à être particulièrement attentifs ; que, dans ces conditions, il résulte de l'instruction qu'une faute d'imprudence peut être imputée à M. C...; que dans les circonstances de l'espèce, cette imprudence doit être regardée comme de nature à atténuer la responsabilité de la commune de Fontenilles à hauteur du tiers des préjudices subis ; que M. C...et la CPAM sont ainsi, dans cette mesure, fondés à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Sur les préjudices :
7. Considérant que l'accident a occasionné une double fracture du tibia et du péroné de la jambe droite, une fracture du poignet gauche, une plaie sous-rotulienne superficielle et une luxation acromio-claviculaire gauche ; que trois hospitalisations ont été nécessaires en novembre 2006 pour réduction des fractures, en mars 2007 pour dynamisation du clou du tibia par ablation de la vis de verrouillage, et en octobre 2008 pour ablation du matériel d'ostéosynthèse ; que l'expert a fixé la consolidation à la date du 27 janvier 2009 ;
S'agissant des préjudices patrimoniaux :
Quant aux pertes de revenus :
8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C...a perçu, durant la période du 13 novembre 2006 au 12 février 2007, puis du 23 octobre 2008 au 15 décembre 2008, une somme de 13 957,56 euros de la CPAM de la Haute-Garonne, au titre des indemnités journalières ; que si l'intéressé a relevé de 49 360 euros, total des sommes demandées initialement en première instance pour ses autres préjudices, à 68 385,50 euros la somme réclamée en appel, il n'apporte aucune explication sur la différence de 19 025,50 euros et n'a d'ailleurs pas sollicité en appel l'indemnisation de pertes de revenus sur lesquelles il n'apporte aucune précision ; que par suite la commune est fondée à soutenir qu'aucune somme ne lui est due à ce titre ;
Quant aux préjudices matériels :
9. Considérant en premier lieu, que la Mutuelle des motards a estimé la valeur de la motocyclette appartenant à M. C...à la somme de 3 400 euros avant le sinistre, et sa valeur résiduelle à la somme de 600 euros ; que le requérant n'établit pas avoir uniquement perçu, ainsi qu'il le soutient, la somme de 600 euros, alors que l'indemnisation par l'assureur se fait en principe sur la base de la valeur du véhicule avant la survenance du sinistre ; que, dans ces conditions, sa demande tendant à obtenir le versement d'une indemnité de 2 800 euros correspondant à la différence entre la valeur de sa motocyclette avant sinistre et sa valeur résiduelle doit être rejetée ;
10. Considérant en deuxième lieu, que M. C...demande le remboursement de la somme correspondant à la détérioration de sa veste, de son casque et de ses chaussures consécutive à cet accident ; qu' il verse des extraits de catalogue correspondant à ces éléments , lesquels permettent d'apprécier la valeur approximative de la perte subie à ce titre par le requérant ; qu'en l'absence de factures permettant d'établir la date d'achat de son équipement et ainsi son usure, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 300 euros ;
11. Considérant en troisième lieu, que M. C...soutient que son état de santé a nécessité l'assistance d'une tierce personne durant les périodes du 4 décembre 2006 au 8 janvier 2007, soit 36 jours, et du 9 janvier au 30 mars 2007, soit 71 jours ; qu'il ressort de l'expertise médicale que l'état de santé de l'intéressé a nécessité une aide durant deux heures par jour, pendant la période d'utilisation permanente de son fauteuil roulant soit jusqu'au 13 février 2007, puis durant une heure par jour jusqu'au 24 avril 2007 ; que l'intéressé sollicite le versement des sommes de 595 et 587 euros à ce titre ; qu'il est fondé à demander l'indemnisation de ce préjudice qui se chiffre à la somme globale de 1 182 euros ;
S'agissant des préjudices à caractère personnel :
Quant aux préjudices temporaires :
12. Considérant en premier lieu, que M. C...sollicite le versement d'une indemnité de 7 200 euros en réparation de l'incapacité temporaire personnelle totale puis partielle dont il a souffert avant son rétablissement ; qu'il ressort du rapport de l'expertise médicale que le déficit fonctionnel de l'intéressé a été total durant 166 jours (du 12 novembre 2006 au 24 avril 2007 puis du 23 octobre au 24 octobre 2008), puis de 50% durant 180 jours (du 25 avril au 31 août 2007 puis du 25 octobre 2008 au 15 décembre 2008) ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par M. C...en le fixant à la somme de 4 250 euros ;
