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16/03/2015 | FRANCE | N°14BX02829

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 16 mars 2015, 14BX02829


Vu la requête enregistrée le 1er octobre 2014, présentée pour M. C...A...demeurant..., par Me B... ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401421 du 24 juin 2014 du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2014 par lequel le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la

Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notificat...

Vu la requête enregistrée le 1er octobre 2014, présentée pour M. C...A...demeurant..., par Me B... ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401421 du 24 juin 2014 du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2014 par lequel le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 80 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte avec délivrance d'un récépissé autorisant le séjour et le travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu les arrêts rendus par la Cour de justice de l'Union européenne les 5 novembre 2014 et 11 décembre 2014 dans les affaires C-166/13 et C-249/13 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 février 2015 :

- le rapport de M. Bernard Chemin, président ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila ;

1. Considérant que M.A..., né le 18 novembre 1982, de nationalité sénégalaise, est entré régulièrement en France le 23 septembre 2007 et a obtenu la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, renouvelé jusqu'au 14 octobre 2013 ; que le 18 octobre 2013, M. A...a sollicité le renouvellement de son titre de séjour, mais par un arrêté du 25 février 2014, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande au motif de l'absence de caractère réel et sérieux de ses études, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de renvoi ; que M. A...fait appel du jugement du 24 juin 2014 du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de renouvellement du titre de séjour :

2. Considérant que le refus de séjour contesté vise les textes dont il fait application, notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention du 1er août 1955 modifiée relative à la circulation et au séjour des personnes entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Sénégal, l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires du 23 septembre 2006 modifiée, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables ; que cet arrêté indique la date et les conditions de l'entrée en France de M.A..., son parcours universitaire de six années sans validation des différents cursus commencés, son absence de progression depuis 2010 et sa situation personnelle et familiale ; que la décision litigieuse mentionne les éléments de droit et de fait relatifs à la situation particulière de l'intéressé et satisfait ainsi à l'obligation de motivation, alors même qu'elle ne fait pas état de la grossesse pathologique de son épouse et de la naissance de son enfant ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ;

3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de la motivation de la décision litigieuse, que le préfet se serait abstenu de se livrer à un examen particulier de la situation personnelle de M.A... ;

4. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. " ;

5. Considérant que pour refuser de renouveler le titre de séjour de M.A..., le préfet de la Gironde s'est fondé sur le fait qu'il n'avait obtenu aucun diplôme depuis plus de six ans, soulignant qu'il avait suivi trois cursus différents sans progression depuis l'année 2010 ; qu'après avoir obtenu la 4ème et la 5ème années de pharmacie filière industrie en trois années après un redoublement, M. A...s'est alors inscrit au titre de l'année 2010/2011 au conservatoire national des arts et métiers pour y suivre une formation associant des unités d'enseignement de comptabilité, contrôle de gestion, assurance qualité et management, puis en 2011 en vue de la préparation au diplôme d'ingénieur spécialisé " génie des procédés " parcours " procédés pharmaceutiques ", dont il n'a validé que cinq unités d'enseignement ; que pour l'année universitaire 2012/2013, il a changé d'orientation en préparant un diplôme universitaire " biotechnologies appliquées au domaine de la santé " et ne s'est présenté à aucun examen ; qu'en admettant même que ces réorientions présentent un caractère cohérent, le requérant ne conteste pas que ces études entreprises depuis six ans et demi ne connaissent aucune progression les trois dernières années ; que les problèmes de santé rencontrées par son épouse lors de sa grossesse et la naissance de son enfant en 2013 ne peuvent expliquer à elles seules l'absence de progression réelle dans ses études depuis 2010 ; que, dans ces conditions, le préfet de la Gironde, qui ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts, a pu sans erreur d'appréciation estimer que les études menées par M. A...ne présentaient pas un caractère réel et sérieux ; qu'il a pu, dès lors, refuser de renouveler son titre de séjour sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet aurait, en refusant de renouveler son titre de séjour, entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ce refus sur la situation personnelle du requérant ;

6. Considérant que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales étant sans incidence sur l'appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies, qui conditionnent le renouvellement de la carte de séjour temporaire d'étudiant ainsi qu'il a été dit, le moyen tiré de ce que la décision de refus de titre de séjour méconnaîtrait ces stipulations est inopérant ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

8. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement vers son pays d'origine ou de tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

9. Considérant que M.A..., qui avait la possibilité, pendant l'instruction de sa demande, de faire connaître, de manière utile et effective, les éléments justifiant son admission au séjour, ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il pourrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement assortie d'un délai de départ volontaire et d'une mesure fixant le pays de renvoi ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait eu de nouveaux éléments à faire valoir qui auraient conduit le préfet de la Gironde à prendre une décision différente ; que, par suite, M. A...ne peut utilement soutenir qu'en prenant à son encontre une mesure d'éloignement sans le mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement et méconnu les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000 ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

11. Considérant que M.A..., qui est entré en France à l'âge de vingt-cinq ans, n'a été autorisé à y séjourner que le temps nécessaire à ses études ; que si l'intéressé s'est marié le 3 mai 2013 avec une compatriote et qu'un enfant est né le 3 juin suivant de cette union, son épouse est également en situation irrégulière ; que M. A...n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident notamment ses parents, selon les mentions non contredites de la décision contestée ; que rien ne s'oppose à ce qu'il reconstitue au Sénégal la cellule familiale composée de son épouse, qui est de même nationalité que lui, et son enfant, qui n'est pas scolarisé ; qu'ainsi, eu égard aux conditions de séjour sur le territoire national où il s'est marié récemment avec une compatriote, la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet de la Gironde n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

12. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru tenu d'assortir son refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français sans examiner les conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

13. Considérant qu'il résulte de ce tout qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. A...demande le versement à son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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No 14BX02829


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX02829
Date de la décision : 16/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Bernard CHEMIN
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : TREBESSES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-03-16;14bx02829 ?
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