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31/03/2015 | FRANCE | N°14BX03012

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 31 mars 2015, 14BX03012


Vu, I) sous le n° 14BX03012, la requête enregistrée le 28 octobre 2014, présentée par le préfet de l'Indre qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401046 du 2 octobre 2014 du tribunal administratif de Limoges en tant qu'il a annulé sa décision fixant le pays de renvoi de M.A..., contenue dans l'arrêté du 28 janvier 2014 refusant de délivrer à ce dernier un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, lui a enjoint de prendre une nouvelle décision sur la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la

notification dudit jugement et a condamné l'Etat au versement d'une somme ...

Vu, I) sous le n° 14BX03012, la requête enregistrée le 28 octobre 2014, présentée par le préfet de l'Indre qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401046 du 2 octobre 2014 du tribunal administratif de Limoges en tant qu'il a annulé sa décision fixant le pays de renvoi de M.A..., contenue dans l'arrêté du 28 janvier 2014 refusant de délivrer à ce dernier un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, lui a enjoint de prendre une nouvelle décision sur la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement et a condamné l'Etat au versement d'une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

2°) de rejeter les conclusions de M. A...devant le tribunal administratif dirigées contre la décision fixant l'Arménie comme pays de destination ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mars 2015 :

- le rapport de M. Bertrand Riou, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité arménienne, est entré en France le 11 octobre 2013 selon ses déclarations, accompagné de son épouse et de ses enfants ; qu'il a fait l'objet, le 12 octobre 2013, d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et d'une décision le plaçant en rétention administrative ; qu'il a déposé une demande d'asile ; qu'à la suite de la décision du 20 décembre 2013 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, refusant d'admettre l'intéressé au bénéfice du statut de réfugié, le préfet de l'Indre, par un arrêté du 28 janvier 2014, a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ; que, par jugement du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté en tant qu'il fixe l'Arménie comme pays de renvoi ; que, par les requêtes enregistrées sous les n°14BX03012 et n°14BX03013, le préfet de l'Indre demande, respectivement, l'annulation et le sursis à l'exécution de ce jugement ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête n° 14BX03012 :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de renvoi d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de renvoi ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

3. Considérant que M. A...a soutenu devant les premiers juges qu'il a dû fuir l'Arménie avec ses enfants et son épouse car il est activement recherché à la suite de l'impression de tracts évoquant la corruption dans ce pays ; qu'il a déclaré que l'un de ses frères a été violemment agressé pour ne pas avoir révélé où il se trouvait ; qu'il a produit en première instance, au soutien de ses allégations, des documents émanant, d'une part, de l'hôpital de Vagharshapat indiquant que son frère souffre de différentes blessures, d'autre part, de la gendarmerie de la section de Vagharshapat se bornant à reprendre la version des faits tels que relatés par l'établissement hospitalier, relayant les dires du patient ; que, ainsi que le soutient en appel le préfet sans être contredit, aucun autre élément du dossier ne permet de connaître les circonstances dans lesquelles ces traumatismes ont été subis par le frère de l'intéressé et leur lien avec la situation de ce dernier et celle de son épouse ; que, dès lors, M.A..., dont la demande d'admission au statut de réfugié a, d'ailleurs, été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, n'apporte aucun élément de preuve permettant de tenir pour établis la réalité et le caractère personnel et actuel des risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine en raison des faits allégués ; que, dans ces conditions, la décision fixant l'Arménie comme pays de renvoi n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Indre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision du 28 janvier 2014 fixant l'Arménie comme pays à destination duquel M. A... sera reconduit, lui a enjoint de prendre une nouvelle décision sur la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement et a condamné l'Etat à verser à son conseil une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Sur la requête n° 14BX03013 :

5. Considérant que la cour statue par le présent arrêt sur les conclusions de la requête n°14BX03012 du préfet de l'Indre tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Limoges du 2 octobre 2014 ; que, par suite, les conclusions de la requête n°14BX03013 qui tendent à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement sont devenues sans objet ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 2 octobre 2014 du tribunal administratif de Limoges est annulé en tant qu'il annule la décision du préfet de l'Indre en date du 28 janvier 2014 fixant l'Arménie comme pays de destination de M.A..., qu'il lui enjoint de prendre une nouvelle décision sur la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement et qu'il condamne l'Etat à verser à son conseil la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Limoges dirigée contre la décision du 28 janvier 2014 fixant l'Arménie comme pays de destination est rejetée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 14BX03013.

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N°s14BX03012, 14BX03013


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX03012
Date de la décision : 31/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Bertrand RIOU
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP ANDRE BONHOMME - PASCALE LEAL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-03-31;14bx03012 ?
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