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05/02/2015 | FRANCE | N°14BX01974

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 05 février 2015, 14BX01974


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 juillet 2014, présentée pour M. B... A...C...demeurant..., par Me D...;

M. A...C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400770 en date du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2014 du préfet de la Gironde portant rejet de sa demande d'admission au séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 juillet 2014, présentée pour M. B... A...C...demeurant..., par Me D...;

M. A...C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400770 en date du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2014 du préfet de la Gironde portant rejet de sa demande d'admission au séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

Vu l'accord-cadre relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie et le protocole relatif à la gestion concertée des migrations, signés à Tunis le 28 avril 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;

Vu le décret n° 2009-1377 du 10 novembre 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2015 :

- le rapport de M. Paul-André Braud, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A...C..., ressortissant tunisien né en 1974, est entré en France en octobre 2004 en possession d'un visa de long séjour pour y faire des études ; que son titre de séjour " étudiant " a été régulièrement renouvelé jusqu'en septembre 2012 ; qu'il a sollicité du préfet de la Gironde le 14 mai 2013 son admission exceptionnelle au séjour par le travail ; qu'il relève appel du jugement n° 1400770 du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2014 du préfet de la Gironde rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ;

Sur l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Considérant que M. A...C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux du 15 septembre 2014 ; que, dès lors, ses conclusions tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 juin 1988 en matière de séjour et de travail : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent accord, dans les conditions prévues par sa législation " ; que l'article 3 de la même convention stipule que : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " " ; que le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signé le 28 avril 2008 stipule, à son point 2.3.3, que : " le titre de séjour portant la mention " salarié ", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'accord du 17 mars 1988 modifié est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'annexe I du présent protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail " ; qu'en vertu des dispositions combinées des articles R. 5221-11, R. 5221-15 et R. 5221-17 du code du travail, lorsque l'étranger est déjà présent sur le territoire national, la demande d'autorisation de travail est adressée au préfet de son département de résidence et la décision est prise par le préfet ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements : " Le préfet de département peut donner délégation de signature (...) 2° Pour les matières relevant de leurs attributions, aux chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département ; / (...) 11° Pour les matières relevant de leurs attributions et dans le cas prévu au dernier alinéa de l'article 18, aux chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans la région et aux responsables de leurs unités et délégations territoriales ( ...) " ; que l'article 2 du décret du 29 novembre 2009 relatif à l'organisation et aux missions des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi prévoit que ces directions ont la charge, notamment : " (...) 1° de la politique du travail (...) ; 2° (...) du marché du travail " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'application combinée des dispositions précitées que le préfet de département peut, pour l'exercice des compétences qui lui sont conférées par les lois et les règlements, donner délégation de signature aux chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat sur lesquels il a autorité, pour les matières qui relèvent des attributions de ces services et pour ce qui concerne l'activité de ces services qui s'exerce dans les limites du département ; que les attributions des services déconcentrés sont fixées par les textes qui organisent ces services et définissent leurs missions, sans qu'ait d'incidence à cet égard la répartition des attributions, au niveau central, entre les membres du Gouvernement ; qu'entrent ainsi dans les attributions des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi les questions relatives à la délivrance des autorisations de travail en France des ressortissants étrangers visées aux articles L. 5221-2 et L. 5221-5 du code du travail ; qu'il s'ensuit que le préfet de département, en matière de délivrance des autorisations de travail des ressortissants étrangers, peut donner délégation de signature aux chefs de service des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) et aux responsables de leurs unités et délégations territoriales, sur le fondement de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 ;

7. Considérant qu'il ressort de l'arrêté en litige que pour rejeter la demande de titre de séjour portant la mention salarié, le préfet de la Gironde s'est fondé sur le seul motif que M. A...C...n'était " pas titulaire d'un contrat de travail visé par les services compétents " ; que le préfet n'indiquant pas qu'il aurait donné délégation permanente au directeur de l'unité territoriale de Gironde de la DIRECCTE d'Aquitaine, il lui appartenait de se prononcer lui-même sur la demande de M. A...C...; qu'il ressort des termes de la décision attaquée qu'il n'a pas indiqué les motifs pour lesquels il estimait ne pas pouvoir viser le contrat de travail de l'intéressé, et s'est cru lié par l'avis défavorable émis, par un courrier en date du 19 août 2013, par le directeur de l'unité territoriale de Gironde de la DIRECCTE d'Aquitaine sur la demande de M. A... C..., avis qu'il n'a au demeurant pas davantage visé pour s'en approprier les motifs ; que dès lors, M. A...C...est fondé à soutenir que le préfet n'a pas pleinement exercé sa compétence dans le cadre de l'instruction de sa demande de titre de séjour portant la mention salarié et à demander par suite l'annulation du refus de titre de séjour opposé par le préfet de la Gironde le 24 janvier 2014 ainsi que, par voie de conséquence, des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, que M. A...C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour opposé par le préfet de la Gironde le 24 janvier 2014 ainsi que, par voie de conséquence, des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que, eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour, mais seulement que le préfet de la Gironde statue à nouveau sur la demande de titre de séjour de M. A...C...; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Gironde, sans qu'il soit nécessaire de prononcer l'astreinte demandée, de délivrer à M. A...C...une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation administrative dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, M. A...C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son conseil peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que son conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A...C...tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le jugement n° 1400770 du tribunal administratif de Bordeaux en date du 28 mai 2014 et l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 24 janvier 2014 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de délivrer à M. A...C...une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation administrative dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera au conseil de M. A...C...une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...C...est rejeté.

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No 14BX01974


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX01974
Date de la décision : 05/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : DUBARRY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-02-05;14bx01974 ?
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