Vu la décision n° 341856 du 7 novembre 2013, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 19 novembre 2013 sous le n° 13BX03109, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt n° 09BX00832 de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 14 juin 2010 et renvoyé l'affaire devant la cour ;
Vu la requête enregistrée le 6 avril 2009, présentée pour la SARL SIF, sise à Saint-Martin d'Ary (17270) ;
La société SIF demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701810 en date du 12 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2000 à 2003 dans les rôles de la commune de Saint-Martin-d'Ary ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2015 :
- le rapport de M. Olivier Mauny, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
1. Considérant que la SA Société Industrielle Forestière, qui exerçait une activité de scierie et de " transformation-fabrication de lambris, parquets, petits meubles " sur un site unique, sis sur la commune de Saint-Martin d'Ary (Charente-Maritime), a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Saintes du 15 juillet 1999 ; que par deux actes de vente distincts, signés par l'ensemble des parties intéressées le 8 février 2000, la SARL SIF Decorland et la SARL SIFLAND ont repris respectivement l'activité de " transformation-fabrication de lambris, parquets et petits meubles " et l'activité de scierie préalablement exercées par la SA Société Industrielle Forestière, chacune des sociétés ayant la jouissance de son fonds de commerce à compter du 4 août 1999 en vertu desdits actes ; qu'au terme d'une vérification de comptabilité, l'administration a rehaussé les bases d'imposition à la taxe professionnelle de la SARL SIF Decorland, devenue SARL Société industrielle forestière (SIF), au titre des années 2000 à 2003 au motif que la reprise de la branche d'activité " transformation- fabrication de lambris, parquets et petits meubles " précédemment exercée par la SA Société Industrielle Forestière constituait une " cession d'établissement " au sens de l'article 1518 B du code général des impôts, et que, par suite, la valeur locative des immobilisations corporelles entrant dans lesdites bases d'imposition devait être déterminée non en fonction du prix de leur cession mais en fonction de leur prix de revient originel ; que, par un jugement du 12 février 2009, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de la SARL SIF tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Saint-Martin d'Ary au titre des années 2000 à 2003 ; que, par un arrêt du 14 juin 2010, la cour administrative d'appel de Bordeaux a fait droit à l'appel de la société en jugeant que cette acquisition ne pouvait être regardée comme une " cession d'établissement " au sens des dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts ; que le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, par une décision du 7 novembre 2013, annulé l'arrêt précité du 14 juin 2010 et renvoyé l'affaire à la cour ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant que, lorsqu'une imposition est, telle la taxe professionnelle, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense et à défaut d'applicabilité de la procédure de redressement contradictoire prévue par les articles L. 55 à L. 61 du livre des procédures fiscales, mis à même de présenter ses observations ; qu'il en résulte que l'administration doit s'acquitter de cette obligation avant d'établir une cotisation de taxe professionnelle sur des bases affectées par un rehaussement d'éléments que le contribuable a déclarés conformément à ses obligations résultant de l'article 1477 du code général des impôts, tels les équipements et biens mobiliers mentionnés au 2° de l'article 1469 du code général des impôts ;
3. Considérant que l'administration a informé le gérant de la SARL SIF Decorland, par un courrier du 9 octobre 2003, de son intention de rectifier des " insuffisances en matière de taxe professionnelle " ; que ledit courrier rappelle, dans un premier temps, la teneur de l'article 1518 B du code général des impôts, précise ensuite les motifs pour lesquels le service considère que la société a procédé à l'acquisition d'un établissement au sens de cet article, et détaille enfin dans plusieurs tableaux les conséquences de la rectification sur la valeur des immobilisations et les rectifications en base pour les années 2000 à 2003 ; qu'au regard des éléments figurant dans ce courrier, qui précise en particulier l'objet, le motif, et les conséquences de la rectification, la SARL SIF a été mise à même de présenter ses observations ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que la requérante aurait demandé la communication de pièces spécifiques sur lesquelles le service aurait assis la rectification ; qu'il suit de là que la société n'est pas fondée à soutenir que les droits de la défense auraient été méconnus par l'administration ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1518 B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession. / Les dispositions de l'alinéa précédent s'appliquent aux seules immobilisations corporelles directement concernées par l'opération d'apport, de scission, de fusion ou de cession, dont la valeur locative a été retenue au titre de l'année précédant l'opération. (...) Pour les opérations mentionnées au premier alinéa réalisées à compter du 1er janvier 1992, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération. (...) Les dispositions du présent article s'appliquent distinctement aux trois catégories d'immobilisations suivantes : terrains, constructions, équipements et biens mobiliers." ; qu'aux termes de l'article 310 HA de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Pour l'application de la taxe professionnelle et des taxes additionnelles : / (...) - l'établissement s'entend de toute installation utilisée par une entreprise en un lieu déterminé, ou d'une unité de production intégrée dans un ensemble industriel ou commercial lorsqu'elle peut faire l'objet d'une exploitation autonome (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour leur application, toute activité disposant des moyens susceptibles de lui permettre de faire l'objet d'une exploitation autonome au sein d'une entreprise constitue un établissement ;