13. Considérant en second lieu, que l'expert ayant évalué à 4,5 sur une échelle de 7 les souffrances que M. C...a endurées suite à cet accident, à raison des trois interventions qu'il a dû subir, de la persistance de phénomènes douloureux au niveau du foyer de la fracture et de l'immobilisation brachio-palmaire qu'il a endurée, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 8 000 euros ;
Quant aux préjudices permanents :
14. Considérant en premier lieu, qu'il résulte du rapport non contesté de l'expert que M. C...demeure atteint d'un déficit fonctionnel permanent de 6 % compte tenu de la persistance de phénomènes douloureux au niveau du foyer de fracture, lié au caractère hypertrophique du cal, ce qui induit une gêne à la station debout et à la marche prolongée et une légère limitation de la flexion dorsale de sa cheville ; que compte tenu de l'âge de l'intéressé au moment où est survenu l'accident, vingt-trois ans, il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence en chiffrant ce préjudice à la somme de 5 200 euros ;
15. Considérant en second lieu, que l'expert a retenu un préjudice esthétique constitué de cicatrices à la jambe droite et de la saillie résultant de la disjonction acromio-claviculaire, qu'il a fixé à 0,5 sur une échelle de 7 ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 300 euros ;
S'agissant du préjudice tenant à une " résistance abusive " de la commune :
16. Considérant que M. C...sollicite le versement d'une somme de 3 000 euros en réparation du préjudice qu'il aurait subi du fait de la " résistance abusive " de la commune refusant de l'indemniser ; que toutefois, la discussion par la commune de sa responsabilité comme des préjudices ne relève pas d'une résistance abusive ; que par suite, ces conclusions doivent être rejetées ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préjudice global de la victime doit être fixé à 19 232 euros ; que, compte tenu du partage de responsabilité évoqué au point 6, la commune de Fontenilles doit être condamnée à verser à M. C...une somme globale de 12 821,33 euros en réparation des préjudices consécutifs à l'accident dont il a été victime ;
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie :
18. Considérant qu'il résulte de l'état définitif de la créance de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne que M. C...a bénéficié, du 13 novembre 2006 au 12 février 2007, puis du 23 octobre 2008 au 15 décembre 2008, d'indemnités journalières à hauteur de 13 957,56 euros ; que la CPAM établit également que les dépenses de santé liées à la prise en charge des suites de l'accident de M. C...se sont élevées à la somme de 36 798,96 euros ; qu'il résulte de ce qui précède, et en particulier du partage de responsabilité énoncé au point 5, que la commune de Fontenilles devra rembourser les deux tiers de la somme de 50 756 euros , soit la somme de 33 837,68 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne ;
19. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne a droit en outre à la somme de 1 015 euros, au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu de mettre cette somme à la charge de la commune de Fontenilles ;
Sur les frais d'expertise :
20. Considérant que les frais de l'expertise, tels qu'ils auront été taxés et liquidés par le tribunal de grande instance de Toulouse, doivent être mis à la charge de la commune de Fontenilles ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
21. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune de Fontenilles sur leur fondement ;
22. Considérant qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la commune de Fontenilles, une somme de 1 000 euros à verser à M. C...et une somme de 500 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1000611 du 25 juin 2013 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2 : La commune de Fontenilles versera une indemnité totale de 12 821,33 euros à M. C....
Article 3 : La commune de Fontenilles versera à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne une indemnité de 33 837,68 euros, et une somme de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Article 4 : : La commune de Fontenilles versera une somme de 1 000 euros à M. C...et une somme de 500 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les frais de l'expertise sont mis à la charge de la commune de Fontenilles.
Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
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No 13BX02485