5. Considérant, d'autre part, que, pour l'application des dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts, un établissement doit être regardé comme ayant fait l'objet d'une cession lorsque le même redevable a acquis l'ensemble des éléments mobiliers et immobiliers, qui étaient nécessaires à l'exercice autonome de l'activité par le cédant, en vue d'y exercer avec ces moyens sa propre activité ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte, d'une part, de l'instruction que la SARL SIF Decorland a acquis, par un acte de vente signé par les parties le 10 décembre 1999 et le 8 février 2000, le fonds de commerce de la SA Société Industrielle Forestière correspondant à la branche d'activité " transformation-fabrication de lambris, parquets et petits meubles " de cette dernière ; que le fonds de commerce comportait, outre les éléments incorporels, des biens mobiliers ainsi que des éléments immobiliers ; que, s'agissant des immeubles, la SARL SIF Decorland a acquis les immeubles appartenant à la SA Société Industrielle Forestière et a repris le bail qui liait cette dernière à la SCI La Pierrière, et a acquis, par ailleurs, les immeubles dont la société Baticentre était propriétaire ; qu'en faisant l'acquisition de ce fonds de commerce, la SARL SIF Decorland a acquis l'ensemble des biens mobiliers et immobiliers qui étaient nécessaires à l'exercice de la branche d'activité " transformation- fabrication de lambris, parquets et petits meubles " préalablement exercée par la SA Société Industrielle Forestière ;
7. Considérant qu'il résulte, d'autre part, de l'acte de vente entre la SARL SIFLAND et la SA Société Industrielle Forestière que la première n'a repris aucun immeuble de la seconde ; qu'il y est fait état cependant de la conclusion future d'un bail entre la SARL SIFLAND et la SARL SIF Decorland, laquelle était " en cours d'acquisition des bâtiments servant à l'exploitation " ; que s'il résulte de cette pièce que la SARL SIFLAND dépendait, pour l'exercice de son activité de scierie, des bâtiments acquis par la SARL SIF Decorland, il ne résulte pas de l'instruction en revanche que la branche d'activité " transformation- fabrication de lambris, parquets et petits meubles " ne puisse pas être exploitée indépendamment de l'activité de scierie reprise par la SARL SIFLAND ; que la SARL SIF n'a, par ailleurs, apporté aucun élément à l'appui de ses allégations relatives à l'interdépendance des deux activités ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le service a pu, à bon droit considérer que la requérante avait acquis l'ensemble des éléments mobiliers et immobiliers nécessaires à l'exercice autonome de la branche d'activité " transformation- fabrication de lambris, parquets et petits meubles ", que cet ensemble était constitutif d'un établissement au titre de l'article 310 HA précité, et que la SARL SIF entrait, ce faisant, dans le champ d'application de l'article 1518 B du code général des impôts ;
9. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que le service s'est appuyé, pour déterminer le prix de revient des immobilisations acquises par la SARL SIF Decorland en 2000, sur les valeurs brutes portées sur le tableau des immobilisations au 31 décembre 1998, et plus particulièrement, s'agissant des biens mobiliers, des valeurs brutes établies par catégorie d'immobilisation, à savoir matériel, transport et mobilier de bureau ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le service aurait disposé d'éléments plus détaillés s'agissant des biens mobiliers, en dépit des demandes restées vaines qu'il a formulées notamment auprès du mandataire liquidateur de la SA Société Industrielle Forestière, et ce alors que l'acte de vente entre la SA Société Industrielle Forestière et la SARL SIF Decorland fait pourtant état de l'annexion d'une liste détaillée des matériels cédés ; qu'en tout état de cause, en procédant ainsi, le service n'a méconnu ni les dispositions de l'article 1518 B ni celles d'une autre disposition du code général des impôts ; que le service a par ailleurs soustrait la valeur des biens qui ne figuraient plus au bilan de la SA Société Industrielle Forestière au cours des années de référence ; que la requérante, qui n'a apporté aucun élément précis à l'appui de son argumentation, n'est donc pas fondée à soutenir que le service aurait commis une erreur dans l'évaluation de sa base imposable à la taxe professionnelle ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL SIF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE
Article 1er : La requête de la SARL SIF est rejetée.
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N° 13BX03109